Il se faisait tard, le soleil commençait à se coucher et laissait s'échapper de l'horizon ses dernières lueurs de lumière. Les lampes des rues se mettaient toutes, au fur et à mesure, en marche afin de reprendre le boulot de feu soleil. Être dans les rues si tardivement développait en moi une certaine forme d'anxiété et c'est cette dernière qui commençait à progressivement s'emparer de mon corps.
Tout s'était bien passé jusqu'à ce que je me rende compte que j'étais quasi seul dans ce quartier ce qui ne dégageait rien de bon... oh non... surtout pas pour un petit gars de moins d'un mètre soixante et frêle comme moi. Qu'on se le dise, même une fille paraîtrait moins fragile...
Les magasins fermaient à leur tour leurs volets qu'ils soient de fer ou de bois me laissant, cette fois-ci, réellement seul ainsi que livré à moi-même. Je pressais le pas tout en regardant tout autour de moi, revenant quelques fois sur mon portable qui indiquait dix heures du soir passé.
Soudain, je m'arrêtais, voyant au loin une bande de voyous qui rigolait tout en s'échangeant des bouteilles d'alcools, cigarettes et autres substances que je ne voulais certainement pas connaître.
L'air méfiant, je me dirigeais vers l'horaire des bus qui indiquait que la prochaine navette allait arriver dans une vingtaine de minutes ce qui était, bien entendu, hors de question que d'attendre jusqu'à là. Si mes souvenirs sont bons, cet endroit est qualifié de mal vu et il est tout bonnement impossible pour moi de rester une seconde de plus ici !
Alors que je décide de partir pour aller attendre le transport en commun dans un endroit un peu mieux fréquenté, je me rends compte que l'ambiance est devenue, en l'espace d'un instant, de plus en plus pesante. Des gangs sortent un peu de partout et de nulle part ce qui instaure une atmosphère de terrain de guerre et non de ville !
Des petits noms d'oiseaux volent des quatre coins du square tandis que la tension gagne en intensité. Mon cœur s'emballe et bat de plus en plus rapidement, se fracassant plus de mille fois sur ma cage thoracique. Mon corps tout entier tremble et mes mains se gélifient tant je suis dans un état de stress absolu. Il ne me reste qu'une solution possible, m'enfuir au plus vite, par n'importe quel moyen, mais je ne veux pas être pris pour cible d'une potentielle bagarre. Certains sont armés de battes ou autres objets pouvant faire très mal alors que d'autres ont des allures de grands sportifs.
Une petite ruelle se dresse devant moi ce qui ne me laisse d'autres choix que de l'emprunter. Ici, la lumière se fait discrète, mon portable faisant désormais office de lampe-torche. Des poubelles, des déchets en tous genres longent les deux immeubles entre lesquels je me trouve alors qu'une odeur infecte de pourriture se fait ressentir.
J'avance, je marche d'un pas rapide et précis tout en me retournant plusieurs fois, ne me sentant pas du tout, mais alors pas du tout en sécurité. Tandis que je ne regarde plus devant moi, je trébuche sur quelque chose et m’effondre à même le sol, me faisant, par la même occasion, quelques égratignures aux mains ainsi qu'aux genoux. L'écran de mon portable se brise, n'ayant pas supporté le choc, et décide de passer en mode "veille". Panique à bord, je suis dans le noir le plus complet et essaye de repérer l'appareil en question avec des touchés. Ma respiration perd son contrôle et voilà que je suffoque, étant presque pris dans un sanglot incontrôlable. Ma voix retentit en de légers "non" continus jusqu'à ce que je sente une présence, derrière-moi.
Je place mes doigts sur mes lèvres pour tenter de contrôler ma ventilation et je sens des larmes monter. C'est certain... je ne suis pas seul... du moins, je ne le suis plus ! Mon corps se pétrifie, je n'ose plus bouger et croise les doigts pour que cette entité ne m'ait pas remarqué. Contre mon gré, un petit bruit aigu sors d'entre mes lèvres en prononçant quelque chose d'à peine audible.
"S'il-vous-plait, ne me faites pas de mal..."
Durant un instant, rien ne se passe, mais un ricanement finit par être entendu. A en croire la tonalité de sa voix, ça doit être un homme assez viril qui prend, visiblement, un malin plaisir à me voir au sol. Peut-être... peut-être est-ce lui qui m'a fait tombé ?
"Pauvre petit... Tu t'es égaré ?"
Rien que son ton ironique ne laissait aucune impression positive. Alors que j'essayais de ramper vers l'avant pour m'éloigner de lui et pouvoir m'enfuir, il me souleva à une main, par le col et me mis face à lui. Grâce à la légère luminosité qui émanait des rues plus loin derrière-lui, je pus voir qu'il possédait une barbe et une cicatrice sur la joue.
J'étais terrifié, tout ce que je voulais c'est qu'il me laisse en vie, tranquille, qu'il ne me blesse pas physiquement puisque psychologiquement c'était déjà trop tard. Des larmes coulaient le long de mes joues ce qui l'amusait encore plus, mais moi j'étais loin de trouver ça marrant.
"Je vous donne tout ce que vous voulez ! Mon téléphone, mon argent, mais laissez-moi la vie sauve !"
Ma voix était tremblante et saccadée par les inspirations et expirations ainsi que les pleurs. L'homme ricanait à nouveau et se mis à me fouiller les poches, cherchant certainement mon argent ou autre chose. Je n'osais pas le regarder dans les yeux ce qui m'avait empêcher de prévoir le coup de poing qu'il allait m'attribuer en pleine joue en me laissant retomber par terre.
Je tenais l'endroit où il m'avait frappé et me débattais tout en appelant de l'aide. Il n'y avait visiblement aucun moyen de dialoguer ou de lui insuffler de la peine à l'égard d'un pauvre étudiant sans défense. Je réussis à me mettre sur mes deux jambes, mais il me ramena de son bras contre lui, visant cette fois-ci mon ventre de son autre main, donnant de violents coups.
Cette fois-ci je demeurais à terre, m'octroyant une étreinte pour maîtriser la douleur. Lui, il tournait autour de moi, n'ayant apparemment pas encore terminé ce qu'il voulait tirer de mon être. Je ne pouvais pas m'arrêter de pleurer et cette impression que j'allais y passer prenait désormais tout son sens. Ça y est... je vais y passer... soit je serai défiguré et à l'hôpital, soit je serai mort... Je me mis à crier, de vive voix, le plus fort possible !
"Arrêtez !!"
Il me prit par le cou et me souleva encore, bloquant ma respiration. J'avais tellement mal au ventre et à ma joue que je peinais à me débattre, mes mains tenant son avant bras. Peut-être que... c'est mieux ainsi ? Voyons les choses du bon côté, au moins je ne serai plus malheureux puisque je ne ressentirai plus rien... Prenons cette situation comme l'unique moyen de me délivrer de mes chaînes ! C'était triste de penser ainsi en étant entre les griffes d'un malfrat, mais ma vie me semblait si pénible et douloureuse... Cependant, je n'arrivais pas à me laisser faire et voulais absolument m'en sortir. Je n'étais apparemment pas assez courageux pour me laisser mourir.