"Qui tu es ?"

Une énigme. Un mystère. Une question qui ne trouve réponse qu'auprès de ceux que le Corbeau ne cherche pas à protéger, ou bien lorsqu'il a échoué dans cette entreprise...
Une question qu'on lui avait déjà posé plusieurs fois par le passé, mais à laquelle il n'avait jamais répondu. Jamais lorsqu'on le lui demandait... Chris fascinait souvent les filles des deux campus d'indarë. Même s'il jouait un rôle d'étudiant modèle la plupart du temps, il ne pouvait renier sa nature profonde tout le temps. Ainsi, l'image d'étudiant modèle se fissurait parfois lorsqu'il se battait, comme aujourd'hui, ou qu'il lui arrivait des histoires étranges, comme lors du voyage en France, avec Lily. Pourtant, contrairement à ce que l'on pourrait croire, cela ne nuisait en fait pas à sa réputation auprès de la gent féminine.

Cela ne faisait que lui donner un côté bad boy qu'elles semblaient particulièrement apprécier chez lui. Elles ne se rendaient pas compte que derrière le sourire qu'il leur renvoyait lorsqu'il leur parlait, tout était faux. Qu'il ne pensait pas un mot de ce qu'il leur disait. Qu'il ne faisait que jouer un rôle afin d'assurer sa sécurité sur le campus. Que derrière le doux bad boy au grand coeur se cachait en fait un assassin capable de les abattre sans ciller d'une balle dans la tête si sa vie était en danger.

Telle était la triste réalité. Tel était l'être qui se dissimulait sous ces traits pourtant si ordinaires. Un assassin extraordinaire. Une arme, créee pour ôter la vie.

Mais aujourd'hui, Chris était parfaitement conscient que face à la jeune Alaput, faire semblant aurait été inutile. Elle l'avait vu combattre. Elle l'avait vu perdre le contrôle et avait vu son côté sombre. Pas une fois, il ne tenta de la berner, pour la simple et bonne raison qu'il n'avait rien à gagner auprès d'elle en jouant les Chris lumineux. Cette fille semblait du genre solitaire, un peu misanthrope ou asociale, peut être même ? Dans tous les cas, il était peu probable qu'elle soit du genre gossip girl, à répéter à ses copines qu'elle avait rencontré Raven dans une cellule et qu'il avait fait ci ou ça. A postériori, il se demanda même si elle avait remarqué qu'il avait perdu le contrôle en tabassant Bratford. Aucune importance, à présent. Ce qui était fait, était fait...

La rouquine joua parfaitement son rôle, et Marvin se retrouva au sol avant d'avoir compris ce qui lui arrivait. Quelques secondes plus tard, la jeune femme quitta la cellule, suivie du brun qui marchait d'un pas étrangement décontracté, la cigarette à la bouche, malgré la situation. Il se tourna ensuite, et traina Marvin dans la cellule, puis ressortit, avant de refermer les barreaux derrière lui.
- Je préfère m'assurer qu'il ne nous posera plus de problèmes. Même si je doute qu'il émerge à nouveau avant un moment. Et le temps qu'il se relève...
Chris ne termina pas sa phrase, mais il faisait clairement allusion au surpoids du gardien moustachu.

Il se dirigea ensuite vers une chaise de bureau qui possédait des roues, un peu plus loin, et s'affala dedans, visiblement satisfait. Il ne répondit rien à la réplique de Nia concernant le fait qu'il n'y allait pas de main morte, du moins pas immédiatement. Il tira sur sa cigarette, puis expira sa fumée, avant de finalement répondre d'un ton calme:
- J'ai simplement fait le nécessaire pour éviter que tu fasses une crise dans la cellule, c'est tout. La situation se serait nettement compliquée, si ça avait été le cas.
Il se tut un instant, avant d'ajouter:
- De toute façon, si tu le fais virer, il ne nous posera pas de problème...

Il se tut à nouveau. Il ne dît rien sur le fait que cela arrangeait bien ses affaires. Sur le fait que Marvin le collait un peu trop depuis quelques temps, que le fait qu'il cherche à tout prix à le faire virer du campus pour un oui ou pour un non commençait sérieusement à le faire chier et que le fait qu'elle le fasse virer allait clairement lui rendre service. Il ne révéla rien de tout ça. Comme toujours, il demeura muet comme une tombe... Comme le paranoïaque qu'il était...
C'est alors que la jolie rouquine revint à la charge, et le prit par surprise avec sa nouvelle question. Il ne put s'empêcher d'exploser de rire. Durant plusieurs secondes, il rigola de bon coeur, avant de finament parvenir à se calmer. Puis, enfin, il lui répondit:
- La CIA, vraiment ? Pourquoi ? Parce que je suis un bon boxeur ? Tous les boxeurs ne travaillent pas dans une agence gouvernementale, tu sais ?

C'était léger comme défense. Trop léger. Et il le savait. Aussi décida -t-il de prendre ça au second degré:
- D'accord... Admettons que je sois un espion... Qu'est ce que je pourrais bien faire à Indarë depuis dix huit mois ?
Il regarda la jeune femme se relever et se diriger vers le bureau pour avoir de quoi dessiner, ce à quoi il lui sourît. Elle lui posa alors une nouvelle question, à laquelle il répondit aussitôt:
- La musique ! Surprise, hein ? Ajouta -t-il devant le regard certainement étonné de Nia. Je parie que c'était une des dernières options auxquelles tu aurais pensé pour un type comme moi ? Comme quoi... Je suis venu pour étudier des langues étrangères à l'origine, mais... C'était tellement pas mon truc que j'ai redoublé... Alors j'ai changé d'option. J'adore la musique, confia -t-il avec un léger sourire qui n'était pas feint, à moitié perdu dans ses pensées. Et toi ? Qu'est ce que tu étudies ?

La tête posée sur sa main, un léger sourire narquois ourlant ses lèvres, Chris observait Nia en train de dessiner. Elle l'amusait légèrement. Elle n'était pas tout à fait comme les autres. De toute évidence fille de famille riche, elle n'avait pourtant aucun trait s'apparentant à ce genre de milieu. Elle n'était pas arrogante ni dédaigneuse envers lui. En tout cas, pas pour le moment.
- Peut être que je me plais dans une cellule... ? Rétorqua -t-il simplement d'un ton amusé, sous entendant qu'il aurait passé de le longs moments dans ce genre d'endroits par le passé.
Nia se lança ensuite dans une seconde théorie concernant la possible présence d'un agent de la CIA dans l'enceinte d'Indarë depuis si longtemps.
- Ou bien peut être que je me fais passer pour un agent de la CIA auprès des filles, pour leur plaire ? Peut être que je t'en montre suffisamment pour que tu supposes que je suis un agent secret... Et que ça te fasse kiffer, ensuite. C'est vot' truc, à vous, les bad boys, commenta -t-il avec un cynisme non dissimulé. Peut être que je ne suis qu'un escroc en mal de cul, conclut il finalement un peu crûment.

Son petit sourire espiègle ne quittait pas ses lèvres. Ce petit jeu qui avait démarré entre eux l'amusait bien. Même si elle parvenait à s'orienter correctement, il ne risquait probablement pas grand chose, venant d'elle. Il restait donc étrangement détendu, bien qu'elle lui pose des questions sur sa vie.

La discussion se poursuivit, et le sourire de Chris s'élargit passablement lorsqu'elle mentionna le fait qu'elle l'aurait davantage imaginé dans une section impliquant d'être un bon tacticien. Etre un bon tacticien était sa vie. Il faisait ça du lever au coucher. A la moindre erreur, sa vie pouvait être menacée, et sa couverture démasquée. Il n'avait pas envie de devoir étudier ce genre de chose en cours...
- Tacticien ? Moi ? Non... Moi je suis un cogneur, Ironisa -t-il sans en ajouter davantage.
La suite le surprit cependant davantage, et son sourire s'évanouît l'espace de quelques instants. Mécano ? Pourquoi faire ? Il ne comprit pas vraiment la démarche.
- Mécano ? Vraiment ? Je croyais que ta famille était riche ? Tu aimes tant que ça ce métier pour vouloir plonger tes mains dans la crasse et dans l'huile de moteur ?
Voila qui confirmait à nouveau ce qu'il pensait d'elle. Elle était différente des autres. Un peu... étrange. Ce n'était pas nécessairement un bien ou un mal, c'était juste... notable.

Il fut encore plus étonné quand elle lui mentionna les autres options qu'elle avait sélectionné: de l'art combiné à de la mécanique. Voilà qui était pour le moins bizarre.
- Le Théâtre t'aidera, mentionna -t-il finalement d'un ton étrangement confiant.
Il savait de quoi il parlait. Il n'avait jamais fait de théâtre à proprement parler, mais on lui avait appris à mentir. Toute sa vie, il avait menti. Il était un professionnel du mensonge, tout autant qu'il était un expert pour ôter la vie. Un bon assassin sait mentir et contrôler ses émotions...
- Reste à savoir si tu auras envie de le faire, le moment venu... Ajouta -t-il une poignée de secondes plus tard. Le fait de savoir mentir n'ôte pas les conséquences qu'une telle action impliquera par la suite pour autant. Tâche de t'en souvenir... Conclut il avant de lui faire un sourire énigmatique.

Heureusement, Nia changea de sujet et rebascula sur quelque chose de plus léger.
- Deux, en fait. Je joue du piano, et du violon. Surtout du piano, pour le moment. Mais je compte développer les deux dans les années à venir. Et toi, tu as l'intention de mettre à profit tes études d'art ? Peindre des tableaux, peut être ? Ou des choses comme ça ?

Le jeu du chat et de la souris. Chris y jouait souvent lorsqu'il croisait la route de la jeune Buchanan. Il se retrouvait régulièrement à mentir à propos de tout et de rien. Mentir à propos de lui, et du reste, si bien qu'en fin de compte, il se noyait dans un océan de mensonges qui étouffaient sa véritable personnalité. Le vrai Corbeau. Celui qu'il était réellement, derrière le masque qu'il s'était forgé. Un système de défense redoutable lui permettant de repousser à la fois ceux qui s'intéresseraient sincèrement à sa personne, et les fouineurs trop curieux qui chercheraient à savoir davantage sur lui. Si bien que dans ces cas là, le chien d'attaque en arrivait à montrer les crocs, et à menacer de mordre...
- Je n'ai jamais dit que je jouais quelque rôle que ce soit avec toi, princesse ! Rétorqua -t-il aussitôt avec un cynisme latent.

La conversation se poursuivit, et le brun estima préférable d'affirmer qu'il était plus bourrin que tactictien. Affirmation qui fut sembla -t-il crue sans difficulté par la rouquine. Grave erreur. Chris était avant tout une personne rusée et manipulatrice sous ses airs de boxeur. C'était un assassin doté d'une intelligence redoutable, et c'était par ailleurs la raison pour laquelle son organisation l'avait trahi, et le traquait aujourd'hui. Il se contenta d'avoir un sourire étrange suite à l'affirmation de la jeune femme, mais ne répondit rien.
Il l'écouta ensuite parler de mécanique, et des raisons pour lesquelles elle suivait ces cours malgré son milieu social aisé, et sa famille riche. Pas de doute, elle aimait la mécanique. C'était inattendu, mais il était content pour elle. Dans ce monde pourri et décadent corrompu par l'argent, rares sont les personnes qui pensent encore à se dénicher un véritable loisir, quelque chose qu'ils apprécient véritablement dans leur vie. La plupart ne font que la traverser tels des fantômes, guidés par leurs obligations, naviguant de remboursements d'emprunts en remboursements de dettes, guidés par la peur. Chris ne voyait que ça depuis qu'il observait les gens.
Mais Nia était différente: bien qu'elle soit riche, elle ne voyait pas la vie via un prisme déformé par ses finances et son milieu aisé. Quelque chose d'assez rare pour être souligné et salué, même s'il ne lui en souffla pas mot...

Elle semblait d'ailleurs dotée d'une certaine innocence, refusant de mentir à moins d'y être forcée. Affirmant qu'elle n'aimait pas le mensonge. Le brun l'observa silencieusement: peu de gens appréciaient cela. Lui même détestait mentir. Il le faisait parce qu'il le devait. Mais parfois, on n'a pas d'autre choix...
Heureusement, alors que le Corbeau était en train de se refermer sur lui même, en pensant aux mensonges qu'il disait à Lily régulièrement, et aux conséquences que cela aurait si elle les apprenait, la rouquine changea de sujet, et lui montra son dessin. Le brun se surprit alors à pouffer de rire devant la tête du gardien.
- Très ressemblant, commenta -t-il, visiblement amusé. Pas de doute, c'est bien lui.
Il pouffa légèrement devant la description que rajouta Nia, puis ajouta:
- Magnifique, en effet !

Il expira tout en observant la rouquine se diriger vers le bureau du gardien et fouiller à la recherche de... quelque chose ? Son téléphone, apparemment. Il se releva aussitôt pour intervenir dès qu'il le comprit:
- Non, attends ! Ne fais pas ça !
Le brun avait une idée derrière la tête depuis un moment, déjà...
- Rien ne nous dit qu'il a réellement appelé les flics. Et si ce n'est pas le cas, pourquoi chercherions nous à les appeler nous mêmes ? Tu as dit toi même que tu possédais la capacité de le faire virer, exact ? Alors, dans ce cas... Laisse moi vérifier quelque chose... Et prépare toi à enregistrer avec ton téléphone. Ca pourrait valoir le coup...

Chris se dirigea d'un pas tranquille vers la cellule, l'ouvrit à l'aide de la clé, entra, et s'enferma dans la cage avec Marvin. Après quoi, il jeta le trousseau de clés au dehors, par précaution. Même s'il ne voyait pas par quel miracle ce tas de graisses pourrait le mettre KO. Deux précautions valent mieux qu'une...
Il s'approcha du type, toujours au sol, et lui donna un très léger coup de pied:
- Hé, Cendrillon ! Debout ! T'as assez roupillé comme ça !
Il n'obtint comme résultat que le fait que Marvin roule sur le côté en marmonnant comme un clodo bourré étendu sur la voie publie, ayant trop bu la veille.
Chris soupira avant de se tourner vers la jeune Calaway, atterré. Après quoi, il s'intéressa à nouveau à sa victime: il se baissa, et lui mit une claque en plein visage. Le résultat fut bien meilleur ! Marvin s'éveilla en catastrophe, terrifié comme s'il avait fait un mauvais rêve.

Pourtant, lorsque ses yeux hagards se posèrent sur un Chris au regard étrange, il sembla apeuré.
- Qu'est ce que tu veux, sale gosse !
- Ca fait cinq heures qu'on attend tes flics, Marvin... Ils se sont perdus en route, ou quoi ? Bluffa Chris avec une facilité déconcertante.
- Mais j'en sais rien, moi ! Ils doivent être occupés, un point c'est tout ! Et quand ils seront là...
Le Corbeau ne le laissa pas terminer sa phrase: il l'attrapa par le col et le souleva de quelques centimètres tout en le fixant de ses yeux de brume:
- Tu mens ! Tu n'as jamais su mentir, Marvin ! Tu n'es qu'un employé médiocre. Toute ta vie, tu n'as jamais été qu'un employé médiocre, mais tu connais bien la loi, en revanche, opina -t-il avec un sourire mauvais. Tu sais que pour appeler les flics, il faut avoir une bonne raison. Tu sais que si tu les appelles sans motif valable, ou bien alors que si ce n'est pas les élèves que tu as enfermés qui ont déclenché l'affrontement, tu risques de t'exposer à des conséquences peu enviables... Et tu ne veux surtout pas de retombées peu enviables... Tu vois, je connais bien la loi et les règles de l'école, moi aussi, ajouta -t-il d'un ton narquois.

Apeuré, ayant du mal à respirer, le gardien fixa l'universitaire avant de marmonner avec difficulté:
- B... Bon sang, mais... qui es tu... ?
A cet instant, le sourire narquois de  Chris disparut, et son expression faciale redevint méchante. Il le souleva du sol et le colla violemment aux grilles de la cellule:
- Il ne s'agit pas de moi, gros lard ! As tu, oui ou non, appelé les flics ?!
- Arrêtes, bordel !
- Réponds à ma question ! Rétorqua l'universitaire d'une voix impérieuse.
- Non ! Non... Je ne les ai pas appelés !

Aussitôt, le brun relâcha légèrement son étreinte, ce qui permit à Marvin de toucher à nouveau le sol, et tourna son regard de brume en direction de Nia. Il était surpris, mais n'était pas certain de quoi faire pour la suite, à présent...
- Quelles étaient tes intentions, dans ce cas ? Demanda -t-il alors en se tournant à nouveau vers le moustachu.
- Je voulais vous donner une leçon... Que vous compreniez que les actions entraînent des conséquences... Que vous ne pouvez pas faire tout et n'importe quoi sans avoir de retombées autres qu'une bête heure de colle à la con !
- Alors, quoi ? Tu nous aurais laissés pourrir douze heures dans cette cellule et puis tu nous aurais laissés sortir, c'est ça ?
- C'était l'idée, oui...

Le brun relâcha totalement sa victime, puis l'observa quelques instants avant de commenter:
- Marvin... Tu es vraiment pathétique... Commenta -t-il en caressant le col froissé du gardien, comme pour le repasser. Et tu aurais vraiment dû choisir un autre boulot...
Il échangea un nouveau regard avec Nia, puis hocha de la tête dans sa direction. Elle pouvait lui ouvrir la cellule, à présent. Mais si elle avait quelque chose à lui dire avant qu'il ne sorte, concernant son avenir, ou autre chose, c'était peut être le moment idéal pour le faire...
Dans tous les cas, c'était à elle que revenait la décision de le faire, ou non.

Pas infaillible, huh ? Dans ce cas, il ferait en sorte que ça le soit...

Lorsque Chris souleva le bonhomme et le projeta contre les grilles, ce dernier prit peur: il put ressentir à la fois la force et la puissance qui émanaient de son mystérieux agresseur. Et une chose était sûre: ce n'était pas un élève ordinaire ! Aussitôt, ses défenses mentales, aussi faibles fussent elles, se brisèrent, et il commença à parler, à leur raconter son "plan". Etouffant à moitié sous la poigne de fer de l'assassin, il répondit à toutes ses questions sans se faire prier.
Nia prit ensuite la parole à son tour, afin de vider son sac. Le brun la laissa faire sans intervenir. Après tout, Marvin ne l'avait pas volé. Elle fit ensuite demi tour en mentionnant au gros lard l'enregistrement, et le fait qu'elle comptait l'amener à la directrice. Mais le Corbeau, lui, avait d'autres projets pour cette fameuse bande...
- Vas y, Nia ! Je termine avec notre ami, et je te rejoins...

Il patienta le temps que la jeune femme soit sortie dehors, tandis que le surveillant, visiblement angoissé, se demandait encore à quelle sauce il allait être mangé.
- Qu'est ce que tu me veux encore, Raven ?!
Chris fixa le moustachu avec un léger sourire narquois: il n'avait pas pensé à l'essentiel: tant mieux ! "L'essentiel", c'était que si ce fameux entretien avec la directrice avait lieu, cela pourrait se révéler particulièrement fâcheux pour lui, pour le Corbeau. S'il devait justifier d'avoir agressé un surveillant, même si c'était pour défendre Nia, ce genre de comportement risquait de très mal passer en haute instance, et plus important encore, cela attirerait la lumière sur lui, ce qu'il souhaitait éviter à tout prix. Il s'agissait de la jouer fine, à présent...
- Nous savons tous les deux que si cette bande arrive auprès de la directrice, tu auras beaucoup de mal à retrouver du taff où que ce soit...

Aussitôt, le regard du surveillant changea. Il avait attiré toute son attention à l'aide d'une seule phrase.
- Qu'est ce que tu proposes ?
- Démissionnes ! Casses toi d'Indarë ! Je me fous de savoir quelles raisons tu invoqueras, mais barres toi d'ici.
- Tu veux rire ? Rétorqua immédiatement Marvin qui savait qu'il pouvait s'assoir sur la moindre compensation financière s'il faisait une telle chose.
- J'ai l'air de plaisanter ? Répondit aussitôt l'assassin d'une voix glaciale en le fixant avec un visage de marbre.
Le surveillant dégluttît avec difficulté, puis:
- C'est du chantage, espèce de petit merd'...
- Peu m'importe comment tu appelles ça ! Le coupa Chris de son ton toujours aussi froid. Nous sommes Lundi. Tu as jusqu'à vendredi pour donner ta démission à Martel. Au delà, je m'arrangerai pour que la bande arrive à bon port... Tu m'as compris ?
- Je n'ai pas vraiment le choix... Commenta aussitôt le moustachu d'une voix haineuse.
- Précisément... Ajouta Chris avant de faire demi tour et de quitter la cellule.

Il fit quelques pas dans le bureau avant de s'immobiliser brusquement:
- Oh, une dernière chose: S'il te venait à l'idée de tenter de récupérer cette bande d'une façon ou d'une autre, ou de menacer Nia... Je vais faire en sorte qu'elle arrive à la directrice si quelque chose devait nous arriver à elle ou à moi. Ne joues pas aux plus malins avec moi, tu ne perdrais que davantage... Contente toi de quitter la table de jeu, comme le font les bons perdants...
A ces mots, Chris quitta le bureau tandis que Marvin frappait un grand coup rageur dans le mur de la cellule.

Il inspira profondément une fois arrivé dehors, visiblement heureux d'être de retour au dehors. Puis lorsqu'il eût retrouvé Nia, il lui sourît avant de lui dire:
- Je suis là, Nia ! Merci de m'avoir attendu. Ecoute, au sujet de l'enregistrement... Je viens de m'arranger avec Marvin, il ne sera pas nécessaire d'aller voir la directrice. Mais je vais avoir besoin que tu me transfères la bande, juste au cas où. Il faut que j'en garde une copie.

L'espace d'un instant, l'éclat de ses yeux fut celui d'un prédateur lorsque la jeune Nia lui demanda ses coordonnées. Fuyez le naturel, il reviendra au galop. Mais très vite, le brun recouvra son attitude normale en trouvant des solutions. Ses traits se détendirent aussi vite qu'ils s'étaient tendus, et un sourire ourla ses lèvres:
- Mieux vaut faire les deux... lui dit il en réfléchissant. Envoie le fichier sur mon adresse mail universitaire. Quand je l'aurai récupéré, je te renverrai un message et tu pourras l'effacer de ton téléphone. On sera sûrs que tu n'auras aucun souci comme ça. De mon côté, j'en fera une copie sur un cd ou un clé usb que je dissimulerai quelque part.
Chaque étudiant avait accès facilement au mail des autres. La rouquine pourrait ainsi envoyer un mail aisément à Chris sans problème, sans qu'il ait besoin de créer une fausse adresse pour ça. Quant à une éventuelle copie... Il la ferait par perfectionnisme, mais il n'était pas convaincu qu'elle serait utile. Marvin était un trouillard, et un raté, avant tout. Il ne tenterait rien, face à lui. Il avait trop peur de ce que "Chris Raven" pouvait réellement dissimuler. Il en avait eu un vague aperçu, et cela l'avait particulièrement effrayé. Suffisamment pour ne rien tenter ensuite...

Le brun sourît, visiblement satisfait, tout en commençant à s'éloigner du bâtiment aux côtés de la jeune femme. La revoir ne lui aurait pas déplu, mais il demeurait ancré dans cette logique d'éviter de revoir les gens s'il le pouvait, pour leur propre sécurité. Il était persuadé qu'il mettait les gens en danger par sa seule raison, et il n'avait pas forcément tort...
Il s'immobilisa finalement au bout d'un moment, avec la mine grave, puis:
- Je suis désolé, Nia... Tout ça est de ma faute. Si je n'avais pas perdu mon sang froid lorsqu'ils m'ont attaqué, et si ce type ne m'avait pas mis sur sa blacklist depuis un bon moment, on n'aurait pas fini dans cette cellule.
Il releva la tête, en fixant le ciel, puis ajouta d'un air pensif:
- La chaîne des effets...

Il fixa à nouveau la rouquine, avant de lui sourire, puis:
- Je te remercie pour ton aide, en tout cas. Ce fut un plaisir de faire ta connaissance. On se voit sur le campus ? Ajouta -t-il en lui tendant la main pour lui dire au revoir.