À droite, l'école et ses élèves normaux, comme tout le monde.À gauche, le centre de redressement pour jeunes dangereux.Maintenant réunis, pour le pire.
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Pfiou, la matinée a été éprouvante. Mes premiers cours à Indarë... Ça me fait bizarre de me dire que je n'y serais jamais allée si mon frère n'avait pas eu de problèmes. Si ça se trouve, sans Alix, on serait tous allés dans une école privé lambda de Londres. Ça aurait été dommage parce que, en vrai, j'aime déjà pas mal cette école. Mes colocs ont l'air sympas même si j'ai encore un peu de mal à leur parler - mais je les connais que depuis quelques heures, aussi ! - et j'ai rencontré une fille sympa en cours, ma voisine de table, Billie. Elle aussi, elle a un frère et une sœur plus vieux qu'elle qui sont venus à Indarë, sauf qu'ils sont toujours là alors que les miens sont partis, et qu'ils ont dix mois d'écart et les miens, dix minutes. Mais bon elle a l'air cool, fun, intelligente aussi, et moins timide que moi... tant mieux parce que j'aurais eu du mal à lui parler, sinon.
Bref en gros, pour mon premier jour, je me suis déjà fait trois copines. Comme quoi parfois les placements imposés, ça a du bon ! Par contre je dois avouer qu'il y a un truc qui me stresse, c'est l'heure du déjeuner. À mon collège, on nous imposait des plats et on avait pas le choix mais ici, on m'a dit que les réfectoire était un self, donc il faut demander. Ça veut dire que j'ai une chance sur d... non, trois chances sur quatre de bafouiller en essayant de commander mon repas, et d'avoir autre chose que ce que je voulais sans oser le dire. Peut-être que je peux demander à Billie de parler à ma place ? ... Non, c'est pas une bonne impression et c'est ma première copine, je veux pas tout gâcher dès le premier jour. On se connaît que depuis le cours d'art il y a deux heures !
- Ça va, Naev ? - O... Oui ! Je euh... j'espère qu'on aura un truc bon. - Hm hm. Panique pas, va, tu es là pour manger, pas te faire manger.
Oui, bon, elle a raison. Mais elle a de la chance, elle, elle est pas aussi timide que moi ! Alors qu'elle a un an de moi. Ah la la... En même temps, j'ai toujours eu un peu de mal. Alix et Rikissa ont toujours été ensemble, eux, mais moi je devais me faire des copains toute seule. C'est moins facile.
- ...ev ? - Hein ? - C'est à toi. - Ah ? Ah ! Euh je... je... Je vais prendre ça.
J'ai pointé un truc au hasard, c'est quoi ? Un truc avec du riz. Bah, de toute façon, je suis pas difficile, j'ai l'habitude de manger des choses nouvelles parce que j'arrive pas à m'exprimer clairement.
- Y a une place de libre, là-bas !
Hein ? Mais... mais il y a déjà quelqu'un d'assis. Un garçon aux cheveux châtains et aux yeux marrons. Je le reconnais pas. Il est dans notre classe ? Ou dans une autre, il a l'air plus vieux que nous. Elle a quand même pas l'intention d'aller s'incrus... ah, si. J'ai le droit de me cacher dans mon plateau ?
- Coucou ! On peut s'asseoir avec toi ?
Mais ça se fait pas... enfin c'est bien parce qu'il a l'air tout seul, mais c'est hyper gênant ! Si ça se trouve il est timide aussi, en plus. Et s'il réagit comme moi ? Ça doit lui faire trop bizarre.
La reprise des cours, qu'elle soit officielle ou non, a toujours eu quelque chose de stressant et d'autant plus cette année étant donné qu'absolument tout est nouveau ou fait office de changement ; les élèves, les bâtiments, les professeurs, les surveillants, les règles ou la façon d'enseigner. Je n'ai jamais été très friand des changements, qu'ils soient provoqués par un déménagement ou par une violente dispute entre mes parents et la direction de mon ancien collège contre lequel ils ont porté plainte. Je ne connais même pas les raisons de cet échange, ni pourquoi maman était très en colère, ce jour-là. Certainement à cause de moi. C'est toujours à cause de moi qu'elle s'énerve. Pas dans le sens où je suis celui qui contribue directement à ce qu'elle se mette dans un tel état, mais plutôt parce que ma condition donne naissance à des situations que peu ou pas d'enfants, voire certains adultes, n'arrivent pas à gérer ou à comprendre.
Depuis tout petit, j'ai été habitué aux regards insistants, aux questionnements et même parfois à quelques moqueries, tout simplement parce que je ne rentre pas dans la case de la normalité. Bien que nous soyons tous différents, déjà par notre sexe ou par notre prénom, je fais partie de ces personnes qui se mettent, et ce malgré elles, en avant pour une sorte d'anomalie, de rareté. Dans mon cas, cette différence porte un nom : la mucoviscidose. Je vis avec depuis toujours et elle contribue à une détérioration naturelle de mon état général, de ma santé et plus particulièrement de ma respiration. Elle ce qui fait que trop de regards se tournent vers moi dans mes phases les plus sombres et que trop de mains me sont tendues comme j'incarnais une personne étant dans une quelconque incapacité d'exercice. Ça me hérisse les poils, rien que d'y pensant et je finis par ne plus dissocier les bonnes âmes de celles qui me veulent du mal. Leurs gestes d'aide sont-ils portés par une bienveillance ou uniquement dictés par une volonté de pointer du doigt ce qui me fait honte ?
Seulement, je n'ai pas le courage de le leur dire en face. C'est déjà assez difficile comme ça de se faire des amis ou de donner envie à quiconque de s'approcher de moi sans qu'ils me prennent pour un cancéreux contagieux. Et puis, c'est dans ma nature d'être assez calme, silencieux et réservé. Est-ce à cause de cette différence ? Je ne pense pas. Du moins, cette dernière n'a en aucun cas été déterminante vis-à-vis de ma personnalité. Après, il faut dire que je ne sais pas trop comment ça fonctionne. Mais je suis certain d'une chose, c'est que je suis, de base, un grand timide. Et puis, je porte beaucoup, voire bien trop d'importance à ce que les personnes qui m'entourent, inconnus, connaissances ou amis, peuvent penser de moi, de mon physique, de ma façon de parler, de me tenir, de mes vêtements, de mes idées, de mes goûts ou de tout ce que je peux faire ou dire. Leurs avis détiennent une importance primordiale sur ma capacité à me sentir bien dans ma peau ou non. Ils sont en quelques sortes les juges me permettant de corriger ce qui ne va pas chez moi. C'est d'ailleurs pour ça que j'évite un maximum de me montrer sous mes jours plus délicats, où une aide respiratoire m'est primordiale si je ne veux pas risquer de virer au bleu ou de devoir faire venir une ambulance en urgence. C'est aussi pour cette même raison qu'aujourd'hui, je me suis permis de venir démuni de tout attirail démontrant une quelconque différence. J'ai toujours mon inhalateur dans mon sac et je me fais passer pour un asthmatique, ça m'évite d'être jugé au premier regard.
L'heure de la pause déjeuner est arrivée, le moment de pouvoir un peu souffler entre les cours. Pas besoin de faire la file pour prendre quelque chose à manger, je sais que pour un premier jour maman m'a préparé un petit quelque chose, sachant très bien que je suis certainement trop réservé pour oser m'adresser aux personnes travaillant au réfectoire. Et elle a raison, parce que je ne l'aurai pas fait et je serais rentré à la maison le ventre vide. Enfin, uniquement rempli par ce que j'ai mangé ce matin et qui aurait déjà été digéré durant la journée.
Après avoir timidement et furtivement regardé autour de moi, je me trouve une table assez tranquille, sur laquelle personne ne s'est installé. Bingo. Ça me permet de ne pas demander si une place est libre ou si ça ne les dérange pas que je me joigne à eux. Encore une fois, la sociabilisation, ça n'est pas trop mon truc. Je sors donc le tout pour manger et joue quelque peu avec ma fourchette dans la salade de pâtes qui a été préparée avec amour par ma maman que j'aime tant. Tout a l'air délicieux, comme toujours, mais j'avoue être quelque peu barbouillé par le stress éprouvé durant cette première partie de journée. Alors je me force un peu à prendre quelques premières bouchées, mais ralentis presque instantanément la cadence, les yeux perdus dans mon plat, l'air un peu... évadé, dans la lune, me détachant un instant de la réalité. En vérité, je pense un peu à tout, surtout en ce qui concerne l'école et à mon avenir au sein de celle-ci, si les choses ne tournent pas comme l'année passée et que je me trouve à devoir prendre des cours à domicile.
Mais alors que je ne prête aucunement attention à ce qui m'entoure, l'approche d'une silhouette, ainsi que sa prise de parole, me sortent toutes deux de mes pensées, me faisant lentement et tout aussi timidement relever la tête. Je la regarde longuement dans les yeux avant de me mettre à rougir et à fuir son regard tout en souriant bêtement.
Que... qu'est-ce qui me prend ? Je... Elle doit me trouver hyper bizarre ! Il faut que je réponde, que je lui dise quelque chose ! C'est peut-être le moment opportun pour se faire des amis !
Un peu dans la panique d'un désir absolu de répondre quelque chose, je relève la tête et prend la parole de manière très peu naturelle, sur une tonalité un peu plus haute que je ne désirais employer, me reprenant cependant assez rapidement, les rougeurs s'emparant de la quasi-totalité de mon visage avant que je ne recommence ma phrase de façon moins... pressée ?!
- O-Oui, bien sûr ! J-Je... Allez-y ! Elles... elles sont libres, les tables ! Enfin, les chaises ! Ce que je veux dire, c'est que... il y a de la place, pour vous installer... si vous... voulez...
Je baisse automatiquement mon visage vers mon plat, fermant les yeux et cherchant à inspirer et expirer lentement, mon cœur battant à cent à l'heure. Il faut que je me calme sinon je vais finir par faire une crise d'angoisse et commencer à souffrir de difficultés respiratoires. Pour une fois qu'on vient me parler, ça serait dommage de tout gâcher à cause de ça.
Sitôt entré dans le réfectoire, Theophile se figea, le souffle coupé. Un brouhaha assourdissant s’élevait autour de lui, c’était si insupportable qu’il mourrait d’envie de faire demi-tour et de se ruer dehors. Il regrettait le calme de sa chambre qui sentait bon le livre. Ici, tous ses sens étaient agressés. Trop de bruits, une forte odeur de nourriture, plein de monde. Son cœur s’emballa. Il n’en serait pas capable. Il n’allait pas en être capable. C’était impossible. Derrière lui, les gens s’impatientaient, et il réalisa qu’il bloquait le passage. Le temps était précieux à ses yeux, il détestait faire attendre les gens, aussi, il avança d’un pas rigide, la boule au ventre. Il avait la sensation d’être constamment agressé tant la cacophonie était omniprésente et écrasante.
Quand arriva son tour de choisir son plat, Theophile ferma les yeux un instant en inspirant à fond. Il devait se reprendre et se montrer calme. Non. Il devait être calme. Il devait réprimer ses émotions. Il tenta d’ignorer l’atmosphère oppressante en songeant aux révisions dans lesquels il se plongerait quand il serait installé tout seul à une table. Quand il rouvrit les paupières, il parvint à commander d’une voix suffisamment claire pour se faire comprendre. Il refusa de prendre de la viande, fidèle à ses convictions, puis, il pivota avec son plateau pour chercher une place du regard. Son cœur se serra aussitôt. N’y avait-il aucune table où il pouvait s’installer seul ? Etait-il arrivé trop tard dans le réfectoire ? Il n’avait aucune envie de se joindre à une table presque pleine et de réviser à côté de leurs bavardages ! Finalement, il nota une table occupée par une seule personne. Cela ferait amplement l’affaire, il lui suffisait de s’installer à cette table, et l’autre n’aurait personne à qui parler ! Il se dirigea d’un pas décidé vers cette table avant que son entrain ne fonde aussitôt quand deux filles se joignirent à lui. Le garçon les observa un instant, dépité, entendant malgré lui leur échange qui lui fit aussitôt regarder espoir. Ils ne se connaissaient pas ! Les filles s’étaient installées à cette table par défaut, comme lui. Avec un peu de chance, ils ne parleraient pas trop. Bon, peut-être les filles entre elle… Mais c’était ce qu’il avait trouvé de mieux. Il s’avança alors de nouveau et s’assit avec eux en déclarant :
« Permettez que je me joigne à vous, il y à déjà beaucoup de monde.
Il nota que le garçon semblait un peu… Bizarre ? Et supposa que l’agitation et le bruit ne lui réussissait pas non plus, aussi, il ajouta :
- Je cherchais un endroit calme, ce n’est pas chose facile ici . »
J’espère que mon post te conviens, n’hésite pas à me prévenir s’il y a un problème et j’éditerais ^^ Prends le temps qu’il te faudra pour répondre :hearts:
Voilà, je le savais ! Elle l'a mis mal à l'aise ! En même temps, elle parle aux gens qu'elle connaît pas comme s'ils étaient potes depuis super longtemps. je sais pas comment elle fait ça. Mais je vois le garçon rougir et je me sens un peu honteuse qu'elle lui ait imposé ça, du coup je crois que je rougis aussi. C'est quoi ce talent pour perturber les gens, là ? C'est pas humain ! Déjà c'est pas humain d'être aussi à l'aise avec les inconnus. Enfin, en tout cas, il a accepté. Il me fait un peu penser à moi, en fait, je suis sûre que j'aurais été capable de répondre de la même façon en m'embrouillant à mort dans mes phrases. Alors je rassemble tout mon courage pour faire un petit sourire gentil pendant que Billie... fait sa Billie. Elle s'assoit, toute contente, comme si c'était tout à fait normal de s'incruster à la table de quelqu'un comme ça.
- M... Merci...
En tout cas, ça nous évite de manger à une table avec un groupe qui me fixerait et me jugerait un peu trop. Enfin je suis pas trop dans mon élément quand même. J'ai déjà rencontré plein de monde aujourd'hui, et c'est plus facile de juste me laisser porter par les gens qui me parlent plutôt que de devoir essayer moi-même.
- Moi c'est Billie et elle c'est Naev, au fait. Et toi ?
Elle lui a tendu la main pour la lui serrer comme si on était des adultes en pleine réunion. Elle m'a fait la même chose, en classe. Je sais pas d'où elle tient sa façon de serrer la main pour se présenter, ça fait tellement sérieux. Avant que le garçon ait le temps de répondre, quelqu'un s'assoit soudainement à la table et je sursaute. Ouah. Ok, je pensais que Billie était hyper audacieuse de demander comme ça de but en blanc à s'asseoir à côté de quelqu'un, mais lui il n'a même pas demandé ! Il y a des gens qui osent vraiment tout faire. Je sais pas comment ils font. Je serre mes mains sur mon pantalon. Ça me stresse trop tout ça ! Billie tourne la tête vers lui, un peu intriguée, avant de hausser les épaules et de toussoter. Cette fois, elle parle aux deux, alors elle remet sa main sur la table.
- Je disais donc. Je m'appelle Billie MacPherson. Elle c'est ma copine Naev. Elle est un peu timide mais elle est cool.
Maiiiiis ! Parle pas de moi comme si j'étais pas là. Je rougis encore plus en baissant la tête pour fixer mon regard sur mon assiette. Un peu timide mais cool... Un peu ? C'est un... comment on dit déjà... ah oui, un euphémisme, c'est ça.
La situation empire. Mais pas dans le sens auquel on pourrait penser. Les filles qui viennent de s'asseoir à ma table m'ont l'air très gentilles, mais il a fallu qu'un autre parfait inconnu vienne s'asseoir, qui plus est à côté et sans même s'être donné la peine de se présenter. Je déteste ça... je n'aime pas trop qu'on m'impose des choses sans que je ne puisse rétorquer quoi que ce soit... tout ça à cause de cette stupide timidité.
Intérieurement, je râle. Je râle même beaucoup, mais d'un point de vue extérieur, j'ai simplement l'air ultra mal à l'aise ainsi que quasiment absent de la conversation. Sous la table à laquelle nous sommes désormais tous les quatre réunis, je joue avec mes doigts et avec mes mains qui deviennent de plus en plus froides, c'est à cause du stress. Je ne sais pas pourquoi, il y a des situations où à contrario, mon corps gagne en température alors que là c'est tout l'inverse.
Je n'ose même plus relever les yeux de mon plateau, ni pour tenter un accrochage avec les filles qui sont assises en face et encore moins avec la personne s'étant assis juste à côté de moi. Pourquoi ça n'existe pas les bancs à trois places d'un côté et une seule de l'autre ? Ça serait tellement plus simple... pour moi... Quoique... ça ne retirerait pas le fait que je ne sois pas vraiment sociable et que la situation en elle-même reste très stressante.
Doucement et le plus discrètement possible, je me racle la gorge tandis que mon regard se perd en quoi dans la direction opposée à celle de mes... copains de déjeuner ?! Si je peux me permettre de les appeler ainsi... Faut pas se leurrer, ils doivent certainement faire ça pour s'assurer une place tranquille vu que je suis le genre de personne qui n'est pas vraiment bavarde et qui dit oui à tout comme un âne. Ou alors... ils seront gentils avec moi jusqu'à ce qu'il découvre toute la vérité.
Un peu dépité face à cette idée, mes sourcils se baissent, donnant à mon expression cachée une pointe de tristesse et de déception alors que je ne me rends même pas compte moi-même que je m'enferme dans des suppositions qui, si ça se trouve, ne verront jamais le jour.
Mais alors que je continue de désespérer dans mon coin, l'une des filles la moins discrète reprend la parole, là où elle s'était arrêtée avant que le garçon ne s'incruste aussi à notre table. Elle se présente, nous donne son nom, Billie MacPherson, ainsi que celui de sa copine, Naev. J'aime bien leurs prénoms, ils sont cools et originaux.
Puis, mon regard est attiré par du mouvement venant de sa part. Je relève donc la tête et remarque qu'elle nous présente sa main, un peu comme les grandes personnes le font lorsqu'elles se disent bonjour. J'écarquille un peu les yeux et je me remets à bêtement rougir tout en les fuyant à nouveau du regard.
Parfois, je suis véritablement irrécupérable... Pourquoi est-ce si compliqué de d'agir normalement ?
Hésitant, je sors une de mes mains cachées sous la table et l'avance vers la sienne, mais entre le stress de ne pas savoir comment m'y prendre, la sensation que tous les regards sont rivés sur moi et la peur qu'elle fasse des remarques sur ma poignée de main ou sur la température de celle-ci étonnement froide, je me rétracte et me contente de faire un petit signe avec cette dernière, accompagné d'un sourire un peu forcé. Disons... surtout très gêné.
- Moi, c'est... Dawson ! Enfin Kim ! Kimson ! Ce que je veux dire, c'est que... ha ha... Kim Dawson... A votre service ! Euh, ravi de vous rencontrer !!! Enchanté, quoi...
Un véritable fiasco. Je cache mon visage de la honte dans mon plat, utilisant comme prétexte la possibilité que la faim me gagne et qu'il est temps de manger alors qu'en fait... j'ai actuellement tout sauf envie de manger. M'enfuir, peut-être ou me cacher dans un endroit où personne ne pourrait me voir. Ouais, ça serait tellement bien...
Le gars qui vient de s'asseoir n'a pas l'air très... comment dire, je pensais que j'étais pas sociable - même si je suis surtout hyper timide, parce que j'adore les gens, sans ça - mais il est pire que moi. C'est à peine s'il nous adresse un regard après s'être assis et avoir balancé ses deux phrases pour justifier qu'il s'assoit à notre table. Ouais, donc quand il parlait d'un coin tranquille, il voulait surtout dire un coin où il n'aurait pas à parler. Tant pis. Billie lui jette un regard qui m'aurait un peu fait peur s'il m'avait été destiné, mais elle finit par se renconcentrer sur l'autre garçon, celui qui bafouille et nous fuit du regard. Celui qui me ressemble, en fait.
Kim, donc. Je dirais bien qu'il est plus mal à l'aise que moi mais lui, au moins, il ouvre la bouche, alors que je suis juste là à rouler des yeux dans tous les sens en me demandant d'où Billie tient ses facultés sociales. Moi aussi j'aimerais bien pouvoir parler aux gens aussi facilement qu'elle mais j'arrive même pas à lever les yeux. C'est pas juste ! Remarque lui il se cache un peu dans son assiette. S'il y avait pas Billie, ça serait la table la plus silencieuse du monde. Elle le regarde avec un petit sourire avant de baisser la main, sans avoir l'air vexée ou quoi qu'il l'ait pas prise, et elle attrape sa fourchette pour commencer à manger un peu.
Mais comme je pense que cette fille est allergique au silence, elle finit par relever la tête et nous regarder tous les deux, poser une seconde son regard sur celui qui n'a pas dit son nom avant de totalement s'en détourner.
- Et du coup Kim, tu es dans quelle école ? Quel programme ?
Elle sourit avant de prendre une bouchée de riz puis une gorgée d'eau. Puis elle prend une pose théâtrale avec les doigts entre ses clavicules et la tête de profil.
- Moi je suis en Gifted.
Ensuite de quoi, elle se contente de rire un peu et de reprendre son attitude habituelle de fille cool et sans prétention. Bon, cool, sans prétention, et beaucoup trop à l'aise. Par contre, moi, je le suis pas, avec le regard qu'elle me lance. Elle veut que je parle ? Mais... c'est très bien quand elle fait la conversation à ma place, non ? Moi ça m'allait, en tout cas.
- J... Je euh... Je suis en... en Tradition.
Je baisse un peu la tête pour laisser mes cheveux cacher mon visage. je dois être super rouge et comme j'ai la peau ultra-blanche de base, je sais que ça se voit beaucoup. C'est pas juste de me regarder comme ça pour m'encourager à parler, c'est encore plus stressant !
Premier jour dans une nouvelle école. Qu'en dire ? C'était déconcertant. Robin ne savait pas sur quelle base commencer son année, son été. Tous les élèves de sa classe étaient aussi perdus que lui, mais certains se faisaient déjà des amis. Il y avait ceux qui étaient sociables, ceux qui se connaissaient depuis qu'ils étaient plus jeunes, supposément du collège ou même d'avant, et il y avait lui. Devait-il se lier d'amitié avec l'un d'eux ? Plusieurs ? Ou tenter de se rapprocher des élèves de classes supérieures ? Quelle option lui apporterait le plus de tranquillité ? Vieillir apportait une maturité hypothétique qu'il n'était pas persuadé de trouver chez ceux de son âge, et il craignait qu'on s'amuse à le charrier sur un sujet ou un autre. Cependant, cette maturité était justement cela : hypothétique. Les plus âgés étaient parfois les plus prompts à se rire de ceux qui étaient différents.
Ces questions existentielles avaient occupé tous ses cours de la matinée, et Robin n'avait finalement pas fait le moindre pas en avant vers ses camarades. Il s'agissait pourtant du premier jour, l'étape cruciale, celle pendant laquelle se formaient les groupes qui duraient, généralement, jusqu'à la fin de l'année. Il n'avait simplement pas su faire son choix, et le temps du midi arrivait déjà. Il entra dans le réfectoire parmi les derniers, relégué à l'arrière de la file car il avait pris un peu trop de temps à rassembler ses affaires à la fin du cours précédent, et que nombre d'autres élèves s'étaient précipités ici avant lui. Un souffle découragé ponctua le passage de la porte. Ce n'était que le premier jour, les suivants seraient plus simples, il voulait s'en persuader.
Plateau en main, il régula de son mieux la lassitude qui s'efforçait de l'envahir. Les tables étaient bondées, et il marcha entre les chaises en ignorant sa gorge serrée par l'anxiété. Il lui fallait simplement une place, ensuite de quoi il saurait s'intégrer à un groupe, espérait-il de tout son cœur.
Dans son errance, il repéra enfin une place libre à une table. Des gens de son âge, il était certain de reconnaître quelques visage. Collectant toute l'assurance qu'il offrait en permanence à la face du monde, il s'approcha.
« Salut, toutes les autres tables sont pleines, je peux squatter ? »
Cool et détaché, telle était la marche à suivre pour ne s'attirer aucun regard étrange. Il attendit donc patiemment la réponse de ses camarades, avec l'espoir qu'elle serait positive.
Pourquoi sommes-nous obligés de prendre la parole pour nous faire des amis ? Pourquoi sommes-nous obligés d'exposer nos faiblesses à la vue des autres pour espérer s'attirer un peu de sympathie en risquant de recevoir le parfait opposé ? Ça me stresse, ça m'angoisse et ça me met terriblement mal à l'aise.
Si je n'avais pas le nez fourré dans mon plat en m'en servant comme prétexte pour ne pas devoir affronter leurs regards, je me rendrais peut-être compte que l'une des deux filles s'étant joint à ma table est en réalité aussi mal à l'aise que moi.
J'ai honte... totalement honte... et ça ne fait que jouer sur l'écoulement du temps qui, soudainement, arbore une lenteur dont je me serai passé volontiers.
Puis, une voix quasiment déjà familière me sort un tantinet de cet épisode où je me questionne sur tout et émet un doute sur la moindre de mes actions, celle de la seule et unique personne présente à cette table ayant un semblant de bien-être, d'aisance et de sociabilité.
Par crainte de déclencher une crise en ne relevant pas le menton lorsque cette dernière prend la parole, je m'efforce de quelque peu réhausser mon visage, la zieutant en coin, les joues roses et marquées par le manque complet d'adhérence à ce comportement qui, actuellement, est complètement contraire à ma volonté ainsi qu'à mon état d'esprit. Seulement, je ne pense pas avoir le choix. J'ai bien trop peur de passer pour celui ne connaissant pas le respect en ne montrant pas ne serait-ce qu'un peu d'intérêt ou d'attention lorsqu'une personne s'adresse à moi, d'autant plus lorsqu'il s'agit de quelqu'un m'étant inconnu.
En premier lieu, elle me pose une question concernant mon école ainsi que le programme que je suis. Après quoi, elle commence à manger et prend une gorgée d'eau, me laissant ainsi hésitant quant à l'attitude à arborer lors de ma prise de parole. J'hésite, je reformule mes phrases, sélectionne mes mots avec parcimonie comme si je me retrouvais face à un oral de fin d'année déterminant pour la suite de ma scolarité. Les yeux jonglant entre divers points stratégiques comme bouffée d'air avant de revenir se poser en biais sur le visage de l'initiatrice de la discussion, je me retrouve finalement à balbutier quelques bribes, tout au plus, servant de réponse à sa question.
- Et bien, en fait... Je suis la tradition. Euh, ce que je veux c'est que j'étudie la tradiflion ! Non, non, en fait c'est... Oh... Mon programme c'est Tradition.
Un petit rire nerveux et voilà que mon regard se concentre à nouveau sur le plat qui se trouve devant moi et dont je n'ai toujours pas ne serait-ce que piqué une seule fois avec ma fourchette. L'envie n'y est pas et plus l'heure s'avance, plus mon estomac se resserre en ce nœud déjà forgé depuis mon arrivée à l'école.
Je m'attends à des rires, qu'ils soient discrets ou non, mesquins ou non, néanmoins dérangeants et blessants à souhait. Pourtant, je m'étonne qui ni l'une, ni l'autre ne s'attarde à la catastrophe ambulante que je représente à l'oral, préférant s'afférer à me partager le programme dans lequel elles sont, elles aussi.
Celle qui n'est visiblement pas rongée par le trac de la rentrée suit le programme des étudiants doués dans un domaine, ce qui la rend d'autant plus impressionnante tandis que la plus timide se trouve être dans le même que le mien. Peut-être serons-nous amenés à faire partie de la même classe ?
Les yeux remplis d'étoiles, admiratif qu'une fille aussi talentueuse que Billie MacPherson puisse s'attarder à un garçon comme moi, je relève le visage le temps de quelques secondes jusqu'à ce qu'une voix masculine ne vienne interrompre cet échange, me faisant immédiatement replonger dans ma bulle protectrice et dans cette anxiété dans laquelle je baigne depuis le début de la journée. De ce que j'entends, de ce que je comprends, il souhaite s'installer à notre table. Une personne... s-supplémentaire... U-Un garçon... j-je... C'est beaucoup d'informations en un coup. D'ailleurs, je sens que ma respiration commence à en être impactée. Il va falloir que je trouve un moyen de discrètement me saisir de mon inhalateur afin de l'utiliser si je ne veux pas risquer d'attirer l'attention en faisant une crise.
Il a l'air aussi à l'aise que moi, c'est à dire pas du tout. Est-ce que Billie réalise qu'elle est entouré de deux personnes hyper timides, ou bien elle est trop dans son état d'esprit pour comprendre qu'on est aussi gêné l'un que l'autre à l'idée de parler à des inconnus ? Elle a l'air totalement dans son élément, elle, c'est presque frustrant. Enfin, ça me rassure de voir que... Kim est pas plus doué que moi pour le social.
Je sursaute en entendant une voix à côté de la table. Le garçon avec nous, qui avait un peu relevé la tête, se replie sur lui-même en même temps que moi. Billie, elle, relève aussitôt la tête pour regarder celui qui vient de s'approcher, et je fais pareil mais en relevant juste un peu les yeux. Il est pas très grand - là je dirais un peu plus que moi mais pas énormément - mais il a plus l'air du genre de Billie que du mien. Il y a qu'à voir la facilité avec laquelle il a demandé à s'asseoir avec nous.
- Oui, oui, viens ! On était en train de faire connaissance !
Pitié m'oblige pas à me re-présenter, pitié m'oblige pas à me re-présenter...
- Je m'appelle Billie. Lui c'est Kim, et elle c'est Naev. Ils sont en Tradition, moi en Gifted. Je fais des jeux-vidéos. Et toi ? Comment tu t'appelles ? T'es en quelle classe ?
Elle est tellement enthousiaste, ça fait presque peur. J'espère pour ce gars qu'il est pas du genre timide parce qu'avec l'énergie qu'elle a, il risque de faire une crise cardiaque. Mais bon, au moins, elle s'est chargée des présentations, ça veut dire que j'aurais pas besoin de reprendre la parole en étant au centre de l'attention tout de suite. Finalement, c'était pas une si mauvaise idée que ça de devenir amie avec une fille comme elle : si elle peut se charger du social à ma place, ça me convient très bien. J'espère qu'on sera dans la même classe à la rentrée... Bon après, si elle est en Gifted, on aura pas tous nos cours en commun donc il y en aura quand même où elle pourra pas parler pour moi. Dommage. Je sens venir les cours où Kim et moi - si on est dans la même classe - on va se transformer en petits fantômes qui essayent d'échapper au regard des autres.
À en croire les réactions que provoqua son arrivé, il n'était pas le seul à naviguer dans l'inconnu aujourd'hui. Le garçon avait baissé la tête et l'une des filles, la blonde, avait été jusqu'à sursauter au simple son de sa voix. L'autre fille, cependant, paraissait déterminée à faire la conversation pour le trio, et ce fut elle qui l'invita à s'asseoir avec eux. S'il se fiait à ce qu'elle venait de dire, ils ne se connaissaient que depuis peu. Ça lui laissait donc une opportunité égale de se faire accepter sans avoir trop de choses à rattraper.
« Merci. »
Ayant apparemment un peu pitié des deux timides presque cachés dans leur siège, la dénommée Billie se chargea des présentations. Billie, Kim et Naev, donc. Deux Tradition... l'autre programme de l'ISS ? Robin tenta de rappeler à sa mémoire l'image de la brochure que lui avait laissé sa mère. Oui, Tradition et Gifted. Ils étaient donc dans la même école. Il s'installa tandis qu'elle continuait de se présenter puis se lançait dans une série de questions qui vint réveiller sa propre maladresse sociale. Toujours aussi détaché en apparence, il ne la laissa pas prendre le dessus et se contenta, machinalement et inconsciemment, de tripoter les boucles attachée à son oreille gauche.
« Je suis en Gifted aussi. Je m'appelle Robin... Bardel. »
N'était-ce pas un peu trop formel, un peu trop scolaire ? La crainte qu'ils décident de se moquer de sa façon très mécanique de se présenter accentua le geste de ses doigts sur ses bijoux.
« Je suis en Intégration, je suis arrivé ce matin. Et vous ? »
Ils avaient l'air d'avoir à peu près son âge, mais il n'était pas plus doué qu'un autre pour remarquer de tels détails. Du moins, il ne s'estimait pas plus doué qu'un autre, et il ne voulait pas risquer une présomption qui aurait pu vexer l'un des trois alors qu'ils allaient manger ensemble et peut-être même être dans la même classe pendant l'été et à la rentrée. Le plus important aujourd'hui était de se créer des liens positifs, il ne pouvait se permettre de faire un geste de travers qui risquait de tout gâcher avant même de commencer.
Beaucoup d'informations s'enchaînent et... et me laissent véritablement sans voix. Heureusement pour moi, et je dirais même pour nous vu que Naev semble dans le même cas, Billie se charge de faire la conversation, ainsi que le résumé de ce qui s'est déjà dit depuis le début, à notre place. Sans quoi, je ne sais même pas où je serais caché à l'heure où je vous parle. Je n'ose même pas les regarder droit dans les yeux lorsque je m'exprime, pour le peu de fois où j'arrive à le faire. C'est à peine si mes prises de paroles, aussi rares se font-elles, se veulent directes.
Ma respiration s'emballe et je tente d'abord de la maîtriser par quelques subtils exercices tandis que j'ai la désagréable sensation que ma température corporelle, ou du moins celle ambiante, monte en degrés. J'espère que je ne suis pas rouge tomate, dites-moi que je ne suis pas rouge tomate, s'il-vous-plaît tout sauf ça ! Enfin, non, pas tout, mais pas ce genre de situations ! Pas le premier jour ! Pas devant mes premières rencoooontres !
Inspire, expire, Kim. Tout ira bien. Plus tu t'affoles et plus tu aggraves tes difficultés respiratoires. Il n'est désormais plus question de passer pour un crétin, mais plutôt de ne pas risquer de mourir sur place parce que j'ai manqué d'air. Tant pis, je n'ai pas le choix, ça devient trop compliqué.
Assez rapidement, je me penche vers mon sac à dos, que j'ai laissé à côté de la chaise sur laquelle je suis installé et fouille rapidement dedans pour y sortir mon inhalateur que je porte tout aussi vite à mes lèvres, essayant au maximum de ne pas me concentrer sur les réactions des personnes qui m'entourent, et en particulier ceux qui sont attablés avec moi. Plusieurs pressions se font, chacune marquée par une inspiration.
Le plus furtivement possible, je le remets à sa place bien que je me doute qu'une telle action n'est pas commode et qu'elle pousse constamment au questionnement. Une fois ma place retrouvée, je garde la tête penchée sur mon plat, les joues très certainement teintes d'une variante rosée ou rouge, craignant que ma prise d'initiative ne soit le début d'un silence pesant que je ne supporterai certainement pas.
Alors, dans un souci de m'assurer que la discussion ne tourne pas autour de ce qu'il vient de se produire, je m'exprime, comme à mon habitude de façon très maladroite, le tout marqué de doute et de rires gênés.
- Ahah, euh... ne vous en faites pas, je ne suis pas malade, je suis simplement asthmatique ! Il n'y a rien de dangereux à cela, haha... J'espère que ça ne vous à pas déranger que je sois atteint... Euuh, d'avoir atteint mes lèvres avec mon inhala... enfin bref, désolé...
Oh mon dieu, c'est un véritable cauchemar... Pourquoi faut-il que je me sente constamment obligé de me justifier auprès de tout le monde ? Et en plus de ça, je ne sais pas mentir alors je finis toujours par m'emmêler les pinceaux et faire des gaffes comme maintenant ! Ensuite, je dois me rattraper et je finis par passer par un fou parce que c'est toujours pire que la phrase initiale !!
Bref, espérons qu'ils ne posent pas plus de questions que ça, qu'ils n'en posent pas du tout, d'ailleurs, ça m'aiderait beaucoup.
HRP:
Je le signale aussi ici, surtout pour toi Robin, parce que tu n'étais pas forcément au courant. Je m'excuse si la réponse fut longue à arriver, mais j'ai été en pleine période assez hard où j'ai eu mon stage, mon rapport de stage à rédiger suivi de mon travail de fin d'études avec des recherches à faire, des photocopies officielles plus une présentation à faire le 31 mai. Normalement, après cette date ultime, le rythme sera, je l'espère, plus régulier X_X
Le nouveau venu a l'air quand même moins timide que nous, il arrive à répondre aux questions de Billie sans hésiter ou bégayer, ce qui est déjà énorme par rapport à moi. En fait, s'il n'était pas en train de triturer sa boucle d'oreille, on pourrait presque croire qu'il est totalement à l'aise. Ou alors c'est juste un tic, comme quand mon frère jouait avec son piercing à la lèvre. je suis contente qu'il n'ait plus ce truc, d'ailleurs, c'était super bizarre de le voir bouger tout seul parce qu'il jouait avec le fermoir du bout de la langue. Rien que d'y repenser c'est... urf.
C'est un autre Gifted, aussi dans notre classe. À croire que cette table est la réunion des nouveaux élèves. Remarque... d'un côté c'est logique, ceux qui étaient déjà là avant doivent s'être regroupés entre eux, donc il reste que les nouveaux qui cherchent un endroit où s'asseoir.
- Pareil. On est tous dans la même classe, alors ? C'est trop cool !
Elle allait enchaîner sur autre chose - ça se voit à sa tête - mais elle est coupée dans son élan lorsque Kim se penche pour récupérer quelque chose dans son sac. Il est... malade ? Peut-être qu'il a besoin de prendre des médicaments à certaines heures comme Alix. Mais si c'est ça, il doit avoir une super mémoire, parce qu'il a même pas eu besoin d'alarme pour s'en souvenir. Je crois que j'en serai pas capable : si rien ne me rappelle quelque chose, je l'oublie trop vite. La plupart du temps parce que je dors, mais bon, voilà.
Au final, il nous explique qu'il est pas malade mais juste asthmatique. C'est une maladie aussi, non ? Ou c'est peut-être juste pour dire que c'est pas dangereux. Je connais pas bien. Il a eu du mal à respirer ? C'est pour ça qu'il a pris un médicament ? Il a pas l'air d'avoir envie d'en parler.
- Pas la peine de t'excuser ! Ça va aller ? Si t'as du mal à respirer on peut aller manger dehors.
Je baisse un peu le yeux en triturant mes doigts. Billie a l'air beaucoup trop à l'aise. C'est grave, quand même : elle est plus jeune que moi et j'ai l'impression que tout est facile pour elle. C'est ça, d'être en Gifted ? Mon frère aussi parle facilement avec tout le monde, après tout. Remarque, Rikissa aussi, et elle est en Tradition. C'est juste Billie qui doit être douée, sinon elle serait pas dans la même classe en étant plus jeune.
Ⓒ Naev paroles en #2E5324
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Mer 2 Juin - 15:12
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Highschool cuteness
Je parle en #C1A273
Ⓒ Felicis
le mercredi 01 juillet 2020
◘ ◘ ◘ - apprendre à se faire des amis
Il s'en sortait bien. À vue de nez, il semblait être tombé sur un groupe assez facile d'accès, ce qui l'arrangeait. Ça lui évitait de trop s'angoisser sur quoi dire et quoi faire, même s'il était incapable de purement et simplement lâcher prise. Ils étaient donc tous dans la même classe, deux Gifted et deux Tradition, à croire que c'était fait exprès. Quand au dernier garçon assis à leur table, il semblait déterminé à rester seul et dans son coin, car il n'adressa la parole à personne et ne répondit à aucune des questions. Robin décida qu'il n'était juste pas intéressé par eux et l'effaça de ses considérations pour le moment.
Au cœur de leur conversation, le garçon aux cheveux clairs se pencha vers son sac pour y récupérer un inhalateur, dans lequel il inspira plusieurs fois. Il avait vu souvent ce genre de scène dans les films, assez régulièrement pour savoir ce dont il s'agissait, à savoir une forme de maladie respiratoire. Il n'était pas certain de savoir de laquelle il s'agissait mais, étant donné sa réaction et la façon dont il balbutia que ce n'était pas grave ainsi que plusieurs excuses, il décida de ne pas poser la question. Ce ne fut pas le cas de la fille brune qui, elle, mentionna l'événement avant de lui poser quelques questions et de faire une proposition pour potentiellement l'aider.
D'une certaine façon, Robin comprenait la réflexion. D'une autre, il se sentait un peu mal pour son voisin de table qui semblait déjà peu à l'aise de parler de ça et de montrer cette faiblesse physique. Naturellement, dans son esprit, cela ne pouvait être dû qu'à la peur du jugement qu'ils pouvaient avoir là-dessus. Mais si une part de lui avait envie de le rassurer et de lui affirmer, comme Billie, que ce n'était pas la peine de s'excuser pour ça, une autre avait un peu peur qu'il le prenne mal d'une manière ou d'une autre, alors il resta muet. Il espérait juste que c'était une maladie qui n'était pas trop grave, ou contagieuse. Mais surtout pas grave.
Forcément, ce genre d'action pousse au questionnement... et je sais que ça n'est pas méchant ! Pour autant, c'est extrêmement gênant de devenir ainsi, l'espace d'un instant, le centre d'attention de tout une table aussi petite ou grande soit-elle. Je n'ose pas faire face à leurs regards... Je n'ose pas mettre les pieds dans le plat et tout simplement expliquer le pourquoi du comment je suis dans l'obligation de prendre ce genre de "médicaments" parce que je n'en ai pas envie. Être considéré comme n'importe qui, est-ce si difficile à avoir ?
Comme à l'habitude qui s'est installée à la table depuis le début du repas, c'est Billie qui s'occupe de rompre le silence en me rassurant bel et bien sur le fait qu'il n'y a aucune raison de s'excuser, ce qui est rassurant, pour ensuite me demander si tout va bien, allant même jusqu'à proposer qu'on aille tous manger dehors au cas où j'aurais du mal à respirer. Si seulement c'était aussi simple... et aussi minimalisé que j'ai fait passer mon soi-disant souci de santé.
Enfin bref, je ne décolle pas mon regard de mon plateau, ce qui fut quasiment le cas durant la totalité du repas, le visage de plus en plus rouge et une sensation chaude de plus en plus intense. Personne d'autre n'émet de commentaires et c'est tant mieux, mais... je commence à ne plus trop me sentir à mon aise, mes yeux jonglant entre la gauche et à la droite à une vitesse ahurissante qu'il est plus que préférable qu'aucun des trois n'en soient conscients.
- N-Non, ç-ça... ça va... je...
Non, ça ne va pas. J'ai un peu mal à la tête à force d'angoisser et de m'énerver tout seul dans mon coin, de quoi un peu plus me faire paniquer, comme si ça n'était pas déjà suffisamment compliqué. Un certain nombre de fois, je déglutis, incertain quant à la suite de la conversation, ayant cette furieuse impression que le temps s'est mis à ralentir. Alors, je me saisis de mon portable et le laisse entre mes jambes, sous la table pour regarder l'heure. Il nous reste un peu de temps avant que la journée ne reprenne, pas assez pour que je puisse me dire que je vais définitivement étouffer, mais trop pour qu'une véritable sensation d'apaisement puisse entièrement me satisfaire.
Dans excès d'angoisse, je fais l'impensable... et me mets à mentir, utilisant mon téléphone comme prétexte afin de quitter la table plus tôt que prévu. Je joue à l'étonné, range rapidement mon téléphone afin d'éviter qu'un regard louchant de mon voisin de table ne remarque que je suis simplement sur l'écran de déverrouillage et emballe un peu trop rapidement la plupart de mes affaires. De quoi je dois avoir l'air vu de l'extérieur... je n'ose même pas y penser. Cartable sur le dos et la tête continuellement penchée vers le sol, je remets ma chaise en place et m'apprête à partir, m'arrêtant un instant dans cette drôle de course pour leur adresser un mot que j'ai failli oublier tant ce besoin d'échapper à cette situation m'obnubile.
- Ah euh... merci pour tout ! Je... Je dois y aller, ma... mère a besoin de... enfin, elle m'attend à l'entrée pour me donner quelque chose que j'ai oublié à la maison ce matin... ahah... quelle andouille, je fais !
Je tourne les talons et fais quelques pas pour finalement m'immobiliser un nouvel instant, tournant un tantinet la tête vers eux, lâchant un petit sourire ainsi qu'un geste de salut à l'aide de ma main que j'agite avec pour but... de les rassurer, de me rassurer... de m'assurer qu'ils ne m'en voudront pas ? Oui... certainement...
- On se voit plus tard... ?
J'attends leur réponse puis reprends ma marche, me triturant les doigts, comme à mon habitude, baignant à moitié dans le regret et la délivrance.
Il a l'air super stressé. Peut-être que Billie aurait pas dû lui poser cette question. En vrai, je m'inquiète un peu pour lui, mais j'ose pas trop poser de question ni parler. Alix n'aimait pas qu'on parle de son épilepsie, quand il avait mon âge, il trouvait ça désagréable que les gens ne voient que ça chez lui alors il faisait comme si tout était normal. Forcément, ça a fait peur à plein de monde quand il faisait des crises et qu'il avait d'un coup l'air d'être un robot en mode veille - et encore, la pire qu'il ait faite, c'était une grosse crise d'épilepsie comme dans les films et ça faisait encore plus peur. Est-ce que Kim est pareil ? Si ça se trouve, il a aussi une maladie qu'il ne veut pas que les gens connaissent. Je sais pas, je le connais pas, après tout. C'est peut-être juste de l'asthme, tout le monde n'est pas comme mon frère. La plupart des gens sont pas comme mon frère, même, en fait.
Il finit par refuser la proposition d'aller manger dehors et Billie hoche la tête. Elle a l'air d'avoir remarqué, elle aussi, qu'il est pas à l'aise. Il serait temps, d'un côté ; je pense qu'elle est pas consciente que tout le monde est pas aussi facile d'accès qu'elle. Avant qu'elle ait le temps d'essayer de relancer des conversations comme elle en a l'habitude, il commence à ranger ses affaires comme s'il allait partir en urgence.
- Kim ?
On a fait quelque chose de mal ? J'aurais dû parler ? M'inquiéter ? Mince, peut-être que j'aurais dû parler et que c'est Billie qui avait raison, en fait. Et s'il voulait plus jamais nous voir parce qu'il nous trouve méchants ? J'espère que non. Ça serait... ça serait triste, surtout si on est dans la même classe ! Mais finalement, il explique qu'il doit partir parce que sa mère lui a rapporté quelque chose. Ah, c'est pour ça qu'il a pris son téléphone ! D'accord, ça explique. Il peut pas faire attendre sa mère super longtemps, c'est logique. Il se retourne une dernière fois pour demander si on se voit plus tard, et Billie me devance (encore) :
- Évidemment ! On se voit en classe, Kim ! Cours pas trop pour rejoindre ta maman !
Ah... Oui c'est vrai que maintenant qu'elle le dit, s'il a du mal à respirer, il vaut sûrement mieux qu'il courre pas. Je lui souris pour lui faire comprendre que j'ai bien envie de le revoir, moi aussi, puis il finit par vraiment partir et je baisse la tête vers mon assiette.
- Mince, j'ai oublié de lui demander quels cours il avait. - Q... Quoi ? - Bah, pour qu'on se revoie en classe, il faut qu'on ait les mêmes cours ! Ya que toi qui t'es inscrite partout.
Je rougis en baissant la tête et en détournant le regard. C'est bizarre, d'être inscrite dans tous les cours ? Je voulais être sûre de tout savoir et de pas commencer l'année en devant poser des questions aux profs...
- Et toi, Robin, t'es dans quels cours ? Vu qu'on en parle !
The Wiesel Den 
![Highschool cuteness [Kim, Robin] Tbab](https://zupimages.net/up/21/15/tbab.png)
