Enfin, un moment de détente... ? [PV Cassy Andrews]

Mathieu sentit d’abord ses lèvres pétiller. Puis cette sensation se propagea dans ses pommettes, ses joues, ses oreilles, puis sur sa nuque, qu’il sentit frémir. Il ressentit alors une nostalgie, et les sons, les odeurs, l’air sur sa peau, tout lui rappela l’été, le mois d’août, les falaises de Normandie, où il avait tant hésité à embrasser Cassy. Là, il était perdu dans l’instant un instant qui lui aurait accroché un sourire niais sur le visage si ses lèvres n’étaient pas monopolisées par la jeune femme.

Celle-ci lui rendit alors son baiser, et Mathieu eut du mal à réprimer un nouveau frisson dans son cou. Lorsqu’il sera redescendu de son petit nuage, il se promettra d’aller remercier le technicien qui avait mal fait son travail. Mais pour l’heure, il ne pensait à rien, sa raison avait laissé ses sentiments prendre les manettes.

Enfin, Cassy se sépara légèrement de lui, et il rouvrit les yeux. Il devait afficher un regard un peu bête, entre la joie d’avoir réussi à franchir le pas, le soulagement de s’être libéré d’un poids gigantesque pour lui, et la tristesse de ne voir leur étreinte se prolonger. Il gardait ses yeux plongés dans les yeux émeraudes de l’actrice, et l’entendit murmurer :

« Tu sais qu’on va devoir… en parler ? Va y avoir… plein d’inconvénients pour toi. Tu es sûr de pouvoir gérer ? »

Il comprenait, il avait déjà réfléchi à tout cela. Après leur virée en France, Mathieu s’était imaginé des tonnes de scénarios possibles. Il avait pensé à un paparazzi collant qui aurait retrouvé sa trace, à leur moniteur d’escalade un peu trop bavard, à une personne travaillant à l’hôtel qui aurait vendu la mèche,… De manière un peu paranoïaque, il s’était attendu à apercevoir en bas du dortoir une horde de journalistes people. Finalement, il avait vite jeté ses idées à la poubelle quand il s’était aperçu que rien ne se passait.

Pourtant, la situation était totalement différente ici. Il s’engageait sur une voie qu’il ne pouvait, au mieux, qu’imaginer. La célébrité, l’anonymat, ces deux choses vont rarement ensemble sans accrocs. Mais pour l’instant, dans cette cabine, le front contre celui de son idole, et pouvant sentir son souffle chaud sur son visage, il envoyait bouler ces contradictions. Résistant à l’envie de goûter à nouveau ses lèvres, le garçon enlaça Cassy et posa sa tête contre son épaule. Il lui murmura en retour, comme s’il avait déjà peur d’être entendu de paparazzis :

« Je sais qu’il y en aura, mais tant pis… s'il faut s’adapter, eh bien… Je m’adapterais. Tout ce que je veux c’est… Passer du temps avec toi, partager ce que je peux partager, et je veux pas te laisser seule… J’veux plus te laisser seule maintenant... »

Sur ces mots, Mathieu se retira de son étreinte et embrassa le front de la jeune femme avant de faire un pas en arrière et de lui sourire. Sourire bête, naïf, mais profondément sincère.

Alors qu’il allait reprendre la parole, un bruit métallique sourd se fit entendre, alors qu’une lég_re secousse fit trébucher le jeune homme, qui se rattrapa comme il le put à la banquette. Ses jambes étaient faibles, comme si cette déclaration l’avait épuisé physiquement. Il tourna les yeux vers Cassy, tentant de trouver une explication, mais une voix grésillante familière résonna à nouveau dans la cabine. Apparemment, l’attraction allait redémarrer, et les tremblements faisaient partie de la procédure. La direction s’excusait pour la gêne occasionnée.

« Vous inquiétez pas les gars, j’vous remercie mille fois... » pensa le lycéen.

Puis la grande roue reprit son lent et incessant ballet circulaire, et Mathieu sentit la cabine bouger, à mesure que le paysage se déroulait par la fenêtre. La couleur orangée du ciel était maintenant plus vive, plus éclatante. Comme si le ciel le félicitait de s’être enfin prononcé.

« Ah bah enfin, c’est pas trop tôt… Tu vois qu’on peut le faire ? On ne se sent pas mieux peut-être ? »

« S-Si, bien sûr, mais… »

« Mais quoi ? On regrette ? Regarde nous, on a un sourire gravé sur le visage maintenant ! »

« Merci… J’y serais jamais arrivé sans… Sans... »

« Sans personne, on y est arrivé tout seul. On est grand Mathieu, et il va falloir assumer maintenant. »

« O-Oui, t’as raison. On a raison. J’ai raison. »


Mathieu reprit alors ses esprits et s’installa à côté de Cassy, adossé à la banquette, en attrapant sa main. Il jouait avec ses doigts, ce qui trahissait une certaine anxiété. Mais il voulait maintenant mettre les choses au clair. Il prit alors une voix un peu plus sérieuse :

« J’imagine bien que je sais pas dans quoi je m’embarque. Mais je vais bien le découvrir. Et puis, même s'il y a des inconvénients, au moins je sais qu’on pourra compter l’un sur l’autre. »

Il détacha alors son regard de celui de la jeune femme pour le pointer en face de lui, vers le paysage qui descendait sous ses yeux. Il avait toujours un sourire en coin, et il était fier d’avoir réussi à exprimer ce qu’il ressentait. Il attendit la réponse de Cassy, et il était prêt à répondre à ses questions, si elle en avait, ou à la suivre où elle le voulait. De toute façon, cette épreuve avec lui-même l’avait épuisé, et elle n’aurait aucun mal à le traîner avec elle. Il était tout simplement profondément de bonne humeur, ce qui ne lui était pas arrivé depuis des mois.

Mathieu écouta silencieusement, presque religieusement les paroles de Cassy. Elle semblait gênée, comme si elle avait commis une faute. A vrai dire, oui, bien sûr qu’il gardait certaines choses un peu en travers de la gorge. Mais il avait compris qu’elle avait dû faire des choix, et que peu importe le choix qu’elle aurait pu faire, des gens auraient été blessés. C’était tombé sur lui, tant pis. Mais il ne lui tiendrait pas rigueur de sa situation, d’autant plus qu’il savait qu’une pression médiatique énorme tournait autour d’elle.

Cassy continua alors à s’expliquer, en lui disant qu’elle souhaitait le protéger. Il savait bien qu’elle souhaitait le tenir à l’écart de toute cette folie de la célébrité, où une simple photo pouvait mettre fin à une carrière et dégénérer en polémiques disproportionnées. Mais l’entendre de sa propre bouche le toucha, lui qui était encore jeune et innocent. De plus, elle lui avait déjà parlé de son manager, en qui elle avait toute confiance. De ce que l’adolescent avait compris, cet homme là ne plaisantait pas avec la protection de sa poule aux œufs d’or, et il s’imaginait bien que si Cassy lui expliquait leur situation, il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour garder son anonymat. Mais même avec toute la bonne volonté du monde, un paparazzi déterminé pouvait tromper la meilleure des sécurités, et il allait devoir vivre dans l’ombre de l’actrice, en quelque sorte. Il pesta mentalement contre ces gratte-papiers payés à violer la vie privée d’autrui et leur souhaita une mort lente et douloureuse.

Puis, Mathieu se décida à répondre, un peu avant que la grande roue ne s’arrête afin de les laisser sortir.

« Tu sais, si vivre caché me dérangeait, j’aurais raconté à un magazine people ce qu’il s’est passé cet été. J’imagine que ça sera encore pire là, mais… Si c’est le prix à payer, alors je m’en fiche. Je suis sûr qu’on trouvera des moyens pour passer du temps ensemble, sans que ces photographes à la con viennent nous embêter. J’ferais tout ce que je peux pour pas t’attirer d’ennuis, promis. »

Le jeune homme fut surpris lui-même par son assurance. Visiblement, le fait de briser le tabou qu’il s’était construit lui permettait d’être plus libre avec Cassy. Il ne savait pas encore comment il s’y prendrait, mais il était bien décidé à ne pas se laisser faire face à ces pseudo-journalistes. Il avait fait le plus dur, il avait réussi à avouer ses sentiments à la personne dont il était amoureux, et il était hors de question que des inconnus avides d’argent et armés d’appareils photos ne lui retirent le fruit de ses sentiments.

Un silence s’installa cependant lorsque la cabine s’arrêta, et que Cassy l’entraîna vers une sorte appartement. Le chemin fut silencieux, comme si elle avait peur d’être reconnue. Mathieu se contenta de la suivre d’un pas rapide, mais en évitant d’attirer l’attention. A la vue de l’appartement, il pensa qu’on ne pouvait définitivement pas imaginer un studio de production. L’architecte devait vraiment être doué.

Il laissa Cassy aller se changer, et attendit sagement que son amie revienne. Lorsqu’elle entra à nouveau dans la pièce, au naturel, il se souvint pourquoi il avait littéralement fondu pour elle. Elle était craquante au naturel, et il la préférait largement ainsi, plutôt qu’avec son déguisement. Elle vint se poster à quelques centimètres de son visage, et lui attrapa la main. Cependant, elle semblait stressée, hésitante, tremblante. Mathieu haussa un sourcil, mais elle répondit avant même qu’il n’ait posé la moindre question :

« Je suis vraiment désolée pour ce que je t’ai fait… Je m’en veux »

Décontenancé, le garçon resta quelques secondes immobile, puis il déposa un court baiser sur la bouche de Cassy, avant de revenir plonger ses yeux dans les émeraudes de la star et de murmurer à son tour :

« Cassy, si je t’en voulais… Tu crois vraiment que je t’aurais dit tout ça, que je t’aurais suivi ici ? Je sais que tu as dû faire des choix, mais j’ai compris… Le principal, c’est que tu n’aies plus à faire de choix maintenant. Maintenant, je veux que tu m’enlèves cet air tristounet de ton visage, et que tu nous fasses tout le temps de jolis sourires, à moi et à Freddy ! En tout cas, je vais tout faire pour ! »

Alors qu’il prononçait ces mots, il avait posé son pouce et son index sur les commissures des lèvres de Cassy pour afficher un sourire sur sa bouche. Il ricana rapidement, fier de son petit effet et aussi pour tenter de détendre la jeune femme. Puis il attrapa ses deux mains avec les siennes, et prit un ton jovial :

« Puisque tu me le proposais, je veux bien visiter. J’espère que c’est plus simple et moins flippant que le labyrinthe… Mais si tu dois bosser, je peux aussi y aller... »

Il termina sa phrase en faisant grossièrement mine de partir, sans lâcher la main de Cassy, afin qu’elle le retienne. Décidément, acteur était un métier qui n’était pas destiné à tout le monde...

Fin du rp
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