À droite, l'école et ses élèves normaux, comme tout le monde.À gauche, le centre de redressement pour jeunes dangereux.Maintenant réunis, pour le pire.
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Famille : Trois enfants : Zack et Scarlett (05/17) et Aydan (09/20)
Situation amoureuse : Mariée à Erik Vint Svent
Personnage sur l'avatar : C.C. de Code Geass
Doubles comptes : Alix, Roxanna, Jesse, Nick/Ellia, Chelsea
Jeu 1 Nov - 22:19
Martel Vint Svent
/!\ Ce rp a été à l'origine posté sur le forum Hoshi No Musu dans le cadre du passé de Yuri Walker et de Nick & Ellia Ballentine. Etant donné que leur section rp n'est pas visible aux invités et que nos persos ont été transférés depuis leur forum, nous transférons les rps ici pour conserver l'évolution de nos personnages. Tous ces rps ont eu lieu au Japon avant l'arrivé de Nick, Ellia et Yuri en Angleterre. /!\
Février. Le jour J était arrivé à grand pas et je devais bien avouer que ce n’était pas pour me plaire. Depuis mon dernier contrat, qui coïncidait avec ma rencontre avec Tougo Okazaki-san, je n’avais vraiment plus envie d’être utilisé comme un outil. Une des raisons, la toute première, était parce que je n’avais jamais eu réellement envie de faire partie de la mafia. Mais ma discussion avec cet homme ayant choisi sa voie, il me semblait ne plus avoir de raison de continuer comme ça. Sans parler que j’avais de moins en moins de contact avec Haley et sa sœur. Avaient-elles déchiffré mon code ? Cela les avaient-elles refroidies de mieux me connaître ? Pour moi il s’agissait là de la meilleure explication, ce qui me donnait un prétexte pour disparaître d’une façon ou d’une autre.
Ne sachant pas trop quoi faire pour le moment, je savais que je n’avais pas d’autres choix que de suivre les ordres et mon prochain contrat avait été prévu à l’avance. Il s’agissait de faire disparaître quelqu’un et que cela ressemble à un accident. Pour cela, je devais me rendre au point de rendez-vous indiqué par mon chef via un SMS à la date prévue. Est-ce que la cible y allait sur demande de la mafia ? Ou était-ce une habitude ? Je n’avais aucune information à ce propos et ce détail m’était pénible puisque je ne savais pas du tout comment l’aborder.
Finalement, je sortis sans avoir une quelconque idée, espérant que ça viendrait tout seul sur place. Il faisait froid malgré le soleil qui brillait. Se moquait-il de moi ? *Mais qu'est-ce que je raconte ?* pensais-je alors que je marchais dans la rue, croisant des passants que je ne connaissais pas du tout. Aucun d’eux n'était ma cible non plus malgré ma légère avance. Peut-être était-il déjà arrivé par craintes, à moins qu'il ait fui ? D’ailleurs, j'étais partie du principe qu'il était seul, mais que pourrais-je faire s’il venait à être accompagné ?
18h30. J’attendais devant le restaurant “La cerise” que la cible arrive, dans l’ombre. Les clients commençaient à arriver, mais aucun ne ressemblaient au garçon dont je devais m’occuper. Plus ou moins patiemment, je restai à surveiller, jusqu'à ce que je l’appercoive. Il ne rentra pas, semblant chercher quelqu’un. Je décidai donc de m’avancer à la lumière pour constater si c’était moi qu’il attendait ou non. Malheureusement, je ne pus le dire et dus m’approcher de lui pour l’appeler par son nom, de façon “professionnelle”.
Il ne fut pas facile de le convaincre de me suivre. Seul, il semblait se méfier de tous les étrangers comme s’il savait ce qui l’attendait. Pourtant, je parviens à lui faire comprendre que j’étais la personne avec qui il avait rendez-vous. Mieux vaut que ma technique reste pour moi puisque je n’en suis clairement pas fière. Mais, au moins, il m’accompagna jusqu’à la scierie à la sortie de la ville sans faire d’histoires. C’est là que mes ennuis commencèrent : loin d’être totalement abrutie, ma victime ne se laissa pas tuer gentiment en regardant le paysage. Au lieu de cela, il se défendit comme un beau diable, me donnant des coups sur ma blessure la plus récente et toujours susceptible de se rouvrir.
À cause du manque d’arme, et parce qu'il fallait que je respecte le thème de l’accident, j’avais amené ma victime là en espérant pouvoir la pousser dans une énorme broyeuse. Si seulement tout avait pu se passer comme prévu… Non seulement je sortis une nouvelle fois blessée de toute cette histoire, le sang coulant sur ma main à travers mon tee-shirt sous mon manteau. Heureusement que ces deux-là étaient noirs. Mais en plus ce nouveau meurtre sembla briser quelques chose en moi. Peut-être qu’à cause de ça je me mis en tête d'aller en mission suicide : aller semer le souk dans la mafia. Avant toute chose, sans penser à ce que pourrait penser ceux qui m’avaient recueillis et “éduqués” une fois mes deux parents morts, je nettoyai mes traces sans grande minutie avant de partir en direction de la ville. Je savais où se trouvait le repère principal, pourtant c’est de plus en plus en but que je semblais errer jusqu’au quartier Sanjuu.
Puis, à bout de forces, je m’assis dans une ruelle sombre, non loin de la rue principale. J’étais fatigué, totalement à bout alors que je comptais inconsciemment le nombre de meurtres que j’avais commis. Méritais-je de vivre après tout cela ? Si cela était le cas, peut-être aurais-je pensé à sauver ma peau en appelant une ambulance, même par un téléphone publique. Mais je n’en fis rien, préférant appuyer sur ma plaieà travers mon tee-shirt inondé, attendant seulement que le temps passe. *Quand j’irais mieux, je rentrerais à l’académie… Sans arme, pas la peine de penser à détruire la mafia, de toute façon…* Telles furent mes pensées alors que je regardai le ciel, la tête tournée vers l’extérieur.
L'hiver était une saison parfaite. Contrairement à l'été, où la moindre séance de sport finissait par devenir une torture à cause de la chaleur, l'hiver épargnait à Ellia ce genre de problèmes : il suffisait de s'entraîner dehors pour échapper au chauffage et, à condition de ne pas glisser sur une plaque de verglas ou de la neige, tous les entraînements devenaient une partie de plaisir - encore plus que d'habitude, en tout cas. Elle s'était accordée une petite séance de course ce matin, pour travailler son endurance dans le froid, puis une autre plus longue dans l'après-midi, et même si elle avait la gorge un peu en feu, elle avait réussi à tenir plus longtemps qu'en temps normal. Une heure d'entraînement avant qu'elle ne s'accorde une pause, se posant à la terrasse d'un café proche du stade où elle s'entraînait pour boire un thé et se réchauffer, malgré les regards surpris qu'elle récoltait. Oui, elle devait bien être la seule à s'installer en extérieur par cette saison, mais ça ne la dérangerait pas ; elle avait affronté des froids bien pires lors de ses compétitions à l'étranger, et ça contribuait à garder son énergie au top. Elle aurait sûrement dû manger quelque chose, aussi, mais son estomac était loin de crier famine pour l'instant.
Son thé fini, Ellia s'étira et déposa de l'argent sur la table avant de se lever pour déambuler un peu dans les rues. Elle vivait seule dans sa chambre universitaire, elle n'avait rien à travailler pour ses examens, donc personne ne l'attendait nulle part, elle pouvait bien rentrer tard, peut-être manger dehors, il devait lui rester assez sur ses économies pour se payer un restau. Elle n'avait rien de spécial à faire, l'idée de s'entraîner encore un peu dans la soirée l'effleura, mais elle était assez lucide pour savoir qu'elle ne pourrait de toute façon pas faire de sport le ventre vide. Pour l'instant, marcher sans but précis dans les quartier lui semblait un bon plan, une occupation comme une autre.
Peut-être que son regard vagabond était plus prompt que celui des autres à repérer des choses étranges, ou peut-être que d'autres personnes l'avaient vu avant elle sans s'arrêter, que ce soit par lâcheté ou par désintérêt. Elle s'arrêta. Ellia se figea soudain au milieu de la route, les yeux attirés par une silhouette assise dans une ruelle - effondrée, plutôt - qui semblait mal en point. Personne ne daignait y prêter attention, mais elle ne pouvait détacher son regard de la scène, et elle finit par bousculer quelques personnes pour s'approcher de la ruelle. L'ombre rendait les détails difficiles à voir, mais elle perçut rapidement qu'il se tenait le ventre. Douleur ou blessure ? Elle se pencha sur lui. "Eh, vous allez bien ?" Elle avait conscience de l'absurdité de sa question, prononcée à voix basse, mais c'était une manière de vérifier qu'il était conscient, pas trop en état de choc. Elle tendit la main vers lui, touchant sa main du bout des doigts avant de les retirer aussitôt après avoir senti un liquide sur sa peau. Du sang. Le sien se glaça dans ses veines. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire ? Appeler une ambulance ? Demander de l'aide ? Si personne n'avait réagi jusque là, le cri d'une fille dans la rue ne provoquerait pas grand chose de plus. "Vous... vous êtes blessé, il faut aller à l'hôpital." Pourvu qu'il soit conscient. Pourvu qu'il y ait une solution simple à ce problème. Et si la blessure était grave ? Et s'il mourait sous ses yeux ? non... non, il ne fallait pas penser ce genre de choses. Elle fouilla fébrilement son sac de sport à la recherche de son téléphone, les mains tremblantes.
Nick parle en #F5634A et en #BD171C (anglais) Ellia parle en #A98BA0 et en #A73A94 (anglais)
Le ciel était plutôt clair, sans nuage. Plutôt ironique quand on sait ce qui s’était plutôt passé plus tôt. Je n’étais pas vraiment très mangas, films ou autres (j’avais du en visionner un ou deux dans toute ma vie), mais j’étais persuadé que dans ce genre de cas il ferait sombre ou la pluie tomberait. Je ris aussi amèrement que silencieusement en pensant que j’avais que ça à faire, penser à la pluie et au beau temps, en attendant que je reprenne un peu de forces. Mon fin sourire devint rapidement une grimace de douleur que je cachai en baissant la tête. C’était pas bon… je perdais plus de sang que je l’avais d’abord pensé et je n’avais aucune idée de ce que je devais faire. Il était hors de question que je prévienne qui que ce soit, pas même ce maïeutique m’ayant aidé par le passé, et je n’avais aucune envie de faire un tour à l’hôpital. Plusieurs raisons s’opposaient à cette idée qui, pourtant, semblait mille fois meilleure que le fait de simplement rentrer à l’académie. J’étais seulement bien trop têtu pour l’admettre.
Les yeux fermés, je tentais de me calmer, de me concentrer sur mon objectif premier. Je ne bougeais pas, laissant mes membres s’engourdir à cause du froid. Personne ne semblait m’avoir vu jusque-là, ce qui m’arrangeait. Pourtant, je pouvais ressentir comme un pincement au cœur. Regret ? Déception ? Je n’en savais rien et ne me laissait pas de marbre, même si mon expression évoquait le contraire.
Néanmoins je pus entendre, après un long moment totalement indéterminé, des pas précipités s’approcher de moi. Ils étaient paradoxalement légers et lourds et, au lieu de partir comme tous les autres comme j’en étais totalement persuadé, ils s’arrêtèrent juste à mes côtés. Un curieux qui venait de me remarquer ? J’en doutais un peu mais avais de toute façon la flemme de vérifier. Je n’ouvrir donc pas les yeux ni ne cherchai à bouger, jusqu’à ce que j’entende un appel. Celui-ci me parut très lointain et comme en écho. Je ne compris donc pas tout de suite ce qui était dit ou même si cela m’était adressé. Doucement, difficilement, j’ouvris les yeux. Ma vision était comme floutée sans que j’en comprenne vraiment la raison.
*Je ne peux pas être si affaibli… * pensai-je en regardant en coin la personne à mes côtés.
La première chose qui me frappa fut son expression : visiblement l’inquiétude était ce qui l’animait, la faisait réagir. Pourquoi ? Je ne ressentais plus ni douleur, ni le sang sur ma peau. J’étais juste fatigué. Cela ne pouvait pas être si grave… Pourtant, alors que je pensais rêver que quelque chose de chaud atteignait mes doigts, la brune à mes côtés sembla plus inquiète encore. C’était étrange… Je ne l'a connaissais pas et n’avais pas le souvenir de l’avoir un jour croisé. Pas d’une façon qui puisse nous lier en tous les cas.
Le contact que j’avais sentit sans pouvoir le définir ne dura que très peu de temps. Et avec la fin de celui-ci revint la voix, un peu plus clairement que précédemment, qui disait que je devais aller à l’hôpital. Aussi rapidement que possible, je tentai de faire une liste de ce que cela impliquait. Mais, ce qui me vint surtout fut la sensation que cela me mettrai en danger. Pourquoi ? Avait-elle de mauvaises intentions ? Non… Cela ne sembla pas être le cas, sinon elle aurait sans doute parlé de la police également. C’était ce que je pensais et espérais. Alors, pourquoi me sentais-je aussi mal à l’aise à l'idée d’aller à l’hôpital ? Une idée me fut alors comme soufflée, certainement par “lui”, et c’est ce qui me fit sans doute réagir quand je vis la jeune femme qui devait avoir à peu près mon âge sortir un téléphone portable.
Porté par l’adrénaline qui m’anima soudainement, je pris son bras de ma main ne tenant pas mon ventre, de son côté. Puis, une expression sérieuse et aussi menaçante que je le pus (pas énormément à vrai dire), je soufflai d’une voix plus grave qu’a l’ordinaire et le souffle court :
- Je n’irais pas à l’hôpital... Laisse moi, ça vaut mieux…
Allait-elle m’écouter ou non ? Je n’en savais absolument rien à vrai dire. Quoique, j’avais tout de même des doutes : elle n’avait pas hésité à venir me voir, avait montré qu’elle voulait m’aider, sans parler des tremblements qui agitaient ses membres. Pourquoi s’inquiétait-on autant pour un pauvre type comme moi ? Je ne méritait pas autant de considération…
La panique était un sentiment qu'elle ne ressentait que rarement. À vrai dire, à part quand elle s'inquiétait pour Nick, elle se laissait rarement atteindre par la moindre forme d'angoisse. Mais... trouver un garçon couvert de sang et isolé dans une ruelle, ça laissait peu de place à la sérénité. Il semblait conscient, en tout cas il avait ouvert les yeux, mais il avait aussi l'air très affaibli. Qu'est-ce qui l'avait blessé ? Elle n'osait pas vérifier. Elle avait l'habitude des blessures, mais les siennes étaient rarement sanglantes. Quand ce n'était pas juste des coups assez violents – une chute, un ballon mal réceptionné, un coup accidentel – c'était dans le pire des cas des entorses ou des fractures. Elle n'était pas tétanisée par le sang mais elle n'y connaissait rien, elle n'était pas capable d'en jauger la gravité.
Elle allait donc appeler une ambulance dans la réaction la plus logique possible, mais elle sursauta lorsqu'il se saisit de son bras. Pour l'arrêter ? Une nouvelle vague de panique remonta dans ses veines. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire d'autre, hein ? Hors de question qu'elle écoute son "ordre" et qu'elle le laisse ici. La seule chose pire que d'assister à la mort de quelqu'un était de se dire qu'on avait peut-être laissé quelqu'un mourir en ne l'aidant pas. Non, non, non. Hors de question qu'elle prenne ce risque. Elle ignorait à quel point il était en danger, mais s'il risquait d'y passer, elle ne pouvait pas rester les bras croisés. C'était contre tout ses principes.
Ellia prit une grande inspiration mais elle finit par accéder au moins à sa première requête et ranger son téléphone portable. Quelle que soit la raison pour laquelle il ne voulait pas aller à l'hôpital, elle ne pouvait pas l'y forcer. Ou plutôt, elle ne l'y forcerait que s'il tombait dans ses pommes. Il avait l'air globalement lucide ou, à défaut, conscient. S'il se débattait pour ne pas être emmené par des infirmiers, ça ne ferait qu'aggraver ses blessures. Et il avait peut-être quelqu'un après lui ; elle n'appréciait pas davantage l'idée de le précipiter dans les bras d'un potentiel ennemi mortel. Elle ignorait totalement d'où lui venait cette blessure, après tout. Elle déglutit et tendit à nouveau sa main pour la poser sur la sienne, à côté de sa blessure. "Laisse-moi au moins regarder... ça a l'air grave..." Et après quoi ? Le soigner ? Elle avait bien des bandages dans son sac, et du matériel de couture pour réparer ses uniformes, mais elle n'était pas vraiment certaine d'avoir le cran de recoudre une blessure. Ni les compétences. Elle risquait d'aggraver les choses, non ? Enfin, c'était sûrement mieux que de rester sans rien faire. "Tu n'as vraiment pas l'air bien..." souffla-t-elle pour le convaincre au cas où il refuserait où hésiterait. C'est seulement à ce moment qu'elle réalisa qu'elle s'était mise à le tutoyer... sûrement parce qu'il avait fait même chose un peu plus tôt. Elle avait toujours eu du mal avec ce genre de choses, malgré toutes ces années d'études du japonais. Elle prit une seconde pour réfléchir, puis décida de ne pas changer de formulation : peut-être que si elle paraissait moins formelle, il serait plus enclin à accepter son aide.
"Si... si tu ne veux vraiment pas aller à l'hôpital, je peux... essayer de te soigner..." C'était présomptueux, mais elle serra doucement ses doigts entre les siens. Il pouvait la repousser, c'était radicalement impossible pour elle de ne pas venir à quelqu'un. Mais elle ne se voyait pas le forcer. S'il refusait totalement son aide, elle ne pourrait rien faire d'autre pour lui que s'assurer qu'il n'allait pas y passer sous ses yeux... on avait vu plus rassurant, comme perspective... Mais elle n'avait pas trente-six solutions. Accepte, s'il te plaît...
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Je ne m’attendais pas à ce qu’elle m’écoute tout de suite. Mais, d’un autre côté, je ne savais pas du tout quoi lui dire pour qu’elle entende raison sans lui dire qu’elle était en danger en restant avec moi. Non seulement cela serait lui révéler que j’étais un danger, ce qui était hors de question, mais en plus ce n’était même pas sûr que cela vienne à la convaincre. Je ne savais pas vraiment quoi faire et je sentais que mes idées avaient un mal de chien à se faire un chemin jusqu’à mon esprit. Il ne fallait pas que je me laisse aller. Pas si je voulais mettre en oeuvre mes desseins, aussi sombres soient-ils.
Par chance, je la vis ranger son portable là où elle l’avait trouvé. Je lui lâchai donc son bras en espérant ne pas l’avoir serré trop fort et posai ma main sur le sol, non loin de l’autre. Malheureusement, elle ne se leva pas pour s’en aller. Elle resta à mes côtés, semblant jauger la situation malgré l’inquiétude qu’elle semblait avoir peinte sur ses traits. Pourquoi d’ailleurs ? Je n’étais qu’un étranger. Même ceux qui passaient non loin de nous me donnaient l’impression d’avoir mis des oeillères. D’un certain côté, cela m’arrangeait puisque cela me permettait de ne pas me soucier si on se préoccupait plus de moi on non. Mais en y regardant de plus près, je ne savais pas si j’étais vraiment capable d’accepter de mourir de la sorte, abandonnant Haley qui était finalement ma seule amie malgré la distance qui s’installait peu à peu entre nous.
*Je suis vraiment trop con…!*
Un contact sur ma main, juste à côté de ma blessure. Cela me permit de reprendre encore conscience alors que je commençais à partir. Il me vint alors la pensée rapide que, finalement, ce n’était pas plus mal de ne pas être seul, même si je n’en étais pas totalement ravi. Je n’eus même pas le temps de m’en donner une claque mentale, entendant la jeune femme me demander à regarder ma blessure. Sur le coup, je voulais refuser malgré le fait qu’elle pense que ce soit grave. De toute façon, que pourrait-elle y faire ? Fermant les yeux, je tentai de réfléchir aux pour et aux contres, trouvant surtout des points pour la seconde partie. Sans parler que ma confiance en autrui n’était pas facile à donner. Je ne savais pas quoi faire ou quoi penser quand elle me fit part que je n’avais vraiment pas l’air bien. Tant que ça ? Je ne voulais pas y croire. Je ne voulais pas croire que j’étais si mal en point. Ce n’était pas possible que je sois aussi faible que cela…
Finalement, ce qui me décida de voir ce qu’elle pouvait faire pour moi fut sa proposition de me soigner. J’ouvris alors les yeux pour la regarder autant que ma vision floutée me le permit. Elle était sérieuse et me parut assez déterminée. Je grimaçai alors et lui demandai en commençant à soulever mon tee-shirt imbibé de sang :
- Déjà, peux-tu regarder si le saignement s’est arrêté ? Et dis-moi ce que tu as pour pour soigner. Des bandage ? Ou autre chose d’utile ?
Cela me gênait qu’elle voit les nombreuses cicatrices qui constellaient ma peau, mais je n’étais plus à ça près. Par contre, j’espérais vraiment qu’elle avait de quoi faire dans son sac sinon je ne donnais pas cher de ma peau. Aller à l’hôpital ne ferait que m’apporter plus d’ennuis que j’en avais déjà… Si seulement je pouvais l’éviter en rentrant à l’académie, avec des soins même précaires. C’était tout ce que je demandais au final.
Une fois à l’air, ma blessure ensanglantée fut très visible. Il s’agissait d’une blessure faite par arme blanche qui avait déjà été recousue une première fois. Elle était moins profonde que le jour où j’avais été retrouvé allongé dans la neige, mais loin d’être guérie, ce qui la rendait encore assez impressionnante même si, par je ne sais quel miracle, j’avais réussi à stopper le saignement. Cela ne la rendait pas moins douloureuse, malheureusement. Je me retins cependant de grimacer pour rester concentré au maximum. Ce n’était tout de même pas gagné vu mon état. Elle avait raison, j’étais vraiment mal en point...
Il ne refusait pas. Pour l'instant, il ne disait rien qui ressemblait à un refus, en tout cas. Ellia sentit quand même son cœur rater un battement quand il ferma les yeux. Et s'il s'endormait ? Ça voudrait dire qu'il était encore plus en mauvais état et que... non, ne pas penser à ça. Elle continua de serrer ses doigts jusqu'à ce qu'il rouvre les yeux et affiche un semblant de réaction. Elle déglutit en voyant qu'il commençait à relever son tee-shirt. Voilà, elle était dedans jusqu'au cou, maintenant. Il fallait assumer ses paroles. Être à la hauteur de son affirmation hésitante. Essayer de le soigner. Son sang pulsait dans ses veines beaucoup trop rapidement. Elle stressait à un point qu'elle n'avait jamais atteint. Même avant un match sur lequel se jouait la totalité de sa carrière, le stress était minime par rapport à une action qui mettait la vie de quelqu'un en jeu.
"J'ai des bandages... et du fil et des aiguilles, mais..." Mais elle espérait très grandement ne pas en avoir besoin. Vu le sang qui imbibait son tee-shirt, et ses doigts, c'était quand même une possibilité qu'elle envisageait. Son regard accrocha à peine une seconde les autres cicatrices, avant que son attention ne se reporte sur la plus importante. Ellia ne put retenir une inspiration choquée lorsqu'elle vit sa plaie. C'était... ça ressemblait à un coup de couteau, non ? Elle n'y connaissait rien, mais elle sentit que ses mains tremblaient légèrement. Heureusement, du peu qu'elle en voyait, elle n'aurait pas à le recoudre. Dans son état d'angoisse actuelle, elle n'était pas sûre qu'elle aurait réussi, encore moins avec les gémissements de douleur qu'il aurait pu pousser au contact de la pointe de l'aiguille.
La jeune fille prit quelques secondes pour retrouver une respiration normale et chasser les images de son esprit. La blessure ne semblait plus saigner, mais il avait dû perdre beaucoup d'énergie. Elle n'était pas médecin, elle ne savait pas vraiment gérer les plaies ouvertes, mais elle ouvrit son sac malgré ses mains fébriles, sortit les rouleaux de bande qu'elle transportait tout le temps avec elle. Est-ce que ça serait suffisant pour le soigner ? Elle n'en savait rien. Ses compétences médicales étaient trop légères. C'était simplement sa seule option. Elle serra et desserra les poings plusieurs fois pour que ses doigts retrouvent une dextérité à peu près stable. "Je vais te mettre un bandage, mais tu as perdu beaucoup de sang. Tu es sûr de ne pas vouloir aller à l'hôpital ?" Elle ne fit pas un geste vers son téléphone, cela dit. C'était sa décision, s'il refusait une nouvelle fois, elle ne poserait plus la question. Il se contenterait d'elle – pas sûre qu'elle soit la meilleure personne pour l'aider, mais c'était tout ce qu'il avait sous la main.
Ellia calma ensuite ses pensées pour se concentrer sur ses gestes. Elle ne savait même pas si elle devait ou non serrer assez fort. Elle avait peur que la blessure se remettre à saigner si elle appuyait trop en plaçant son bandage, et elle craignait à tout moment de lui faire mal au moindre contact avec sa peau ou sa blessure. Alors c'est très prudemment qu'elle appliqua son bandage, serrant juste assez, elle l'espérait, pour empêcher ce qui lui semblait être une couture de se défaire davantage, ou la plaie de s'élargir. C'était le mieux qu'elle puisse faire. Elle recula ses mains sitôt que la bande disponible fut épuisée et qu'elle eut accroché le tout de manière à ce que le bandage ne puisse pas se décrocher. Ce n'était pas du haut niveau médical. Ça suffirait. Ça suffirait, pas vrai ?
Elle l'espérait très fort. Mais au fond d'elle, elle savait qu'empêcher l'expansion de la plaie ne ferait pas tout. Il avait l'air d'avoir perdu beaucoup de sang, vu comme il semblait faible, et elle ne savait pas comment remédier à ça. Tout ce qu'elle avait à disposition à part ses affaires de sport, c'était une bouteille de boisson énergétique, et elle n'était pas sûre que l'intérêt soit fantastique. C'était vraiment le genre de situation auxquelles elle n'était pas préparée. Du tout. Mais elle ne regrettait pas de s'en être mêlée.
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La voix de la jeune fille me tenait éveillé, tout comme le fait qu’elle s’affairait près de moi. Je ne sais pas si elle le faisait juste parce qu’elle ne voulait pas voir quelqu’un mourir, si elle m’avait reconnu d’une façon ou d’une autre alors que je ne la remettais pas ou si… Non. Ce n’était pas possible. Tout bonnement. Personne n’était fait d’autant de bonté sans cacher quelque chose. Après tout, même moi j’avais du sang sur les mains alors que j’essayais d’aider les autres. Une façon à moi de me racheter d’une façon ou d’une autre. Alors qu’est-ce que cela pouvait être pour elle ?
Ramené à la réalité, je fus dans l’obligation de me concentrer. Je pus alors prendre en note le fait qu’elle avait de quoi me bander et me recoudre. Néanmoins, je ne me sentais pas capable de supporter la douleur des coutures sans faire preuve de violence. Alors, je lui dis en cachant au mieux ma faiblesse derrière une assurance que je peinais à avoir :
- Oublie l’aiguille et le fil. Tu vas me bander ma blessure. Essaie de serrer assez fort pour que le sang ne coule pas plus lorsque je bougerais.
J’avais toujours dans l’idée de retourner au pensionnat. Certe, ce pansement de fortune ne suffirait sans doute pas, mais je n’avais pas vraiment d’autres solutions. Pas dans les circonstances dans lesquelles je me trouvais. Je ne connaissais pas cette fille et malgré les soins je ne voulais pas la déranger plus que ça. C’était le seul moyen que j’avais pour la remercier. Peut-être étais-je bête. Ou irresponsable. Quoique ce point était une certitude. Plus que penser que je puisse être ingrat. Dans mon coeur, ce n’était pas le cas puisque je m’isolais pour éviter d’impliquer d’autres personnes dans mes histoires. Comment expliquer ce genre de choses plus qu’en demandant de ne pas m’approcher ? Je ne le pouvais pas.
Pendant qu’elle me soignait, je me trouvai totalement incapable de lui indiquer s’il fallait serrer plus ou moins les bandes. Je n’étais pas vraiment un expert et il me semblait qu’elle n’était pas à l’aise. Je le compris assez bien grâce à sa question : si je ne voulais vraiment pas aller à l’hôpital. A nouveau, je lui répondis que non dans un grognement d’irritation. Ce n’était pas la réaction que je voulais lui offrir, mais la douleur et la faiblesse dont je faisais preuve me rendaient quelque peu irritable à mon insu. Au moins, elle n’avait pas tenté de prendre son téléphone, ce qui ne m’avait pas fait faire de mouvement brusque, ce qui était déjà pas mal.
En parlant de gestes, les siens se trouvèrent être très précautionneux. Je ne m’y étais pas du tout attendu à vrai dire, n’étant jamais tombé sur des tendres auparavant. Mais je n’en dis rien, gardant ce fait pour moi seul. Elle n’avait pas besoin de le savoir et, bien qu’il m’était impossible de me l’avouer, je souhaitais en profiter au moins un peu. Après tout, la réalité me rattraperait assez tôt, ramenant avec elle la douleur et les déceptions les plus cruelles. Comme à chaque fois que je nourrissais un espoir trop important, en somme.
Le silence s’éternisait. Même après qu’elle eut terminé les soins, elle ne me dit rien. J’en profitai donc pour rabaisser mon tee-shirt en grommelant un “merci” à peine articulé. Puis, faisant attention à ne pas me faire mal ou tirer plus que nécessaire sur ma blessure, je me relevai. Au moins me séparer de ce mur et me redresser. C’est seulement à ce moment-là que je compris à quel point je devais avoir froid tant j’étais resté sans bouger par ces températures. Mon corps était tout engourdi, j’avais des difficultés à bouger. Malgré la grimace qui tordit mes lèvres et mes sourcils froncés, je tentai de masquer cela en continuant mon geste jusqu’à ce que j’atteigne la position assise. Je sentais bien combien j’étais mal désormais, mais je ne voulais pas le prendre en compte. Il fallait que j’atteigne mon objectif avant de tout relâcher.
*Avant de mourir, il faut au moins que je foute la merde là-bas !* pensais-je sans remarquer que l’expression de douleur avait été remplacée par la haine que je portais à mes employeurs.
- Merci pour ton aide, fis-je sur un ton distant en faisant mine de me relever pour me mettre sur mes jambes. Mais nos chemins se séparent ici.
Je ne pensais pas qu’elle accepterait facilement cela. Surtout que je devais m’aider du mur pour me relever et que j’étais vraiment dans un état pitoyable. Mais je ne voulais pas lui laisser le choix. Il fallait que je rentre pour me reposer et me préparer à mon tout dernier coup. J’allais le faire, peu importe les risque.
Soigner quelqu'un n'avait jamais vraiment fait partie de ses compétences, mais elle espérait vraiment qu'elle n'avait pas fait n'importe quoi. Mais il ne voulait pas qu'elle l'emmène à l'hôpital ; il n'avait pas eu besoin de prononcer le moindre mot pour ça, son grognement avait suffi à ce qu'elle comprenne que c'était exclu. Elle aurait voulu appeler quelqu'un qui s'y connaissait mieux qu'elle, au hasard son entraîneur, ou même son père, mais elle avait peur que prendre son téléphone n'entraîne un nouveau mouvement brusque de la part de celui qui était devenu son patient. S'il faisait un geste trop violent pour l'empêcher de téléphoner et que sa blessure se rouvrait, Ellia était bonne pour un nouveau coup de panique. Alors elle serra les dents, plaça son bandage, et pria pour que son absence totale d'assistance ne l'ai pas conduite à faire trop n'importe quoi. Au moins, il n'avait pas l'air d'avoir trop souffert, gérer des fractures lui avait au moins enseigné la douceur.
Elle laissa échapper un discret soupir de soulagement une fois son travail fini. Elle ne releva même pas le "merci" à peine articulé, qui aurait pu en outrer plus d'un vu le quasi-miracle de son intervention ; c'était compréhensible. Vu son état, c'était même déjà surprenant qu'il ait eu la force de prononcer toutes les phrases qu'ils avaient réussi à échanger jusque là. Par contre, elle grimaça une moue sceptique quand elle le fit tenter de se relever. Il avait l'air bien plus faible qu'elle ne l'avait imaginé au départ. Ça ne fit que titiller davantage son instinct protecteur.
Deux parties d'elle se battaient en duel. Celle, encore un peu paniquée, qui louchait sur sa blessure entre deux regards vers son visage, et qui voulait juste le soigner, s'assurer qu'il survivrait et l'avoir bien soigné. Et la part d'elle protectrice, qui fonctionnait à la détermination et qui était presque prête à le frapper pour l'empêcher de s'en aller. Il tenait à peine debout et il rasait les murs, et elle avait peur que l'expression fugace de colère qu'elle avait vu sur son visage ne soit le signe qu'il rechercherait la personne qui l'avait poignardée. Personne qui disposait sûrement encore d'une arme et qui réduirait ses effort à néant.
La main d'Ellia se posa fermement mais sa violence à côté du visage du jeune homme pour l'empêcher d'avancer davantage – si avancer n'était pas un terme beaucoup trop fort pour définir son rasage de murs. Son bras se dressait entre lui et la sortie de la ruelle, et elle plissa les yeux. Les deux parts d'elle s'étaient mises d'accord pour un juste milieu entre le besoin qu'il survive et sa détermination protectrice naturelle. "Tu plaisantes, là ? Tu tiens à peine sur tes jambes." Son ton n'était pas froid, mais il était sec, comme s'il ne souffrait aucune contradiction. Non, elle ne le laisserait pas partir, il pouvait insister autant qu'il voulait. Contrairement à sa volonté de ne pas appeler l'hôpital, qu'elle pouvait respecter, celle-ci était hors limite.
"Si tu pars tout seul, tu vas t'effondrer dans la neige au bout de trois mètres." La bonne façon de mourir de froid. Déjà qu'il avait l'air d'avoir souffert de son petit séjour dans la neige de la ruelle... Sans compter qu'une chute rouvrirait sûrement la plaie. Elle fronça les sourcils le temps de réfléchir, et un argument lui vint. Si l'hôpital était si proscrit que ça, peut-être que... "Sans compter que si tu pars comme ça, le premier flic ou médecin qui te croise t'enverra direct à l'hôpital, avec des questions en prime."
Si ça ne suffisait pas à le convaincre de l'écouter cinq minutes, ou de s'arrêter, elle pourrait tenter de l'arrêter par la force, il n'avait sûrement pas beaucoup de résistance. Mais elle préférait ne pas avoir à recourir à ça. "Il faut que tu te reposes... Laisse-moi t'aider..." Elle avait techniquement assez de force pour le soutenir le temps de le ramener chez lui... ou, si c'était moins loin, chez elle, après tout il n'avait pas l'air bien dangereux. Et s'il l'était en temps normal, vu son état actuel, elle aurait pu l'assommer d'une pichenette. Tiens, elle tenterait ça, s'il jouait encore les réticents. L'assommer. Il y avait plus doux, comme solution,mais bon en dernier recours... Quoique ça impliquerait sûrement de le traîner derrière elle, il y avait plus pratique. Rester à espérer qu'il ne refuserait pas trop longtemps.
Nick parle en #F5634A et en #BD171C (anglais) Ellia parle en #A98BA0 et en #A73A94 (anglais)
J’allais très lentement. Plus que je l’aurais voulu. Le mur n’avait pas vraiment de prises malgré qu’il soit fait de pierres, mais ce n’était pas grave. L’important n’était pas là puisqu’il me permettait de me soutenir alors que je tenais encore mon abdomen au niveau de ma blessure. De toute façon, que ce soit d’une façon ou d’une autre, il fallait que je rentre chez moi. Enfin… chez moi… Au pensionnat. Je ne pouvais décemment pas appeler cela ma “maison” étant donné que je n’en avais pas. Mais, de toute façon, on ne me laissa pas poursuivre ma route à peine entamée.
La jeune femme plus petite que moi, maintenant que j’étais debout, semblait plus déterminée qu’effrayée alors qu’elle me barrait le chemin de son bras. Là, elle me demanda si je plaisantais en argumentant le fait que je tenais à peine sur mes jambes. Je me sentis incapable de soutenir son regard, surtout qu’elle avait raison, fort malheureusement. Je le détournai donc en ne répondant pas. D’autant plus qu’elle était sèche dans le ton qu’elle employait. Je n’aimais pas ça. J’avais l’impression que mon coeur se déchirait entre raison, devoirs et sentiments à chaque rencontre et, cette fois, j’avais encore plus de raisons de l’être. Moi qui voulait mourir par les mains de mon bourreau me voyait face à une personne déterminée à sauver ma misérable vie.
Comme si cela ne suffisait pas, elle me rappela la façon dont je m’étais fait cette blessure. Mourant de froid dans la neige, j’avais été trouvé par quelqu’un me rappelant quelle place était la mienne. Je n’aimais tellement pas cela… Mais le pire venant d’elle fut la raison qu’elle amena sous un argument de taille : le fait que quelqu’un de moins compréhensif qu’elle pourrait me mener à l’hôpital en me voyant en si mauvais état.
*Non… Pas ça... *
L’idée qu’on me trouve à l’hôpital et ce qu’on pourrait me faire par la suite me faisait mal. Vraiment mal. Mais était-ce plus que ce sentiment terriblement lancinant qui me torturait alors que je l’écoutais ? J’étais comme perdu alors que je savais parfaitement où je me trouvais. Plus encore lorsqu’elle me fit part qu’elle voulait m’aider parce qu’il fallait que je me repose. Sans doute était-ce une certitude. Je le ressentais aussi. J’avais perdu trop de sang.
*Non, je ne peux pas accepter…*
- Où veux-tu m’amener ?
Mais quelle incohérence !! Je ne voulais pas lui demander cela. Il ne fallait pas que j’accepte son aide. Pire encore, il ne fallait pas que je me raccroche à qui que ce soit. Pourtant, c’était ce que j’étais en train de faire avec mon esprit confus et mon coeur si lourd qu’il aurait pu me faire tomber plus bas que terre.
Qu’est-ce qui était le mieux ? Éviter d’aller à l’hôpital et ainsi les foudres de mes patrons, prenant ainsi le risque qu’on lui fasse du mal ? Ou aller seul jusqu’à l’académie en prenant le risque de ne pas mettre à exécution ma vengeance ? Chacune de ces possibilités, comme les autres, avait son lot de souffrances. Que ce soit pour elle, ou pour moi. Quoi que peut-être plus pour moi que pour cette jeune femme…
*Qu'est-ce qu'je peux être égoïste…*
Je me sentais extrêmement con et déchiré. Je ne savais plus du tout ce qui était le plus important alors qu’il était évident que j’en connaissais la réponse.
Aussi sûre d'elle et ferme qu'elle ait l'air d'être, Ellia se sentait toujours un peu perdue. Son instinct de protection avait pris le dessus pour le moment, empêchant les questions et l'angoisse de se bousculer dans sa tête, mais il avait aussi encapsulé ses émotions brutes. Ses interrogations. Tout ce qui faisait fonctionner autre chose dans son cerveau que "je dois le protéger". Elle ne savait rien de lui. Elle n'arrivait même pas à déterminer s'il lui faisait de la peine, si elle s'inquiétait – probablement un peu des deux – ou pourquoi elle pouvait bien ressentir de l'empathie pour cet inconnu croisé dans cette ruelle. Quoique la réponse n'était pas bien compliquée, dans le fond. Malgré toute l'indifférence qu'elle pouvait afficher face au monde et la part sombre en elle, il lui était impossible de laisser quelqu'un dans cet état alors qu'elle pouvait agir. Alors agit.
Elle eut du mal à trouver les mots pour le faire réagir. Sa présence l'empêchait d'avancer aussi sûrement que si elle avait été un mur, mais il y avait le bloquer dans sa progression et le convaincre de prendre du repos. Mais il évitait son regard. Elle ne chercha pas à comprendre pourquoi, elle ne cherchait plus à comprendre grand chose. L'important était qu'il soit en sécurité, qu'il se remette, que ses soins n'aient pas été vains. Et sa voix intérieure déterminée s'apaisa légèrement quand elle le vit tiquer à son dernier argument. Un éclat dans son regard, comme si le mot hôpital avait réveillé quelque chose. Au fond d'elle, elle sut que c'était ce dernier élément qui l'avait convaincu. Tant mieux, ça lui éviter de considérer trop longtemps l'option de l'assommer pour le traîner en sécurité.
Sa question lui laissa cependant un moment de silence, aussi bien intérieur qu'extérieur. Où l'amener ? Elle y avait réfléchi mais, à vrai dire, certaines options étaient compliquées. Sa chambre n'était pas loin, un petit quart d'heure en métro, mais il fallait d'abord rejoindre le métro, et dans son état ça risquait d'être compliqué ; et en plus de ça, il y avait aussi la réflexion futile qu'il n'avait peut-être pas le droit ou l'envie de se retrouver dans les dortoirs des filles. Facile à résoudre étant donné qu'elle avait la clef de la chambre de son frère. "Tu... habites loin ? Sinon j'ai une chambre à l'université, ou alors..." Et tout tenait dans ce "ou alors".
L'ex petite amie de son frère et mère de son neveu, Anko n'habitait pas loin. À quelques rues d'ici, en vérité. De ce qu'elle en savait, le fils de Nick était probablement à l'école, et la jeune femme devait travailler à cette heure-là, mais le risque n'était pas nul. L'appartement serait sûrement vide, il était vraiment proche, et elle avait les clefs. Mais si elle se trouvait nez à nez avec Anko ou avec n'importe quel membre de sa famille, la situation deviendrait vite compliquée... enfin plus compliquée qu'elle ne l'était déjà. "Une de mes amies habite à quelque pas d'ici. Il n'y a personne chez elle à cette heure et j'ai les clefs. Mais je ne sais pas quand elle rentrera."
Dans tous les cas, la direction était la même ; que ce soit le métro qui les ramènerait à l'université ou l'appartement. Alors Ellia abandonna son rôle de barrière humaine pour se placer à côté de lui. "Appuie-toi sur moi. Ne t'en fais pas, je suis assez forte pour te soutenir." Elle l'avait déjà fait plusieurs fois, aider des gens blessés à avancer en se tenant à ses épaules. Des blessures moins effrayante vu qu'il s'agissait le plus souvent de fractures ou d'entorses, mais elle était habituée à ce qu'on s'appuie sur elle de ton son poids pour marcher. Et puis elle était plus petite que lui, ça rendrait l'appui plus confortable, sans trop tirer sur sa blessure. Car si l'amener quelque part où il serait en sécurité était important, c'était encore mieux qu'il soit en un seul morceau à la fin. Essentiel, même.
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Pendant un moment, je crus qu’elle allait abandonner l’idée puisqu’elle garda le silence. Pourtant, elle ne s’enleva pas de mon chemin. Au contraire, elle sembla grandement réfléchir à la question que je venais de lui poser. N’avait-elle donc aucune idée lorsqu’elle m’avait proposé de m’emmener quelque part ? C’était tellement étrange… Mais je n’en fis pas part. Non seulement je n’en avais pas la force, mais en plus cela ne servirait à rien à part nous mettre en conflit. A quoi bon puisque, de toute façon, je ne pouvais pas me battre éternellement dans cet état ?
Finalement, je finis par avoir deux propositions. Le fait qu’elle me laisse le choix sur l’endroit où je voulais aller ne me laissait rien supposer de bon. J’écoutai néanmoins avec toute l’attention dont j’étais capable. Soit nous allions à l’université, soit chez une de ses amies. Ne voulant pas déranger plus d’étranger que je ne le faisais déjà, sans parler de la mort possiblement future de toute une famille par ma faute, mon choix ne fut pas difficile à faire. Je soupirai donc et, espérant que l’université en question ne soit pas loin de mon campus, je lui répondis en la regardant dans les yeux :
- Allons à l’université…
Fatigué, et complètement désespéré par ma propre faiblesse, je la laissai se détacher de son rôle de barrière entre moi et la liberté sans bouger. A quoi bon ? De toute façon puisque je n’avais aucun moyen de me détacher de mon mur sans tomber. Et elle dû s’en rendre compte étant donné qu’elle me proposa son aide. A moins que ce soit le fait qu’elle ait vu ma blessure ? Je n’en savais rien et n’étais pas sûr de vouloir le savoir de toute façon. A nouveau, je soupirai avant d’obtempérer. Puis, doucement, je m’appuyai sur elle. Malgré ses dires (comme quoi elle serait assez forte pour me porter), je ne mis pas tout mon poids sur elle. Certes, je n’étais pas bien, mais je refusais de lui faire porter un assassin.
Luttant contre la torpeur et la douleur, je marchai en m’aidant du maintient qu’elle me donnait pour tenir en équilibre. Nous nous dirigions vers le métro, transport que je n’avais encore jamais prit, préférant nettement marcher et voir la ville en surface. J’étais bien trop dans l’ombre pour me permettre d’aller de moi-même sous terre… Pourtant, je ne fis rien pour l’empêcher de me faire descendre les escaliers menant dans les tunnels froids de la ville.
N’ayant pas d’argent pour acheter le ticket, et parce que je ne voulais pas faire des allers-retours inutiles, je m’assis sur un banc en face des rails en attendant ma sauveuse. Puis, ensemble, nous attendîmes notre métro. Je ne connaissais pas du tout les arrêts, ce fut la carte qui me permit de me rendre compte qu’on rentrait à l’académie que je connaissais. Coïncidence ou elle me connaissait sans que je le sache ? En tous les cas, par cette occupation qui n’avait pas été voulue au départ, je lui demandai :
- Toi aussi, tu fais partie de l’Académie Chisê ?
L’info en elle-même n’était pas importante, mais au moins cela me permettrait peut-être de me rassurer sur le lien que nous avions. J’espérais tout de même que ma faiblesse et ma maladresse ne lui poseraient pas de problèmes.
Ce n’était pas forcément une bonne chose, mais j’avais totalement baissé ma garde. J’étais totalement hors d’état de combattre ou me défendre. Peut-être qu’une petite dose d’adrénaline aurait suffit à changer la donne, mais sans cela ce n’était pas le cas. Mais ce n’était pas grave. Pour ce que je voulais faire, de toute façon, ce n’était pas comme si ma survie allait changer grand-chose… Il en était de même si on cherchait à me poser des questions. Non seulement il n’était pas sûr que la personne obtienne une réponse, mais en plus je n’étais pas vraiment en état de me débattre. Quoique cela dépendait si je risquais vraiment quelque chose ou non, ou si quelqu’un était en danger par ma faute. Tant de variables incontrôlables…
Néanmoins, il sembla que rien de tout cela se passa, que ce soit avant ou pendant le voyage en métro. Et le calme ne m’empêcha pas de rester un minimum attentif à mon environnement. Ne plus être sur ses gardes ne voulait clairement pas dire se laisser aller chez moi. Ce fut grâce à cela que je pus noter que notre destination n’était autre que l’académie Chisê. Et le sursaut de la jeune femme à mes côtés. Enfin, ce geste ne m’étonna guère contrairement à la surprise que je lus sur ses traits le temps de quelques secondes. Je ne la compris pas du tout, même lorsqu’elle sembla comprendre le sens de ma question et y répondre sans détour. Elle me retourna même mon interrogation, ce qui me fit soupirer presque imperceptiblement. Seul mon visage alors que je fermai les yeux avant de regarder à nouveau devant moi aurait pu le faire deviner. Puis, d’une voix morne, je lui répondis comme si c’était une évidence :
- J’suis au lycée.
J’étais presque certain que cela aurait pu mettre fin à la discussion. Mais il n’en fut rien : après peu de temps de silence seulement troublé par les passagers qui nous entouraient et le bruit du transport en commun, elle me demanda si je préférais qu’elle m’accompagne jusque dans ma chambre. Sincèrement, je me mis à peser le pour et le contre avant d’accepter. J’avais un peu peur de croiser mes colocataires, même si je n’avais eu, pour le moment, aucun problème avec eux. Finalement, je décidai de lui laisser le choix, lui répondant simplement :
- Si tu n’as pas peur de réveiller une ou deux âmes endormies dans la chambre, je veux bien.
Etait-ce tous les universitaires qui avaient leur chambre à eux, ou les lycéens pouvaient-ils en avoir une aussi ? Je n’en savais rien. Ou, plus exactement, je n’avais pas cherché à savoir avant qu’elle n’émette cette hypothèse. Pour moi, cela serait sans doute plus simple si je venais à devoir m’éclipser dans la nuit en catimini…
A la fin du voyage, l’aide de la jeune femme pour me relever fut grandement appréciée. Je n’étais pas prêt à l’avouer mais j’étais tout engourdis et avais grandement envie de dormir. Vu ma perte de sang, ce n’était pas très étonnant, au fond. Ce fut pour cela également que je fus soulagé de prendre les escalators plutôt que les escaliers. C’était moins rapide à mon goût, mais je ne l’aurais pas été plus dans mon état. Puis j’allais devoir marcher jusqu’à l’académie, ce qui n’était pas une mince affaire.
*Dire que j’avais voulu me débrouiller seul… Je ne suis vraiment qu’un con.* pensai-je alors qu’on atteignait enfin l’académie après un temps indéfini de marche.
Certes, il n’y avait pas eu beaucoup à faire entre la sortie de métro et la destination finale, mais mes jambes étaient trop flageolantes pour que je puisse être aussi assuré qu’à l’accoutumée. Il était beau le Faucheur… Enfin, ce n’était pas comme si on avait fait beaucoup d’éloges à ce propos. … Bref !
N’ayant pas beaucoup d’autres choix que me laisser guider, je m’en remis finalement entièrement à la jeune femme qui me soutenait. M’avait-elle déjà donné son prénom ? Et m’étais-je présenté ? Non, il ne me semblait pas. Pourquoi en avais-je besoin à ce moment précis ? C’était n’importe quoi ! Totalement n’importe quoi. Pourtant, je ne parvenais pas à me défaire à ce genre de formalités que j’avais eus envie d’apprécier en m’inscrivant dans cette école. Peut-être que les lieux me rappelaient quel était le but que je m’étais fixé dans ma vie : vivre comme une personne normale sans les chaînes me liant à la mafia japonaise.
Ellia avait encore du mal à croire qu'elle l'avait convaincu. Bon, elle lui avait un peu forcé la main, difficile de le nier, mais comment aurait-elle pu faire autrement ? Hors de question qu'elle l'abandonne là pour qu'il meure dans la neige. Il répondit après un soupir, faisant finalement le choix de l'université. D'un côté, ça l'arrangeait : si jamais il avait d'autres problèmes un jour et personne vers qui se tourner, autant qu'il sache vraiment où la trouver, plutôt que d'avoir l'adresse d'une illustre inconnue en ville qui ne saurait pas quoi faire pour lui. Même si ça impliquait qu'il veuille demander de l'aide et, vu ce qu'elle savait de lui pour le moment, ça lui semblait peu probable.
Veillant bien à ne pas le blesser, elle l'aida à marcher dans les rues de la ville, s'assurant de rester à l'écart des grandes avenues pour que personne ne leur pose trop de questions, mais sans lui faire un trop gros détour pour autant. Heureusement, la station de métro n'était pas bien loin. Elle prit un ticket sans même lui demander s'il avait de quoi le payer : ce n'était pas bien cher et elle avait mieux à faire que de réclamer quelques pauvres yens à la personne qu'elle sauvait, sans compter qu'atteindre un éventuel portefeuille avec sa blessures lui aurait peut-être demandé des mouvements supplémentaires pas forcément recommandés. Elle préféra le laisser s'installer sur un banc pour ramener deux titres de transport, s'asseyant à ses côtés juste après. Pendant tout le temps d'attente et le trajet, elle garda un œil prudent sur les personnes proches d'eux, assises en face ou pas très loin ; quelles que soient ses raisons, elle avait compris que son protégé ne tenait pas vraiment à ce qu'on s'intéresse de trop près à sa blessures. Ellia veillait donc à faire détourner les yeux à tous ceux qui lui semblaient un peu trop curieux ou inquisiteurs, préférant centrer l'attention sur elle que sur lui.
Le trajet depuis la ruelle s'était déroulé tellement silencieusement qu'elle sursauta presque en l'entendant parler. Son cerveau analysa la phrase dans le désordre. D'abord, elle se demanda comme il pouvait savoir ça, avant que le "toi aussi" ne se fraye un chemin jusqu'à ses méninges. "Oh. Oui, je suis des cours à l'université avec mon frère. Tu y es aussi ?". La coïncidence était surprenante. De toutes les personnes qui auraient pu s'arrêter pour l'aider, il était tombé sur quelqu'un de la même école. Mais au-delà de ça, ça avait un côté pratique : elle n'aurait peut-être pas besoin de lui prêter sa chambre ou celle de Nick pour se reposer, s'il en avait une à lui. "Tu veux peut-être que je t'accompagne à ta chambre, du coup ?" Ça avait le désavantage de ne pas lui laisser d'adresse où la trouver en cas de problème mais, au pire, elle avait encore ses cartes de visite d'athlète olympique, elle n'avait pas changé de numéro de téléphone depuis.
Leur arrêt approchant, elle se leva en se penchant vers lui pour qu'il puisse s'appuyer à nouveau sur son épaule, prête à l'aider s'il faisait mine de vaciller ou d'être en difficulté. Il n'y avait pas trop de distance entre l'arrêt de métro et l'académie, il pourrait se reposer ensuite. Elle l'aida à rejoindre les escalators, préférant ne pas lui imposer un deuxième escalier. Elle croisa les doigts jusqu'à ce qu'ils soient dans la rue pour qu'aucun contrôleur ne se retrouve sur leur route, consciente qu'ils auraient sûrement posé des questions sur sa blessures, puis elle entreprit de le soutenir sur les derniers mètres qui les séparaient de leur destination.
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Ce n’était pas forcément une bonne chose, mais j’avais totalement baissé ma garde. J’étais totalement hors d’état de combattre ou me défendre. Peut-être qu’une petite dose d’adrénaline aurait suffit à changer la donne, mais sans cela ce n’était pas le cas. Mais ce n’était pas grave. Pour ce que je voulais faire, de toute façon, ce n’était pas comme si ma survie allait changer grand-chose… Il en était de même si on cherchait à me poser des questions. Non seulement il n’était pas sûr que la personne obtienne une réponse, mais en plus je n’étais pas vraiment en état de me débattre. Quoique cela dépendait si je risquais vraiment quelque chose ou non, ou si quelqu’un était en danger par ma faute. Tant de variables incontrôlables…
Néanmoins, il sembla que rien de tout cela se passa, que ce soit avant ou pendant le voyage en métro. Et le calme ne m’empêcha pas de rester un minimum attentif à mon environnement. Ne plus être sur ses gardes ne voulait clairement pas dire se laisser aller chez moi. Ce fut grâce à cela que je pus noter que notre destination n’était autre que l’académie Chisê. Et le sursaut de la jeune femme à mes côtés. Enfin, ce geste ne m’étonna guère contrairement à la surprise que je lus sur ses traits le temps de quelques secondes. Je ne la compris pas du tout, même lorsqu’elle sembla comprendre le sens de ma question et y répondre sans détour. Elle me retourna même mon interrogation, ce qui me fit soupirer presque imperceptiblement. Seul mon visage alors que je fermai les yeux avant de regarder à nouveau devant moi aurait pu le faire deviner. Puis, d’une voix morne, je lui répondis comme si c’était une évidence :
- J’suis au lycée.
J’étais presque certain que cela aurait pu mettre fin à la discussion. Mais il n’en fut rien : après peu de temps de silence seulement troublé par les passagers qui nous entouraient et le bruit du transport en commun, elle me demanda si je préférais qu’elle m’accompagne jusque dans ma chambre. Sincèrement, je me mis à peser le pour et le contre avant d’accepter. J’avais un peu peur de croiser mes colocataires, même si je n’avais eu, pour le moment, aucun problème avec eux. Finalement, je décidai de lui laisser le choix, lui répondant simplement :
- Si tu n’as pas peur de réveiller une ou deux âmes endormies dans la chambre, je veux bien.
Etait-ce tous les universitaires qui avaient leur chambre à eux, ou les lycéens pouvaient-ils en avoir une aussi ? Je n’en savais rien. Ou, plus exactement, je n’avais pas cherché à savoir avant qu’elle n’émette cette hypothèse. Pour moi, cela serait sans doute plus simple si je venais à devoir m’éclipser dans la nuit en catimini…
A la fin du voyage, l’aide de la jeune femme pour me relever fut grandement appréciée. Je n’étais pas prêt à l’avouer mais j’étais tout engourdis et avais grandement envie de dormir. Vu ma perte de sang, ce n’était pas très étonnant, au fond. Ce fut pour cela également que je fus soulagé de prendre les escalators plutôt que les escaliers. C’était moins rapide à mon goût, mais je ne l’aurais pas été plus dans mon état. Puis j’allais devoir marcher jusqu’à l’académie, ce qui n’était pas une mince affaire.
*Dire que j’avais voulu me débrouiller seul… Je ne suis vraiment qu’un con.* pensai-je alors qu’on atteignait enfin l’académie après un temps indéfini de marche.
Certes, il n’y avait pas eu beaucoup à faire entre la sortie de métro et la destination finale, mais mes jambes étaient trop flageolantes pour que je puisse être aussi assuré qu’à l’accoutumée. Il était beau le Faucheur… Enfin, ce n’était pas comme si on avait fait beaucoup d’éloges à ce propos. … Bref !
N’ayant pas beaucoup d’autres choix que me laisser guider, je m’en remis finalement entièrement à la jeune femme qui me soutenait. M’avait-elle déjà donné son prénom ? Et m’étais-je présenté ? Non, il ne me semblait pas. Pourquoi en avais-je besoin à ce moment précis ? C’était n’importe quoi ! Totalement n’importe quoi. Pourtant, je ne parvenais pas à me défaire à ce genre de formalités que j’avais eus envie d’apprécier en m’inscrivant dans cette école. Peut-être que les lieux me rappelaient quel était le but que je m’étais fixé dans ma vie : vivre comme une personne normale sans les chaînes me liant à la mafia japonaise.
Il avait l'air épuisé. Rien d'étonnant à ça, il aurait dû être dans un lit à se reposer, par traîné d'un escalier à l'autre et d'un métro à l'autre. L'air libre lui ferait sûrement du bien, mais elle s'inquiétait toujours. La peur qu'il s'effondre subitement à cause de la faiblesse engendrée par la blessure ne la quittait pas, et elle vérifiait régulièrement en tournant la tête vers lui s'il marchait régulièrement, sans risque de s'écrouler. Il avait l'air très mal en point. Elle retint son bras autour de ses épaules, au cas où il glisserait, et lutta contre la voix intérieure qui voulait presser le pas pour le faire arriver plus vite à son lit. Ça aurait été totalement contre-productif et, heureusement, son esprit logique était assez conscient pour l'en empêcher.
C'était un lycéen de son école. Un lycéen... comment s'était-il retrouvé avec une telle blessure ? Au lycée, il aurait dû vivre une vie normale, aller en cours, peut-être se blesser en faisant du sport, mais certainement pas avoir une telle plaie ouverte. L'image de son frère, père avant d'être majeur, effleura son esprit un instant. Qu'était-ce que la normalité, après tout ? Personne chez les Ballentine n'était normal, il suffisait de voir leurs parents ; pouvait-elle vraiment juger de la normalité d'un garçon qu'elle ne connaissait pas ? Elle ignorait jusqu'à son nom, après tout. Mais tout de même... Comment avait-il bien pu se retrouver avec une telle blessure ?
Quand ils approchèrent de l'Académie, elle se concentra du mieux qu'elle put pour ne pas laisser ses pensées lui échapper. Il avait bien parlé de colocataires ? Ce n'était peut-être pas une bonne idée de le ramener dans sa chambre, dans ce cas. Il avait l'air de vouloir éviter les questions, et même si ça risquait d'en soulever d'autres. Que préférerait-il : que ses colocs lui demandent comment il s'était blessé, ou que des filles se demandent ce qu'ils faisaient dans la chambre d'Ellia Ballentine ? L'une des questions était moins dérangeante que l'autre, alors elle préféra faire le choix à sa place. Elle se dirigea vers les dortoirs de l'université. Il serait plus tranquille dans sa chambre, il pourrait dormir plus longtemps sans être dérangé et... elle aurait une bonne raison de rester. Parce que s'assurer qu'il allait bien ne s'arrêtait pas à juste le laisser se reposer dans un lit ; il risquait toujours une possible crise dans son sommeil.
Elle fit de son mieux pour le soutenir dans les escaliers, sa chambre ayant la malchance de ne pas se trouver au rez-de-chaussée. Elle sortit les clefs de sa poche pour déverrouiller la porte et aider le garçon à s'installer dans son lit, d'abord à s'asseoir, puis à s'allonger. "Repose-toi." souffla-t-elle. "Personne ne viendra te trouver ici." C'était tout ce qu'elle pouvait dire pour essayer de le convaincre de dormir.
Ellia s'assit au sol, à côté du lit, gardant un œil sur lui en appuyant sa tête contre le mur. A quel moment s'était-elle retrouvée dans ce genre de situation ? Avec un garçon blessé dans son lit. Est-ce qu'il dormait ? Elle n'en était pas sûre. Elle eut un sourire ironique en imaginant la réaction des gens s'ils avaient qu'elle avait amené un garçon dans sa chambre. Pas du tout pour le genre de raisons qu'ils pourraient croire, mais les rumeurs ne s'arrêteraient pas à ça. Bah, qu'ils disent ce qu'ils voulaient. L'important, pour elle, c'était qu'il avait beaucoup plus de chances de s'en sortir que dehors, blessé, dans la neige.
Elle étouffa un bâillement. Le poids de l'entraînement tirait sur ses muscles et toutes les émotions qu'elle venait de vivre n'aidaient pas son énergie à rester élevée. Elle ferma les yeux plusieurs fois, sentit sa tête dodeliner un peu. Je veux veiller sur lui... S'il lui arrive quelque chose pendant qu'il dort... Mais sa résolution ne fut pas assez forte. Elle posa les yeux sur lui une dernière fois. Il n'avait pas l'air de souffrir. Cela suffit à éteindre la dernière alarme qui résonnait dans son esprit. Avant de pouvoir vraiment lutter, elle sentit le côté de sa tête se poser contre le matelas et le peu d'énergie qu'il lui restait s'évanouit.
Nick parle en #F5634A et en #BD171C (anglais) Ellia parle en #A98BA0 et en #A73A94 (anglais)
The Wiesel Den 
Ruri pour 
