Alastair Grayson

>Sérieusement j’en ai marre de ces séances avec le psy. Ce gars ne comprend foutrement rien et à plus l’air d’avoir peur de mes réactions que d’autres choses. Si j’accepte encore de le voir c’est simplement pour cette pseudo liberté que j’ai de suivre des cours dans cette école. Sans ça il est évident que je serais enfermé dans une cellule pour le restant de mes jours. Mais quoi qu’il en soit et comme je le lui ai déjà dit, si je devais recommencer je referais exactement les mêmes choses. Sans rien changer. Et ça ça lui fait peur... quel tapette...
Je m’appelle Alastair Grayson. Je suis né il y a quelques années sans savoir quand exactement. Du coup j’ai bien une date de naissance mais elle m’a été donné au hasard. Si ça se trouve je suis plus vieux qu’il n’y parait. Ou bien plus jeune qui sait. Je n’ai pas connu mes vrais parents. D’aussi loin que je me souvienne j’ai passé une partie de ma vie dans un centre avant qu’on essaie de me caser dans des familles. Mais cela ne fonctionnait pas. Jamais. Du coup je retournais rapidement dans le centre et ce pour de long moment. C’est d’ailleurs là que j’ai rencontré Alicia. Une jeune fille d’environ mon âge. Ce fut comme un coup de foudre amical. On s’est trouvé et on ne s’est plus lâché. A tel point que quand l’un était placé il faisait tout pour retourner au centre retrouver l’autre. Et ça ils l’avaient bien comprit. Ils essayaient de nous séparer mais rien a faire. Jusqu’à ce qu’ils décident de nous faire adopter ensemble. C’était plus difficile mais une famille accepta après une bonne année d’attente. Nous avions environ dix ans à cette époque il me semble. La famille Grayson. Il était avocat et gagnait bien sa vie. Sa femme était au foyer et a cause d’un cancer quand elle elle était enfant ne pouvait plus avoir d’enfants. Une histoire qui m’avait quand même touché à l’époque.

Sans mentir nous ne manquions de rien dès lors que nous étions entrés dans cette famille. Nos « parents » nous offraient tout ce dont nous désirions et même plus sans oublier l’amour. Je pensais sérieusement à ce moment précis que ma vie n’allait être que meilleur. C’était sans compter ce que la vie, ou Dieu peut-être, nous réservait encore. Quand on est un chat noir on l’est à vie n’est-ce pas ? Et c’est bien mon cas.
Alicia et moi étions toujours aussi proche. Nous étions à la même école et fans la même classe la plupart du temps et nous nous aidions pour les cours. C’était bizarrement trop facile pour moi mais pas pour Alicia. Elle avait quelques difficultés dans quelques matières mais excellaient dans d’autres. Du coup bah pour éviter qu’elle ne se sente trop nulle, vu qu’elle avait tendance à manquer de confiance en elle et ne pas se voir à sa juste valeur, je jouais les gars bidons dans les matières où elle excellait pour qu’elle puisse aussi m’aider. Et c’est ainsi qu’on passait les classes. Jusqu’à nos 13-14 ans...
C’est à cette époque qu’elle rencontra une bande et qu’elle se lia d’amitié avec. Au point où elle s’éloignait de moi. Je ne vais pas le cacher je l’ai assez mal vécu. C’était comme un abandon pour moi et pour la première fois nous nous sommes mis à nous disputer. Et pas qu’un peu. Son comportement était en cause, elle changeait drastiquement. Même nos « parents » le disaient. Ils ne la connaissaient pas autant que moi mais ils le voyaient. J’ai passé plusieurs mois à essayer de la convaincre, de la faire redevenir la Alicia qu’on connaissait et qu’on aimait. Mais rien n’y faisait. Des mois à en chier jusqu’à ce que je baisse les bras. Dégoûter...

18 janvier. Je rentrais de l’école sans avoir vu Alicia. Cela faisait plusieurs jours que ça se passait ainsi. Nous nous croisions le matin et on ne se voyait plus jusqu’au soir une fois de retour des cours. Il neigeait légèrement et la ville s’était recouvert d’un fin manteau blanc. C’était vraiment beau. Je souriais sous cette vision avant de rapidement déprimer. Je me souvenais qu’Alicia aimait particulièrement cette période. Du moins... l’ancienne Alicia. Alors que je claquais la porte d’entrée de la maison, je ne comprenais pas ce qu’il se passait en voyant la police dans le salon, ma mère en pleure. Mon coeur s’arrête presque quand elle m’annonça ce qu’il se passait. Le corps d’Alicia avait et retrouvé plus tôt dans la journée. La cause de la mort ? Overdose de médicaments. Et ma vie changea du tout au tout à partir de ce jour.
Je n’avais clairement pas accepté sa mort. Alors que mes parents faisaient tout pour m’aider et étaient présent, je m’enfermais dans un silence profond et inquiétant, choqué. A partir de ce jour j’ai commencé à voir un psy. Celui dont je vous parlais un peu plus tôt. Son diagnostique était sans précédent. Je m’enfonçais. Et rien ne pouvait inverser la tendance. Ce dernier savait ce que j’avais en tête mais n’y croyant pas, il n’a alors rien fait. Aujourd’hui je pense qu’il s’en veut. M’enfin personnellement je m’en fou.
Alors que je craquais et retournais la chambre de ma « sœur », je tombais sur ce qui semblait être son journal intime. J’avais besoin de réponse. J’avais besoin de comprendre ce qui s’était passé. Pourquoi avait-elle fait ça ? Qu’est ce qui avait conduis une fille aussi géniale à devenir la dernière des garces et se suicider derrière ? Si le dégoût que je ressentais de violer son intimité et sa mémoire en lisant son journal était puissant, mon besoin de réponse était encore plus grand et prit le dessus.

Ce que je découvrais était... répugnant. Révoltant. Je n’avais pas de mot pour décrire ce que je ressentais. Des larmes coulaient sur les joues avant de s’écraser sur les pages mais je continuais. Encore et encore. Violée, humiliée, battue, droguée... tout avait débuter lors de sa rencontre avec cette bande. Je n’étais même pas sûr qu’elle s’en rendait compte au début. Son écrit était différent au début mais il évoluait au fur et à mesure. Et lors de sa prise de conscience elle se renferma, se dégoûta. Jusqu’à...
Une chose était sûr, je ne pouvais laisser les responsables s’en tirer. J’ai été condamné à mes 14 ans pour meurtres multiples avec préméditation. Autant être clair, je n’ai rien nié et me suis présenté moi-même à la police une fois ma vengeance accomplie. Le pire dans tout ça, si on peut vraiment dire ça, c’est que j’ai vraiment aimé leur ôter la vie. Et quand on m’a demandé si je regrettais mon geste j’ai souris, ris aussi avant de dire que je recommencerai avec grand plaisir. Et que je prendrais même plaisir à ôter la vie à d’autres trou du cul dans leur genre. Si le jury s’est complètement indigné suite à mes paroles, mon avocat réussit, sans que je ne sache comment, à m’éviter la prison, proposant alors l’Institution Indarë pour me remettre sur le droit chemin et me permettre d’avoir un potentiel véritable avenir. Je suis alors entré dans l’école à mes 15 ans et y suis toujours aujourd’hui. Ce n’est pas la prison mais c’est tout comme. Comprenez par là que je vis dans une chambre entièrement fermé et sécurisé et que je ne sors que pour aller en cours, muni d’un superbe bracelet à la cheville. M’enfin c’est mieux que rien dirons-nous.