[Galerie] Le bazar de Bell & Martel

Hey, elle aussi elle a couché avec Ruthven xD Cette école était petite.


↑ Cette image date de la v1 de ce forum, genre il y a 6-7 ans, quelque chose comme ça.


Me demandez pas pourquoi ils sont déguisés en dinosaures. J'ai oublié, mais il me semble que ça venait d'un pseudo-pictionnary dans le flood.


↑ Je vous épargne les détails irl autour, mais il est sorti avec cette fille-là après, avant que le forum disparaisse

L'art de se rencontrer dans la délicatesse et la bonne humeur.


↑ La nuit, ou le pourquoi il y a un couvre-feu à Indarë .o.


↑ Je t'aime bien, viens on deviens copains. Non ? T'as pas le choix


↑ En vrai, juste après elle s'est barrée en courant


Le rp a jamais atteint ce stade, mais globalement ça c'était "je m'en fous que tu sois son mec, je l'ai vue en premier, dégage".

Qu’est-ce qui t’arrive ?
Quand elle ouvrit les yeux, il n’y avait rien. Rien que cette question qui tournait, encore et encore, parce qu’elle ne parvenait pas à percer l’obscurité qui s’étendait devant elle.
Je tangue. Je vacille. Je ne vois rien.
De quoi tu te souviens ?
Rien.
Si, elle se souvenait. Elle se souvenait d’être sortie de chez elle pour acheter quelque chose. Quoi ? Aucun idée. Et après ?
Rien.
Elle cligna des yeux. Un fois. Deux fois. Trois fois. L’obscurité sembla s’éclaircir, devenant comme une lueur crépusculaire autour d’elle. Elle tourna la tête, mais le monde était encore flou. Impossible d’avoir un tableau clair de la réalité qui l’entourait.
Si. Elle était sortie faire une course rapide. Il lui manquait quelque chose. Du sucre, peut-être, ou des œufs. Il faisait jour, à ce moment-là. Elle avait respiré l’air frais de la montagne en sortant de chez elle, avait salué un voisin.
Plus rien. La mémoire s’interrompait là, encore.
Elle se leva lentement, tâtonna dans le noir. Un mur, ici. Quelque chose heurta sa jambe. Elle se pencha, sentit de l’osier sous ses doigts. Un panier, peut-être. Souviens-toi, bon sang.
Elle était passée devant le café où elle sortait souvent avec ses amies. Un autre, qu’elles évitaient comme la peste, La Cabane, qui avait très mauvaise réputation et qu’elle avait évité de son mieux.
Bruit de frein.
Lumière.
Obscurité.
Je me souviens.

"longues plumes de glace" "tours bourgeonnantes" "rider le ciel" "à la dérive"
"pluie" "neige" "nuage" "lois rationnelles" "cotonneux"

Les légendes qui couraient à travers le pays étaient nombreuses, de la plus terrifiante histoire de fantôme aux superstitions féeriques. Pour Raine, la plus magique, la plus attirante de toutes était celle qui couvrait le mystère du Nuage de Brume, cette région que nul n’avait osé explorer et qui avait alimenté rêves, contes et fantasmes, cette région qu’elle essayait d’observer du bord de sa fenêtre.

Elle tendit une main hésitante, son gant noir disparaissant dans le brouillard opaque qui marquait la frontière de son village. On racontait que derrière cette barrière de pluie figée s’étendait un royaume peuplé de fées et des animaux miraculeux qui, de son côté, ne faisaient qu’alimenter des histoires. Ce royaume s’appelait Raine, comme elle, et sans doute était-ce ce qui l’attirait tant.

De la brume, sa main ressortit intacte, à peine couverte de quelques gouttes d’eau affectueuses. Après une grand inspiration, Raine s’aventura dans la brume, le poing serré sur la poignée de sa lanterne.

Quand la pluie figée cessa de caresser son visage, elle ouvrit les yeux. Sa lanterne tomba au sol, dans un bruit de verre brisé qui ne retint pas son attention.
Elle ne remarqua qu’après la neige qui craquait sous ses sandales alors que chez elle l’été commençait à peine, ou le fleuve gelé qui serpentait dans la brume sans exister de l’autre côté, ou encore les longs traits nuageux qui ridaient un ciel bien trop blanc pour un mois de juin.

Devant elle s’étendait un monde à la dérive, dont la nature même défiait les lois rationnelles. Tout ce qu’on avait voulu lui enseigner pour effacer les contes et les croyances de son enfance se brisait sans retour possible sur les tours bourgeonnantes d’un château de cristal qui semblait avoir poussé là, sur une île flottant à quelques pas du sol. Un vertige la saisit quand, en baissant les yeux, elle vit s’étendre un vide cotonneux qui semblait infini. Elle leva la tête, préférant affronter le ciel.

L’île du château était la seule qui semblait habitée. Toutes les autres terres flottantes, couvertes de neige, n’était qu’ode à une nature improbable, entre arbres de glace et fleurs immaculées. Elle s’avança à pas timides vers une cascade gelée qui reliait le fleuve au château et, le cœur serré par l’angoisse, elle grimpa.
Debout devant les porte de cristal, Raine perdit son regard dans les méandres du Nuage de Brume, et ses doigts effleurèrent le pendentif qui brillait à son cou. Une longue plume de glace, ramenée du royaume par son père avant qu’il ne disparaisse. Quand un oisillon aux plumes semblables se posa à ses pieds, elle adressa un adieu silencieux à son village natal et franchit les portes, prête à rencontrer le roi.
Prête à revoir enfin son père.

FRAISES : Je me souviens du parfum de fraise. Pas celui des fruits, même si j’en ai mangé beaucoup, vraiment beaucoup, avec du sucre et de la chantilly, mais seulement le parfum, celui du gaz que l’on fait respirer aux enfants pour les endormir, à l’hôpital. J’y allais souvent, je crois – d’après ce qu’on m’a dit. J’étais la gamine qui entrait en même temps que tout le monde et qui ne ressortait pas, histoire de faire bien peur à ma mère, alors que j’avais juste le sommeil lourd et que je ne m’étais pas réveillée avec les autres. Je n’ai pas beaucoup de souvenirs de tout ça, juste des histoires qu’on me raconte et ce parfum de fraise. J’en avais presque oublié l’odeur avant le collège, et on m’y a renvoyée à cause d’une prof de sport qui semblait avoir oublié la définition d’asthme et qui était persuadée que je faisais semblant. Retour à l’hôpital, on attend, longtemps, et puis ce gaz à la fraise. Je ne sais pas si je rendormirai pendant des heures après ça, maintenant, mais je me rappelle de cette odeur de fraise. Rien à voir avec celle du vrai fruit.


INSOMNIE : Il y a plusieurs façon d’être insomniaque. Il y a ceux qui le sont depuis l’enfance, les enfants hyperactifs généralement qui ont déjà du mal à trouver le sommeil, et ça ne s’améliore pas en grandissant. Et il y a ceux qui finissent pas le provoquer involontairement, comme moi, à force de vouloir oublier l’utilité du sommeil. D’aussi loin que je me souvienne, je me couchais tard. Je me rappelle de cette limite de minuit, l’heure à laquelle ma mère montait se coucher et passait dans ma chambre pour m’embrasser avant de dormir, sachant que moi, bien sûr, j’étais endormie depuis longtemps. Sauf que non. J’avais toujours un livre, ou un jeu, et le regard qui faisait des aller-retours vers le réveil pour être sûre et certaine de ne jamais rater ce "minuit", de ne jamais me faire prendre. Lire sous la couette à la lumière de la GameBoy, tout éteindre à minuit, et s’endormir avant d’avoir eu le temps de tout rallumer. J’avais fait une obsession sur ce minuit, au point d’un cauchemar qui a été récurent pendant un long moment, d’espèces de monstres qui venaient attaquer toute ma famille parce que, pour une raison absolument floue, on était encore en train de dîner à minuit. On courait tous se coucher, le plus vite possible, mais les corbeaux géants savaient qu’on ne dormait pas vraiment, et on se faisait prendre. À minuit, toujours.
Après, la limite de minuit a perdu sa raison d’être. Le collège doit être la seule période où je me suis couchée tôt, puis j’ai atteint le lycée, les longues soirées sur l’ordinateur, les nuits blanches pour finir à tout prix un bouquin parce que chaque chapitre se terminait avec du suspens, les enchaînements de deux à trois nuits blanches de suite, cette impossibilité de faire des siestes qui me poursuivait depuis la maternelle – le deuxième cauchemar de mon enfance, les siestes. Se coucher à 10h pour se réveiller à 16 le week-end, dormir en cours la semaine, et un long processus grandement arrangé par un décalage horaire de six heures pour réussir à reprendre un rythme à peu près normal. Trop tard pour empêcher les insomnies de se faire une petite place au chaud. Je ne sais pas si j’étais insomniaque avant ou si je l’ai provoqué moi-même, à force de lutter contre le sommeil, mais je me retrouve souvent à regarder ma montre à cinq heures du matin en me demandant comment j’ai fait pour ne pas avoir une seule seconde de sommeil depuis minuit.

Dans votre langage, disons que je suis un voleur, dans une ville que vous ne connaissez sûrement pas et que je ne prendrais pas la peine de nommer pour vous. Pour les autres, je suis ce que j’ai envie de leur montrer et nul ne se doutera jamais vraiment que je suis tout le monde et personne à la fois.

Ce que vous devez savoir sur cette ville, c’est qu’il fait toujours très chaud, une chaleur à crever, qui rend certains déguisement plus durs à porter que d’autres. Prendre le costume de tous ces marchands et venus du nord qui gardent leur tenue d’origine par fierté, c’est quelque chose que j’évite, mais pour se mêler à la foule certaines saisons, il est plus discret d’être un touriste.

Dans un livre que j’ai volé une fois, un truc à propos d’un trône fait avec des épées, ils parlaient d’assassins sans visage qui pouvaient prendre n’importe quelle apparence. Sans me vanter, de criminel en criminel, je pense être leur alter-égo chez les voleurs.

Il faut gagner sa vie comme on peut, non ? Mon travail à moi c’est de jouer des rôles, comme un acteur, sauf que c’est surtout pour mettre tout votre argent dans mes poches.

Il faut se lever, plus vite que ça. Sortir de la chambre, mettre des beaux vêtements, s’asseoir pour la soupe. On est six, des gamins qui n’ont pas demandé à naître et à qui on a pas demandé de naître. Ce soir on sera sûrement cinq. "Feng a onze ans, c’est un adulte maintenant", qu’ils disent. En fait, c’est juste que c’est un garçon et qu’ils ne veulent pas le nourrir pour rien. De toute façon, sa mère est morte hier et son père n’était qu’un client anonyme comme les autres. Comme tous nos pères. Comme le mien. On est des "accidents de travail", voilà, c’est que qu’on nous dit souvent, même si je sais pas trop ce que c’est comme travail. Et Feng va partir ce soir, j’en suis sûre, ils vont lui coller un baluchon entre les mains et le mettre à la porte. Et demain, on sera cinq.

Moi aussi, j’ai onze ans. Moi aussi, je veux partir. "Tu as de la chance, Shih", qu’ils me disent, "tu as un joli visage, tu vas devenir une belle femme, ils vont te garder. Tu crèveras pas de faim dehors." Moi, je veux pas qu’ils me gardent. Je veux pas finir comme ma mère, que je n’ai jamais vue, et rester enfermée ici toute ma vie, jusqu’à avoir moi aussi un accident de travail qui sera une jolie fille et qui restera ici. Je veux m’enfuir, moi, être libre.

Depuis la fenêtre, la petite fenêtre de notre petite chambre, on peut voir la mer. Quand tout le monde dort, j’arrive à ouvrir la fenêtre et à écouter les vagues. Elle est trop petite pour que je sorte, et pourtant je voudrais être de l’autre côté. Là-bas, il y a des bateaux de l’armée de Chine qui combattent les pirates. Je préfère les pirates. L’armée de Chine, elle vient jamais ici, elle viendra ni m’aider, ni me sauver. Les pirates, ils sont déjà venus. J’ai entendu tout le monde crier de l’autre côté du mur, là où on a pas le droit d’aller, puis ils sont partis. Avec une des femmes.

Quand je serai grande, quand ils m’auront gardé, j’attendrai les pirates. Ce sera moi qu’ils emmèneront sur leur bateau, dans la mer, et ils me garderont, eux aussi. Parce que je suis jolie. Et au lieu d’être juste la petite terreur de la chambre qui gronde les autres enfants, je deviendrai une grande pirate, libre comme l’air. Je serai la terreur des mers de Chine.

J’aime ce nom, ça sonne bien. Beaucoup mieux que cette journée et toutes les autres qui se répètent. J’ai fini de manger, je lave mon bol et je rejoins les autres enfants dans la chambre. On ne nous apprend rien – ce serait du temps perdu – mais j’ai trouvé un livre pour apprendre l’écriture, les caractères. Quand ils ouvrent aux clients derrière le mur, je sors mon livre pour instruire mes frères. Non, mon équipage. Mon équipage de six bientôt cinq.

Il fait presque nuit dehors maintenant. Les autres enfants jouent avec des bouts de ficelle, moi je regarde le ciel. J’aimerais rejoindre toutes ces étoiles mais je dois rester là, attendre, être patiente. Bientôt il faudra manger, et retourner dormir, et recommencer, encore et encore, pendant des années.

Il y a un cri à côté. Une femme. Deux autres cris, puis j’entends l’un d’eux hurler quelque chose, un mot qui regonfle mon cœur d’espoir. Les pirates sont revenus. Pas pour moi, pas encore, mais bientôt c’est moi qui partirai avec eux. Moi, Shih Yang.
La future terreur des mers de Chine.