I will always be waiting for you ... (Naomi)

27 Janvier
2017

I will always be waiting for you...

Melody Williams

De ce qu'elle a gagné...  Quoi, moi ? Dans un sens, ça rejoint ce que je dis. Si elle n'avait pas souffert – si je n'avais pas perdu mon procès – on ne se serait jamais connu. Mais dans ma tête, ça sonne comme de l'égoïsme, limite mesquin. Dans sa bouche... comme de la résignation. Limite un pointe de contentement. Difficile à concilier. Pourtant je suis celle qui répète le plus que je n'ai peur ni d'échouer ni de tomber, alors pourquoi est-ce que sa réaction me semble si invraisemblable ?
Parce que je ne suis jamais tombée d'aussi haut. Oui, sûrement ça.

Je la regardes marcher pieds nus dans les feuilles sans dire un mot. J'ai envie de la contredire, encore. Ça devient de plus en plus un réflexe. Non tu n'es pas un boulet, ne dis pas n'importe quoi. Je ne suis pas le genre de personne qui s'encombre de quelqu'un ou de quelque chose qui lui pèse. Pas le genre qui se traînerait des boulets – j'ai brisé suffisamment d'amitié, volontairement ou non, pour le savoir. Une certitude que l'on finit par avoir, quand on se lasse aussi vite que moi : l'ennui est mon pire ennemi. Et si quelqu'un m'ennuie ou me pourrit la vie, à quoi bon rester ?
C'est pour ça que je veux la contredire. Pas juste par principe, mais parce que si elle était un boulet pour moi, je ne serai pas là. Je serai à Londres à faire je ne sais quoi d'autre, mais pas là. Mais au lieu de ça, je secoue la tête l'air de dire "tu ne l'es pas, arrête". C'est ça mon plus gros problème : formuler mes pensées. Trop de désordre, trop d'inconsistance.

- Merci Naomi...

Je ne dis rien. Qu'est-ce que vous voulez répondre à ça ? Je n'ai pas l'impression d'avoir fait quoi que ce soit pour elle, à part quelques discutions de temps en temps et une amitié qui a finit par en découler. Est-ce qu'on remercie quelqu'un pour une amitié ? Je ne sais pas. Moi, non. Mais j'ai conscience d'être insensible, d'une logique glaciale et glaçante qui crée plus de mal que de bien. On s'y habitue. Je m'y habitue. J'ai plus de mal à m'attacher aux gens parce que je sais que je vais finir par les abandonner et les blesser, alors à quoi bon ?
Il m'a fallu plus de temps qu'elle, sans doute, pour développer un semblant d'affection. Son remerciement semble un peu décalé, du coup. Presque hors de propos. Alors je préfère me taire.

- Tu veux qu'on rentre ?

Je hausse simplement les épaules. Ce n'est pas à moi de décider. C'est elle qui m'a amenée ici et c'est à elle de choisir quand elle compte partir, si elle a finalement d'autres choses sur le cœur. Je ne sais pas vraiment pourquoi elle m'a conduite ici. Peut-être qu'elle voulait me parler de son passé le plus profond possible, peut-être qu'elle voulait juste me montrer cet endroit et m'expliquer. Peut-être... je sais pas.

- C'est toi qui voit.

Ici ou ailleurs, tant que je ne la laisse pas seule face à ses mauvais souvenirs, seule dans la nostalgie, seule avec sa sœur trop possessive.
Sa sœur qui me déteste. Sa sœur qui essaierait de faire en sorte qu'elle me déteste aussi, sûrement. Rien ne dit que c'est impossible. Beaucoup de personnes m'ont détestée alors que ça paraissait improbable.