Une St Valentin au soleil [Jenifer]

13 février, c'est la date de mon départ du pays pour un week-end seule avec Jagger. Pas de boulot, personne pour se pointer chez nous à l'improviste, rien. Néanmoins afin de rajouter un peu de sécurité à notre appartement, j'ai donné mes clés à Lizzy pour qu'elle puisse relever notre courrier et passer de temps en temps pour faire croire que nous sommes toujours là. Ca n'a l'air de rien mais ça peut dissuader les éventuels voleurs.

Le vol a été assez calme et silencieux entre Jagger et moi. Lui il a dormi et moi j'ai bouquiné. Je sais qu'il a travaillé tard hier soir et je n'ai pas voulu le déranger. Un peu de repos lui fait du bien. Quelques heures plus tard, l'avion se pose et nous pouvons enfin sortir. Je n'ai pas peur de voler mais je ne suis pas pour autant entièrement à l'aise dans l'un de ces appareils. C'est étroit, trop rempli de monde et pas très pratique pour être réellement au calme. De plus lorsqu'on est quelqu'un qui a besoin de bouger, comme moi, rester assis durant plusieurs heures peut ressembler à une torture.

Je prends mes bagages et suis mon époux pour m'installer dans une voiture qu'il a louée. Je ne fais aucune remarque à ce sujet bien que ça me surprenne de sa part. Une voiture n'est pas forcément cher en location. Ce qui me surprend bien plus, c'est la maison. Vue de l'extérieur, ça va. Ca m'étonne qu'il ait loué une maison mais après tout pourquoi pas selon la taille et le style. Vue de l'intérieur par contre c'est beaucoup plus surprenant. Je sais que son ancien job – illégal – pouvait lui rapporter une belle somme mais de là à loué une baraque pareille... Il a économisé ou quoi ?

- Comment t'as pu louer une maison aussi luxueuse ? T'as économisé ?

Tout en gardant sa main dans la mienne, j'entame une petite visite des lieux. Oui ça me plaît. C'est même pour cette raison que je visite. Dans le cas contraire j'aurais fait une tronche de déterrée ou dégoûtée. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres en songeant à une petite idée coquine. Je regarde Jagger en  gardant l'air malicieux qui est apparu en même temps que le sourire. Tournée face à lui, je laisse glisser mon index sur son torse à travers le tissu.

- Faudra qu'on se fasse une visite de tous les recoins de la maison ensemble, si tu vois ce que j'veux dire.

Peut-être pas ce soir s'il est fatigué mais on a tout un week-end pour effectuer le tour du propriétaire en duo. Et puis on est enfin complètement seuls et avec une maison entière rien que pour nous. On peut bien profiter de l'espace qui est à notre disposition. Et techniquement, avoir envie d'une partie de jambes en l'air est plutôt bon signe de mon côté même si ça fait déjà quelques mois que les désirs sont de retour. Ca prouve que je me remets doucement mais sûrement de la fausse couche. Peut-être aussi que le fait d'avoir failli le perdre durant l'ouragan a aidé parce que bizarrement après le 12 novembre, je suis devenue bien plus câline qu'avant. Je veux pouvoir encore faire des projets avec lui. Je veux aussi pouvoir créer une famille avec lui. Alors maintenant qu'on a enfin un moment de repos rien que tous les deux, je veux pouvoir profiter de ce week-end avec lui.

La maison louée est impressionnante. Je ne sais pas comment il a pu trouver l'argent pour la payer par contre et j'admets que ça m'inquiète un peu. Il a seulement économisé ? C'est son travail illégal qui lui a rapporté autant ? Non, impossible. Ca rapportait certes plus que son job de barman mais pas au point de pouvoir payer la location d'une maison pareille en plus d'avoir payé les billets d'avion. Soit il a très bien économisé depuis des mois, soit il a reçu une aide. Il me fournit une explication assez simple. Une prime de départ. Si la moitié est utilisé pour ce voyage et que l'autre moitié est pour rénover son pub, je n'ose pas imaginer le montant total qu'il a reçu.

La visite se poursuit, main dans la main, alors qu'une idée sale me vient en tête. Il faudra que l'on refasse une visite complète, mais de façon plus ludique. Okay, ma proposition est juste coquine. Je lui fais seulement comprendre que j'aimerais coucher durant notre week-end. Le message est passé, compris aussi et a été approuvé. Pas pour ce soir cependant. Je comprends. Il a travaillé tard hier soir et il est crevé. Ce soir ça sera donc détente sur une plage privée apparemment.

- Je ne pensais pas forcément ce soir, rassure-toi. Je voulais juste pouvoir « jouer » avec toi durant le week-end mais je n'ai pas de préférence pour le jour.

Autrement dit, je m'en fiche que ce soit ce soir, demain ou après demain, je veux faire l'amour. Je ne suis pas encore totalement guérie de ma dépression mais je suis sur la bonne voie. Mes envies sexuelles qui reprennent du service en sont déjà un signe. Et un bon en plus. Puis je suis devenue plus câline depuis l'ouragan. C'est un autre bon signe. En fait, l'ouragan a même été plutôt bénéfique pour moi. Même si je ne suis pas encore totalement soignée, c'est quand même grâce à cette tempête que j'ai pu reprendre plus rapidement le dessus. Sans ce jour néfaste, je serais sûrement encore dans un état larvaire ou zombifié à l'heure actuelle. En plus grâce à ça, je profite un peu plus de mon époux par la même occasion. Ca fait plusieurs avantages.

- J'préfère me réchauffer au corps de mon époux mais vu que j'pourrai te mater pendant que tu feras la cuisine, je pourrai m'en contenter.

Qui ne rêve pas de voir son compagnon aux fourneaux ? En plus ça lui donne un côté sexy quand il cuisine. Voir tous ses muscles s'activer pour lui permettre de faire de bons petits plats, ça me rend toute chose. Et la bouffe a tendance à m'achever ensuite. Jagger n'est peut-être pas parfait mais il sait me mettre dans tous mes états.

Pour me préparer à aller au restaurant, je me contente seulement de mettre une veste. Pas envie de me faire chier à me changer totalement juste pour une sortie alors que mes habits sont propres. Je n'en vois pas l'intérêt. Je suis toutefois obligée de mettre ma veste. Même si les températures sont remontées, elles ne sont pas suffisantes pour pouvoir se balader dehors sans protection contre les coups de froid. En plus je suis frileuse alors ça n'aide pas. Une fois que nous sommes tous les deux prêts, je suis Jagger pour aller au restaurant. Pas trop le choix. Je ne sais pas lequel il a choisi et je ne connais pas les lieux de toute façon.

Le plus régulièrement lorsqu'un des deux conjoints dit qu'il est trop fatigué pour faire des cochonneries le jour-même, c'est souvent la femme. Soit parce qu'elle est réellement fatiguée, soit parce qu'elle n'en a pas envie et qu'elle ne veut pas vexer son compagnon. Et lorsque c'est l'homme qui sort cette excuse, en général – pas toujours heureusement – c'est facilement parce qu'il a rendu cocu sa femme. Ou alors parce qu'il est vraiment fatigué ou qu'il a un problème dont il ne veut pas parler parce que c'est embarrassant. Bref plein de raisons possibles dans les deux cas. Par contre quand Jagger me dit qu'il n'en a pas envie alors que d'habitude il est plutôt prêt à l'action, c'est qu'il est vraiment épuisé. Rien d'anormal, il travaille pas mal en ce moment. Et puis moi je ne pensais pas obligatoirement ce soir alors je rajoute cette petite précision à mon époux.

On continue de discuter un peu du programme du week-end puis Jagger m'explique ce qu'il a prévu pour notre soirée. Un resto. Chacun se prépare donc à sortir, ce qui signifie juste le rajout de ma veste dans mon cas. Je n'ai pas envie de me changer totalement juste pour aller manger dans un simple restaurant. Je l'aurais fait si ça avait été un rendez-vous prévu ou un truc professionnel mais lorsque ce n'est pas le cas, je préfère garder une tenue simple. Pendant que nous marchons, Jagger m'avoue qu'il a quelques inquiétudes à mon sujet. Tout ça juste parce que depuis l'ouragan, mes envies sexuelles reviennent peu à peu et que je suis plus câline qu'avant. Sauf qu'à l'entendre, j'ai l'impression que c'est revenu trop fortement. Peut-être que ma peur de le perdre joue un rôle, je ne sais pas. Pourtant je ne pense quand même pas être si affamée que ça en terme de sexe. Plus que d'habitude peut-être mais pas tant que ça. Ca doit quand même être suffisant pour inquiéter Jagger apparemment.

- Pourtant j'le suis pas beaucoup plus qu'en temps normal...

Bon et bien...changement de programme, pas de sexe ce week-end. Si ça l'inquiète tant alors je prendrai juste des douches froides pour calmer mes ardeurs. Il pourra se reposer comme ça. Mon attention se concentre ensuite sur le restaurant devant lequel on se trouve désormais et surtout, sur la bouffe que je pourrais commander. C'est surtout ça qui m'intéresse quand je vais dans un restaurant. Ce n'est pas la décoration, ni qui sont les employés, ni s'il est étoilé ou non. Moi je veux juste pouvoir manger.

- Allons bouffeeeeer !

Plat de nourriture, me voilà ! J'entre alors dans le restaurant puis m'installe à la table qu'on nous a attribuée. Je pose gentiment ma veste sur le dossier de ma chaise en prenant mes aises. Quant à la commande, apparemment je n'ai pas le choix pour le plat. Ce n'est pas grave, j'aime bien la paella. Le seul truc que je n'aurai pas le choix de faire, c'est de donner les moules à Jagger. Il ne pouvait pas le savoir parce qu'on en a pas mangé depuis qu'on est ensemble mais je suis allergique à ces petites bêtes. Je les aime mais elles par contre elles me détestent. Ou c'est mon corps qui les déteste. Bref je trierai un peu pour laisser les moules à Jagger et tout ira bien. Et pour la boisson, je commande un simple soda. L'alcool n'est jamais une bonne idée avec moi. Il le sait, je le sais alors j'évite d'en boire le plus possible.

- Tu...Tu veux vraiment en fonder une ?

Je suis surprise. Très surprise même. Il ne voulait pas d'enfant avant même si quand il a appris pour ma grossesse, il a assumé. Je ne pensais pas qu'après cet épisode il voudrait finalement fonder une famille. Peut-être que l'ouragan a eu des séquelles aussi chez Jagger.

- Moi j'veux bien, hein c'est pas le problème. Ca me surprend, c'est tout. La dernière fois tu n'en avais pas envie même si t'as assumé le rôle quand...enfin tu vois quoi. Du coup t'entendre dire que tu veux le faire, ça me fait à la fois plaisir et un gros effet de surprise.

Installée à table, j'écoute en silence ce que Jagger me confie. Il m'a déjà surprise en me disant que je l'épuise avec mes désirs sexuels qui reviennent. Cette fois il me surprend en me proposant de fonder une famille. Lui qui ne voulait pas d'enfant avant, il me propose carrément d'en faire cette fois. Il y a de quoi être stupéfait. Je ne lui cache pas que même si ça me fait plaisir et que je ne suis pas contre, et bien je suis aussi étonnée de l'entendre me dire une telle chose.

Pendant que les cuistots s'affairent en cuisine, Jagger en profite pour me parler un peu de son état d'esprit. Je reste encore silencieuse pendant son monologue, ne l'interrompant à aucun moment. C'est rare qu'il se confie ainsi alors je dois le laisser parler. Si je l'interromps, il risque de se braquer et de ne plus me parler de ce qui le tracasse.

À la fin de son explication, j'ai une horrible envie de pleurer. Je me fais même violence pour ne pas laisse les vannes s'ouvrir. Je ne cesse de me répéter mentalement que je ne dois pas pleurer. Pas de tristesse, non. Je suis juste touchée. Ma main serre un peu plus son étreinte sur la sienne alors que je résiste à l'envie de verser mes larmes.

- C'est... Ca me fait plaisir que tu te sois confié comme ça.

Même si mon expression ne montre pas mon envie de chialer, que je parviens à me retenir, ma voix me trahit. Il faut vraiment que je prenne des cours de théâtre pour que le ton de ma voix ne me trahisse plus. Quand je suis simplement attristée ou énervée, j'arrive à me contrôler sans me trahir. Quand il faut éviter de pleurer par contre, j'ai plus de mal. Ca m'énerve.

Le repas débute enfin et Jagger reprend la parole. Apparemment avec le reste de l'argent, il en a profité pour payer la rénovation de son bar. Ce n'est pas une mauvaise idée. Bon du coup il n'a plus d'économies mais ça, ça peut s'arranger.

- Je ne dis pas non à un garde du corps si c'est toi qui as ce rôle.

Il serait bien évidemment payé pour le travail accompli même s'il est mon époux. Et il pourrait avoir des extras en nature aussi. Et puis ça me permettrait d'être encore plus souvent en sa compagnie. Même si on se dispute encore régulièrement, j'aime être près de lui.

Le repas se passe bien. On discute de tout et de rien tout en dégustant notre plat. Entre-temps je lui ai refilé toutes les moules pour éviter de les manger. C'est soit ça, soit il appelle une ambulance pour me récupérer et m'amener à l'hôpital. À la fin du repas, on quitte le restaurant et on retourne à notre logement du week-end. Après avoir rempli nos estomac, un peu de repos ne nous fera pas de mal. Surtout à Jagger. Une sieste lui ferait le plus grand bien.

- Tu devrais faire une sieste, ça te fera du bien après ta nuit courte.

Jagger s'est livré à moi sur son ressenti et ça m'a fait vraiment plaisir de voir qu'il se confie enfin. Même si ce n'est pas beaucoup, même si je sais qu'il ne le fera pas souvent et encore moins pour tout, c'est déjà un bel effort qu'il a fait là. Une attention qui me touche au point que j'ai dû me forcer  à ne pas fondre en larmes. Heureusement le fait d'avoir notre repas qui commence enfin m'aide à me reprendre. Le plat est super bon. Il n'y a que les moules que j'ai refilé à Jagger. Je lui en avais vaguement touché un mot il y a quelques temps, histoire qu'il soit un minimum au courant de mon allergie. Ca aurait été con qu'il me fasse manger des moules et qu'il soit obligé d'appeler une ambulance juste après.

Après le repas, nous sommes retournés à la villa et j'ai conseillé à Jagger d'aller dormir un moment. Il n'a pas pu beaucoup se reposer alors il doit profiter de l'après-midi pour faire une sieste. Petit truc auquel je ne m'attendais pas cependant, c'est la petite sauterie juste avant. J'avais prévu de ne pas coucher du week-end pour le laisser tranquille mais apparemment il en a décidé autrement. Je n'arrive pas à savoir si je le déteste ou je l'aime pour ce changement d'avis de dernière minute. Je voulais lui foutre la paix mais en même temps, c'est tellement bon.

Pendant qu'il dort, j'ai refait un petit tour du propriétaire, j'ai regardé un film et je me suis même changée pour me prélasser sur la terrasse. Je n'ai pas mis grand-chose, seulement mon bikini et mes lunettes de soleil. Installée sur une chaise longue, une boisson fraîche sur la table à côté de moi, me voilà en vacancière qui prend un bain de soleil. Une chose est sûre, je suis sereine. Ca fait du bien de ne pas penser à mon boulot, à Xavier qui commence à essayer de reprendre contact avec moi depuis la prison, à tout ce qui a pu me démoraliser,...

Ca fait une bonne demie heure que je joue à la vacancière sur la chaise longue lorsque Jagger pointe le bout de son nez. Je tourne un peu la tête vers lui en souriant après avoir regardé l'heure sur mon téléphone.

- Deux bonnes heures. Mais t'en avais bien besoin, j'suis même étonnée que tu n'aies pas dormi plus longtemps.

Il disparaît quelques instants et revient avec une canette de soda. Celle-ci est la bienvenue puisque mon verre est vidé depuis quart d'heure. Ou vingt minutes. Je n'ai pas trop vu le temps passer pendant que je bronzais. Il me fait alors une proposition à laquelle j'ai envie d'accepter mais...je ne peux pas. Aller dans la piscine me donne envie mais il y a un gros problème. Celle-ci est remplie par de l'eau... Mon petit sourire disparaît pour afficher une mine désolée.

- J'peux pas...

Se rappelle-t-il que j'ai une peur bleue de l'eau ? Possible que non. La première et dernière fois que j'ai eu ce problème, c'était il y a longtemps. Et en plus je ne lui avais rien dit, il l'avait compris tout seul. Mais s'en souvient-il ? Il m'avait même proposé de venir dans le bain quand je serais prête mais au final, je n'y suis jamais entrée. Je n'ai pas été prête. Et je ne le suis toujours pas depuis le temps. Je n'ai pas le courage suffisant pour mettre ne serait-ce qu'un pied dans l'eau. Je n'ose même pas être à côté du bassin, je garde toujours une petite distance de sécurité. Pourtant j'ai réellement envie de pouvoir aller dans une piscine... Ce n'est pas juste...

- Mais ne te prive pas à cause de moi ! Vas donc te baigner un moment, l'eau doit être rafraîchissante !

Je ne veux pas qu'il se prive d'une bonne baignade juste parce que moi je suis incapable d'entrer dans l'eau. Nager lui fera du bien et il a le droit à son moment de fraîcheur.

Deux heures à devoir m'occuper seule. Ce n'est pas la mort, je le fais régulièrement mais ça me fait un peu bizarre quand même parce que Jagger dort et qu'on est en week-end loin de nos appartement. C'est surtout ces deux dernière choses qui me perturbent un peu. J'ai tout de même pu profiter de cette solitude pour boire, regarder un film et faire bronzette. Surtout bronzer. Je ne peux pas vraiment le faire en Angleterre sauf en trichant alors pour une fois qu'on a du soleil longtemps, j'en profite un maximum.

Jagger finit par me rejoindre et me propose d'aller nager. Malheureusement j'ai dû refuser. Cette étendue d'eau me fait trop peur. Même un simple bain me met en panique. Ca m'agace. J'envie beaucoup ceux qui peuvent aller nager car oui, avec cette chaleur de l'eau ne serait pas de refus. Moi aussi je veux pouvoir me rafraîchir dans un bassin frais mais je n'y arrive pas.

Jagger tente de me rassurer mais tout ce que j'arrive à faire pour le moment, c'est l'observer nager. Et voir un caleçon voler jusqu'au transat... Il est sérieux ? Il s'est vraiment mis à poil dans l'eau ? Je me redresse un peu pour prendre le caleçon mouillé avant de regarder mon époux qui me nargue.

- T'exagère, c'est pas toujours au bout de trois heures. Tu me prends pour une nympho ou quoi ?

Je jette gentiment son caleçon trempé sur le transat d'à côté. Il me prend vraiment pour une grosse assoiffée de sexe... Je sais parfaitement tenir plusieurs jours sans relation intime. Okay je dis rarement non à une partie de jambes en l'air mais s'il n'est pas possible de le faire durant trois semaines, je tiendrai.

- J'peux très bien tenir plusieurs jours sans coucher...

Je le prends peut-être vite mal alors qu'il me taquine seulement mais j'ai l'impression qu'il me prend vraiment pour ce que je ne suis pas là. Il manquerait plus qu'il me compare à un succube. J'espère que non sinon je le prendrai vraiment mal et dormirai sur le canapé. Ou je lui tournerai le dos dans le lit. Ce sera à voir s'il ose me traiter de succube. Ou de nymphomane.

Le sujet change rapidement pour revenir à ma phobie et surtout la raison de celle-ci. C'est vrai que je ne lui en ai jamais réellement parlé. Je lui ai juste dit que j'étais aquaphobe, sans plus. Ca serait peut-être bien qu'il le sache si on veut éviter qu'il fasse pareil que mon père un jour, et qu'il accentue ma peur. Je reste assise sur le transat et rassemble me jambes contre moi en fixant l'étendue d'eau dans la piscine.

- Mon père a voulu me faire une petite blague une fois. Rien de méchant, ou en tout cas, ce n'était pas son intention. Bref il m'a poussée un jour dans une piscine alors que je ne savais pas très bien nager, j'ai failli me noyer et depuis l'eau m'effraie. Depuis ce jour je n'ai plus posé un pied dans un bassin rempli d'eau. J'ai essayé à plusieurs reprises d'aller au moins dans une petite étendue d'eau, comme une baignoire avec un peu d'eau, mais ça a toujours été un échec. Je me fige dès que je suis trop proche de l'eau....

Un simple jeu qui a viré au cauchemar et qui s'est terminé par un traumatisme. En plus de ça, à cause de cette mésaventure, je n'ai plus jamais nagé. De ce fait, je n'ai pas pu m'améliorer et même si je trouvais le courage de venir dans l'eau, ma nage serait mal assurée. Je reprends finalement le caleçon sur le second transat puis le jette à la figure de Jagger en changeant un peu de sujet.

- Au fait rhabille-toi au lieu de te balader nu, toi ! J'admets que t'as de belles fesses mais ça serait dommage que le soleil change leur couleur blanchâtre ! Y a que moi qui ai le droit de leur faire changer de couleur !

S'il y a bien une chose que j'ai du mal à accepter, même venant de Jagger, c'est qu'on me prenne pour ce que je ne suis pas. Cette fois mon époux me prend carrément pour une nymphomane et je dois admettre que c'est un tantinet vexant. Enfin je n'insiste pas, je n'ai pas envie de gâcher le week-end avec un débat de merde qui a de grands risques de se transformer en dispute.

Lorsque le sujet en vient à ma phobie, je n'hésite pas à lui fournir les explications qu'il attend. Une simple blague qui a mal tourné et me voilà figée devant les bassins d'eau. Après mon petit discours, je lui balance son caleçon de bain à la tronche. Et là j'apprends que monsieur a gardé son boxer sous son caleçon de bain. Mais...

- Fallait le virer estúpido...

Comment a-t-il fait pour réussir à oublier son boxer ? Sérieusement ces trucs doivent horriblement gêner. Surtout sous un maillot de bain.

Il disparaît quelques secondes sous l'eau avant de réapparaître plus loin avant de me proposer de m'asseoir sur la première marche. Euh...non ? Enfin si moi je veux bien mais c'est mon corps qui ne suivra pas. Je le sais. Combien de fois ai-je tenté avec juste un fond d'eau et que ça a toujours été un échec ? Pour les concerts de Lizzy, si on doit utiliser un truc rempli de flotte, ce n'est qu'un bac géant avec cinq ou dix centimètres d'eau. Aucun risque de se noyer même si on tombe. Et si le bassin est plus profond, ce n'est pas moi qui y vais. Là, la première marche est quand même dans un gros bassin.

- J'y arriverai pas...

Je le veux mais je suis sûre que ce sera encore un échec. Il vient s'asseoir à côté de moi avant de prendre ma main dans la sienne. Il me parle encore et essaie une nouvelle fois de m'encourager à venir. Sauf qu'après il me propose de l'alcool. Euh oui mais non, je n'irai pas poser un seul pied dans l'eau si je picole. Enfin...peut-être que je le ferais mais ce serait une mauvaise idée car là je risque réellement de me noyer.

- Alors j'veux bien un cocktail, n'importe lequel mais sans alcool. Même si on ne tente pas tout de suite à faire un gosse, j'tiens pas à prendre le risque d'être ivre près de l'eau. En plus t'as vu comment je suis quand je bois trop alors on va éviter de réitérer l'expérience.

De plus, depuis la fameuse soirée, il ne veut plus que je picole. Il accepte que je boive un peu d'alcool mais plus au point d'être ivre. Et moi je sais que si je commence, j'aurai beaucoup de mal à me stopper.

Je regarde ensuite vers la piscine pendant que Jagger se charge de faire les boissons. S'il vient avec moi, je ne risque pas de couler, hein ? Et puis ce n'est que la première marche. Peu d'eau. Et si Jagger se tient à mes côtés, il m'empêchera de tomber. N'est-ce pas ? Et si je trempe seulement les pieds, ça suffira. Non ? Je n'ai pas besoin d'avoir les fesses dans l'eau. Lorsque Jagger revient avec les boissons, je le remercie en prenant la mienne puis le regarde après avoir bu une gorgée.

- Si... Si j'viens sur une marche, tu me tiendras ? Tu ne me lâcheras pas hein ?

Bon, il faudrait déjà que je réussisse à m'approcher des marches. Et ça, je ne suis même pas sûre d'y parvenir... Si je dois aller vers ce bassin, il vaut mieux que j'assure un peu la chose parce que sinon je serais capable de changer d'avis.

- Tu pourras me porter ? Si j'vais de moi-même je sais que je changerai d'avis et que je me figerai en cours de route. Si c'est toi qui m'y amènes, je ne pourrai pas fuir...

Et c'est ce dont j'ai besoin. Qu'on m'empêche de fuir. Qu'on m'empêche d'abandonner. Je n'arriverai jamais surmonter mes problèmes sinon.