À quoi bon hésiter ? [Jun]

A quoi bon hésiter ?

Le temps, simplement le temps... Infini, à l'arrêt, en suspens. Cette simple proximité a comme véritable pouvoir de jouer avec son écoulement. Nick et moi demeurons dans cette même posture durant des secondes ou des minutes qui paraissent interminables. Son pouce sur ma lèvre, ma main sur la sienne, des gestes aussi inactifs que nous, mais pourtant gorgés de sensations toutes aussi incroyables les unes que les autres.

Seul mon souffle continue son émission, si proche de son visage, si proche de ses lèvres sur lesquelles mes yeux portent un intérêt bien délicat, s'y attardant un peu trop longuement pour que cela ne soit qu'une simple volonté d'observer ou d'admirer leurs courbes généreuses appelant aux caresses ou... aux baisers...

Mes pensées s'agitent, se perdent ou prennent des chemins qui ne sont que l'incarnation même d'une précipitation naissante, d'un désir ardent d'aller plus loin, mais qui nécessite une remise en mouvement dans l'unique but de craquer et de succomber à l'appel tentateur d'actions enivrantes. Seulement, le temps que je me décide à comment amener la chose, Nick se charge déjà du reste. La proximité de nos visages se rompt, ne laissant place qu'à une union désirée, voulue et obtenue sans même avoir eu besoin de l'exprimer autrement que par l'installation d'une évidence entre deux personnes s'étant mutuellement avoué leurs sentiments.

Mes yeux s'écarquillent un moment face à l'effet de surprise du geste, mais perdent rapidement en ouverture pour ne laisser qu'une douce lueur, causée par une arrivée d'émotions humidifiant mes yeux, s'échapper de mes paupières mi-closes.

Le contact est bref, mais suffisant pour que je prenne pleinement conscience de l'envie qui brûlait mes prisonnières avant que mon nouveau petit copain n'accède à ma requête passée sous silence. C'est à cet instant précis que je me rends compte à quel point nous sommes sur la même longueur d'ondes tandis que je m'amuse à imprimer le goût de son baiser en agitant doucement mes lèvres sur les siennes.

Toutes les bonnes choses ont cependant une fin, le baiser finissant par se rompre dans un écartement de son visage faisant déjà naître au sein de ma poitrine une terrible sensation de manque. Étrangement, ce n'est qu'une fois l'action amenée à son terme que je prends pleinement conscience de ce qu'il vient de se produire entre nous, plaçant, par automatisme, ma main libre sur celles qui viennent d'être les heureuses élues d'un échange des plus alléchant. Mes pommettes reprennent leur teinte rosée et mon regard s'échappe là où il ne pourrait pas croiser celui de Nick.

Cependant, je reviens rapidement sur ma décision de fuir ce que je n'ai, finalement, pas envie de manquer et replonge, après une brève pause, mes yeux sur l'homme que j'aime... que j'aime éperdument. En m'intéressant à nouveau à ce qu'il fait, dans l'optique de capter son attention, je remarque ses grandes mains cacher son visage dont on peut percevoir le changement de teinte ce qui me fait naturellement, mais très délicatement, rire sous une tonalité prônant l'attendrissement.

J'hésite à prendre la parole, à lui demander de ne pas camoufler quelque chose qui, finalement, m'est tout autant arrivé qu'à lui. Pourtant... je ne le fais pas, le cœur complètement fondu face à cette scène bourrée de candeur que je ne me permettrais pas de rompre. Ma main libre, quant à elle, glisse sur la table, me faisant me pencher en avant jusqu'à ce que je ne parvienne plus à étendre ce dernier. Du bout de mes ongles, je tapote sur la surface relativement solide et plate, un sourire aux lèvres camouflé par mon autre main.

- N-Nick... j-je... on... on vient de s'embrasser... ? Ce... si c'était le cas, ce... c'était très agréable...

Tellement agréable que l'envie qu'on reproduise l'action m'obnubile en tous points, mes rougeurs s'intensifiant à nouveau dans un élan d'amour enivrant et de passion la plus soutenue par un cœur en décomposition, dans le bon sens du terme, par un sang en véritable ébullition et par des réactions qui, de part et d'autre, se trouvent être maladroites ainsi que terriblement adorables.

- J-Je... je crois que j'ai envie de... de recommencer...

A quoi bon hésiter ?

Se sentir bien auprès d'une personne est une sensation indescriptible... Et pourtant, elle est bien là... Elle s'immisce dans notre tête, enchante nos pensées, illumine notre regard, réchauffe notre cœur, fait frissonner notre peau et nous procure ce bien-être que rien d'autre ne pourrait nous apporter de comparable une fois que nous y avons goûté. C'est un peu comme découvrir le parfum d'une glace qui nous était alors inconnu. Une fois que nos lèvres se sont entrouvertes afin de laisser la crème glacée froide, quelque peu onctueuse, entrer en contact avec ces dernières, tous nos sens sont aiguisés, en alerte et transmettent à notre cerveau le fait que nous adorons ce que nous sommes en train de goûter ou de vivre.

Actuellement, je ressens exactement la même chose, si ce n'est encore plus puissant. Ces lèvres, ce baiser qu'il m'a offert, vient de créer une emprunte qui restera à jamais gravée au sein de ma mémoire. Elle est prenante, elle me fait tourner la tête, elle embrume mes idées tandis que mon cœur bat la chamade. Entre légère timidité, maladresse d'action et profond désir de faire perdurer ce rendez-vous en l'entraînant vers l'infinité, nous demeurons à nos places respectives et dans nos réactions qui nous sont propres. Lui, par le biais d'une certaine volonté de masquer un visage entièrement peint par la gêne derrière ses grandes mains. Moi, dans un léger instant de réalisation quant à ce que nous venons d'échanger, pensif, mais pourtant extrêmement heureux.

De temps en temps, je ramène mes pupilles sur cette expression que j'essaye d'entrevoir jusqu'à ce que je réussisse à obtenir ce que je désire admirer de mes prunelles noisette. Un fin sourire accroché aux lèvres qui remontent à en faire apparaître mes pommettes et un regard tout simplement gorgé de bonnes intentions, telles sont les fioritures décoratives que je me permets d'emprunter devant l'homme qui me met dans un état que je me pensais impossible à redécouvrir. La diva ou l'ancienne star de la chanson n'a pas sa place dans la conversation. Il ne doit voir en moi que le jeune adulte amoureux que je suis et rien d'autre.

Il est adorable... Il est incroyablement beau... Il est si gentil... Pourvu d'une douceur sans pareille... Il n'y a qu'à se délecter de ses réactions qui sont semblables à celle d'un petit garçon intimidé, qui viendrait d'annoncer quelque chose dont il est fier, mais dont il a à la fois honte. Peut-être parce que c'est le cas ? Peut-être parce qu'en osant se montrer ainsi à nu, il est redevenu le petit garçon qui sommeille en lui ? Quoiqu'il en soit, ça le rend d'autant plus craquant.

Nos mains entrent à nouveau en contact l'une avec l'autre et je lui laisse tout le plaisir de manipuler la mienne comme bon lui semble, m'attardant un instant sur ses doigts, si doux, qui prennent possession de ma peau en la caressant avec tendresse. Et puis, voici que l'autre s'approche de mon visage dans l'optique d'écarter l'unique obstacle se dressant devant mes lèvres.

A mesure que la barrière s'effondre, mon cœur pulse intensément contre ma poitrine, se fracassant avec violence à m'en faire plisser les yeux. Et puis... nos visages réduisent la distance qui les sépare, touchant du bout du doigt une nouvelle union qui ne tarde pas à se manifester. Un baiser... Un autre... Celui que j'ai réclamé et qu'il m'a offert en ayant, lui aussi, confirmé cette flamme ardente ayant affiché le désir le plus intense qui soit.

Je me laisse faire, entièrement faire, ne désirant rompre cette seconde offrande sous aucun prétexte. Sauf peut-être pour respirer. Quoique, là encore, je ne ressens plus le besoin à ce que mon corps se voit réapprovisionner en oxygène étant donné que ses sentiments à mon égard, que ses baisers et que ses caresses se chargent du reste. Alors je profite pleinement du goût et de la texture de ses lèvres que j'imprime aussi à jamais au sein de mon esprit, penchant légèrement la tête sur le côté tout en suivant la même voie que ma moitié en fermant doucement les yeux.

A quoi bon hésiter ?

Impossible de s'en priver, difficile de s'arrêter, les maîtres mots de l'état dans lequel nous nous trouvons très certainement tous les deux tandis que nous bravons, main dans la main, les limites de nos poumons qui, au fur et à mesure que notre second baiser se prolongeant, crient de douleur leur manque cruel d'oxygène. Seulement, au début, nous ne les écoutons guère perpétuellement geindre, rien que dans l'optique de profiter de la moindre gouttelette de ce nectar envoûtant pouvant être extirpée, provenant directement des lèvres de notre moitié ainsi que de cet échange délicat, mais aussi sensuel auquel nous avons inséré une solide dose d'amour et de passion.

Pourtant, comme on nous le répète si souvent, toutes les bonnes choses ont une fin et les effets d'un certain manque de souffle commencent à se répandre au sein de notre corps, nous faisant finalement prendre conscience qu'il est bien beau de vivre d'amour et d'eau fraiche, mais qu'il ne faut pas non plus laisser de côté, en guise de second plan, les besoins dont notre corps et notre esprit ont besoin.

C'est donc à contre-coeur que je vois l'être, qui agite les battements de mon cœur, tendrement retirer ses lèvres des miennes non pas sans qu'une sensation de manque ne vienne titiller tous mes sens. Heureusement, il ne se décale que très légèrement de mon visage, de quoi pleinement me faire profiter des traits dont il a hérité, comme ses yeux au sein desquels mon regard semblable à la couleur d'un café noisette se perd aisément. Et puis, il ne faut pas non plus oublier que d'autres contacts que les lèvres me permettent de m'assurer un rapprochement certain qui ne semble pas prêt de se briser. Par exemple, sa main qui enferme la mienne entre ses doigts s'attelant à une offrande de douceur, de caresses et de frissons en tous genres qui ne font qu'émaner de sa peau incroyablement douce... légèrement chaude et très agréable à sentir.

Il prononce mon prénom, qui prend très soudainement une consonnance plutôt sensuelle entre ses lèvres que je ne décroche que rarement des yeux, jonglant perpétuellement entre ces dernières et sa main pour le moins impressionnante de part le soin que Nick leur apporte très certainement de manière quotidienne. Nous n'allons pas parler de leur taille étant donné qu'il n'est pas difficile de comprendre qu'elles sont plus grandes et larges que les miennes.

Et puis, soudainement, tandis que je m'apprête à souffler le sien, de prénom, voici que son autre main se hisse sur ma joue, qu'il caresse avec cette même délicatesse qui le caractérise tant jusqu'à remonter sur mes pommettes et finalement terminer sa course en enroulant quelques-uns de ses doigts entre mes mèches gorgées de soleil.

Je rougis... lentement... progressivement... en parfaite corrélation avec l'évolution de la situation qui, on peut le dire, bat de l'aile au même titre que nos cœurs, du moins le mien, j'en suis certain, paraît entièrement prêt à prendre son envol en direction de l'homme qui me fait face, qui est assis devant moi et qui me prête tous les sentiments dont il a l'air désireux de partager avec moi.

Un mot... Un seul... flottant dans l'air ambiant et qui donne cette impression de se répéter à l'infini au creux de mes oreilles ou au sein même de la sphère de la dualité dans laquelle nous nous sommes enfermés, rien qu'à deux... pour l'éternité. Ses paroles, remplies de sens, de devoirs et annonciatrice d'un futur proche qui, je l'espère, perdura, me touchent en plein cœur et en viennent à m'émouvoir plus que je ne m'y étais attendu.

Les larmes aux yeux, de bonheur il en est plus qu'évident, je remonte ma main libre le long de son bras jusqu'à la positionner par-dessus la sienne qui s'amuse à triturer ma chevelure méticuleusement soignée. Comme un enfant, je souris en même temps que mes rougeurs s'éparpillent un peu partout sur ce visage dorénavant rougi par un surplus d'adrénaline, d'émotions, de flatterie, le tout saupoudré sous une gigantesque vague de sentiments à l'égard de ce fameux Nick Ballentine, qui n'est visiblement pas prêt de s'arrêter à me faire tourner la tête.

- N-Nick...

Presque aussi susurré que ses propres paroles, je laisse inconsciemment planer un suspens en ayant, comme commencement de réponse, prononcé son prénom. Son si joli prénom que je ne me lasserai pas de porter à mes lèvres, quel que soit l'état dans lequel je pourrais bien me trouver.

- Moi aussi, je t'aime...

A quoi bon hésiter ?

Et dire que sentimentalement, j'avais déjà perdu espoir. Et dire que je ne croyais pas possible les retrouvailles d'une telle situation. Me voilà bien étonné, mais surtout réjoui de comprendre que je m'étais trompé sur toute la ligne. Ce que je vis, non, ce que nous vivons en ce moment, ensemble, n'en est que la preuve ultime qu'il y a toujours un moment où la lumière finit par à nouveau nous faire l'honneur de sa présence en écartant petit à petit l'aspect grisâtre et maussade des nuages jusqu'alors présents.

Cette lueur, cet espoir, c'est lui, c'est cet homme qui me fait face. Celui qui m'a récupéré dans un bar, dans un état pitoyable, alors qu'il aurait très bien pu passer son chemin en se disant que je n'étais qu'une cause perdue ou en ne s'attardant pas aux problèmes des autres. Celui qui a cru en moi et m'a relevé, m'a motivé à maintes et maintes reprises sans qu'il ne puisse un jour donner l'impression qu'il arrivait à bout ou qu'il ne parvenait plus à trouver les mots, ou encore les actes, servant à me permettre de reprendre goût à la vie.

Grâce à lui, j'ai perdu le poids qui était de trop. Grâce à lui, j'ai enfin réussi à adopter un mode de vie bien plus sain en empêchant ainsi de me dégrader plus que nécessaire. Grâce à lui, et à cause de son sourire charmeur, de ses réactions bien trop adorables et de ses mimiques dont je ne pourrais désormais plus me séparer, je connais ce que signifie "le véritable amour".

Mon cœur s'emballe, mes lèvres, quant à elles, ne parviennent pas à faire autre chose que de s'étirer en un sourire attendri tandis que mon regard, de part la lueur émanant de mes pupilles, trahit l'amour et la tendresse que j'apporte à cet homme qui laisse l'une de ses mains se perdre dans mes mèches blondes.

Je ne suis plus l'unique maître de mes mouvements et la main prisonnière de la sienne n'en n'est qu'une preuve supplémentaire. Pourtant, je ne me sens ni enfermé, ni obligé de quoi que ce soit. Au contraire, je n'ai jamais été aussi libre qu'à ses côtés. Tout en le fixant, dans ses réactions et dans ses mouvements, je profite des baisers qu'il dépose au creux de ma main alors qu'il la ramène vers son visage et la place contre la base de son cou. Les effleurements de son pouce ne s'arrêtent pour rien au monde et voici que les miens commence à l'imiter en se plaçant sur sa joue si gentiment présentée.

Je... Je ne pouvais définitivement pas rêver mieux que de tomber sur un homme aussi charmant, charmeur, séduisant et attentionné que lui. Il est très certainement l'idéal masculin pour ses dames et ses messieurs à sa recherche, ce qui fait que j'en suis d'autant plus flatté qu'il se soit attardé sur moi et ait, par chance ou par signe du destin, jeté son dévolu sur moi.

Plus aucun mot ne se permet de briser le silence en s'extirpant de nos lèvres. Et c'est peut-être mieux comme ça. C'est un moment fort que nous vivons là et il serait dommage de le rompre par des paroles qui n'ont pas forcément besoin d'être prononcées pour en comprendre le sens. Mes yeux se perdent sur lui, dans les siens, sur sa main ou sur son visage et alors je nage en plein rêve... un rêve qui s'annonce être une réalité de laquelle je ne compte pas me défaire.