Ici c'est moi qui mène la danse [Ouvert à tous]

La chaleur de l'adrénaline dans ses veines n'a rien à envie à celle de l'alcool dans sa gorge. Il y a tout pour titiller ses sens, entre ce sourire charmeur d'une satisfaction vite écourtée par des réactions tout aussi délicieuses. Damen ne sait plus s'il préfère ses instants provocateurs ou ceux où, au contraire, sa trouvaille de la soirée perd cette assurance pour revêtir une expression bien plus vulnérable. Oui, aussi fier ait-il pu être de réussir à fendiller un instant la sérénité de façade du roi de la soirée, son éclat d'orgueil s'est étouffé dans des frissons trop visibles pour être ignorés. Parfois, il suffit de mots pour faire autant d'effet qu'un contact sensuel. Les bonnes paroles, le bon sous-entendu, la bonne manière, aussi. Comme un chuchotement tendancieux au creux de l'oreille.

Oui, il y a tout pour titiller ses sens dans cette réaction aussi. Le frisson, les yeux écarquillés par la portée de ce qu'il a entendu, sûrement, ces dents qui se referment lascivement sur sa lèvre comme un coup du karma pour retourner contre lui sa propre petite victoire. Mais Damen n'oublie rien qu'il ne veuille pas effacer, et il n'a pas oublié la sensation de cette langue taquine sur son index, celle qu'il venge en venant s'en prendre à son oreille. Il se nourrirait presque du soupir qui s'échappe des lèvres du brun, ou de la crispation qu'il perçoit dans cette main serrée sur son poignet. C'est à ça qu'il carbure, aux souffles discrètement altérés et aux regards brûlants de désir... et à tout ce qu'ils impliquent, bien évidemment. Le cou qui s'offre à lui est un paysage de tentation auquel il ne daigne offrir qu'une expiration tout aussi provocatrice que le reste.

Loin de disparaître, son sourire s'élargit lorsqu'il finit par s'écarter suffisamment pour croiser son regard un instant perdu, le suivant brillant d'une lueur de défi qui ne fait que distiller une nouvelle dose d'adrénaline dans son cœur. Ça aurait été trop facile de le faire craquer avec si peu, et moins amusant que de le voir continuellement reprendre le contrôle de lui-même, simplement pour se laisser emporter un peu plus à l'action suivante, jusqu'à ce qu'il finisse par sombrer trop loin pour s'accrocher à sa répartie. Il veut voir ce moment où le défi finira par disparaître de ses yeux pour des sensations auxquelles il n'aura pas la force de résister, trouver le point de rupture qui le fera définitivement craquer. Mais chaque chose en son temps, et chacun son tour.

Difficile de déterminer laquelle des réactions de Damen remporte la première place, entre son sourire à l'allure plus prédatrice que jamais, le soupir qu'il laisse échapper ou sa langue qui vient dépasser un instant, parcourant sa lèvre supérieure comme si son imagination l'avait maniée l'espace de quelques secondes. Même pour lui, il est difficile de rester indifférent à ce genre d'attaque, pas alors que l'assaillant a, consciemment ou non, réveillé des instincts rouillés par la facilité au bout des billets. Il n'a pas l'habitude qu'on lui résiste, ou du moins qu'on essaye de s'élever à son niveau, mais il ne peut pas dire qu'il n'aime pas ça Au contraire, le défi de le faire craquer s'élève peu à peu au rang de priorité, effaçant le reste de ses préoccupations. C'est ce qu'il voulait, oui, mais la méthode est presque assez rare pour la qualifier d'inédite.
Mais soyons réaliste, c'est le genre de jeu qui réveille aussi l'orgueil ; il n'a aucune intention de céder le premier.

» Tu commences à t'impatienter ? La curiosité est une qualité dangereuse.

Son visage s'est recomposé assez vite, ne laissant transparaître que ce qu'il veut bien montrer. Sourire satisfait, intérêt, attirance, et une soif de victoire qui se loge tranquillement dans ses pupilles, décidée à ne pas les quitter de sitôt. Il est persuadé d'avoir plus de ressources que le garçon en face de lui et il a bien l'intention de le prouver mais, pour ça, il faut lui céder un peu de terrain. Par exemple, laisser une pulsion précédente prendre les commandes, passer sa langue le long de son cou avec une lenteur sensuelle et calculée destinée à le voir trembler encore un petit peu. Puis un murmure à son oreille.

» Si tu tiens tant que ça à savoir si c'est ce à quoi je pense, je peux accepter de répondre à ta question et te montrer... mais il faudra demander gentiment. Ou alors...

Il jette un regard autour de lui, juste assez longtemps pour tendre son verre à la première personne qui passe et qui l'accepte sans vraiment réaliser ce qui vient de se passer. Indifférent aux conséquences, il laisse son joint tomber au sol pour libérer sa main. L'autre étant à la merci des lèvres bien trop taquines de son invité impertinent, il use de l'index et du majeur nouvellement débarrassés de leur fardeau pour relever un peu son menton.

»... me céder ce privilège que je suis censé obtenir en échange.

Réclamer ou craquer, voilà le choix qu'il lui offre. Un choix qui se heurte à l'orgueil dans les deux cas, mais surtout une question à laquelle il meurt d'envie d'avoir la réponse : laquelle des deux options décidera-t-il de suivre ? À moins qu'il ne trouve une troisième voie. L'imagination aussi est une qualité dangereuse.

Il veut le voir craquer. Il veut le voir fondre et perdre le contrôle sous des petites provocations qui viendront petit à petite grignoter sa résistance. Encore plus en goûtant à sa peau, de sa langue passée contre son cou. Encore plus en sentant ses doigts se desserrer de son poignet comme s'il renonçait lentement au jeu qu'ils ont mis en place. Heureusement pour lui, surtout en considérant la chaleur exquise à laquelle il vient de goûter, Damen dispose d'un contrôle entraîné par l'expérience qui lui permet de ne pas s'emporter et de venir, à la place, murmurer quelques mots à l'oreille de sa trouvaille du soir. De résister, aussi, à la tentation de récupérer son privilège lui-même et, à la place, de proposer sensuellement au jeune homme qui lui fait face de le lui concéder. Parce qu'il ne craquera pas le premier. C'est le genre de décision auquel il se tient bien plus qu'à n'importe quelle chose qu'il pourrait affirmer ou prétendre.

Pourtant il doit admettre que le brun a plus de cartes en main que ce qu'il pensait. Vu son état, vu les frissons qu'il lui a tirés, il pensait avoir au moins atteint une des limites de sa résistance, mais les lèvres qui se dérobent aux siennes pour venir, à la place, rejoindre sa joue lui donnent terriblement tort. Il a failli se faire avoir, failli avancer un peu son visage pour briser cette petite distance qu'il pensait sur le point de disparaître. Alors sa bouche entrouverte par l'appétissante proximité de leur lèvre reprend sa forme initiale, s'étire à nouveau en un sourire amusé.

» Ce serait trop facile.

Est-ce qu'il se parle à lui-même, pour se traiter d'idiot d'avoir cru gagner si facilement, ou bien répond-il simplement aux mots qui viennent de lui être adressés ? Un peu des deux. Il n'a pas envie d'aller le chercher, quand bien même il ne peut empêcher son regard de courir sur les courbes rosés qui viennent de lui être refusées.
Ou comment rendre l'idée d'y goûter bien plus prioritaire, presque obsédante.

Ses yeux finissent malgré tout par relâcher son visage, pour suivre le mouvement de la main doucement serrée sur la sienne. Quelques traits d'adrénaline viennent presque aussitôt accélérer le rythme de son cœur, comme si la sensation du tissu sous ses doigts, ou plutôt leur emplacement, était un chef d'orchestre un peu trop enclin à créer de l'enthousiasme. Une inspiration plus intense et une expiration déguisé en rire soufflé, ce sont les seules réactions physiques qu'il lui accorde. Mais le regard qu'il vient croiser au sien dit tout autre chose. L'intérêt qui encerclait ses pupilles s'est intensifié, reflète plus de désir qu'à peine quelques secondes plus tôt. Peut-être qu'il a plus de ressources que Damen ne l'imaginait. Moins que lui tout de même.

» Ça dépend... Tu joues avec le feu, alors...

Ses doigts remontent de quelques centimètres le long du tissu, même s'il en vient presque à regretter cette tenue qui l'empêche de venir toucher directement sa peau.

» ... est-ce que tu préfères la prudence...

Son sourire comme gravé sur les lèvres, il s'approche un peu pour récréer l'infime distance entre leurs lèvres et se permet même quelques respirations visant à le déstabiliser un peu. Puis il change la direction de sa main pour s'avancer vers le bas, jusqu'à quitter son bas-ventre pour une zone nettement plus personnelle.

» ...ou bien tu es prêt à te brûler ?

Sa main reste là, immobile, l'effleurant à peine. Elle n'est ici que pour titiller son imagination et, avec un peu de chance, déclencher enfin le déclic qui lui permettra de gagner la première manche. Parce qu'il a quand même envie de savoir enfin quel goût ont ces petites provocatrices qui ne cessent de se dérober à lui.