À droite, l'école et ses élèves normaux, comme tout le monde.À gauche, le centre de redressement pour jeunes dangereux.Maintenant réunis, pour le pire.
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Soyons honnête : des fois, j'ai un peu peur de sortir dans cette ville. Quand on sait que je me suis fait kidnapper il n'y a pas si longtemps, ça explique sans doute. J'ai encore du mal à réaliser tout ce qui m'est arrivé depuis que je suis revenue en Angleterre. J'ai retrouvé un ami d'enfance, il m'a traînée à une soirée où j'ai eu mon premier (et dernier) "écart" dû à l'alcool, je me suis perdue avec un type de l'IRS, je me suis perdue au Japon aussi. Dire que je pensais que ma vie au Canada était compliquée. Que la série dans laquelle je jouais était exagérée. Tu parles. Il m'arrive au moins autant de trucs qu'à ces gamins en une année scolaire.
Bref, tout ça pour dire que j'avais décidé d'avoir une journée normale aujourd'hui. Vous savez, le genre de journée où on sort de chez soi juste pour traîner, manger une glace et éventuellement croiser un pote au coin d'une rue. Voilà, ce genre de journée. Du coup je me suis levée en faisant un gros effort pour ne rien oublier, jusqu'à compter. Une jupe, c'est bon. Un collant parce qu'on est pas encore en été quand même, un chemisier blanc, une veste. En fait, un truc qui ressemble vachement à un uniforme quand on y pense. Bah, tant pis. Si je me re-change maintenant, je serais capable d'oublier quelque chose. J'attrape mes lunettes de soleil sur ma table de nuit avant de sortir des dortoirs, puis de l'école.
Je me suis achetée une glace sur un stand qui traînait dans le coin - la magie des grandes villes - et j'étais en train de me promener tranquillement dans Brixton quand j'ai entendu des éclats de voix pas très loin de moi. Pour la journée normale, c'est rappé. Oui, j'aurais pu passer sans me retourner comme une grosse partie des passants mais... disons que j'ai un peu trop de coeur, voilà. Entendre des voix de garçons et une seule voix de fille qui se disputent, ce n'est jamais bon signe et j'ai des mauvais souvenirs associés à ce genre de situation - même si, dans mon cas, c'était un seul type. Bref autant que ce spray au poivre et mes cours de self-defence servent encore une fois.
Je tourne à droite pour débarquer dans la rue d'où proviennent les voix et je me retrouve face à deux gars, certes assez musclés mais je devrais pouvoir les gérer, et une fille. Il y en a un troisième pas loin d'elle.
Une si belle journée s'offre à moi et pourtant, je ne peux même pas en profiter pleinement, je suis obligé de suivre cet idiot... Tout ça parce que le psy à trouver intelligent de me menotter enfin attacher par la taille à une autre personne pour je cite « Augmenter mon relationnel » ! Relationnel, mon cul ouais ! Je ne connais même pas ce type ! Et il ne m'inspire pas confiance, mais alors pas du tout ! Déjà, il a une manière de parler que je n'affectionne pas, et puis franchement, il a vraiment l'esprit tordu ! Brrr, je suis bien content d'être un mec ! Je n'imagine même pas ce qu'il ferait vivre à une fille ! On avançait dans je ne sait quelles rues de Londres, jusqu'à ce que mon camarade rejoigne une ruelle assez miteuse où nous attendez un gars tout aussi louche... Super dans quoi je me suis encore fourré !
Alors que je divaguais sur le fait que je me retrouve dans l'une des situations les moins envisageables de ma vie, je remarquais que les gars n'ont pas bougé de la ruelle, bizarre... Ils avaient l'air de guetter quelque chose ou plutôt quelqu'un... Mmmh je devrai leur demander !
- Excusez-moi ! Mais on fait quoi actuellement ? Bon, aucune réponse, je les remercie et comprends qu'ils avaient oublié mon existence... Ça fait toujours plaisir ! Je vois qu'il explique à son collègue le pourquoi du comment je me retrouve attaché à lui, d'ailleurs ça ne bafoue pas un peu certaines règles des droits de l'hommes ça ? Je vous jure que cette école aura ma peau ! Je tends néanmoins l'oreille pour écouter ce qu'ils se disent et comprends qu'ils attendent encore quelqu'un, sûrement un autre ami louche ! Je m'adosse alors contre le mur et attends patiemment qu'on vienne me libérer de ces fardeaux ambulants...
Je somnole puis entends des éclats de voix, je me redresse et vois que les deux énergumènes sont en train d'embêter une jeune fille de l'école... Merde, mais qu'ils sont cons, c'est deux là ! C'est bon pour qu'on se fasse tous virer avec ces conneries, cette gamine à l'air apeuré et moi, je reste comme un con à rien faire, putain, mais secoue toi Jack !
- Lâchez-la ! Vous êtes vraiment... Je fus interrompu par une belle fille blonde qui elle aussi est à l'école ! Je l'avais déjà repéré, Naomi quelque chose ! Ouais, c'est elle l'actrice ou je ne sais pas trop quoi ! Elle semblait aussi énervée que moi... - Ne la touche pas ! Dit-elle, je dois avouer qu'elle est courageuse ces gars sont tous sauf accueillants ! Je m'étais rapproché de la petite pour l'aider si les gars allé trop loin. On ne sait jamais avec ce genre de personnes tout peu arriver !
Mais pourquoi je fais tout le temps ça ? Pas que je regrette d'être venue l'aider, surtout qu'elle a l'air bien paniquée comme il faut la petite, mais à des moments faudrait que je réfléchisse. À une contre trois, il y a peu de chances que j'arrive à tenir la distance, même en sachant me battre. Faut diminuer un peu la dose. Genre. Comme ça.
Bon j'aurais pu y aller un peu moins fort mais il était un peu trop près d'elle (et de moi) à mon goût, donc le coup de pied est parti tout seul. Enfin il a de la chance, je porte des baskets aujourd'hui, il y a peu de chances que je lui ai cassé le nez. Merde j'espère que je lui ai pas cassé le nez, en fait. Si on me reconnaît ça va être chaud au niveau de l'école, et bizarrement une convocation chez le directeur ça me tente pas plus que ça.
- Non mais t'es qui toi ?
C'est un type bizarre qui a parlé – je suis désolée, un mec avec une corde attachée autour de la taille, c'est forcément un type bizarre, surtout qu'elle est reliée à rien. Ou alors elle a cassé. Il me fixe comme s'il en avait rien à foutre que j'ai envoyé son pote par terre. C'est peut-être vrai, je suis juste une fille qui sait donner des coups de pieds, il doit se sentir supérieur avec ses muscles là. Abruti.
- Moi c'est Naomi. Et je vous dis de la laisser tranquille.
Évidemment, ça les fait rire. Qu'est-ce que je m'en fous. Qu'ils essayent un peu de rire quand ils se seront pris mon pied dans l'estomac... ou plus bas, en fait. Puisqu'on en est là.
- Tu crois que tu nous fais peur ? - Non. Mais je sais que je peux vous faire mal.
La pauvre fille est à moitié planquée derrière moi maintenant. Elle va me gêner s'ils décident de se battre, mais j'ose pas lui dire de lâcher mon bras. Elle est déjà en passe d'être traumatisée, si je la brusque en plus on va pas s'en sortir. Ne t'agrippe pas à moi comme ça, bordel.
Ça m'empêche pas de reculer en la faisant reculer avec moi, histoire de la protéger et de trouver une solution pour qu'elle me lâche en douceuuuur. Non parce que sinon je vais en venir à dégager mon bras violemment et si elle se retrouve en PLS à pleurnicher ça va être au-dessus de mes forces. Je suis pas psy, moi. Juste un peu trop héroïque par moments. Allez arrête de réfléchir Naomi. Ils sont deux, et ils sont encore trop occupés à se marrer comme des cons pour être dangereux. Ça va pas durer. D'expérience, ce genre de type apprécie pas qu'une fille leur tienne tête, surtout si elle affirme pouvoir les battre sans souci (oui, je l'affirme, mais je suis pas super sûre d'y croire.) Alors on va faire les choses dans l'ordre.
- Reste pas derrière moi. Pars en courant, je sais pas moi.
Elle me fixe avec un regard de biche effrayée. Rah mais traumatisée ou pas, je sais pas, réagis. Casse-toi, genre tout de suite, tu vas finir en dommage collatéral si tu restes. Non parce que là ils ont arrêté de rire, un peu. Et ils avancent trop vers moi. Et mon coup de pied va pas avoir un effet éternel. Faut que je la secoue, là.
- Bon, tu cours oui ou merde ? Tu vois pas qu'ils vont te frapper si tu restes ?
Eh mais plus jamais je joue la sauveuse de demoiselle en détresse. Rends-moi mon bras oh !
OUTCH ! Putain ! Mais elle est malade elle ! Mon nez ! C'est bon pour qu'elle me le casse, n'importe quoi moi qui voulez aider ! Merci, on repassera pour ça, je me relève difficilement, je touche mon nez, il ne me fait pas mal ça va ! Mais je saigne et ça... C'est chiant. Je regarde ce qu'il se passe la jeune fille est caché derrière l'autre furie , on dirait qu'elle l'empêche de se défendre... Je perçois difficilement leurs dires, mais les filles n'ont pas l'avantage. Je regarde par terre et remarque que ma corde a été cassé ! Merci dieu ! Je devrai partir et les laisser se débrouiller en même temps, c'est leur problème pas le mien, mais ma conscience décide de se réveiller, je ne peux pas laisser, c'est deux filles comme ça surtout pas avec ces deux barges ! Rooh et puis merde Jack une bagarre de temps en temps, c'est quoi ? Rien d'énorme tant que je ne dépasse pas la limite.
- Hey les lourdauds ! Vous ne pouvez pas chercher un adversaire à votre taille ? Je me place derrière ces choses et fais une balayette à l'un d'eux qui s'écrase au sol... Je regarde alors les deux filles enfin surtout la plus petite et lui dit :
- Mais casse-toi ! Tu ne vois pas que tu vas gêner ! La douceur ? Pas le temps ! Putain, mais elle n'est pas décidée à bouger elle ! Le gars se relève et il a l'air bien énervé ! Merde... Bon bah tant pis pour le contrôle. Je pousse la fille sur le côté pour que les passants la voient et me tourne vers l'autre blondasse hystérique.
- Toi, tu vas m'aider ! Tu prends le plus petit je prends le costaud ! Je n'attends aucune réponse particulière et fonce sur ma victime... Un coup de genou dans le ventre et il se plie en deux... Je regarde vite fait Naomi qui à l'air de gérer, mais je prends trop de temps et l'autre me fout une droite... Putain ça faisait longtemps tiens ! Je crache un filet de sang et me rue sur mon adversaire, le faisant tomber au sol et le rouant de coups... Et merde ça y est, je perds le contrôle putain... Si je n'arrête pas maintenant, je vais le tuer, mais bizarrement je le revois prêt à frapper ces deux filles et une vague de haine me submerge, j'arrête de le frapper et pose mes mains autour de son cou. Je commence à serrer et me penche vers son oreille.
- Alors ordure ? On aime violenter les femmes ? On va voir comment tu gères quand c'est toi qu'on frappe... Mon sourire carnassier lui fait face et je lui donne un violent coup de poing dans le thorax , je n'entend plus rien autour de moi et je ne sais même pas comment s'en sort la blondinette...
Qu'est-ce qui se passe là, exactement. Wait. J'ai besoin d'une seconde pour analyser. Juste. Une. Seconde. Ok. Réfléchis. Là, il est en train de prendre notre défense (avec une réplique digne d'un film et qu'il a sûrement pompée dans un films d'ailleurs). Donc si j'ai bien compris... J'ai tapé la mauvaise personne. Bien. Génial, bravo Naomi. Ou alors il a changé d'avis après coup. Pour ma défense, il avait l'air franchement dans leur camp jusque là, je pouvais pas deviner qu'il faisait pas partie de leur bande. Et puis il faisait quoi, tout à l'heure, s'il les aidait pas ? Il regardait ? C'est pas beaucoup mieux...
Ok, ok, il s'est rattrapé avec la balayette. Ça m'en fait un de moins sur le dos et il me reste juste à virer la gamine traumatisée qui serait en train de m'arracher le bras si elle en avait la force. Elle compte se barrer avec ou quoi ? Elle bouge pas. Mais merde si moi je te fais pas peur, réagis quand un gars te crie dessus, surtout un des trois qui t’encerclaient il y a trois secondes. Barre. Toi. Je secoue mon bras pour qu'elle me lâche, à peu près au moment où lui la vire. Il a le visage en sang, j'ai vraiment tapé fort, merde.
- Toi, tu vas m'aider ! Tu prends le plus petit je prends le costaud !
Je lui aurais bien dit de se calmer (et aussi que j'avais laaargement la force de me coltiner le costaud, au passage), mais il est déjà parti. J'ai juste le temps de voir qu'il s'en sort bien avant d'esquiver un coup de poing. Bien. Il veut jouer à la bagarre, le petit ? Jouons. Un coup de pied dans le genou, surtout avec une jolie feinte, ça marche à chaque fois. Je le vois vaciller un peu, même s'il se reprend assez vite pour me balancer un nouveau coup de poing. Sauf que celui-là, je l'ai vu venir, trésor, et que moi ce qu'on m'a appris c'est la défense. Choper le poing au vol, frapper à la base de la nuque et bloquer son bras en le plaquant au sol. En tordant – oups – un petit peu trop, histoire que ça lui fasse mal.
- C'est pas agréable, hein ?
J'aurais bien savouré ma victoire plus longtemps (c'est toujours drôle d'humilier les pseudo-racailles), mais je crois que l'autre est en train de péter un câble sévère. Pourquoi c'est toujours moi qui me coltine des gens cinglés exactement ? Genre de tous les gars qui pouvaient me filer un coup de main pour sauver une fille, il fallait que je tombe sur le malade du coin. J'adore ma vie.
- Eh, toi. Ton pote, il s'appelle comment ? Le troisième ? - J... Jack ? C'est... pas mon pote...
Ça je m'en fous, mon gars. Mais totalement. Parce que celui des deux qui est vraiment ton pote est en train de se faire étrangler et globalement dégommer. Mais merci de la réponse. Bon, on envoie celui-là faire un petit tour au pays des étoiles avant de gérer le conflit un peu trop violent d'à côté. Là, voilà, un de moins. Plus que deux, du coup. Comment on calme un gars qui enrage à ce point ? Je veux pas me prendre un coup de coude ou quoi... Remarque, je lui ai balancé un coup de pied en plein visage, ça ne serait que justice.
Merde. Ma journée normale elle est fichue pour de bon. Bon bah foutue pour foutue... Je me précipite vers lui en glissant mes bras sous les siens pour essayer de le tirer en arrière (ou en tout cas pour qu'il ne puisse plus frapper, c'est un début). Au pire je me prendrai un coup, au mieux il reprendra ses esprits.
- Arrête ! Calme-toi !
Alias la phrase qui calme le moins les gens. Rah. J'ai pas la moindre idée de comment le calmer, et s'il se retourne contre moi ça va mal finir. Les deux autres gars doivent pas être aussi altruistes que moi : s'il se met à me frapper, ils vont juste se barrer en courant. Mais il a dit qu'il ne voulait pas qu'on s'en prenne aux femmes, non ? Il appliquera ce principe même dans cet état ? On va parier que oui. C'était quoi son nom déjà ? Ah oui.
- Jack, arrête. Il a compris ! Laisse-le ! Ça va dégénérer.
Ça a déjà dégénéré. Ce qui compte, c'est que j'arrive à le tirer assez en arrière pour qu'il desserre la prise sur sa gorge. J'ai pas envie d'être témoin – complice même? – d'un meurtre aujourd'hui, alors lâche ce type.
Je n'arrive décidément pas à m'arrêter, je frappe, je le frappe jusqu'à en perdre haleine... Je déteste ça, perdre le contrôle... Mais cette enflure l'a bien cherché aussi. Putain son visage vire au violet, mais mes doigts refusent de relâcher sa nuque pour autant... J'entends une voix au loin...
C'est bizarre, une pression se fait sentir au niveau de ma taille, je baisse les yeux une seconde et remarque que des bras m'encerclent. Encore cette blondinette de malheur, à tous les coups ! Je frissonne de rage, je l'enverrai bien se faire voir, mais au fond de moi, je sais qu'elle se met en danger pour moi... Et étonnement, j'admire son courage. Peut-être suicidaire mais néanmoins courageuse.
- Jack, arrête. Il a compris ! Laisse-le ! Ça va dégénérer.
Sa voix faite écho au fond de moi comme une résonance mélodieuse... J'entends ce que tu dis bordel ! Tu vois bien que là, je ne peux pas, que là, je n'y arrive pas... Allez Jack concentre toi, comme on te l'a appris. « Respire Jack, compte jusqu'à 10... Inspire, expire... 3... 2... 1... ».
Voilà ma respiration revient à la normale et mes doigts relâchent leur proie, je respire profondément, c'est bon, je vois l'autre partir en courant, lâche...Maintenant, je me détends serrant les poings, mes phalanges sont blanches, je regarde les bras qui sont restés accroché à moi et bizarrement, je trouve ça apaisant.
Putain, j'ai bien failli le tuer celui-là... Je crois que mes séances avec le psy vont revenir au bout du jour... Décidément, jamais je ne serai tranquille et en paix avec moi-même, je sent quelque chose de chaud me piquait le visage, je touche et fronce les sourcils. Merde, j'avais oublié que la blonde et l'autre con ne m'avaient vraiment pas loupé, je pisse le sang bordel ! Quelques gouttes perlaient au sol, je me rappelle alors que la jolie blondinette est toujours accrochée à moi... Tiens, j'ai bien envie de jouer, je vais l'embêter un peu.
- Alors boucles d'or ? On se la joue entreprenante maintenant ? Fis-je en souriant discrètement.
Je fais quoi s'il se calme pas ? Je l'assomme ? Je le tire en arrière par les cheveux ? Je décroche ses doigts un par un comme avec les gosses ? J'ai jamais eu à me poser ce genre de questions. Je veux pas avoir à me poser de questions ! Le gars est en train de devenir beaucoup trop bleu. C'est pas normal d'être bleu, merde !
Ok. Ok. Il est en train de le lâcher. Tout va bien. Il est vivant. Je crois. J'en sais rien. Il a l'air de respirer. Le deuxième s'est réveillé, visiblement, vu qu'il est en train de se barrer en criant un truc qui ressemble à "vous allez le regretter". Oui, on va sûrement le regretter. Enfin plus le blondinet que moi parce que, pour l'instant, j'ai pas fait grand chose de mal – je défendais quelqu'un, après tout. D'ailleurs c'est dommage, il arrive à courir malgré mon coup dans le genou. Ça aurait été plus satisfaisant qu'il s'en aille en boitant. Bon, j'arrive à souhaiter le malheur d'un connard, la panique est passée.
- Alors boucles d'or ? On se la joue entreprenante maintenant ?
Sursaut. Ah oui zut, je l'ai pas lâché pendant tout ce temps. Remettre mon cerveau en état de marche normale avec toute l'adrénaline qu'il a produite et absorbée, ça a un peu court-circuité tout le reste. Je le lâche avec un léger soupir. Et il m'a appelée "boucles d'or" là ? Il est sérieux ?
- Je suis ravie que tu n'aies pas tué quelqu'un, trésor, mais si tu me parles comme un dragueur du dimanche on va pas s'entendre.
Comment ça, c'est ironique de la part de quelqu'un qui l'appelle "trésor" ? J'appelle tout le monde comme ça, si on commence à y voir une tentative de drague, ironique ou pas d'ailleurs, je suis pas sortie. Bon pour être tout à fait honnête, j'ai quand même souri en lui répondant, ça casse un peu ma crédibilité. Mais entre toute l'énergie qui a circulé dans ma tête avec cette histoire et le fait que j'ai échappé de très peu à la complicité de meurtre, j'ai pas trop l'état d'esprit pour faire la gueule.
- Faudrait peut-être qu'on appelle une ambulance ?
Ouais. Enfin si on fait ça, moi je me barre avant qu'ils arrivent, parce que justifier l'état de la loque étalée sur le sol, ça implique beaucoup de choses par lesquelles je n'ai pas envie de passer. Mais bon... s'il se réveille – non, quand il se réveillera – on risque d'avoir des problèmes. Il s'est quand même fait défoncer à coup de poing. Peut-être qu son pote a déjà appelé une ambulance, aussi. Ou les flics. Ou les deux.
- Qu'est-ce que tu foutais avec ces types, au fait, si tu les détestes tant que ça ?
Moi je traîne pas avec des gars que je suis capable de défoncer à coup de point cinq minutes plus tard, et je crois pas être bizarre sur ce point-là. Le rapport ? Je vous assure dans ma tête ça avait presque un lien logique. Ou pas. Je sais juste pas quoi faire avec ce machin par terre, en fait, alors je détourne.
- Je suis ravie que tu n'aies pas tué quelqu'un, trésor, mais si tu me parles comme un dragueur du dimanche, on ne va pas s'entendre.
La pauvre si elle prenait ça pour une technique de drague, elle n'est pas sortie de l'auberge ! Woh. Mais qui dit encore ça à 17 ans ? N'importe quoi je m'égare... Je regarde le type allongé au sol, il a l'air au bord de la mort... Je n'y suis vraiment pas allé mollo. Mais genre vraiment, il pisse le sang, je vois son pote partir en nous criant une vague "Vous allez le regretter ! ", wesh frère tu abandonne ton pote après ce que je lui ai fait et tu me menaces ? Mais c'est quoi ces mecs ! Genre qu'il laisse son pote en plan ok ! T'as le droit d'être lâche mais menacé le gars qui peut te tuer en deux minutes, ça, c'est suicidaire. Bref, j'entends l'autre gémir à côté gisant dans son propre sang, j'ai presque pitié de cette ordure. Je dis bien presque y a des limites dans la vie... La douce voix de boucles d'or m'oblige à arrêter ma contemplation... J'en bien ravi aussi ! Martel ne me laisserait pas revenir à l'institution en tant que meurtrier... Wait... Mais elle l'a déjà fait ! Bon circonstances atténuantes, tu me diras.
- Ne t'inquiète pas ! Je ne drague pas, je taquine ! Au fait tu feras attention t'a du chocolat au coin de la bouche... Fit-je en lui faisant un clin d'oeil, je ne sais pas si elle me croira mais j'aime bien ce genre de blagues nulles.
J'en profite pour l'observer, la détaillant quasiment à chaque centimètre de sa peau. Cheveux blonds yeux verts, basique, mais je ne pourrai pas l'imaginer autrement... Par rapport à moi, elle n'est pas très grande, mais jolie tout de même. Je m'attarde une temps, soit peu sur ses formes, pas mal pas mal. Mon regard descend sur ses hanches et passe par ses fesses, bombées, musclées et beaucoup trop envoûtantes ! C'est muy caliente moi, je dis ! Je m'attarde encore un peu sur cette magnifique partie rebondie de son anatomie, même si je dois avouer que le haut n'a rien à lui envier...
- Faudrait peut-être qu'on appelle une ambulance ?
Sa voix me sortait à mon grand regret de ma contemplation.
- Faudrait... Mais je n'ai pas envie. Remarque s'il meurt, je ne me sent pas d'aller en taule... Blondie ? T'as un téléphone sur toi ?
Elle doit forcément en avoir un ! Et puis si elle n'en a pas, on demandera à un passant. Ouaip, on va faire ça par contre hors de question que je plonge parce que j'ai défendu une nana totalement idiote qui a su se fourrer là.
Je savais que je n'aurai jamais dû écouter l'idée de ce psy débile mais bon au pire, je dis que c'est de sa faute ? Je n'aime pas les adultes autant accusés celui qui m'a mis dans la merde ?
- Qu'est-ce que tu foutais avec ces types, au fait, si tu les détestes tant que ça ?
- Ouais, je sais, mais tu devrais poser la question à ce cher Mr. Ueda... Il m'a mis dans une merde pas possible avec ses conneries...
Non mais vraiment qu'elle idée de m'attacher à ce mec... Putain, je n'ai pas envie d'aller en taule moi. Je m'adosse au mur puis me laisse tomber immédiatement par terre, mes jambes ne supportant plus mon poids... Pourquoi moi hein ? Siempre mio...
- Putain pourquoi toujours moi...
Ça y est je déprime... Super devant blondie en plus... Comment passer pour un blaireau by Jack Winston.
J'espère vraiment que ce gars ne va pas s'amuser à appeler les flics. Je veux dire, on a tous les deux – trois – vu qu'ils s'en prenaient à un fille, il n'oserait pas ? On peut toujours dire la vérité, à savoir qu'on la protégeait, et prétendre que Jack n'a fait que se défendre... bon ça impliquerait quelques coups de pieds de plus pour que l'histoire soit crédible vu qu'il est globalement intact (à part son nez), mais si jamais on a des problèmes ça peut être une solution. C'est pas le moment de penser à ce genre de choses, franchement.
- Ne t'inquiète pas ! Je ne drague pas, je taquine ! Au fait tu feras attention t'a du chocolat au coin de la bouche... - Eh bah ça nous fait au moins un point commun.
Le chocolat ou le côté "taquinage" ? Qui sait (choix n°2) ? Enfin à supposer que ce soit pas encore une blague, un peu de chocolat au coin de la bouche c'est rien qu'un coup de langue ne puisse pas enlever. Voilà. Et s'il peut avoir le doute aussi tant qu'à faire, je dis pas non. Il y a aucune raison qu'il soit le seul à s'amuser. Et oui, je sais qu'il y a un gars qui est en train de ramper en gémissant par terre. Permettez ? Je m'occupe de le garder en vie dans une seconde.
- Faudrait... Mais je n'ai pas envie. Remarque s'il meurt, je ne me sent pas d'aller en taule... Blondie ? T'as un téléphone sur toi ?
S'il... meurt ? Il est sérieux là ? Je sais bien qu'il a tapé fort mais quand même... Ooook, j'ai rien dit, il suffit d'un regard sur ce type. Il est à moitié mort et il pisse le sang. Bordel, pourquoi je me retrouve toujours à côtoyer des psychopathes ? Soupir. Bon, commençons par la base. On va passer sur le fait qu'il m'appelle Blondie – ça fait tellement caricature de blondasse américaine ce surnom mon dieu – et on va aller à l'essentiel. Mon téléphone. On va appeler une ambulance, éjecter le problème et se barrer d'ici vite fait. Ouais, c'est une bonne idée.
- Alors on va le garder en vie. J'appelle.
Il va falloir que je mente. Un peu. Pas trop, pour qu'on ne m'accuse pas d'obstruction à la justice si on finit par nous retrouver. Le temps que le téléphone sonne, j'en profite pour changer de sujet. Manquerait plus qu'il flippe derrière moi en plus.
- Ouais, je sais, mais tu devrais poser la question à ce cher Mr. Ueda... Il m'a mis dans une merde pas possible avec ses conneries... - Ueda ? Tu es à Indarë ?
Sûrement un élève de Martel. Ils me poursuivent, c'est pas possible. Ça devient presque lassant, à la longue. Ah, quelqu'un décroche. Ok, une grande inspiration. Oublie que tu es dans le monde réel pour une seconde. Il est temps de se composer un rôle. Prenons un ton... paniqué et hésitant, tiens.
- Je... je viens de trouver quelqu'un... par terre. Je crois qu'il ne respire plus...
Il me font le couplet classique (je commence à le connaître à force de jouer dans une série où il y a un accident toutes les deux minutes). Donc il me suffit de répondre le même genre de trucs. Par exemple : est-ce que j'ai vu quelque chose ? Et où je suis ?
- J'ai... j'ai vu un gars s'enfuir. A Brixton.
Un bref regard autour de moi histoire d'avoir le nom des rues pour qu'ils trouvent facilement, "on envoie quelqu'un", et je raccroche. Et je crois que j'ai jamais autant soupiré en si peu de temps.
- Putain pourquoi toujours moi... - Tu veux comparer ? Je me suis fait kidnapper au début de l'année.
Franchement, si quelqu'un peut dire "pourquoi toujours moi", c'est plutôt moi. Sans blague. Enfin c'est pas le moment. Il faut qu'on se bouge.
- L'ambulance va bientôt arriver, il faut qu'on se tire. Sauf si tu veux passer l'aprem à répondre aux questions des flics.
Moi non, donc s'il a un soudain accès de culpabilité et qu'il préfère rester, je m'en vais quand même. J'ai rien fait de mal, à part défendre une fille qui se faisait agresser – il faut que je me rappelle de son visage, d'ailleurs, au cas où. Manquerait plus qu'on m'accuse, en plus.
Même si j'ai repris mes esprits, je dois avouer que j'ai vraiment, mais alors vraiment la haine... Et vu l'état de cette enflure, je n'y suis pas allé mollo. Je suis tellement paumé, je n'ai même pas capté blondie qui me parlait...
- Ueda ? Tu es à Indare ? - Bah ouais... On dirait ça te choque, il n'y a qu'un forge pour péter les plombs comme ça.
Ma réponse ne laissait pas vraiment la place à un quelconque dialogue, j'étais encore trop énervé pour entretenir une discussion concrète avec une personne.
En tout cas, Blondie elle, n'était pas prête de se taire... Je n'en peux plus de cette pipelette qui me prend la tête.
- Tu veux comparer ? Je me suis fait kidnapper au début de l'année.
Je dois avouer que je ne faisais pas trop gaffe à la conversation jusqu'à entendre ça... Mais d'où la meuf me lâche ça comme ça ? Je dois lui dire un truc ? Genre « Ah triste mdr » parce que là, j'ai rien qui me vient à l'esprit..
- Wait ! Quoi tu t'es vraiment fait kidnapper, mais quand ? Comment ? Mais genre ?
Bon blondie me répondra peut-être plus tard écouter... Ce n'est pas très gentil tout ça beauté.
- L'ambulance va bientôt arriver, il faut qu'on se tire. Sauf si tu veux passer l'aprem à répondre aux questions des flics.
Ah pas con ça ! Même si j'ai abusé et ça s'est peu le cas de le dire, j'ai moyennement envie de finir au commissariat. Encore une fois, je regardais blondie et dans un élan de bon sens lui saisi la main.
- Bah ouais... On dirait ça te choque, il n'y a qu'un forge pour péter les plombs comme ça.
Évidemment. Évidemment. À un moment, je vais finir par croire que je suis poursuivie. Ou maudite. Ou les deux. Je peux aller nulle part sans tomber sur un élève d'Indarë. Non, je peux aller nulle part sans tomber sur un élève de Forge, même. J'ai dû rencontrer un ou deux Potion mais franchement, j'ai l'impression que la vie a décidé que je devait croiser des Forge à tous les coins de rue – littéralement, pour cette fois. Je vais en faire une maladie, un jour. Heureusement que je vais passer un mois à l'autre bout du monde. Si je croise un Forge là-bas aussi, je crie au complot mondial.
- Wait ! Quoi tu t'es vraiment fait kidnapper, mais quand ? Comment ? Mais genre ?
Ah bah je l'ai choqué. Je sais pas si c'était vraiment mon but, mais c'est assez marrant. Il vient de défoncer un type à coups de poings mais c'est moi qui le choque. Franchement, à part le réveil dans un lieu inconnu, ce n'est pas un souvenir si traumatisant que ça – enfin si, mais je m'en suis sortie en un seul morceau comme toujours donc ça me fait plus sourire que flipper quand j'y repense. Y a que moi pour sourire en repensant à un kidnapping. Mais j'ai pas le temps de le distraire avec des détails. Pour l'instant, je veux me barrer de cette ruelle et laisser cette histoire de sauvetage un peu foiré derrière moi. Je pars dans quatre jours, je refuse de voir tout foutu en l'air parce que j'ai eu l'idée idiote – bon pas vraiment idiote mais voilà – de me mêler d'un truc que la moitié de la ville avait ignoré.
Eh trésor, on a peut-être sauvé une fille ensemble mais tu pourrais avoir une seconde d'hésitation avant de me prendre la main comme ça, non ? Bah visiblement non. Si j'avais pas autant hâte de me casser d'ici, j'aurais peut-être retiré ma main brusquement en levant les yeux au ciel, mais pour l'instant je préfère courir pour être loin de cette rue quand l'ambulance arrivera. Voilà, courons.
Je ne ralentis et ne m'arrête que quand ma respiration décide que franchement, j'abuse, et je m'adosse au premier mur qui passe pour reprendre mon souffle. Les gens nous ont jeté des regards bizarres – du moins pour ceux dont j'ai perçu le regard. Forcément que deux personnes qui traversent les rues de Londres à toute vitesse ça doit pas forcément être commun pour eux, surtout quand il y en a un qui a du sang sur le visage. Ah mais oui merde je lui ai balancé un coup dans le nez tout à l'heure.
- Euh... Désolée... pour le nez...
Maintenant qu'on est hors de danger, ça me semble le bon moment pour m'excuser. Je pouvais pas savoir qu'il n'était pas leur ami, aussi ! Comment j'aurais pu me douter que le psy s'amusait à coller les gens avec des gens qu'ils n'aimaient pas. C'était censé être quoi comme thérapie, de toute manière ? On soigne quoi en forçant un type à traîner avec des mecs pareils ? En tout cas pas la colère, visiblement.
Je pousse un soupir en arrangeant un peu mes cheveux. Dire que j'avais l'intention de vivre une journée normale aujourd'hui. Mais non, cette école a définitivement décidé de me retirer le droit à la normalité et à la tranquillité, même pour vingt-quatre heures.
- Rassure-moi, dis-moi qu'il est pas cassé...
J'ai tellement, mais tellement pas envie de devoir aller à l'hôpital pour leur expliquer que oui, j'ai pété le nez d'un inconnu à coup de pied. S'ils reconnaissaient ma voix ou faisaient le lien avec le garçon récupéré à moitié mort dans la ruelle, en plus, ça ne ferait que m'attirer encore plus de problèmes. Et puis ça serait triste, de défigurer un si beau visage. Ouhla, je divague, moi.
Ah putain ! Mon nez ! J'avais totalement oublié ! C'est vrai que je suis limite ensanglanté, mais bon, on va dire que notre rencontre a été frappante hein ?! Ok blague nulle...
- Rassure-moi, dis-moi qu'il n'est pas cassé...
Cassé ? Certainement pas ! Elle a beau tapé fort la demoiselle, il en faudra plus que ça pour me le casser... Mais bon, je vais la faire tourner un peu en bourrique ma jolie blondie. Je vais mettre mes talents d'acteurs à l’œuvre. Je me tiens le nez, grimaçant de douleur.
- Putain... Je crois bien que si... J'ai super mal et j'ose à peine le toucher. T'aurais pu faire gaffe, va falloir qu'on aille à l’hôpital.
Ne ris pas, ne ris pas, mon dieu, j'aime trop sa tête ! C'est à tomber, je pourrai voir cette tête tous les jours, je ne m'en lasserai pas !
- Détends-toi baby ! Je rigole, j'ai connu pire !
Je ris, un peu trop fort peut-être, mais cette fille est trop mignonne... Woh, wait ! Jack, tu déconnes là. On va se calmer mignonne, mais de loin ok. Ce n'est pas du tout le moment, ni l'endroit, ni le contexte pour s'enticher d'une poupée que tu lâcheras certainement deux semaines plus tard ! Même si le contexte ne se prêtait pas aux pensées que j'avais, je ne pus m'empêcher de regarder le visage si fin de la blondinette, et ses grands yeux verts qui brillent d'une étincelle de malice, chose rare de nos jours... Bref, cette Naomi a réellement tout pour me plaire, dommage, je ne sais vraiment pas tenir une fille... Ou un gars.
Mais outre ce fait ! Je suis toujours imbibé de sang et au vu des passants ce n'est pas beau à voir... Merde faudrait que je me change, ou du moins que je lève ça. Bah, j'vais faire ça, ouais, allez hop, on l'enlève, bon, j'vais éviter de le jeter à la poubelle des fois qu'on essaye de remonter jusqu'à moi ça serait con après la fuite très discrète qu'on vient de vivre...
- Bon chérie ? Tu n'as pas un second t-shirt sur toi par hasard ? Tu serais douce... Allez hop ! Petit regard qui tue n'importe qui, genre petit yeux de chatons battus si avec ça elle ne fond pas !
Attends t'es sérieux ? Genre je lui ai vraiment fait si mal que ça ? Bon si je lui avait cassé le nez je sais pas s'il aurait eu la force de tabasser un gars à mains nues - ma mère m'a dit que ça faisait super mal. Quoiqu'il dit que ça lui fait mal... Génial, vraiment génial. Paye ta journée, hein. Une altercation dans une ruelle et un possible séjour à l'hôpital, peut-être même chez les flics après. J'ai dit que j'avais pas envie de me retrouver chez les flics juste parce que je suis tombée sur un gars qui sait pas garder le contrôle ?
- Détends-toi baby ! Je rigole, j'ai connu pire !
Je vais lui en coller une. Oh oups je crois que je lui ai balancé un coup de poing dans l'épaule. Quoi ? Il était tout doux mon coup ok ? Je suis pas violente non plus. Et puis je suis sûre qu'il fait pareil à ses potes quand ils font une blague de merde. Il se marre en plus. C'est ça, c'est très drôle. Pff.
- T'es vraiment grave...
Je sais pas si c'est la retombée d'adrénaline ou l'émotion mais je trouve que son rire est vachement agréable à entendre - même s'il se fout de ma gueule, ce con. Ça m'a même fait sourire. Ah bah super pour ma crédibilité de femme en colère. J'ai pas l'énergie pour vraiment m'énerver, de toute façon, et je suis plus rassurée qu'autre chose. Si je lui avait vraiment cassé le nez la journée aurait été invivable. Faut croire qu'il saigne facilement.
Parlant de sang, il en a plein son t-shirt à force de pas faire gaffe et... il fait quoi, là ? Il est juste en train de se foutre torse nu au milieu de la rue, sans pression. Je dirais rien, des fois j'oublie de mettre un haut par-dessus mes sous-vêtements donc je peux pas juger. Mais quand même... Il est... Il est vachement bien foutu maintenant que j'y pense.
- ...douce... - Hein ?
Je crois que j'ai bugué. Il a dit quoi ? Attends, on va commencer par remettre mon cerveau en place correctement, avec un petit secouage de tête discret. Enfin relativement. De toute façon vu que j'ai bugué sur ses abdos pendant plusieurs secondes je vais galérer niveau discrétion. On va reprendre du début. Il a dit quoi ? Enfin même en réfléchissant vu que j'étais pas attentive du tout j'ai pas compris autre chose que "douce". On va pas aller loin avec ça. Mais en même temps si je lui demande de répéter il va me charrier. A moins d'avoir besoin de nouveaux yeux, il a forcément remarqué. Soupir. J'ai vraiment le chic pour me mettre dans des situations pas possibles.
Attend, mais d'où elle me frappe elle ? Avec sa force de moustique là, je ne peux pas m'empêcher de rire, elle est trop drôle, pauvre puce...
- T'es vraiment grave...
Je ris et l'attrape par les épaules pour lui frictionner les cheveux, je sais que les filles détestent ça, et bien entendu, j'adore faire ce que les gens détestent... Mais bon à part, ça, elle ne m'a pas répondu pour le t-shirt... Je la relâche et la regarde attendant qu'elle réponde, mais bon apparemment, elle a bugué. Elle m'écoute blondie ou pas là ? Eh oh ! J'agitais ma main devant son visage, un léger sourire au coin des lèvres... Elle rêvasse, non mais je rêve ! La meuf bave carrément sur mes abdos, j’émets un petit rire.
- Alors tu la fermes cette bouche ? Je me sens violer dans mon intimité !
Chose fausse mais bon ! J'aime mettre les gens mal à l'aise, leur faire remarquer des petites choses gênantes, c'est la base ! Je me concentre sur Blondie dont le malaise est à son paroxysme hehe ! J'adore, elle est mignonne dans cet état ! Mais même mignonne, je vais peut-être éviter de continuer de me balader à poil dans la rue... J'accroche mon regard à celui pétillant de Blondie, souriant légèrement devant sa gêne.
- Du coup, je disais, t'as pas un second t-shirt sur toi ? Même si entre nous, tu préférerais que je reste comme ça hein ?
Je lui fis un petit clin d’œil complice, si elle croit que je vais faire genre, je n'ai pas remarqué que je lui plais, c'est mort ! Bon, on pourrait parler de réciprocité, mais ça elle n'a pas à le savoir ! En vrai, je la plains, elle est vraiment tombée sur le pire beauf que je suis... Mais je ne saurai dire comment, je sent qu'on va bien s'entendre elle et moi !
On va... regarder ailleurs un moment. Ouais. Ça me semble un bon plan d'avenir. Il se moque de moi et il prends même pas la peine de le cacher. Violé dans son intimité tu parles ! C'est lui qui se fout à moitié à poil au milieu de la rue. Tss. Ouais bon je m'énerve mais c'est surtout parce qu'il a visé juste – sans trop de difficulté – et que je dois avoir complètement changé de couleur en l'espace d'une demi-seconde. Vers le rouge. Je le déteste. Doucement, Nao. Desserre les dents. Voilà. Et les poings aussi, tant qu'à faire. On va éviter de lui écrire encore plus de "je me suis battu" sur le visage. Même si je lui en aurais bien collé une, juste pour la forme. Quoi ? J'aime pas qu'on me mette face à des trucs gênants. Et ça c'est carrément gênant.
- Du coup, je disais, t'as pas un second t-shirt sur toi ? Même si entre nous, tu préférerais que je reste comme ça hein ?
Ha ha ! Ça va les chevilles, sinon ? Sous prétexte que je me suis perdue dans mes pensées une seconde – oui bon pas vraiment mais c'est plus facile à admettre – il se la joue. J'aurais juste dû le planter sur place, tiens, ça l'aurait calmé. Comme si j'allais préférer qu'il reste comme ça...
- Tu aimerais bien.
Moi aussi j'ai le droit de balancer des petites piques inutiles. Faut qu'il arrête de prendre ses rêves pour la réalité pour quelques secondes avec les yeux... dans le vague. Ouais. C'est pas parce que t'as des abdos bien dessinés que tu peux te la péter en toute impunité.
- Qu'est-ce que tu veux que je foutes avec un deuxième t-shirt ? Et puis je suis pas sûre que mon style t'irait très bien, tu sais.
Et s'il insiste je lui file celui que je porte en ce moment, on verra bien qui va buguer après ça. Franchement. Et oui, j'en serais capable. Ça serait pas la première fois que la moitié d'une ville – ou une ville entière, même – me verrait en sous-vêtements et je suis plus à ça près.
- Enfin le plus simple ça serait que tu retournes en chercher un à Indarë...
Ça implique de traverser tout le quartier torse nu, mais ça avait plus l'air de le faire marrer qu'autre chose donc j'imagine que ça le dérange pas. Et si ça peut me permettre de le laisser là-bas au passage pour tenter de rattraper un peu ma journée pas si normale... Ouais, non, j'ai juste envie de me poser quelque part, je tenterai la journée normale demain. Ou quand je serais à l'autre bout du monde. Pour l'instant j'ai un blondinet à moitié nu et avec du sang plein la tronche à gérer, c'est déjà pas mal.
- Et tu devrais essuyer ton visage un peu. Perdu pour perdu, utilise ton t-shirt.
Je pense pas qu'il réussira à le laver après ça de toute manière. Le sang ça reste.
The Wiesel Den 
Naomi
![Savior incoming [Jack] Tbab](https://zupimages.net/up/21/15/tbab.png)
