Le 14 février n'est vraiment pas un jour fait pour moi. Certes je crois à l'amour, je le vis même actuellement avec Jagger. Cependant nous n'en sommes pas au point de devenir ridiculement bisounours, d'attendre un jour spécifique juste pour nous offrir des putains de chocolats à la con, des fleurs ou autres cadeaux. Si l'on veut s'en offrir, on le fait et ce, peu importe le jour. La St-Valentin est juste un jour commercial. Tout est bon pour se faire du fric. La St-Valentin, Noël, Halloween,.... La seule différence est que les autres fêtent donnent une excuse pour faire des repas familiaux. Ou faire peur à d'autres. La St-Valentin ne sert strictement à rien.

Aujourd'hui, je profite d'un jour de repos pour me promener en ville et plus particulièrement au parc. À vrai dire, je n'ai surtout que ça à faire de la journée. Jagger travaille, Lizzy aussi et mes grands-parents fêtent ce jour ensemble. Ils ne font rien de spécial en fait. Ils profitent juste de passer la journée ensemble avant d'aller manger dans un restaurant. Indirectement ils se fichent bien de la St-Valentin en elle-même mais ça leur donne une excuse pour se payer un restaurant. En plus ils ont des rabais spécial couples.

Le parc est animé. Bien plus que d'habitude. En même temps, c'est plutôt normal. Pas mal de stands et d'animations sont présents pour ce jour. Et beaucoup de couples n'ont rien d'autre à foutre que de venir se rouler des pelles en public, se dire des mots doux et presque crier leur amour l'un pour l'autre alors que tout le monde s'en fout. Je ne suis pas devenue aigrie – ou peut-être un petit peu – mais je n'ai jamais été très fan de ce genre de truc. Avec Jagger, on ne se dit pas beaucoup de « je t'aime » ou autre connerie du genre. On se le fait comprendre par les actes, le regard ou les attentions.

J'observe tranquillement les différentes activités proposées tout en faisant mon petit tour. Je ne reste jamais trop longtemps devant les stands. Certains sont capables d'embarquer les passants trop curieux pour faire leurs activités. Je n'ai pas envie d'être embarquée contre mon gré dans ce genre de stupidité. Cependant en passant près d'un petit terrain de course, la chance me tourne le dos en me faisant un fuck. Pas un gros heureusement. Un homme me renverse sa boisson sur les vêtements. Au moins il s'excuse et heureusement pour moi – et accessoirement pour lui – le chocolat est froid.

- Ce n'est pas grave, ça partira au lavage.

Ouais enfin...je suis quand même bonne pour me balader avec un t-shirt tâché. J'ai franchement la flemme de repartir à la maison pour me changer pour ensuite ressortir. Il y a bien une fontaine pas loin où je pourrais rincer un peu la tâche mais je n'ai pas vraiment envie de finir trempée. Du moins plus que je ne le suis déjà. Je regarde autour de moi à la recherche d'un stand qui vendrait éventuellement des t-shirt en rapport avec leurs conneries. Je ne pense pas en trouver et pourtant... Pourtant le miracle se fait. Un stand, pas trop loin de nous, vend divers t-shirt. Enfin il ne les vend pas vraiment. Il les donne en échange de notre participation à leur jeu. Moi qui voulais éviter de faire ce genre de stupidité, on dirait que je n'aurai pas le choix si je veux pouvoir me changer. Cependant c'est un machin à faire en couple et je suis seule. Après un instant de réflexion, je reporte mon attention sur le type qui m'a sali le t-shirt.

- Pour vous faire pardonner, participez à ce parcours avec moi.

Je pointe le stand qui offre les t-shirts en même temps afin qu'il sache de quel parcours je parle. D'après ce que j'ai vu, ils faut remporter diverses épreuves qui sont disséminées dans tout le parc. C'est à faire en couple mais c'est peut-être plus drôle que ça en a l'air.

Il faut croire que même lorsque je tente de me détendre, la poisse aime me suivre. Une petite promenade au parc et me voilà déjà avec un t-shirt sali. Je ne m'énerve pas. J'ai bien vu que le type n'avait pas fait renversé volontairement sa boisson sur moi. Ce serait du gâchis pur et simple. Néanmoins je dois tout de même me changer. Un stand donne éventuellement des t-shirts – au goût de l'amour évidemment – mais à la seule condition que l'on participe à leur truc. Malchance numéro deux, je ne suis pas venue en couple. J'improvise donc un plan de secours afin de pouvoir avoir un t-shirt propre. Je ne les aime pas, je les trouve trop cucul la praline à mon goût mais au moins, ils ne sont pas tâchés et ils m'évitent un retour à l'appartement pour me changer. Je fais donc part de mon plan de secours à l'inconnu. En fait je lui fais surtout un résumé. Ou plutôt, je lui expose la chose avec comme excuse que c'est pour se faire pardonner.

Je dois cependant me retenir de rire en voyant sa tronche lorsqu'il réalise de quel stand je parle. Il se décompose littéralement. Il faut croire qu'il est autant attiré que moi par le truc. Courage, ce n'est que pour avoir un t-shirt. Et puis si moi je dois me faire chier à faire ce parcours, lui aussi. Je ne veux certainement pas être la seule à subir une connerie pareille.

- Croyez-moi, si on avait pu éviter de faire ce parcours, j'aurais été la première à esquiver.

Moi aussi j'aurais bien voulu que ces t-shirts soient en vente plutôt qu'acquis uniquement grâce à une participation. Je n'ai moi non plus pas pas envie de m'abaisser à faire un truc gnangnan. Cependant je n'ai pas trop le choix. J'espère seulement que c'est plus amusant que ça en a l'air. Ca me permettrait de ne pas trop perdre en dignité. Le salisseur de t-shirt tente tout de même de faire un deal avec le gérant du stand. Acheter un t-shirt. Mais non, rien à faire. Nous devons obligatoirement participer pour en avoir un. C'est complètement con. On lui propose de gagner du fric simplement en nous refourguant l'un des vêtements et lui, il refuse.

- C'est quoi les lots des super gagnants ?

Pas que ça m'intéresse réellement mais quitte à devoir subir une humiliation pareille, autant être bien récompensé après. Ou du moins, ça peut nous donner un minimum de motivation. L'homme nous explique alors que les super gagnants obtiendront deux billets pour un voyage d'une semaine en Egypte. Il nous explique également que c'est tout frais payés, que ce soit hôtel, restaurant ou les billets d'avion. Ma foi, j'admets qu'un voyage est plus tentant qu'une simple peluche. Je regarde alors l'inconnu qui va devoir subir la torture avec moi. À vrai dire je m'en fiche de gagner ou non le voyage. Je veux juste avoir un t-shirt propre.

- Allons-y ! Ca peut être drôle après tout. Et puis je suis sûre qu'un petit voyage loin d'ici te dériderait un peu « mon coeur ».

Quitte à être prise pour sa petite-amie, autant jouer le jeu. Et puis j'avoue être aussi curieuse de voir s'il se décompose encore face à ce genre de situation. Ou alors il jouera aussi le jeu pour garder la face. Dans tous les cas, j'obtiendrai ce que je veux, c'est-à-dire le t-shirt – qui est normalement prévu pour différencier les participants et les passants lambdas – et peut-être un peu d'amusement au final.

Le prix des super gagnants est plutôt intéressant. Enfin ça m'étonnerait que je me rende en Egypte pour autre chose que mon travail. Cependant ça reste une meilleure idée qu'une simple grosse peluche ou d'un truc cucul la praline spécial amour. Ce n'est pourtant pas ce qui m'a réellement motivée à participer à ce stand. Outre l'envie d'avoir un t-shirt propre, il y a aussi le fait que je veux voir les différentes réactions de mon compagnon du jour. Il semble être du genre à se décomposer à chaque fois qu'un thème amoureux lui tombe sur la gueule. Je ne vais pas me moquer sachant que j'ai été comme ça durant un moment. Néanmoins je reste curieuse de voir comment il réagira au moment de faire les activités. Le plus amusant reste quand même le fait qu'il a légèrement rougi lorsque j'ai sorti un surnom à la con pour le taquiner. Je ne pensais vraiment pas que ça lui ferait un effet quelconque.

- J'te suis très bien mais comme tu le vois, on n'a pas trop le choix.

Je lui fais un petit clin d'oeil taquin avant de donner mon nom au teneur du stand.

- Jenifer.

Une quinzaine de minutes à attendre désormais avant de commencer notre séance de torture. Néanmoins grâce à cela, j'ai enfin un t-shirt propre que je peux enfiler. Une légère grimace s'affiche tout de même sur mon visage lorsque je regarde ce qu'il donne sur moi. J'ai l'air...ridicule. Il n'y a pas à dire, je ne suis plus vraiment faite pour les thèmes amoureux. En fait, je ne suis même pas sûre d'avoir un jour été faite pour ces trucs. Maintenant que j'y pense, je n'ai jamais réellement fêté ce jour. Lorsque je veux faire un cadeau ou une activité en amoureux, je le fais et puis c'est tout. Je n'attends pas un jour en particulier pour le fêter.

Chris et moi nous nous éloignons du stand, profitant de nos quinze minutes de répit pour discuter. Enfin il serait plus juste de dire que c'est pour mettre les choses au clair entre nous. Trois remarques, aucune qui ne soit réellement méchante. Je dois juste arrêter de le vouvoyer et de lui donner des surnoms à la con. Ca marche pour les deux. Je vouvoie par respect mais si la personne préfère le tutoiement, je le fais volontiers. Quant aux surnoms c'était juste pour le taquiner puisque le gérant nous a pris pour un couple. Et pour la dernière remarque, il faut juste que je fasse appel à mon esprit de compétition.

- Ca me va ! On va tous les écraser ces désespérés de l'amour !

Quand il bougonne, il est plutôt mignon. Quand il sourit parce qu'il est possédé par l'esprit de compétition, il semble être du genre redoutable. Tant mieux. Même si ce concours est merdique, je n'aurais pas voulu me traîner un boulet comme allié. On n'aura déjà pas trop le choix d'être liés l'un à l'autre par les poignets. SI en plus il me donne l'impression d'être un boulet, ça n'aurait pas fonctionné.

- Bon je ne connais pas trop leurs épreuves mais d'après ce que j'ai entrevu, je crois qu'il y a un truc où l'un devra « nourrir » l'autre et finir le plat dans un temps limité, un où il faut éclater des ballons sans les mains ou les pieds et je crois qu'il y a aussi une course.

Ce sont les trois épreuves que j'ai pu entrevoir mais il y en a d'autres. J'espère juste qu'il n'y aura rien qui nous demande de parler de l'autre ou de répondre à des questions sur l'autre. On sera dans la merde sinon.

- C'est des épreuves débiles mais bon je pense qu'on pourra quand même leurs foutre la pression rien qu'avec ces trois-là. Ils vont voir que même sans être réellement en couple, on peut être des adversaires très sérieux.

Même sans se connaître, on découvre un point commun entre les deux. La compétition. Il aime en faire, pareil pour moi. Même dans la danse, il m'arrive de participer à des concours juste pour montrer que mon niveau est élevé. J'ai un tel esprit de compétition que je donne toujours tout ce que j'ai pour gagner. Et si je perds, je retiens la leçon et je travaille deux fois plus pour améliorer mes compétences dans le domaine. C'est pareil pour les autres concours. Du moment qu'il y a de la compétition à laquelle je peux participer, je réponds présente. Même si celle-ci est complètement débile et sans réel intérêt comme celle d'aujourd'hui.

Bien que nous soyons totalement inconnus l'un envers l'autre, nous avons au moins pu trouver un point sur lequel nous sommes d'accord. La compétition. Quitte à devoir foutre notre égo de côté durant un certain laps de temps, autant montrer à tous nos adversaires que notre esprit de compétition est très loin d'être touché. Et puis ça sauvera quand même une partie de notre fierté qui elle, sera touchée. Nous sommes donc prêts à en découdre durant ces 6 petites épreuves ridicules. Du moins c'est ce que je croyais avant de voir la tronche de mon partenaire du jour. On dirait qu'il vient de voir un fantôme. C'est quoi cette réaction dès l'entente de la première épreuve ? Je dois juste lui donner à bouffer, ce n'est pas la mer à boire. Et puis ce n'est pas comme si j'étais porteuse d'une maladie hyper contagieuse ou que je serais le genre de fille à me faire facilement des idées lorsqu'elle fait une activité avec un mec.

En approchant du stand où se déroule notre première épreuve, je vois Chris pâlir encore. Toujours à cause de notre épreuve ou bien est-ce l'entente du reste qui le fait frémir ? Il est vraiment difficile à cerner. Puis dès que le moment de faire nos preuves est arrivé, j'ai cru pendant quelques instants avoir affaire à un môme qui refuse de manger ses légumes. J'étais prête à inverser les rôles, ça ne m'aurait pas dérangée mais malheureusement, on n'a pas le choix. C'est lui qui doit remplir son estomac. Et c'est lui qui ne voulait pas que je sois un boulet... Actuellement c'est plutôt l'inverse. C'est lui le boulet. J'ai beau approcher la nourriture de sa bouche pour essayer de le motiver, il ne fait rien.

- Ca va être dur de te nourrir si tu n'ouvres pas la bouche, tu sais ?

Ouais il peut être désolé, ça c'est sûr. Il ne veut pas perdre, il veut montrer aux autres que c'est un putain de compétiteur et pourtant là il montre tout l'inverse. Et on perd déjà par la même occasion. En tout cas, on est sur la bonne voie pour la défaite. Je m'apprête à lui faire un commentaire pour essayer de le motiver mais un couple se charge déjà de le rebooster. Chouette, ils font le taf à ma place. Pour le coup, je leur en suis reconnaissante.

- Et bien t'es enfin décidé, ça fait plaisir à voir.

Je profite de cet élan pour le nourrir et que l'on rattrape un peu notre retard. Puis c'est le tour à l'épreuve des ballons. Quelle idée de faire ce genre d'épreuve après avoir dû remplir rapidement l'estomac de la moitié des participants... Remarque, c'est toujours mieux que la course à pied. Avant que l'on doive passer, j'en profite pour observer un peu les diverses techniques des autres concurrents. Dix ballons à faire éclater sans l'aide des mains ou des pieds. C'est assez amusant mine de rien. Tout le monde a l'air affreusement con mais les techniques utilisées sont marrantes. Ca va d'un simple écrasement dos contre le mur à un écrasement fesse contre fesse. Il y a vraiment de tout. Je crois que c'est dans cet exercice-là que l'on va devoir mettre le plus de côté notre égo.

Notre tour arrive enfin, ainsi que le tour de quelques autres couples supplémentaires histoire de ne pas surcharger la place. Le gérant du coin nous explique alors les règles qu'il y a. Nous pouvons prendre le ballon dans les mains pour le tenir – logique – mais pour l'éclater, il nous faudra user du reste de nos corps, quitte à se mettre à deux pour éclater un ballon. Tous les moyens sont bons pour le faire à l'exception des mains et des pieds. L'épreuve débute ensuite et je me vois obligée de mettre ma fierté de côté pour faire exploser les ballons. Contre un mur, avec ou sans l'aide de Chris. Je teste même une fois avec les dents mais ça, c'est une très mauvaise idée. Ca fait un mal de chien à la bouche une fois que ça pète.

Nous parvenons à rattraper encore un peu notre retard puis après avoir éclaté les dix ballons de manières toutes plus farfelues les unes que les autres, nous pouvons enfin passer au stand suivant. L'épreuve qui nous attend cette fois c'est la coordination. L'homme doit guider la nana dans un parcours d'orientation alors que celle-ci a les yeux bandés. Ca a le mérite d'être un truc plus calme au moins. Dans ce genre d'exercice, il faut savoir faire confiance à son partenaire et l'écouter. Pour la première chose, on va avoir du mal je pense. On ne se connaît pas, il a déjà rechigné pour être nourri alors niveau confiance ça ne dit rien de bon. De plus j'ai moi-même du mal à avoir confiance en qui que ce soit. Même Jagger me l'a reproché après en avoir subi les conséquences.