Accident meurtrier - 15/02/2018

Au bout d’un moment, je ne fis plus du tout attention où nous allions. Je n’avais qu’une seule envie, c’était me poser. Rien d’autre. Et si je ne me sentais pas aussi faiblard au point que ma voix se serait éteinte avant que je ne finisse ma phrase, j’aurais demandé à cette jeune femme de me laisser là. Après tout, nous étions à l’intérieur des murs, ce n’était pas comme si j’allais mourir de froid.

*C’est la seconde fois… S’ils en entendent parler, j’suis foutu…* pensai-je en bougeant légèrement les lèvres comme si j’avais voulu le dire à voix haute.

Heureusement que je ne l’avais pas fait, sans quoi j’aurais eu le droit à des questions auxquelles je n’aurais pas pu répondre. Que ce soit à cause de mon état ou pour notre sécurité. Je ne tenais pas vraiment à la mettre en danger. Quoiqu’en y réfléchissant bien, je l’avais peut-être fait rien qu’en étant avec elle. Fallait être honnête, mes pensées allaient dans tous les sens et j’avais du mal à aller de façon cohérente jusqu’au bout de mes idées. Mais une chose était sûre : j’allais certainement regretter qu’elle m’ait trouvé dans cette ruelle. Même si cela allait me permettre de faire cette attaque tant désirée au QG de la mafia.

Les escaliers furent la partie la plus pénible de cette traversée. A dire vrai, plus je montais de marche, plus je ralentissais. C’était l’impression que j’avais en tous cas, que j’avais de plus en plus de difficultés à mettre un pied devant l’autre. Un peu comme si la douleur augmentait au fur et à mesure que je levai une jambe pour ne pas buter contre les marches. Puis, finalement, je pus m’asseoir. J’en poussai un soupir qui continua jusqu’à ce que je sois couché. Sur un lit vraisemblablement, mais je ne fis aucunement attention aux détails. Je pus juste entendre sa voix féminine et douce me demander de me reposer, me rassurant sur ma sécurité. Je n’en avais pas vraiment besoin, même si en cas normal si. Là, je m’endormis presque immédiatement et profondément. Aucun rêve ne troubla mon sommeil. Le bandage de la jeune femme se montrait également assez solide pour que ma blessure ne s’envenime pas d’une façon ou d’une autre. Pouvait-on dire pour autant qu’une nuit de repos soit suffisante pour que je puisse guérir ? Non… Pas de façon concrète en tous les cas.

Le lendemain, je me réveillai alors qu’il faisait jour. L’heure qu’il était ? Aucune idée. Le soleil était juste levé, ses rayons traversant la vitre de la chambre dont je voyais nettement le plafond. J’avais les yeux ouverts depuis peu tandis que j’essayais de me remémorer les derniers événements de la veille.

Déjà, j’étais sorti pour… boucler un contrat. Je ne voulais pas y repenser. Je ne voulais pas me revoir en train de mettre fin à la vie d’un autre. … J’étais brisé et chaque nouveau sang coulant sur mes mains agrandissait cette cassure. Je n’en pouvais plus. Si seulement je pouvais arrêter…
A cause de ce genre de pensées, je ne parvins pas à réfléchir plus que cela aux événements de la veille. Je tentai donc de me lever et c’est là que ça me revint. La douleur sur mon flanc me rappela que ma blessure s’était rouverte alors que j’étais parti avec l’idée de faire une mission suicide (l’idée ne me déplaisait toujours pas), mais à court d’énergie, je m’étais assis dans une ruelle pour me reposer. Une jeune femme m’avait retrouvé et m’avait ramené à l’académie malgré ma lutte pour qu’elle n’en fasse rien. Ok. Cela expliquait pourquoi j’étais habillé, que j’avais mal et que je me sentais pas très bien. La question suivant à se poser était…

*Où suis-je bordel ?!*

La décoration ne me faisait clairement pas penser à ma chambre. J’avais beau n’être qu’à moitié relevé, le peu qui entrait dans mon champ visuel ne me disait rien. Déjà, il y avait des trophée… partout. En plus, il n’y avait qu’un seul lit et…

Quelque chose me frôla la main alors que je la bougeai afin de me relever un peu plus. Pour savoir de ce qu’il s’agissait, je tournai la tête. C’est seulement à ce moment-là que je la vis et que, dans le même temps, je compris : j’étais dans sa chambre ! Pourquoi ? Que s’était-il passé ? Bon, j’étais habillé donc il ne s’était probablement pas passé quelque chose de répréhensible entre elle et moi. De toute façon, en aurais-je été capable ? Bordel ! J’avais la tête qui tournait…

Finissant de m’asseoir sur le matelas étranger qui m’avait accueilli toute la nuit, je pris le temps de me reprendre afin de pouvoir repartir en katimini. Si possible, sans qu’elle ne s’en aperçoive. Il fallait que je retourne à ma chambre, ce qui me parut être une tâche un tantinet ardue.

*Il semblerait que la mission suicide attendra. Pas trop longtemps j’espère…*

J’essayais de trouver la force nécessaire de me lever, mais un mouvement à côté de moi attira mon attention. La demoiselle était en train de se réveiller. Bon, pour le départ en douce, c’était un peu raté. Et partir alors qu’elle pouvait me retenir d’un accès de peur ne m’enchantait pas des masses. En forme comme je l’étais, je ne me sentais pas vraiment capable de faire face à la même scène que la veille. D’ailleurs, j’avais de la chance que ce soit elle qui m’ait trouvé mine de rien, sans quoi je pense que j'aurais dû faire face à pas mal d’emmerdes. Devais-je la remercier ? Sans aucun doute, mais je ne voulais pas qu’elle pense que je me sentais redevable. C’était le cas, mais le lui laisser penser ne nous apporterait rien de bon. Me comporter en goujat ? L’idée même me fit grimacer. J’étais déjà un assassin et n’étais pas bien apprécié en général, alors si en plus je venais à avoir ce genre de réputation, autant aller dans cet état au QG de la mafia pour me suicider puisque je n’aurais plus rien. Absolument plus rien.

Réfléchir ainsi avait laissé à la jeune femme le temps de se réveiller et se relever. D’un certain côté, je l’avais fait exprès, n’étant pas totalement un monstre d’ingratitude. Ainsi, je fus encore là pour répondre à son inquiétude pour moi. Inquiétude que je ne comprenais pas. Beaucoup moins que son malaise en tous cas. Après tout, je n’étais rien d’autre qu’un homme inconnu dans sa chambre de fille. Pourquoi ne m’avait-elle pas ramené dans ma chambre d’ailleurs ? Ah… PePeut-être tout simplement parce que je m’étais pratiquement évanoui en chemin… Quel crétin j'étais !

-Ça va, t’inquiète pas, lui répondis-je en haussant les épaules.

En vérité, j’avais mal. La peau entre l’ouverture et le reste des points tiraient grandement et je ressentais encore le poids de la perte de sang que j’avais subie. J’allais devoir me reposer quelques temps. Peut-être sécher en allant au bâtiment abandonné. Ouais, bonne idée. D’habitude il n’y avait personne là-bas, ce qui m’arrangeait grandement.

Le silence s’éternise par la suite entre nous. Je n’allais clairement pas lui demander si elle avait bien dormi étant donné que le sol n’était clairement pas un bon endroit pour se reposer. Ensuite, elle avait dû être pas mal inquiète pour moi. Au point de me ramener là et de veiller sur moi jusqu’à l’épuisement total. Jamais personne n’avait jamais fait ça pour moi à part elle.

*Faut que j’arrête, crétin que je suis ! Ce n’est pas comme si elle était mon amie. Et même si c'était le cas, elle ne serait qu’en danger en restant à mes côtés…*

“Fort” de cette pensée, je me relevai avec difficulté. Elle aussi était debout et semblait penaude, gênée, comme si elle ne savait pas quoi faire ou dire. J’avais un peu de peine pour elle, mais je n’avais pas le choix. Je devais me montrer froid. Être ami avec moi ne ferait que la blesser. Mon amitié avec les jumelles me l’avait prouvé. J’allais donc commencer à partir quand elle me demanda si je voulais me reposer encore un peu. De cette façon, j’avais l'impression qu’elle m’obligeait à répondre. Ce que je fis d’ailleurs en fronçant légèrement les sourcils :

-Je vais retourner dans ma chambre. Je me reposerais là-bas.

Avais-je été froid ?... Oui, peut-être un peu. Mais je ne savais pas comment faire autrement. Du coup je me mis à avancer en direction de la sortie. Je me trouvais où exactement là ? Ce devait être la zone des dortoirs de l’académie puisqu’elle m’avait dit être étudiante à Chisê. Donc, si ma mémoire était bonne…

*Il faut que je descende un étage pour être au niveau des lycéens, non ?*

J'étais venu là une seule fois et c’était pour aller dans la chambre de Sasha, un étudiant qui cherchait son chat. Je me demandais d’ailleurs ce qu’il était devenu. Cela faisait longtemps que je ne l’avais pas aperçu…

A quoi est-ce que je m’attendais ? Je ne le savais pas moi-même. C’est pourquoi je ne sus vraiment que penser lorsqu’elle hocha simplement la tête en acceptant mon envie de rentrer dans ma chambre. Enfin, je pus également noter une légère grimace qui avait déformé son visage le temps de quelques secondes. Je devais vraiment me trouver dans un état pitoyable. Enfin… ce n’était pas comme si c’était étonnant. Con comme je l’étais, je cherchais à mourir par tous les moyens possibles. Ou c’était au moins ce que je laissais sans doute penser par mes actions me menant toujours à me faire aider par les autres quand je me trouvais blessé. Et sans parler de mon envie d’aller faire une vendetta à la mafia.

J’allais donc jusque la porte tranquillement, prenant le temps pour éviter de flancher d’une façon ou d’une autre. Après tout, avec l’équilibre que j’avais, c’était limite si je ne voulais pas retourner sur le lit dans l’immédiat. Je parvins néanmoins à animer mon courage en me disant que mon calvaire serait bientôt terminé. Peut-être même pourrais-je “le” relâcher sans le moindre remord cette fois. Rien que me dire cela était assez libérateur, pour moi qui me voyait comme un monstre. Alors quand la jeune femme m’arrêta, je me retournai avec une expression un peu plus dure que plus tôt. Mon regard ne s’attardant que très peu sur elle, je descendis rapidement mon regard sur ce qu’elle tenait entre ses doigts. Une carte. Sans comprendre, je la pris en l’écoutant pour la lire. Un nom, sans doute le sien, un numéro de téléphone et autres. D’ailleurs, si je venais à la chercher, je pouvais facilement penser qu’elle se trouverait au club de handball. Ce n’était vraiment pas compliqué à deviner vu qu’elle se disait pro. … Allais-je vraiment en avoir besoin de cette information en vérité ?

Ne comprenant pas trop ce qui poussait cette fille, Ellia Ballentine, à vouloir m’aider sans me connaître. Surtout que si elle avait su de quoi j’étais capable, la raison pour laquelle j’étais avachi dans la ruelle, elle n’aurait certainement pas dit ça. Du coup, je ne lui répondis pas et partis, tout simplement. Puis, en essayant d’oublier ma culpabilité qui nourrirait bien assez tôt mes actions, afin de traverser aussi lentement le couloir que dans la chambre jusqu'à ma chambre. Sincèrement, mieux valait ne pas savoir combien de temps j’avais mis à cause de la douleur qui devint de plus en plus forte à mesure que je marchais. Bon, mon raid solo allait être définitivement reporté à plus tard. Bien plus tard…

Et une fois dans ma chambre, je m’affalai pour me reposer sans savoir que ce que je prévoyais allait tout simplement me conduire à souffrir encore plus. Je n’allais pas oublier Ellia, mais j’espérais qu’elle ne s’accrocherait pas à moi. Cela ne valait pas la peine, surtout qu’elle en pâtirait sans rien y gagner. Tout comme le ferait, plus tard, une jeune femme alors que j’avais joué au garde du corps. Une action que j’allais grandement apporter...