Ces choses dont on ne parle pas [Médée]

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

"Donne-moi une semaine. Personne ne m'a résisté autant. Dans une semaine, Hannah Wayne aura couché avec moi et elle pleurera comme toutes les autres quand je partirais !"

Un bruit sec interrompit la réminiscence. Le bruit mat d'une lame qui s'enfonçait dans le plafond. Retombait, quelque secondes plus tard, pour atterrir sur le matelas à côté de lui. Le regard d'Alix se perdit sur les entailles au-dessus de lui. Des dizaines. Plus que ça. Des centaines ? Cela faisait trois semaines qu'il lançait ce couteau sans s'arrêter. Jour après jour après jour. Sombrerais-tu dans la folie ? songea-t-il lorsque la lame se planta à nouveau dans le plafond. Peut-être. Peut-être sombrait-il dans une obsession morbide. Ces mots restaient gravés dans sa tête. Une ombre sur son quotidien. Un visage, un type assez prétentieux et idiot pour prétendre qu'Hannah n'était qu'un trophée. Le visage qu'il imaginait à la place de ce plafond.

"Elle s'appelle Kate. Je vais l’appeler ainsi. Elle devrait être en confiance comme ça. Et vous, vous avez trouvé quoi ?"

Sale con. Sale petit connard prétentieux. Sale petit enfoiré sans cervelle. Que croyait-il faire ? La blesser, jouer avec elle ? Le couteau se planta à nouveau dans le plafond. L'appeler Kate. Quel gros con. C'était le meilleur moyen de finir avec un poignard dans l’œil et, même si ce n'était pas l'envie qui lui manquait, Alix ne serait pas celui qui le manierait. Jamais Hannah ne laisserait passer ça. Jamais Médée ne laisserait passer ça.
Alors pourquoi se sentait-il aussi oppressé ?

Il avait entendu des gens en parler. Des gens qui le narguaient, qui appréciaient de le voir grimacer ou enrager à chaque fois que cette histoire apparaissaient dans leur conversation, qui faisaient exprès de parler plus fort, à côté de lui, pour qu'il sache tout. Et ce type qui continuait de s'en vanter. "Elle va tomber dans mes bras", "Je vais me la faire", "Je vais lui montrer ce que c'est un vrai mec", "Elle est trop bonne pour se contenter d'un type comme lui", "Je suis beaucoup mieux que lui, évidemment qu'elle finira dans mon lit". Se contenter d'un type comme lui, hein ? Connard. Il valait mille fois moins que lui, un million de fois moins que lui. Un million de fois moins que le norvégien idiot qui avait abandonné Hannah pour se morfondre sur son sort et la faire souffrir. Autant dire qu'il ne valait rien. Qu'Alix mourait d'envie de l'écraser et de le réduire en cendre comme la petite merde qu'il était. La lame resta plantée un moment de plus dans le plafond. Assez pour qu'il ait le temps de s'imaginer la planter dans sa gorge. Puis elle retomba.

Il avait fini par avoir un nom, en trois semaines. Chris Backet. Un petit abruti de seconde zone, avec autant de neurones que de filles intelligentes dans son entourage direct. Un boucher à dindes. Le genre qui se croyait séduisant parce que trois grognasses qui ne vivaient qu'à travers leur cul s'étaient attardées un instant sur son entrejambe. Qui se pensait supérieur parce qu'elles chouinaient après coup, alors que tout ce qu'elles voulaient, c'était une partie de jambes en l'air de plus pour oublier à quel point leur existence était médiocre. Elles étaient probablement allées sécher leurs larmes dans les bras d'un autre mec en chien, tout aussi peu difficile et tout aussi connement fier de ses minables performances.
Mais il restait une incertitude.
Une rumeur.
"Eh, Alix, il paraît que ton ex a un rencard ce week-end".
Ridicule. Impossible. Jamais. Jamais...
Bien sûr qu'Hannah n'était pas capable de tomber dans ses bras. Même Médée n'irait pas jusque là. C'était juste les connards de potes de la paire de couilles sur pâtes qui cherchaient à le narguer. A taper là où ça fait mal tout en flattant l'égo enflé de l'autre connard. Sûrement qu'il s'était vanté de quelque chose pour faire le beau auprès de ses potes après son quarantième râteau. Même si Hannah avait souffert à cause de lui, elle était trop intelligente pour se laisser avoir par ce type. Même si Médée aimait jouer avec les gens, elle avait trop d'amour-propre pour lui concéder cette victoire.
Elles valaient mieux qu'un trophée. Bien mieux qu'un trophée.

Le couteau qu'il allait lancer dans le plafond pour la énième fois dériva vers un mur de la résidence au moment où il entendit la sonnette. Si c'était encore un de ces types venus lui balancer les dernières rumeurs débiles à la gueule... Avec un grognement, il se leva de son lit, enfila un sweat par-dessus son caleçon et alla ouvrir la porte.
Et là il se figea.
Hannah.
Non.
Médée.

- Aide-moi... S'il te plaît... Sweety-boy... Par pitié... Aide-moi Alix... J'ai perdu Hannah...

Son sang se glaça dans ses veines. Toute la colère se figea par le même coup, contenue à l'écart par une barrière d'une solidité indestructible. La peur.

- … Quoi ?

Comment ça, perdu Hannah ? Qu'est-ce qu'elle racontait, de quoi elle parlait, comment... comment était-ce seulement possible ? Il eut un léger mouvement de recul, un petit pas en arrière avant de se ravancer vers elle, tendant la main pour l'aider à se relever.

- De quoi tu parles, Médée ? Tu... t...

Ses pensées peinaient à se mettre en ordre, tournant de façon anarchique autour d'une seule question : comment ? Comment pouvait-elle avoir perdu Hannah ?

Ces choses dont on ne parle pas

Alix ∞ « … Quoi ?»

Je t'ai vu reculer. Ne mens pas Sweety-boy. Je t'ai vu. Évidemment, tu ne pensais qu'à Elle. Tu n'avais toujours penser qu'à Elle. Et moi, tu m'as toujours oublié n'est-ce pas ? Et tu t'es avancé. Tu m'as tendu la main pour me relever. Tu bégayais. Tu avais peur. Pour Elle. Je suis prête à parier que pas une seule question dans ta jolie tête blonde ne me concernait. Pas. Une. Seule. Je le lisais avec autant de facilité qu'Elle pouvait lire dans ton regard. Il n'y avait que son nom. J'ai attrapé ta main, tentant de me relever. Le sais-tu ? Je souffrais. Je souffrais d'être là, de ma journée. Je souffrais de te voir. Tu étais ma plus grande souffrance parce que tu ne me voyais pas. Mais je n'avais personne d'autre vers qui me tourner.

Alix ∞ « De quoi tu parles, Médée ? Tu... t... »

De quoi je parle ? Voyons... Tu as parfaitement compris ce que j'ai dis entre mes larmes... Mon corps se levait sans que je ne comprenne comment il faisait pour tenir debout.

Médée ∞ « Je peux... entrer ? J'ai peur d'être seule chez moi... »

Enfin, chez Elle plutôt. Mais ça c'était compliqué à expliquer. J'avais froid. Je le sentais à mes tremblements, mon visage s'abaissant pour observer la robe que je portais. Elle était légère. Il était tard. Il y avait du vent non ? Je ne sais plus. Je n'ai pas fais attention. Ton corps a arrêté de barrer la route et je suis entrée. Je n'ai même pas fais attention au décor, à ta tenue, au bordel... J'avais mal. J'avais froid. Mon esprit était concentré sur la disparition de ma personnalité principale. Je me suis avancée, je t'ai presque ignoré... Je me suis assise avant d'observer la robe qui ne m'allait pas, qui était bien trop large, bien trop... Trop tente pour moi. Je me suis relevée, ai retiré le tissu ample avant de me rasseoir, croisant les doigts avant de les fixer, longuement. Mon sang bouillonnait, mon cœur tapait contre mes oreilles... Et mes larmes n'en finissaient pas de couler. Quelle image de moi avais-tu... ?

Assez naturellement, j'ai relevé ta couette pour m'enrouler dedans, cachant mon visage, me repliant lentement sur moi-même. J'avais tellement mal...

Médée ∞ « Elle... ne répond plus... Je suis toute seule... »

Une nouvelle fois, je me sentis trembler. De tout mon corps. Je sentais l'air frais caresser mes jambes et me rappelais que j'étais en mini-jupe. Je m'en fichais. Tu étais la seul chose importante de la pièce. Bientôt, mon froid se déplaça. J'avais chaud sur ma peau, c'était mon sang qui semblait se geler.

Médée ∞ « J'ai du faire une erreur... Mais je sais pas où... Elle partait avant... Quand Bidule était là... Elle l'aime pas... Et j'ai bu... J'ai beaucoup bu... Et j'arrive pu à lui parler... Elle me répond plus... Alix... Je suis seule...»

Ma voix se brisa sous mes larmes. La couette partit de mes épaules et mes jambes se relevèrent pour que mes genoux cachent mon visage. Peu importe ce que tu voyais. Peut-être mon boxer ? J'en savais rien. Et je m'en fichais.

Médée ∞ « J'ai besoin d'aide... Pitié Alix, répéta ma voix, je t'en supplie... Aide-moi... Fais-la revenir... J'ai beau lui dire que Machin est parti, qu'il ne reviendra pas, qu'elle va être tranquille... Elle ne dit plus rien... Alix... J'ai peur...»

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

Il n'avait jamais vu Médée dans cet état. A vrai dire, il n'avait même jamais vu Médée autrement que joueuse ou énervée. La voir ainsi effondrée, visiblement terrifiée, lui fendit le cœur. Et c'était probablement la première fois, depuis qu'ils se connaissaient, que ce n'était pas juste parce qu'il voyait le visage d'Hannah se décomposer.

Encore sous le choc, il s'écarta pour la laisser entrer, sans uns mot. Il ne savait pas quoi dire, pas quoi faire. Elle passa devant lui en silence, le regardant à peine avant d'aller s'asseoir. Et il resta figé un moment. La regarda ôter sa robe pour une tenue bien trop légère, bien trop... trop Médée. Depuis combien de temps Hannah n'avait pas eu son mot à dire ? Il l'imaginait très mal accepter ce genre de tenue.
Mais Médée n'avait pas pu la chasser. Impossible. Elle avait elle-même affirmé plusieurs fois qu'elle la protégeait, et elle ne serait pas aussi désemparée si ça avait été volontaire. Quelque chose avait dû se passer. Quelque chose d'assez grave pour la faire fuir.

Quand elle parla à nouveau, il parvint à sortir de son état tétanique et à s'avancer vers elle, ou plutôt la boule de couette recroquevillée qui l'avait remplacée. Elle semblait au bord du gouffre, et il ne pouvait que la comprendre. L'idée qu'Hannah puisse disparaître lui glaçait le sang. Il y avait forcément une raison. Elle reviendrait forcément.
Elle reviendrait forcément, hein ? Elle ne pouvait pas vraiment s'effacer... elle ne pouvait pas vraiment partir...

- J'ai du faire une erreur... Mais je sais pas où... Elle partait avant... Quand Bidule était là... Elle l'aime pas... Et j'ai bu... J'ai beaucoup bu... Et j'arrive pu à lui parler... Elle me répond plus... Alix... Je suis seule...

Il se crispa. Bidule ? Qui ? L'image de l'enflure qui était responsable de la nouvelle décoration de son plafond s'imposa à son esprit. C'était lui, non ? Médée ne retenait jamais le nom de personne. Mais ça ne pouvait être que lui. Lui qu'Hannah détesterait assez pour laisser Médée prendre le contrôle à chaque fois qu'il s'approchait. Qui d'autre ? Elle se contentait d'être froide et distante avec les autres. Mais s'il l'avait collée pendant trois semaines, s'il avait osé l'appeler Kate...

- Je vais le buter...

Son regard loucha sur le couteau planté dans le mur pas très loin de lui. Il s'en approcha. Tendit les doigts pour l'attraper. Mais les sanglots de Médée l'arrêtèrent au moment où sa main se refermait dessus. La colère se disputa avec l'inquiétude. Il ne pouvait pas la laisser comme ça. Il ne pouvait pas partir et laisser seule dans cet état, malgré son sang qui avait commencé à bouillir dans ses veines.
Il lutta quand même pour desserrer ses doigts du couteau et laisser son bras reposer le long de son corps. Tourna les yeux vers elle.
Plus tard. Plus tard il s'occuperait d'expliquer à ce gars ce qu'il en coûtait de faire du mal à Hannah et Médée.

Doucement, il vint la rejoindre sur le lit. S'assit à côté d'elle en cherchant un mot, un geste qui pourrait l'aider, mais il était lui-même dans un désarroi semblable. Il ne savait pas comment faire revenir Hannah. Il ne savait pas comment réconforter Médée. Les deux étaient liés. Et il ne pouvait rien faire.
Les mains tremblantes, il s'approcha de la jeune fille. Passa un bras autour de ses épaules pour la ramener contre lui alors qu'il sentait les larmes poindre dans ses yeux et lui brûler la gorge. Encore une fois, il ne pouvait aider personne. Encore une fois il était impuissant, inutile, incapable de faire quoi que ce soit d'autre que de regarder son monde s'effondrer.

- Je ne sais pas quoi faire, articula-t-il d'une voix beaucoup trop faible. Je ne comprends pas... On ne peut pas l'avoir perdue.. Il... il doit y avoir une raison.

Une raison, une solution, n'importe quoi qui l'empêcherait de se briser le cœur sur une réalisation cruelle. Elle était forcément toujours là.

Ces choses dont on ne parle pas

Hannah... ?
…

Je me mordis la lèvre. Pourquoi tu ne réponds pas Hannah ? Pourquoi tu me laisses seule ? Pourquoi tu prends peur si vite ? Reviens...

Et toi... Toi tu t'es éloigné de moi. Je l'ai entendu. Je ne sais pas ce que tu as fais. Je sais juste que tu as passé quelques secondes loin de moi. Je comprends tu sais. Je comprends que ce n'est ni simple ni ce que tu voulais. Tu la voulais elle n'est-ce pas ? Je t'ai senti t'asseoir à mes côtés. Vois-tu Hannah en moi ? Ai-je le droit d'espérer que tu me vois ? Ou alors tu ne voulais pas faire cet effort ? À moins que ce ne soit trop pour toi. Je comprends. J'aurais aimé qu'Elle vienne te voir pour dire que j'aurais disparu. Tu n'aurais pas paniqué. Tu aurais été calme et doux. Tu aurais été... son protecteur... Alors que là, je n'étais en rien ce que tu voulais. Je le savais. Et ça ne m'aidait pas vraiment à aller mieux.

Pourtant, tu m'a pris dans tes bras. Tu m'as amené contre toi. Mon visage se lova contre ton buste, contre ton odeur qui sembla m'envelopper.

Je t'aime tellement... Je dois faire quoi pour que tu me voies aussi... ?

Alix ∞ « Je ne sais pas quoi faire. Je ne comprends pas... On ne peut pas l'avoir perdue.. Il... il doit y avoir une raison.»

« On » ? Non... Lui. Il l'avait perdu. Moi... Je n'aurais jamais dû être là. J'aurais dû partir bien avant. J'aurais dû la laisser. Et elle t'aurait demandé de l'aide. Tu l'aurais protégé et vous seriez, à l'heure actuelle, vous seriez ensemble...

Médée ∞ « Je suis désolée... C'est ma faute. J'aurais pas dû venir... J'aurais dû partir... depuis longtemps... Je suis désolée Alix... »

Je n'avais que ces mots en bouche. J'étais désolée. Désolée d'exister. Désolée d'être restée. Désolée de t'aimer autant qu'Elle. Lentement, mon esprit assimila quelque chose que j'aurais dû piger bien plus tôt. Je ne servais plus à rien. Je ne devrais déjà plus exister. J'étais... Je n'étais qu'un parasite non ? Autant je l'avais protégé, autant je ne servais plus...

Médée ∞ « Je vais finir par partir... » murmura ma voix, mes mains se raccrochant à ton haut.

Je ne voulais pas. Je ne voulais pas partir. Je voulais aussi être heureuse. J'en avais le droit non ? Non... Je n'existe pas. Je n'ai pas à vouloir le bonheur d'Hannah...

Médée ∞ « Je suis désolée... Je n'aurais pas dû te provoquer lors de cette soirée. Je n'aurais pas dû t'embrasser. Je n'aurais pas dû taquiner autant Hannah. Je ne fais que des conneries... Même mes sentiments n'ont aucunes raisons d'être. Putain... je suis tellement toxique... »

 

C'était évident. C'était comme ça qu'Elle devait me voir. Je devrais... Je devais... prendre une décision... Mes bras s'enroulèrent doucement autour de ta taille. Pour une fois, je voulais simplement être près de toi...

Médée ∞ « Je peux rester dormir ici... ? Je ne veux pas être seule... Et... Il n'y a que toi qui me calme... S'il te plaît... Laisse moi rester... J'ai peur d'être seule... Et peut-être que quand j'aurais pu d'alcool dans le sang... Hannah reviendra ?»

 

Je n'en savais rien. J'espérais. Mais je ne voulais pas partir sur la base où j'avais perdu Hannah... Je ne pouvais pas me permettre... Naturellement, je me suis allongée, t'amenant avec moi. Je me lovais contre toi, sans vouloir plus que ce que je n'avais. J'avais juste besoin d'être rassurée... Hannah... Hannah je ne savais pas...

Médée ∞ « Alix... On trouvera une solution hein... ? Je vais pas rester seule... ? C'est pas mon rôle... ça l'a jamais été... Je devais la protéger... Je suis désolée... J'ai pas réussi... »

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

Il serra la jeune fille contre lui tout en essayant de réfléchir correctement. Impossible, dans cette situation. Tout ce qu'il arrivait à penser, c'était que Médée était seule. Qu'Hannah ne répondait plus. Que tout ça était de la faute de Chris Backet. Et qu'elle avait préféré fuir plutôt que de lui faire regretter ses actes.
À quel point avait-il été envahissant ? À quel point l'avait-il blessée ? À quel point perdrait-il de sa santé mentale et physique, une fois qu'Alix aurait l'occasion de le faire payer ?
Quelle importance cela aurait, si Hannah ne revenait pas ? La vengeance ne ramenait personne. Il crispa la mâchoire, serra davantage Médée contre lui. Médée... elle avait été le bras vengeur d'Hannah, sa protectrice, sa sauveuse, son rempart contre la douleur, tant d'autres choses, aussi. Mais seule ? Non... C'était comme demander à la lune d'exister sans la Terre. Impossible. Elle s'effondrerait bien trop vite, elle en dépendait bien trop.

- Je vais finir par partir...
- Partir ..?

L'idée lui laissait une sensation étrange. Un refus, léger mais présent. Il n'avait que peu connu Médée, dans sa relation avec Hannah mais... elle faisait tant partie d'elle qu'il s'était habituée à sa présence.
Elle semblait aller tellement mal qu'il rangea la terreur qui nouait son estomac, la mit sous clef. Pour l'instant. Ça n'avait jamais été une bonne idée, il le savait, il en était plus que conscient ; ça avait tendance à avoir des effets néfastes sur le long terme mais, pour l'instant, il se refusait la panique. Il se refusait la détresse. Combien de temps tiendrait-il ? Aucune idée. L'angoisse finirait par revenir ; il ne pouvait pas la contenir éternellement, sinon son esprit finirait par griller.
Littéralement.

- ... Putain... je suis tellement toxique...
- Ce n'est pas de ta faute, chuchota-t-il en la ramenant contre lui et en crispant les doigts. C'est de sa faute à lui. C'est lui qui vous a fait ça...

Pouvait-il vraiment dire ça ? Oui, Chris était responsable, mais si Alix n'avait pas laissé Hannah seule, s'il n'avait pas passé tout ce temps sans la voir, peut-être que l'autre abruti ne se serait pas senti assez téméraire pour tenter sa chance. Non, pas peut-être : c'était une certitude. Il avait sa part de responsabilité, dans cette histoire. La phrase qu'avait prononcé la garce qui l'avait fait enfermer lui revint en mémoire.
"Il fallait bien que le karma fasse son boulot."
Était-ce ça, le prix pour l'avoir abandonnée ? Il ne se sentait pas le courage de le payer. Perdre Hannah... la perdre vraiment, à jamais, ne plus jamais revoir son regard se lever doucement sous sa capuche ou ce sourire qu'il était le seul à connaître. Ne plus jamais entendre sa voix dans ses intonations, la façon dont elle s'adressait à lui... Il déglutit et serra les dents. La serrure n'avait pas tenu bien longtemps ; il sentait déjà ses yeux le brûler.
Il s'allongea à ses côtés avec un soupir tremblotant. C'était trop inédit. Trop compliqué à gérer.

- Tu peux rester autant que tu veux...

A vrai dire, il ne se sentait pas plus qu'elle le courage de dormir seul. Et il espérait, tout comme elle, qu'Hannah serait de retour le lendemain matin.
Allongé contre elle, il la tint contre son cœur presque naturellement. Mais il se sentait trembler. Il sentait que ses mains refusaient de rester totalement stoïques.

- Ça va s'arranger, souffla-t-il d'une voix un peu tremblante. Tout va s'arranger...

Il n'était pas sûr d'y croire lui-même. Et si ça ne s'arrangeait pas ? Et si tout s'effondrait véritablement ? Il ferma les yeux, tenta de son mieux de réprimer ses larmes.
Il ne pouvait pas la perdre. Non. Non, non...

Ces choses dont on ne parle pas

J'aimais ça. C'était stupide. Méchant. Idiot. Sans raison valable. Mais j'aimais sentir tes réactions. Que tu trembles. Que tu me serres contre lui. Tu voyais Hannah. Je le savais. Je savais que tout ton corps, ton cœur, était pour elle. Je n'étais... Qu'un surplus. Qu'une gêne. Doucement, je sentais les larmes monter le long de ma gorge, coulant faiblement sans que je ne dise un mot. Je ne voulais pas être seule. Je ne voulais pas... Je ne voulais pas te laisser. Je te voulais aussi. Je voulais avoir le droit de t'enlacer, t'embrasser. Je voulais être ta copine. Simplement. Et je sentis un sourire moqueur poindre sur mon visage. J'étais idiote. Complètement stupide. Je n'existais pas. Depuis quand une entité virtuelle pouvait prétendre à l'amour ? J'étais sûrement plus conne qu'Hannah... A t'aimer autant qu'elle. Mais j'étais plus égoïste qu'elle. Je te voulais pour moi seule. Je voulais que tu me vois. Que tu me reconnaisses. Que tu m'aimes. Autant que tu l'aimais elle.

Alix ∞ « Ce n'est pas ta faute. C'est de sa faute à lui. C'est lui qui vous a fait ça... »

Médée ∞ « Tu ne comprends pas... Si... Si je n'avais pas accepté le date, si j'avais juste mis mon poing dans sa gueule... Rien ne serait arrivé... »

Pourtant, mon corps resta contre toi. Je me refusais de te laisser t'inquiéter alors que tout était de ma faute... Je voulais être... tienne. Juste une fois. J'avais besoin de l'illusion d'être à quelqu'un... Non... Je voulais être tienne. Juste tienne... Je t'aimais tellement...

Médée ∞ « Ne t'en veux pas... Ne change pas... Tu es parfait... L'homme qui hante ses nuits. Tu es mon aimé. Notre aimé.»

Mes lèvres embrassèrent ta peau. Lentement, sur ton cou. J'avais besoin de te goûter. J'avais besoin que tu me voies. J'avais besoin de toi contre moi... J'avais besoin d'un corps à moi. D'une vie. J'avais besoin d'exister... Et je me repris. Je n'avais pas le droit. Encore moins qu'Hannah. Parce que si tu en venais à m'aimer... Tu te briseras quand je partirais. Je ne devais pas. Mon corps s'éloigna du tien alors que je ne désirais que tes bras qui se referment sur moi, ta voix qui me chuchote tous les mots que tu as pu murmuré pour Elle. Je voulais. Sa vie. Juste pour moi. Parce que même en ayant rien, elle avait tout. C'était injuste.

Médée ∞ « Il n'y a pas de raisons qu'elle ne revienne pas... Machin va la laisser tranquille... T'façon, je doute qu'il revienne avec ce que je lui ai fais. »

Je m'allongeais sur le dos, restant contre lui avant que mon regard observait le plafond sans comprendre. Un sourcil se fronçait avant de questionner faiblement.

Médée ∞ « Dis-moi Alix, tu as refais la déco ou vous avez des bâtiments chelous ici ? »

Je me posais sur le côté, observant enfin la pièce. Mes pupilles regardèrent longuement le couteau dans le mur. Depuis quand tu as un couteau ? Depuis quand tu l'utilises ? Est-ce que tu l'as utilisé ? Qu'es-tu devenu mon amour ? Je savais bien que la Forge n'était pas pour toi. Tu dois partir. Tu ne dois pas rester... Tu dois... partir. Loin de moi... C'est tellement contradictoire. Je ne veux pas partir. Et je sais que je finirais par partir... Bordel. Je suis tellement nulle. Il faut qu'elle revienne. Que tu sois heureux. Et que vous m'oubliez.

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

- Tu ne comprends pas... Si... Si je n'avais pas accepté le date, si j'avais juste mis mon poing dans sa gueule... Rien ne serait arrivé...

Alix secoua la tête. Il connaissait ce genre de type. Un poing dans la gueule ? Ça n'aurait rien changé à son existence. Il aurait continué. Il aurait même capable de voir ça comme un défi supplémentaire, de s'accrocher encore plus, de faire encore plus de dégâts. S'il était seulement possible de faire plus de dégâts. La disparition d'Hannah et les larmes de Médée, c'était un niveau de destruction déjà bien assez violent. Il avait du mal à imaginer pire.

- Ça n'aurait rien changé.

Elle n'avait pas à s'en vouloir. Une seule personne était responsable de cette situation. Même s'il devait bien admettre que l'expression "accepté le date" l'avait fait violemment grincer des dents. Surtout quand il avait baissé les yeux sur sa tenue. Rien que l'idée que Chris ait pu la voir comme ça lui écorchait un peu plus les nerfs. Il entendit sa phrase suivante en la serrant davantage contre lui, puis son cerveau tilta.
"Mon aimé ?"
La réalisation disparut aussi vite qu'elle était apparue, quand les lèvres de Médée se posèrent dans son cou.

Un frisson le parcourut et ses bras autour d'elle se crispèrent légèrement. Son cœur manqua deux ou trois battements, il déglutit difficilement. Puis elle s'écarta, presque aussitôt, mais il sentait toujours que son cœur battait étrangement. Cela lui laissa un goût amer dans la bouche. Frissonner au contact de Médée... en avait-il seulement le droit ? Il n'arrivait pas à savoir envers qui il se sentait le plus coupable. Envers Hannah, pour réagir ainsi à un contact avec une autre, même si le mot était fort ; ou envers Médée, tant il ne savait pas si c'était juste le parfum et la chaleur d'Hannah qui lui faisaient cet effet plutôt qu'elle.

- Machin va la laisser tranquille... T'façon, je doute qu'il revienne avec ce que je lui ai fais.
- S'il revient, ça ne durera pas, dit-il d'une voix froide.

Qu'il ose s'approcher encore d'Hannah après ce qu'il avait fait et Médée serait le cadet de ses problèmes.
Sa question suivante le fit froncer les sourcils, avant qu'il lève les yeux et comprenne qu'elle parlait des multiples entailles dans le plafond. Il suivit son regard, le vit se poser sur le couteau toujours planté dans le mur. Il haussa les épaules en fermant les yeux.

- C'est à cause de l'autre. Dommage que je n'ai pas pu dessiner sa tête sur mon plafond avant.

L'amertume dans sa voix à chaque fois qu'il mentionnait ce gars était clairement perceptible. Il observa à son tour les entailles au-dessus d'eux. Trois semaines à ruminer dans sa chambre, et ça donnait ça. Alix grimaça. Il avait vraiment pété les plombs. Ce type avait causé trop de dégâts.
Il baissa la tête vers Médée, essuya ses larmes du bout du pouce.
Beaucoup trop de dégâts.

Ces choses dont on ne parle pas

Il faut que tu m'oublies. Que tu fasses ta vie avec Hannah. Il faut que tu sois heureux... Il faut que tu arrives à être heureux. De toute façon ma présence...

Alix ∞ « Ça n'aurait rien changé. »

Le coup est porté, mon souffle ne se saccade même pas sous les mots. Tu ne répondais qu'à mes mots. Tu ne sais pas à quoi je pense. Tu n'es pas méchant. Tu es juste amoureux d'elle n'est-ce pas ? Alors c'est exactement pour ça que mes propres baisers sont intenables. Parce qu'elle ou moi, nous voulons être à tes côtés. Parce que chaque frisson, oui ce frisson-là, lui est adressé. Je le sais. Je n'ai pas besoin de te questionner. Tu l'as aimé, tellement, désespéramment. Tu t'en es caché. Et maintenant que tu peux la tenir contre toi, ce n'est pas elle, c'est moi qui suis là. Tu dois être déçu. Je comprends. Je te comprends mon trésor. Et le pire... C'est que je n'ai pas le droit d'insister. Si je te prenais, alors je la détruirais. Nous mourions. Tu nous suivrais. Rien ne finirait bien. Je dois donc supporter cette douleur. Quel enfer non ? Qu'en penserais-tu ?

Tu en penses que Machin t'énerve. Tu lui en veux de l'avoir approché. Tu lui en veux de l'avoir terrifié au point que j'intervienne. Après tout, ne suis-je pas celle qui protège ? Mais dis-moi Alix... Que penserais-tu de savoir qu'elle est sûrement celle qui me protège et pas l'inverse ? Ce serait surprenant non ? Médée ressent, pense. Elle n'est pas qu'une garce qui joue. Ce n'est pas quelque chose qui va avec ce que tu connais de moi... Mais dis-moi.. Si tu ne me connais pas... Tu ne la connaîtras pas non plus quand je partirais...

Médée ∞ « Je suis désolée... de ne pas être Elle... »

 

Tout aurait été bien plus simple... Mes pensées, les tiennes. Votre relation. Tu l'aurais aidé à sécher ses larmes. Tu l'aurais enveloppé pour qu'elle arrête de trembler. Tu l'aurais embrassé. Elle aurait craquer. Elle t'aurait dit qu'elle n'avait jamais arrêté de t'aimer. Tu lui aurais sûrement rendu son amour. Et tout serait allé parfaitement. À la place... Je suis là. Et je fous tout en l'air.

Médée ∞ « Tu n'as pas à lui faire de mal... Tu donnerais raison à ceux qui pensent que tu es violent. Alors que non... Tu n'es pas comme ça. »

Ma main effleura ton visage, dégageant une mèche blonde. Même tes doigts qui essuient mes larmes sont pour elle... C'est encore plus douloureux que d'être seule. Je n'ai personne.

Personne.

Mes doigts continuaient de caresser ta peau, comme pour essayer de te calmer. Tu te retenais. Mais ce n'était pas ton rôle. C'était le mien. Je pouvais encaisser un peu plus non ?

Médée ∞ « Si tu veux pleurer, me questionner... Vas-y. S'il te plaît... Arrête de tout garder pour toi... »

Mes yeux me faisaient mal. J'avais sûrement trop pleurer. Et je continuais. Ne garde pas tout. Dis-moi... Tu ne dois pas aller mal... Je suis là pour ça. Tu dois aller bien. Quand elle reviendra, elle te voudra en pleine forme...

Je suis seule. Je n'ai personne. Même toi, tu m'échappes à chaque fois que tu me regardes. Tu m'entends Hannah... Il ne pense qu'à toi.

Et ma voix sembla raisonner dans mon crâne vide.

Je suis seule. Personne ne me veut. Personne ne me voudra. Personne. Jamais.

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

- Je suis désolée... de ne pas être Elle...

Alix tourna la tête presque aussitôt, baissant les yeux vers elle avec une expression indéchiffrable, entre l'indignation et l'incompréhension. Il n'avait pas l'habitude de voir Médée dans cet état. Il ne savait pas gérer Médée dans cet état. Pas au moment où sa propre angoisse débordait déjà beaucoup trop, et trop facilement. Jamais il n'aurait cru la voir triste. Jamais il n'aurait cru la voir pleurer. Et du coup, il ne savait pas comment réagir. La saint-valentin avait été un indice assez marqué sur le mal-être qui agitait Médée, mais il ne s'attendait pas à ce qu'elle soit aussi mal.
Il ne savait pas quoi faire d'autre que d'essuyer ses larmes et la serrer aussi fort que possible dans ses bras pour l'empêcher de dire ce genre de choses.

- Tu n'as pas à lui faire de mal... Tu donnerais raison à ceux qui pensent que tu es violent. Alors que non... Tu n'es pas comme ça.
- Ah, je ne suis pas comme ça, tu penses..?

Peut-être que si. Peut-être que ce plafond en était la preuve. Peut-être que ce couteau dans le mur en était la preuve. La violence, il n'avait pas attendu la Forge pour en avoir. Il n'avait même pas attendu Hannah et Médée pour en avoir. Toutes ses crises de manque l'avaient conduit dans cette spirale. Peut-être qu'il était naturellement violent et que seul le jeu contenait cette part de lui. N'avait-il pas été adepte des blagues cruelle pendant une bonne partie de son enfance ?

Il soupira en fermant les yeux, la laissa caresser son visage, écarter ses cheveux. Le malheur de Médée le blessait. Autant que celui d'Hannah ? Il n'en savait rien. C'était elle qui lui avait dit qu'elles n'étaient pas si dissociées que ça, alors il avait assimilé l'information, et il avait parfois du mal à situer les barrières.
Mais il savait qu'il n'aimait pas la voir souffrir.

- Si tu veux pleurer, me questionner... Vas-y. S'il te plaît... Arrête de tout garder pour toi...

Alix serra les dents et relâcha légèrement son étreinte. Non. Il ne se sentait pas le courage de s'effondrer. Évidemment, il allait finir par craquer. Ses mains tremblaient légèrement, à vrai dire pas uniquement ses mains, mais il ne voulait pas s'écrouler en même temps qu'elle. Même si elle le lui demandait. Même si...

- Et on aura l'air de deux boules de larmes dans une couverture... répliqua-t-il à voix basse.

Sa gorge était trop serrée, sa voix trop faible, sa résistance trop élimée. Mais il ne voulait pas y penser. Ne pas penser qu'Hannah avait peut-être disparu pour longtemps. Peut-être pour toujours. S'il pleurait, pour lui, c'était comme l'admettre. Donner trop de réalité à cette situation. Poser des questions ? Pareil. S'il lui demandait trop de choses à propos d'Hannah, il ne ferait que réaliser davantage qu'elle n'était pas là. Sa voix se briserait avant la première question. Il ne pouvait qu'imaginer le vide dans sa tête. Si elle le lui détaillait, il n'aurait aucun moyen d'échapper à cette réalité. Il préférait rester dans le déni. Plus confortable, moins douloureux.

Il caressa son visage du bout des doigts. Tenta, comme il l'avais tant fait dans l'autre sens, de vraiment voir Médée malgré le visage d'Hannah. Elle était là, elle aussi. Seule. Son cœur se serra. Voilà ce qu'ils étaient. Deux idiot seuls dans une résidence qui ne comprenaient pas la disparition de la troisième.
Il ne voulait pas être seul. Il n'avait jamais connu, jamais toléré la solitude. Il ne voulait pas être seul. Jamais. Il ne voulait pas la perdre.
Il sentit sa gorge et sa poitrine le brûler, ravala ses larmes.
Ne pas trop y penser. Ne pas trop réfléchir.

Ces choses dont on ne parle pas

Alix ∞ « Ah, je ne suis pas comme ça, tu penses..? »

Je sais que tu n'es pas comme ça. Tu es doux. Curieux. Ton regard s'illumine quand tu parles de physique ou de chimie. Tu es l'homme qu'Hannah a choisi. Tu ne peux pas être mauvais. Sinon je t'aurais frappé. Je t'aurais terrifié au point que tu ne l'approches plus. Au lieu de ça, je te confie ma vie. Pire encore, je te fais tellement confiance que je te confie sa vie à elle. Et là... Là je savais que tu l'aiderais. Parce que tu l'aimais. Parce que tu ne l'avais pas abandonnée, tu as tenté un autre chemin pour finalement revenir vers elle. Ne vois-tu pas quel homme adorable tu es ? Es-tu tombé si bas que tu en doutes ?

Je continuais de te faire des papouilles, lentement, son cœur se serrant sous ta voix qui se serrait, s'éteignait dans ta gorge. Je m'assis, près de toi. J'avais besoin de te toucher. De sentir que je n'étais pas seule... Mais... Ce n'était pas suffisant. Parce que je faisais ce que je faisais avec Hannah. J'absorbais pour me libérer plus tard. Je ne comptais pas craquer de nouveau. Je ne voulais pas. Je ne pouvais pas... Et tu as tendu le bras. Assez pour toucher ma joue, pour la caresser lentement. C'était brûlant. Comme si tes doigts me brisaient doucement alors que je te sentais la chercher.

Médée ∞ « Alix... »

Je me replaçais pour m'agenouiller, mon buste se penchant vers toi. Au diable tout le reste. Tu souffrais. C'était de ma faute. Je devais réparer ça. Vite.

Médée ∞ « Je suis désolée... Vraiment... Alix... J'ai besoin de toi... »

À quelques centimètres de ses lèvres, je m'arrêtais. J'en avais tellement envie. Tellement besoin. Je voulais qu'il sache que je ne le laisserais pas seul. Que j'étais là pour toi. Que... Que...

Médée ∞ « Je t'aime tellement... Ça me fait tellement mal... J'ai envie d'être avec toi. J'ai besoin de toi... J'ai envie de t'embrasser... J'ai envie de tellement plus... Et... Et toi... Toi, tu ne me vois pas... Tu ne m'as jamais vu. Et c'était très bien. Tu ne devais que la voir elle. Pas moi. »

Ma vision se flouta alors que mes doigts caressaient sans interruption ta peau. Je n'y arrivais pas. Je ne pouvais pas y arriver... C'était trop me demander.

Médée ∞ « Rejette-moi... Dis-moi que tu n'aimes qu'elle, que je ne suis pas ton genre de fille, que tu ne veux pas de moi... Mens-moi... S'il te plaît Alix... Ne me laisse pas t'embrasser... Je n'ai ni la force, ni l'envie de me retenir... Par pitié... Repousse-moi... »

Je crois que mes larmes sont tombées sur ton cou, sur tes joues. Je ne sais pas trop. Je me sentais trembler. J'avais mal. J'avais tellement mal que je ne pouvais qu'espérer mourir. Je t'aimais. Je t'aimais autant que je me détestais. Mais en cet instant, peu importe à quel point je me méprisais, je t'aimais bien plus encore. Je désirais prendre chaque parcelle de ton corps, que tu fondes sous mes caresses, sous mes baisers. Je te voulais comme amant. Comme amour. Et le plus douloureux c'était que je voulais que tout ça soit réciproque.

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

- Alix...

Il leva la tête vers elle, désormais assise à ses côtés. Elle semblait aussi perdue que lui, aussi seule. Elle se pencha vers lui et il sentit son cœur perdre légèrement le rythme. Elle était vraiment, vraiment très proche, et il n'arrivait pas à assimiler les excuses qu'elle venait de prononcer. Il sentait son souffle sur ses lèvres et il déglutit. Ce n'était pas prévu. Il ne savait pas quoi dire, pas comment réagir.

- Tu...

Sa voix ne porta pas assez et elle l'interrompit avant qu'il n'ait le temps de prononcer quoi que ce soit. Il resta là, immobile, à la fixer pendant la déclaration qui lui fendit le cœur. Posa finalement une main sur sa joue pour essuyer les larmes qui envahissaient son regard et menaçaient déjà de rouler sur ses joues. Ces mots se plantaient dans son cœur aussi sûrement et profondément que ceux qu'elle avait prononcés à la saint-valentin. Lui-même sentit ses résistances céder. Retenir les larmes qui flottaient comme une épée de Damocles au-dessus de son cœur lui devint bien vite impossible. Il ne supportait pas de la voir pleurer. De l'entendre dire qu'elle n'avait pas sa place, qu'elle devait être un fantôme.
De l'entendre supplier de la repousser.

- Médée...

Comme un funambule en équilibre au-dessus du vide, Alix perdit son regard dans ses yeux, courut sur son visage, sur ses lèvres. Le souffle de Médée sur les siennes était un appel aux frissons. Elle le priait de la retenir, de l'écarter. Elle lui disait de ne pas la laisser l'embrasser. Mais...
Mais la solitude lui rongeait les entrailles. Mais la peur lui comprimait la poitrine. Mais sa peine à elle lui brûlait la gorge et les yeux.
Mais il n'avait pas envie...

Plutôt que de la rejeter comme elle lui demandait, il sentit son visage se rapprocher d'elle, sa main sur sa joue l'amener à lui ; il sentit leurs lèvres se rapprocher, s'atteindre. Elles avaient le goût salé de larmes, mais les siennes devaient être pareilles. Il l'attira contre lui sans rompre le baiser qu'elle l'avait supplié de ne pas rendre réel.
Il n'avait pas pu. Pas devant sa détresse ni avec le vide au creux de son cœur. La rejeter lui semblait l'effort de trop. La trahison de trop. Il n'aurait jamais eu la force de le faire.

Ces choses dont on ne parle pas

Je m'excusais. Longuement. Pour Elle. Parce que je dépassais tout ce que je ne devais pas dépasser... J'avais envie de me laisser aller. Et, par respect pour Elle, je me retenais. Je n'avais pas le droit. Tu étais bien trop faible pour me repousser. Si j'insistais, tu craquerais. Je le savais. Et je ne voulais pas en profiter. Je n'avais pas le droit. J'ai senti ton mouvement. J'ai senti ton corps se rapprocher du mien. Que faisais-tu ? Tu allais me prendre dans tes bras ? Ta main sur mon visage se pressa assez pour que mon esprit arrête de penser.

J'ai entendu mon nom. Celui qu'à l'époque, Kate m'avait donné. Celui que j'ai gardé parce que je n'en avais, n'en aurais jamais d'autres. J'aimais que tu m'appelles. J'aimais que tu me vois... Et nous n'avions pas le droit. Pourtant je n'ai rien fais. Je t'ai laissé t'approcher jusqu'à sentir tes lèvres sur les miennes. C'est un goût salé qui m'a ramené. C'était mes larmes ou les tiennes ? Tu pleures ? Je t'ai fais pleurer mon trésor... ? Je suis désolée... Je n'aurais jamais dû venir... Tu n'aurais pas dû me voir... Et j'aimais ça. J'aimais que tu m'embrasses. J'aimais tant que je n'ai pas reculé. Je me suis penchée sans lâcher le baiser si attendu qui m'embrasais. Rapidement, je me posais contre toi. J'avais besoin que l'instant ne s'arrête jamais. J'avais chaud, comme au bar.

Mes lèvres restèrent contre les tiennes jusqu'à ce que mon corps me force à arrêter de t'embrasser. J'avais le souffle court, mes larmes s'étaient arrêtées. Et en sentant ton souffle, je me trouvais immonde. Immorale. Méchante. Infâme. Je n'aurais pas dû... Je... J'étais sale. Un frisson me parcourut alors que je me redressais. Je regardais mon bras un instant. Machin m'avait touché là... J'étais sale. Tellement sale... Mon corps frissonna une nouvelle fois.

Médée ∞ « Je peux aller me laver... s'il te plaît... ? Je... Je vais sûrement te demander un câlin... A..Après... »

Mon corps enjamba le tien alors que je n'arrive pas à esquiver tes lèvres de nouveau. Le baiser est plus doux, plus tendre. Plus amoureux. Une caresse légère. Je te voulais. Je t'aime. Je t'aime. Je n'arrive pas à t'aimer. Je n'avais pas le droit. Je m'en fichais. Oui. Non. Je t'aime. Je n'ai pas le droit.

Je suis entrée dans la salle d'eau, attrapant un de tes sweat sans faire attention. Je me suis lavée rapidement, observant la tenue que j'avais porté toute la journée. J'étais... J'étais bien mieux ainsi. Déjà parce que ton odeur m'entourait et me berçait. Aussi parce que j'étais mieux au naturel. Sans artifices, sans jupe qui ne couvre rien. Je n'avais ni sous-vêtement, ni bas quelconque. Je n'avais que ton sweat. Mais tu m'avais déjà vu nue. Et contrairement à Hannah, je me fichais que l'on me voit en tenue d'Ève. Je ne me suis pas attardée sur la vision de mon regard rouge, de mes joues qui semblaient creusées des larmes. Mes iris étaient petits, sous l'effet de l'alcool... Et je me sentais toujours aussi sale...

En revenant, je suis retournée dans ton lit, me cachant sous la couette, comme si elle pouvait mieux me protéger que mes poings.

Médée ∞ « Alix... J.. Tu ne t'énerveras pas trop hein... ? Je t'aime tu sais ? »

Mon regard se ferma lentement. Je ne savais pas trop si tu étais là où pas. Ma tête tournait faiblement. J'étais lourde. Tellement...

Médée ∞ « Il m'a dit des trucs... qu'Hannah aurait trouvé horrible. Il m'a dit avoir réservé un hôtel... Il voulait la prendre... Il était persuadé qu'Hannah aurait dit oui. Il se vantait sans cesse. Il a essayé de m'embrasser pendant le film. Il m'a touché. Il a touché mon bras. Mes hanches. Mes cuisses. Et j'avais envie de le tuer... »

Je n'ai pas réalisé que tu étais contre moi. Je me suis rapprochée pour oublier cette journée de merde.

Médée ∞ « Alix... Je peux t'embrasser encore... ? J'aime quand tu m'appelles... Quand... Quand je suis là... »

Je suis immonde. J'en viendrais à être heureuse de la disparition d'Hannah... Tu ne mérites pas d'être avec moi...

Hannah. Je t'en prie. Reviens vite... Je vais sûrement encore faire des conneries...

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

Ce baiser avait le goût bienvenu de l'oubli. Oublier l'année de solitude qu'il venait de vivre, oublier la détresse actuelle qui lui serrait le cœur, oublier la douleur qu'il entendait dans chacun des mots de Médée. Il laissa leurs lèvres se retenir, se trouver comme elles ne s'étaient jamais vraiment trouvées. Jamais il n'avait embrassé Médée comme ça. Jamais il n'avait embrassé Médée autrement que dans un jeu qu'elle avait lancé, un baiser provocateur entre deux commentaires ironiques. Ceux qu'elle faisait avant de laisser la place à Hannah pour la mettre mal à l'aise, ou avant de s'éclipser sur un dernier sourire narquois.
Aucun n'avait jamais porté autant de sentiments. Autant de besoin.
Là, dans la solitude qui les rongeait l'un comme l'autre, c'était presque la seule chose qui semblait réelle. Et quand leurs lèvres se séparèrent, il se sentit vide.

Elle s'éloigna en lui accordant un baiser tendre qui, lui non plus, ne ressemblait à rien de ce qu'ils avaient un jour pu échanger. Il n'avait pas vraiment écouté où elle allait. Se laver ? C'était ce qu'il lui semblait avoir entendu ; Si elle avait erré, alcoolisée, dans les rues de Londres avant de venir ici, ça n'aurait rien d'étonnant. Il laissa sa tête reposer contre le matelas avec un long soupir et en fermant les yeux.
Véritablement seul depuis que Médée avait franchi cette porte. Tandis qu'elle se douchait dans l'autre pièce, il se replia doucement sur lui-même, s'enroula presque dans la couette. Il n'avait jamais eu autant besoin de chaleur.

Quand elle le rejoignit, se cacha sous la couette non loin de lui, il réalisa qu'il respirait un peu plus normalement. La solitude le glaçait, lui rongeait les sangs. Est-ce que la présence de Médée la comblait vraiment ? Il n'en savait rien. Il n'avait pas envie de se poser la question. Il l'écouta parler en se recroquevillant de plus en plus sous sa couverture. Même la colère peinait à traverser la barrière de ses angoisses. De sa peur. L'idée qu'il ait pu la toucher, les toucher, avoir la présomption de croire qu'elles tomberaient dans ses bras... elle aurait fait bouillir son sang dans ses veines quelques minutes plus tôt. Mais là... là, il se sentait tellement glacé que même la rage ne le réchauffait pas assez pour faire brûler son cœur.
Il se roula juste en boule, sous sa couverture, la gorge serrée, tandis qu'elle continuait d'évoquer tout ce que cet enfoiré avait essayé de faire. L'embrasser... l'embrasser... comme si quelqu'un d'autre qu'Alix avait le droit de l'embrasser... Droit qu'il s'était enlevé. Droit qu'il n'aurait jamais dû s'enlever. Droit qu'il voulait récupérer.
Si Hannah ne revenait pas, il ne le récupérerait pas.
Cette constatation lui planta une nouvelle lame au fer blanc dans le cœur et il sentit des larmes qu'il ne chercha pas à retenir. Il essuya ses yeux d'une main en serrant les dents.

- Alix... Je peux t'embrasser encore... ? J'aime quand tu m'appelles... Quand... Quand je suis là...

Son cœur se serra davantage, comme si c'était seulement possible. Il tourna à peine la tête, aperçut son visage, finit par se retourner complètement pour la prendre dans ses bras. À chaque fois qu'il l'embrassait, il se sentait bien. À chaque fois qu'il l'embrassait, il se sentait coupable. Les deux sentiments se battaient en duel bien plus violemment que la peur et la colère. Ses doigts s'attardèrent sur le visage de la jeune fille. Hannah. Médée. Hannah ou Médée. Il savait qui il avait en face de lui. Ses baisers n'avaient pas le même goût, son regard n'avait pas le même air. L'apparence ne faisait pas tout. Une leçon qu'il avait dû enseigner à la manière forte cinq mois plus tôt.
Non, il savait qui il avait en face de lui.
Ça ne l'empêcha pas d'attirer son visage vers le sien. De l'embrasser à nouveau. Juste pour sentir un peu de chaleur à travers le froid qui l'avait envahi. Un peu de réel dans cet instant de cauchemar. Médée était bien plus réelle qu'elle ne l'imaginait. Bien plus.
Et il avait besoin de cette réalité.

Ces choses dont on ne parle pas

J'avais besoin de tes bras. J'avais besoin que tu m'enlaces comme tu m'enlaçais actuellement. J'ai besoin que tu me voies... Mon Dieu, que suis-je en train de penser ? Non. Non ! Tu ne dois pas me voir ! Tu ne dois pas m'enlacer. S'il te plaît … Reprend-toi … Par pitié... Arrête Alix. Tu ne dois pas. Nous n'avons pas le droit. Continue de caresser mon visage. Arrête. Je n'en veux pas. Je n'ai désiré que ça. Je t'aime. Je ne dois pas t'aimer. Ne me voit pas. Regarde moi. Je t'en supplie. Je t'en conjure. Déteste-moi. Aime-moi.

C'était le bordel dans ma tête. Je te veux. Je veux te repousser. Je veux que tu ne sois qu'à moi. Tu ne devais être qu'à Hannah.

Médée ∞ « Je... »

Et tes lèvres me prennent de nouveau. Mon cerveau craque. Encore. Ne t'arrête pas. Tu fais battre mon cœur. Stop. Hannah n'aimerait pas. Éloigne-toi de moi. Reste près de moi. Je t'aime. Je ne dois pas t'aimer. Aime-moi. Tu ne dois pas m'aimer. Je n'arrive pas à te repousser. Mes mains viennent enlacer ton visage. J'ai besoin que tu sois réel. Seigneur, faites que ce ne soit qu'un rêve. Par pitié, soit à moi. Par pitié, détruis-moi.

Mon corps s'approche du tien. Si c'est un rêve... Je veux rêver encore des années. Je donnerais ma vie pour toi. Pour que tu sois heureux. Pour... Mon souffle s'écrase sur tes lèvres pendant que mon cœur s'emballe. Je t'aime. Je ne dois pas t'aimer.

Médée ∞ « ...suis tienne... Encore... Embrasse-moi encore...»

Non. Si. J'ai bien fais. Je ne dois pas. Je suis désolée. Menteuse. Je ne suis pas une menteuse. Je le suis. Je veux qu'Elle revienne. Je te veux pour moi. Je veux tout. Je n'ai rien. Je ne te laisse pas réfléchir. J'enlace nos jambes ensemble, je reprends tes lèvres. J'ai besoin de toi. J'ai besoin d'attention. Non. Que de toi. C'est faux. C'est vrai. Dis-moi que je t'aime vraiment. Dis-moi que tu ne veux pas de mon amour. Dis-moi que mes sentiments viennent d'Hannah. Dis-moi que je n'existe pas.

J'ai besoin de toi. J'ai besoin que tu comprennes ce que je suis avec ce baiser. J'ai besoin que tu me comprennes. Pas longtemps. Juste le temps de nous endormir. Demain tout ira mieux non ? J'espère...

Médée ∞ « Je t'aime tellement... »

Je t'en supplie... Fais-moi taire. Fais-moi hurler. Dis-moi ce que je veux entendre. Dis-moi ce que tu veux dire. Dis-moi ce que tu penses. Embrasse-moi. Déshabille-moi. Embrase mon corps, que je puisse partir pour de vrai.

Médée ∞ « Alix... Continue... »

Non arrête-toi. Continue. Je t'aime. Je n'ai pas le droit ! Arrête-toi. Fais-moi l'amour. Déteste-moi. Renie-moi. Va chercher Hannah. Trouve-moi d'abord.

Je suis idiote. Folle. Folle de tout. Folle de toi.

23 juin
2018

Ces choses dont on ne parle pas...

Médée

Qu'était-il en train de faire ? Qu'était-il en train de penser ? Son esprit était flou, son cœur était en panique, son corps était hors de contrôle. Il n'arrivait pas à réfléchir. Pour quoi faire ? Aucune réflexion ne le sortirait de là, aucune réflexion ne pourrait lui rendre Hannah. Il ne pouvait que s'accrocher désespérément au réel. Médée. Il sentait ses mains autour de son visage, qui empêchait leur baiser de se rompre. Il ne chercha pas à la lâcher. Il passa son bras derrière sa nuque pour la garder contre lui, ne relâchant ses lèvres que quand elle s'écarta pour parler. Les mots peinèrent à se frayer un chemin jusqu'à son esprit. Il avait le cerveau trop embrouillé, trop d'informations contraires pour la comprendre. Les mots étaient flous, les sentiments aussi. Il ne savait plus ce qu'il traversait. Il ne savait plus ce qu'il était censé penser.

Elle était collée contre lui. Il l'embrassait. Il sentit sa respiration s'emballer lorsque leurs jambes se touchèrent et s'enlacèrent. Elle était si proche... Si proche alors qu'Hannah était si loin.
La pensée le frappa de plein fouet ; il la chassa en glissant sa main derrière sa tête, croisant ses doigts à ses cheveux pour la ramener plus près, toujours plus près de lui comme si ça allait effacer tout le reste.
Il voulait effacer tout le reste.
Il n'avait pas le droit. Il le réalisa au moment où elle prononça ces mots.
"Je t'aime". Et moi?
La question ne trouva pas de réponse dans sa tête. Juste une autre question. Deux autres questions. Peut-on aimer deux personnes en même temps ? Pouvait-il vraiment réfléchir à ses sentiments dans sa situation ? Peut-être à la première, non à la deuxième. Il ouvrit les yeux un quart de seconde pour voir son visage. Les referma sans lui répondre. Que lui répondre, de toute manière ? Il ne pouvait pas affirmer qu'il ne l'aimait pas. Pas affirmer qu'il l'aimait. Sa seule certitude était qu'il se sentait désespérément seul. Était-il en train de se servir d'elle ? Non... Non... Ça n'était pas son genre.

Mais elle avait bu. Lui non. Mais ils étaient tous les deux désespérés avec un besoin violent de sentir l'autre dans leurs bras. Était-elle vraiment amoureuse de lui ? Sûrement. Il ne se trouva pas la force de la repousser. Pas l'envie, non plus. Il se contenta de faire ce qu'elle le suppliait de faire. De continuer. De l'embrasser à nouveau. De murmurer son nom juste avant de sceller leurs lèvres encore une fois.
Il se sentait cruel et égoïste. Ne la faisait-il pas davantage souffrir en l'embrassant ainsi qu'il ne l'aurait fait en la repoussant quand elle le lui avait demandé ?