[2018] L'inca et le romain

Mon entrée en fanfare était signe de puissance et de confiance en soi, mais je me rendis vite compte que l’ambiance du bal et en plus le monde ne me mettait franchement pas à l’aise. J’étais presque tétanisé par la peur, je n’avais vu que deux ou trois visages familier mais pas celui de Tsume, elle n’était peut-être pas arrivée ou alors elle portait un masque. Si je dois soulever chaque masque que je vois, je ne suis pas sorti de l’auberge …

-Tss … je n’aime pas ct’ambiance …

Ne voulant pas rester plus longtemps, je fis signe à mes camarades et a deux trois amis que je ne resterais pas plus longtemps, j’ai même pu justifier un appel téléphonique vu que quelqu’un m’appelé vraiment. Je ne perdis pas une seconde de plus pour sortir et de m’assoir sur un banc proche de l'auditorium.

-Oui, c’est qui ? Douze c’est toi ? Ca fait une paye …

Echangeant des « banalités » avec le fameux douze, je ne pouvais prendre mon temps pour fumer car je n’avais pas pensé à prendre un paquet de cigarette, mais ce n’est pas le problème. Douze avait pris l’initiative de me contacter pour parler affaire. Effectivement, celle de mon petit business était plutôt évolutive et dans une croissance explosive. Tellement explosive que le chiffre d’affaire avait dépassé les limites que j’avais fixé avant de venir en Angleterre.

-On fait quoi patron ?

-Mmh … on lance le plan A en avance. Achète des filiales pharmaceutiques et s’il reste du fric déboite sur l’immobilier. Nous devons agrandir notre « société » le plus vite possible.

-Bien.

Et il raccrocha. Ce fût court, mais mon piège pour détruire ma famille commençait à prendre forme, je pourrais ainsi me venger du traitement que j’ai subis et je pourrais offrir à Tsume une vie décente … en y pensant, je ne l’ai toujours pas aperçu. Devrais-je retourner à l’intérieur ? La douceur de la nuit était plus agréable à supporter que la chaleur et le bruit de l'auditorium, mais bon, il faut retrouver la belle domestique. Quand j’y pense, ne l’avais-je pas loupée pendant l’arrivée de la troupe ? C’est une piste à exploiter.

J’ai dû me résigner à me lever et retourner dans l'auditorium, mais si la vie était si facile, tout le monde serait heureux. Mais rien n’est facile.

J’ai croisé beaucoup d’élèves sur la route, certains d’entre eux venaient me voir pour de la marchandise que je pouvais donner et ils furent heureux quand ils partaient avec, pour les autres, c’était moi qui allait les voir, j’avais besoin de savoir où était ma dulcinée, les premiers ne savaient pas ou elle était mais c’est un petit groupe de dinde blonde qui m’indiqua qu’elle était dans un coin de l'auditorium l’air grognon voir agressif. J’avais merdé dès le début … bravo l’artiste.

-Merde …


Me précipitant à l’intérieur et en bousculant potentiellement les élèves, j’étais de nouveau dans l'auditorium à la recherche de la belle Tsume. C’était comme trouvé Charlie dans la BD enfin … Waldo, mais ce n’est pas la question. Regardant dans chaque coin et recoin de l'auditorium, j’ai eu du mal à repérer la petite domestique, enfin si, mais elle n’était plus une bonne, mais une magnifique inca si mon costume était un conquistador espagnol, le blague était parfaite.

-Bon … comment je vais faire pour rattraper le coup.

D’un pas chancelant et peu rassuré, j’avançais vers ma petite inca qui, même si ce n’est qu’une simple impression, évitait de croiser mon regard. Ce qui veut dire, qu’elle m’avait déjà aperçu depuis un moment sans que je la remarque. Putain Kaled, t’es vraiment le roi des glands.

-Salve*  Tsume, dis-je en frappant ma poitrine pour faire un salut militaire romain.

Etrangement, je sens que je vais en prendre plein la gueule.

(à prononcer Salvé, cela veut dire « Bonjour/salut »)

La soirée avait bien avancée quand je vis Kaled en train de chercher quelqu'un dans la foule. Tiens, monsieur se serait-il rappelé qu'il avait invité une fille à l'accompagner au bal, à venir danser et prendre un peu de temps pour elle ? Je décidais de le laisser se débrouiller, restant tranquillement assise à regarder les personnes que je connaissais s'amuser. Cela me suffisait, n'est ce pas ? Après tout, Garcia était venu, me voyant seule, pour me proposer de participer à une petite valse mais j'avais refusé, voyant bien qu'il préférait la compagnie de la jolie blonde qui ne le quittait pas du regard. Son offre était gentille et pas faite par pitié, je le connaissais, mais cela y ressemblait un peu trop. J'eus quelques autres propositions mais je les ai toutes refusées, même celle qui m'a été faite alors que le général romain, ou je ne sais quel nom on leur donnait, cherchait une vénézuélienne.

Je comprenais, en partie, le mal qu'il du avoir à me localiser, s'il me cherchait grâce à ma chevelure. Il est vrai qu'elle est d'ordinaire d'un joli vert en harmonie avec mon regard de jade mais ce n'était pas le cas aujourd'hui. J'avais décidé de venir avec la couleur naturelle, noire, de mes cheveux, car cela n'aurait pas été conforme avec ce peuple des andes qui ne devait pas connaître la manière de se teindre les cheveux.

Finalement, il me repéra et se dirigea vers moi, me saluant d'une manière bizarre avec un mot que je ne connaissait pas. Salvé ? Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Surement un mot romain. JE le regardais, me levant car il n'est pas poli d'être assise quand votre interlocuteur est debout. J'envisageais un instant de faire comme si je ne le connaissais pas mais cela semblait si puéril, alors que je venais d'achever mes études. Je me contentais de lever la tête, le regardant dans les yeux avec une expression surement "agacée" sur le visage.

"Buena tarde, señor romano Kaled*. Comment allez vous ? La soirée fut aggréable pour vous ?"

Je ne pu retenir un peu de colère dans ma voix, ce qui m'énervait un peu car j'aime à me maîtriser, comme se le doit toute femme de chambre bien éduquée. Je ne comprenais pas car seul Kaled avait ce don de me mettre dans cet état. Maintenant, j'attendais de savoir comment il allait s'excuser, expliquer de m'avoir fait poireauter et passer pour une idiote devant tout le monde avant de choisir entre lui pardonner ou le gifler et partir pour regagner ma chambre.

[Traduction : Bonsoir, monsieur le romain Kaled*]