Filature professionnelle [ Chris]

C'était un après-midi. Il commençait à faire chaud. Cela était loin de déplaire à Will qui traînait en ville. Il s'ennuyait et les ISS d'Indare n'étaient plus très amusant en ce moment. On se lassait vite d'un chien qu'on aurait réussi à dompter et Will commençait à ne plus distraire personne. Il allait devoir attendre l'année prochaine pour  repartir avec des nouveaux cons qui trouveront ça trop cool d'avoir un fou à disposition dans le groupe. Il soupira doucement. Et Holly qui n'apparaissait plus... Non car il avait beau lui avait promit de faire des efforts et tout niveau fidélité  mais ce n'était pas vraiment dans sa nature à la base. Et il ne l'avait revu depuis septembre quand même. Bho, il avait bien tenté de voir où elle était passée mais il avait vite laissé tombé. Il n'avait pas envie de se prendre la tête et préférait laisser les jours couler tranquillement.

Le faux albinos était donc en train de s'amuser avec les pigeons, accroupis en face d'eux à les imiter. Pour le bonheur des enfants et le regard circonspect de leur parent. Il s'en foutait bien, il détestait l'ennuie. Et puis ses bêtes avaient quelque chose de fascinant. Mais hélas, cela aussi commença à le lasser et il ne pu que laisser ses fesses retomber sur le banc. Il n'avait rien à fumer, rien à baiser, rien à boire, rien pour se couper et rien d’intéressant à photographier. Il râla un bon coup et se frottant le nez, basculant sa tête en arrière. Ses lentilles lui piquaient. Comme si ses yeux n'étaient déjà pas assez rouges... Quoi que si les gens le voyaient comme un psychopathe, c'était une bonne façon pour leur donner raison. Et il n'y avait rien de plus drôle que de faire peur avec ce genre de futilités. Tiens, et s'il allait effrayer des enfants ? Non trop risqué, il voulait pas qu'Indare l'empêche de sortir... Cette école était vraiment mégalo. Penser pouvoir aider les élèves, c'était si drôle. En deux ans, ils ne savaient toujours pas ce qu'il se passait dans la tête du jeune homme.  

Toujours la tête en arrière, il observait les gens se balader. D'un coup, il plissa les yeux. Qu'est-ce que... Il se redressa, posa les deux pieds sur le banc en restant accroupis pour regarder la personne qui se déplaçait. Pourquoi....Y'avait un truc étrange avec ce gars qui avait tout l'air d'un étudiant. Quelque chose dont il ne saurait dire si c'était plaisant ou à fuir.

La conscience de Will se mélangea au jeu. Il voulait savoir et il se faisait en même temps chier. Cela lui sembla  tout naturel donc de suivre cette énergumène. Il oublia alors en partie sa sensation précédente de curiosité, de nouveau dopé à l'amusement. Il trouva un journal sur un banc et fit deux trous à la hauteur de ses yeux pour se déplacer comme ça, derrière lui, "discrètement". Bien sûr, c'était ABSOLUMENT DÉBILE. Les passants ne comprenaient juste pas pourquoi un garçon avait fait ce genre de modifications sur les nouvelles du matin. Mais dans sa tête, il était un super espion. Sa mission était des plus importantes.

Bon après cinq minutes, son délire commença aussi à le fatiguer et l'obligea à avoir de nouveau affaire avec la lucidité. Une chose dont il n'était pas très fan. Il se plongea alors dans ses pensées, ne se rendant qu'à moitié compte qu'il rentrait dans l'université. Il l'observa la silhouette...Non vraiment c'était pas la forme qu'il reconnaissait. Le regard ? Peut-être... Il devrait le contourner.  Rha et pourquoi il se faisait chier franchement ? Mais juste, ça l'agaçait de sentir que quelque chose coinçait en lui. Même s'il allait le regretter juste après. Après tout, qu'est-ce qui pouvait bien lui faire peur ?

Il fit alors des pas de côté pour le dépasser un peu plus au loin. Dès qu'il fut devant lui, à bien une dizaine de mètres, il se retourna. Oui, y'avait bien mieux niveau discrétion mais en même temps, qui ne trouvait pas Will étrange ? Ce ne serait pas la première fois qu'on le range dans cette catégorie. Donc il s'en foutait bien. Le voilà alors,  à marcher à reculons, avec son journal troué au niveau des yeux à observer ce gars en silence.

C'était bien le regard qui coinçait...Où avait-il déjà vu ses yeux... ? Pourquoi ça le fascinait en quelque sorte ? Il se retourna à nouveau pour marcher dans le bon sens comme si de rien n'était.

Meilleur espion du monde.

Il ne savait même pas s'il avait été ou pas repéré. Et au fond il s'en foutait, il avait du mal à prendre en considération les autres. C'était l'un de ses défauts et certainement la conséquence d'avoir passé ses jeunes années isolés. Will continuait donc à suivre l'inconnu et cela même après sa manœuvre pour observer son regard. Il ne tarda pas à se retrouver à nouveau derrière lui. Visiblement ça ne lui revenait pas. Il hésitait à arrêter mais le faux albinos avait du mal à résister à ce genre de fascination. C'était un sentiment comme un autre et il voulait en profiter, le garder rien que pour lui.

La cible tourna dans une ruelle. Il en fit de même quelques secondes plus tard. Un cul de sac. Donc soit il était rentré quelque part, soit il lui tendait un piège. Will était loin d'être stupide et tout ça fit augmenter son adrénaline. Même se faire agresser lui paraissait être une expérience à vivre. Il continua alors à avancer, son journal toujours devant les yeux. Il arrivait presque au bout quand une voix sonna derrière lui. C'est lui On lui demanda ce qu'il cherchait. Will, s'attendant à ce genre d'embuscade, se tourna vers celui qu'il suivait depuis le début, gardant cette protection de papier entre eux-deux. Il l'observa longuement en réfléchissant. Mais où il avait pu le voir ? Il l'avait peut-être sauté dans le passé ? Non, certainement pas, personne ne l'avait jamais vraiment marqué dans ce domaine là. Mais d'où il sortait putain...

Le jeune homme lui souriait attrapant le journal sur la poubelle d'à côté en lui disant qu'il voulait certainement une version moins abîmé. Il lui tendit quelques secondes avant que son expression joviale ne disparaisse. Son ton devint d'un coup froid. La question était claire: qui était-Will ? Qu'est-ce qu'il lui voulait ?

Le faux albinos ne répondit pas. Il fonça les sourcils à travers son bout de papier, permettant de cacher ses émotions. Ce gars était vachement théâtrale en tout cas. Ou bipolaire. Non car faire le sympa pour d'un coup sortir une réplique singlante...C'était que dans le film que ça se passait comme cela. Le jeune homme hésita. Hors de question de rentrer dans son jeu. Comment réagir donc pour que cet inconnu cesse de le prendre au sérieux et, voir, le laisse partir ? Cette sensation de l'avoir déjà vu lui était de plus en plus malsaine. On était proche d'indare non ? S'il se comportait comme le dingue que les gens pensaient qu'il était, ce gars ferait certainement le lien et se dirait qu'il est seulement tombé sur le fou de service inoffensif. Cela avait toutes ses chances de marcher.

Il baissa le journal, puis le fit tomber, lui faisait découvrir son visage à lui.

-Ah...Je suis démasqué

Il eu un long sourire. Il se sentit d'un coup un peu plus vulnérable en ayant baissé les nouvelles du matin.

- Tu as raison Marty ! (il le pointa du doigt), je suis ton fils revenu dans le passé pour t'empêcher de faire une énorme gaffe !

Il jouait bien hein, et puis ça l'amusait de faire ça.

- Surtout, ne mange pas ce soir, ton indigestion pourrait être la source de la destruction de la Terre dans 150 ans !

Il savait que le fait que voir un gars aussi absurde allait lui retirer toute crédibilité d'être un sorte de méchant, il jouait beaucoup là-dessus. L'inconnu allait certainement le laisser partir maintenant, pour le laisser fuir de cette impression étrange de déjà vu qui devenait petit à petit de plus en plus clair.  

Will avait une confiance en lui assez visible. En quelques années en internat dans ce genre de lieu, il pensait connaître à peu près les réactions de tout le monde. Il avait "parlé" à beaucoup de personnes après tout. Donc il savait comment réagir pour rester dans le jeu et ne pas tomber dans une conversation trop sérieuse. Chose dont il avait horreur. Il ne saurait pas définir pourquoi il détestait cela autant...Enfin si, il le savait bien mais il préférait taire cette lucidité pour ne donner aucun indice aux psychologues-clowns de cet établissement.

Le faux albinos observait alors son interlocuteur, ayant déballé toute sa connerie, gentiment emballé dans son sourire. Allez, laisse-moi passer maintenant... Cependant il ne baissait pas le regard et savourait le côté étonné du jeune homme qui ne s'attendait visiblement pas à ce genre de réponse. D'ailleurs ce gars sembla s'absenter pendant quelques secondes et notre bonhomme ne pu que patienter. Il ne voulait pas vraiment se mettre à courir pour l'esquiver, ou bien tenter de le pousser... Il était léger et même s'il pouvait courir vite, il doutait pouvoir aller très loin. Se faire attraper voudrait dire perdre la situation, perdre l'avantage qu'il avait sur les autres: sa folie en partie factice.

Le jeune homme reprit de plus belle. L'air froid, il lui annonça qu'il connaissait son nom de famille, qu'il était célèbre à l'IRS. Il ajouta que ça ne servait à rien de se la jouer théâtrale, que Will ne partirait pas tant qu'il n'aura pas répondu à la question de l'inconnu.

C'était difficile à savoir ce que Will détestait le plus: ceux qui l'imitaient dans son absurdité pour tenter de communiquer avec lui ou alors ceux qui lui parlaient comme à un enfant totalement timbré. A vrai dire, le plus simple comme réaction était les ISS qui se contentaient de rigoler, se moquant un peu de lui  et d'hausser les épaules. Mais là... Il venait de faire face à toute autre réaction: celui qui semblait deviner sa comédie. Il ne s'y attendait pas. Et cela même s'il ne le montra pas. Enfin si, il était possible de voir les réactions de Will mais il fallait le connaître et être très observateur. Cela se limitait généralement à un léger pincement de la lèvre, à un ongle qui se plante doucement dans son pouce ou à un simple un oeil qui se plisse un peu. Donc vu de l'extérieure, il continua juste à sourire.

Que faire ? Comment réagir ? Cela devenait beaucoup trop sérieux pour lui et il était hors de question de rentrer dans ce jeu là. Continuer à faire le dingue jusqu'à ce qu'il comprenne que ça ne servait à rien ? Il n'allait pas le séquestrer...Il finirait bien par le laisser partir. Son oeil se perdit discrètement sur les alentour de la ruelle, au cas où il pourrait grimper quelque part. Un passage secret peut-être ? Cette sensation d'être dans un film lui plaisait de moins en moins à vrai dire et ce gars lui paraissait de plus en plus être une menace. Il y avait clairement quelque chose dont Will ne voulait pas penser. Ou se souvenir.

Au bout de plusieurs secondes de silence avec ce fin sourire, il finit par dire alors:

- Oooh, je vois, Marty est donc de mauvais poil aujourd'hui. Il fallait bien que je te suive pour trouver un endroit pour parler en privé. Tout le monde ne peut pas savoir que les voyages temporels existent. Mais tu peux le comprendre puisque c'est toi qui va construire. Enfin, construire, tu mourras avant mais tu laisseras les plans. Très pratique d'ailleurs merci.

Il ricana doucement et haussa les épaules.

- Mais moi j'ai tout mon temps

Il alla s'asseoir contre le mur qui finissait la rue, les fesses au sol, il le regarda. Tout au fond de son regard brûlait une lueur de défis. Plus ou moins visible comme d'habitude. Il voulait garder le contrôle.

- C'est toujours un plaisir de discuter avec son père du passé après tout. C'est pas des rencontres très fréquentes.

La deuxième fois ça allait peut-être passer ? Il allait bien finir par comprendre tout de même qu'il fallait lui foutre la paix là... Will le fixait, au fond, toujours intrigué par son regard. C'était presque. C'était vraiment proche.

Will était provocateur. Même s'il ne le montrait pas extérieurement en jouant au fou, il était très curieux de voir la suite des événements. Assis alors au sol, il attendait de voir ce qu'il allait arriver, espérant quand même qu'il laisse le jeune homme un peu tranquille. Cependant quand il vu ce gars s'avancer vers lui et le soulever par le col, son cœur loupa un battement. Il allait le frapper ? Vraiment ? Pour si peu ? Il du d'ailleurs voir la surprise dans son regard pendant un moment mais il n'avait pas non plus peur. Disons que son adrénaline avait un peu augmenté.

Finalement le jeune homme fut remit sur pied et l'inconnu le remit bien en place. Pour une fois ce fut à son tour d'être perdu. Mais cela ne dura à peine que quelques secondes avant qu'il ne se reprenne quand il rentra un peu dans son jeu. Il se contenta alors de sourire assez mécaniquement. D'ailleurs il lui proposa de vite dégager. Bon, le faux albinos ne pouvait pas partir sans rien dire, il avait un petit peu de fierté quand même. Il dit alors avec un grand sourire:

- Oublis pas alors, ne mange pas ce soir. L'indigestion peut avoir des graves conséquences sur le futur.

Il commença alors à partir puis courra juste pour le plaisir de courir. Ne se rendant pas compte qu'il venait de faire tomber son portefeuille au sol par ses mouvements.

Il ne le su pas pendant longtemps en fait, il s'en servait très peu donc quand il rentra à Indare, il passa le reste de sa journée à ne rien faire. Il se préservait pour ce soir. Il avait eu vent d'une petite vente d'herbe derrière les appartements de l'université d'à côté. Et ça faisait beaucoup trop longtemps qu'il n'avait pas touché à ça...Cela lui ferait vraiment le plus grand bien de pouvoir fumer un coup. Il resta alors plutôt patient et finit par s'endormir. Vers vingt heure il se réveilla. Il était un peu en retard. Le faux albinos ne râla pas et s'activa, enfilant un gros pull pour sortir dehors en bas de l'immeuble de Lightstrom. Le garçon regarda autour de lui et reconnu vite que le mec louche à capuche contre le mur était certainement le dealer. Il sourit en s'approchant. Ce gars le jaugea un moment de la tête au pied et lui donna son prix. Will hocha la tête, il avait de quoi. La vente de ses photos pouvait lui rapporter gros. Même si c'était toujours pas très légal. Mais bon, Will et sa notion du bien et du mal...

Il fouilla ses poches. Tient ? Mais son portefeuille...Mais non ! Sérieux ! Il fonça les sourcils. Il était sûr qu'il était dans ses poches. Il finit par relever la tête et dit d'un petit sourire:

- Alooors. Possible de payer en credit ?
- Te fous pas de moi le gosse. Tu payes ou tu dégages.

Oh non, ça le faisait vraiment chier, il en avait vraiment envie là. Il se mordit la lèvre quand d'un coup la voix d'un adulte résonna.

- Hé ! Vous faites quoi ! Venez ici tout de suite !

Le petit dealer eu une réaction très rapide, il se cassa, prenant de cours Will qui n'avait pas finit ses petites affaires dans sa tête. Mais il du aussi finir par bouger, se mettant à courir. Dans la même direction qu'un type devant lui d'ailleurs. Ils allaient vers la même direction: vers le bâtiment des sports. C'était certainement un hasard... Il n'en savait rien mais il devait s'y diriger. Il prit alors toute sa vitesse pour sprinter et dépasser ce gars devant lui. Il n'aurait certainement plus aucune force dans quelques minutes mais il devait prendre assez d'avance sur l'adulte pour s'introduire dans le bâtiment en douce. Il vit le lieu s'approcher. Il avait beau ne pas avoir beaucoup de force, il avait développé une certaine rigueur dans ses mouvements en cas de danger. C'était des vieux souvenirs douloureux mais quand on voulait fuir une nuée d'adulte qui te courrait après, c'était plutôt pratique.

Il regarda la fenêtre ouverte du bâtiment, cassée depuis deux semaines maintenant. Il sauta sur la caisse qu'il avait laissé la dernière fois (preuve qu'il traînait vraiment partout ), sauta assez haut pour attraper le rebord et grimper. Il finit par atterir dans le bâtiment en pliant les jambes. Il resta un moment sans bouger, respirant rapidement puis s'allongea au sol, totalement essoufflé d'avoir recommencé ce genre de connerie acrobatique. C'était plus de son âge.

Il était au niveau de la piscine. Le gouvernant ne rentrerait certainement pas ici s'il pensait que le bâtiment était fermé.

Will resta alors allongé sur le bide.

Il allait s'en sortir, il se sentait fort et sûr de lui, toujours au sol d'un petit air malin. Il respirait contre, sans force. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été dans une fuite aussi. Il soupira doucement en entendant très doucement le mouvement de l'eau. Du calme...Enfin...C'était vraiment agréable.

Bon, ça ne dura absolument pas. Il sentit d'un quelqu'un tomber à quelques centimètre de lui. Il en fallu de peu avant qu'il ne se fasse écraser. Il déglutit, se figeant un moment. Le gouvernant n'était pas allé quand même là pour le chopper si....? Il bougea un poil que d'un coup...L'inconnu se retourna, se leva, lui attrapa la gorge pour le plaquer contre un mur. Will ressentit quelque chose...De fort. Une peur qu'il n'avait pas ressentir depuis longtemps. Pendant le temps de quelques secondes, il fut presque tétanisé, sans voix, tout son corps se contractant. Qu'est-ce qui se passait ?! Pourquoi ?! Ce n'était pas drôle ! Ce n'était pas drôle du tout ! Son regard transmit tout son effrois avant qu'au bout de deux secondes, il le relâche. Will comprit qui c'était. Ce gars de la ruelle... Il resta, silencieux et tétanisé. Des images passèrent dans son esprit alors que sa respiration était très rapide.

Je ne saurais dire quel jour c'était. J'avais froid en tout cas. Je venais de ressortir de ce genre de salle qui testait certainement mes limites. J'avais craqué rapidement selon eux. Je me souviens les avoir supplié de me laisser sortir. Je ne sais pas combien de temps. Ils m'avaient promis un chocolat chaud après. C'était si rare qu'en soit, je me sentais heureux et chanceux. Il m'avait mit une couverture qui gratte sur les épaules et on avait traversé un couloir pour aller dans une autre salle. C'est ce jour là je crois que j'ai vu au loin...Un enfant de mon âge. Je fus d'un coup heureux. Et surpris. Je ne savais pas que ça existait. Combien il y en avait ici ? Pourquoi je n'étais pas au courant ? Je tenta de faire des signes, criant un peu pour me faire entendre, d'un coup excité. Nos regards se croisèrent. J'eu à peine le temps de le voir que j'ai été déplacé, emporté ailleurs. Je ne l'ai jamais revu. Ni aucun autre enfant de mon âge jusqu'à ce fameux jour

Will avait un long moment d’absence... Il entendit ce gars l'engueuler (alors qu'il venait juste de l'étrangler avant au passage). Cependant le jeune homme resta bloqué. Donc c'était ça ? Non... Il voulait pas que ce genre d'élément se retrouve dans sa vie à lui ici. Il ne le voulait pas.

Le faux albinos avait du mal à retrouver son rôle de dingue, complètement sonné. La fenêtre était un peu haute pour remonter tout seul. Au bout de dix longues secondes il finit par répondre:

- A cause de la beuh je crois

Il n'était visiblement pas dans son jeu habituel. Il était dans la fuite. La vraie cette fois. Car il aurait pu tellement trouver des choses amusantes à répondre en soit... C'était même étrange de le voir ainsi. Il ne voulait pas parler et s'éloigna pour trouver la lumière. Ce qu'il finit par faire. Toute la salle s'alluma. Il avait visiblement changé d'attitude. Il commença à aller vers une caisse dans l'optique de la pousser jusqu'à la fenêtre mais fut retenue par le cadenas qui la bloqué. Merde, il devait partir. Il ne voulait pas affronter ça.

Bien sûr, ce n'était pas vraiment le fait d'être poursuivit par un surveillant qu'il craignait. C'était juste de rester avec lui plus longtemps. Will vivait sa lucidité en force et il détestait ça. Comme s'il n'arrivait plus à utiliser son imaginaire pour fuir ce qu'il ne voulait pas voir, ne pas se souvenir. Il n'arrivait pas à revenir dans le jeu et l'absurdité et avait l'impression de perdre le contrôle de la situation. Donc certainement que le faux albinos préférait être choppé par le gouvernant. Bien que cette idée aussi ne lui plaisait spécialement non plus.

Il lui avait proposé une cigarette. Will l'a prit par automatisme. S'il pouvait se réfugier quelque part pour se calmer, autant le faire. Il le laissa allumer le clope alors qu'il regardait toujours ce qu'il pouvait faire pour s'en aller. Il eu alors le malheur d'allumer les lumières pour mieux voir. Il sentit d'un coup l'inconnu le tirer alors qu'il eu à peine le temps de jeter sa cigarette dans l'eau. Il retint son souffle, avant qu'il ne s'en rende compte, il avait été foutu dans un placard, à quelques centimètres du garçon. Pendant un instant, il avait cru qu'il allait tenter de le frapper et le faux albinos hésitait déjà à se défendre avant de voir qu'il lui fit signe de se taire. Will se sentait mal à l'aise. Tous ce qu'il ressentait, alors qu’habituellement il raffolait des sensations comme une drogue, ne lui plaisait pas. Il n'arrivait plus à redevenir comme avant. Alors qu'il maîtrisait à peu près tout depuis qu'il était arrivé dans sa famille d’accueil.

Il devait se calmer. Il ne devait pas lui faire comprendre qu'il se doutait, du moins qu'il avait une intuition, de qui ce type était (en partie) ce type. Il craignait de devoir se retrouver à avoir une discussion sérieuse là-dessus.

Pour l'instant, il lui chuchota s'il avait éteint sa cigarette. Mécaniquement il lui montra ses mains pour valider le fait qu'il ne l'avait plus vraiment de toute façon. Restait à espérer que le gardien ne fouille pas trop loin. Il respirait doucement, se concentrant sur la fenêtre, laissant le temps couler. Il voyait l'homme bouger dans la pièce d'un air suspect. La lumière était allumée avant ? Ou était-ce eux qu'il l'avait fait ? C'est certainement ce qu'il se demandait. Cependant il ne savait pas trop comment ils avaient pu rentrer, ne voyant la fenêtre ouverte. Il fit le tour de la piscine calmement alors que le silence régnait. Il finit par recevoir un appel.

- Oui ? D'accord, les deux autres ne doivent pas être loin, j'arrive.

L'homme s'en alla d'un pas rapide. Ahlala, c'était ridicule. C'était tellement voyant que ce gars se prenait pour un flic ou un espion et qu'il trouvait là-dedans une part d'amusement. Non car il prenait ça vachement au sérieux pour de la beuh quand même. Il fut tellement pressé qu'il laissa la lumière allumée et partit par la porte des vestiaires (certainement qu'il les ferma).

Will souffla doucement, attendit quelques secondes puis sortit sans trop demander la permission. Il avança de quelques pas pour être sûr que personne n'allait revenir. Il ne savait pas quoi faire ou quoi dire. Il réfléchissait de quelle façon absurde il pouvait gérer la situation. Il ne savait pas. Cela semblait trop artificiel. La seule façon qu'il trouva pour s'éloigner un peu fut de regarder le siège en hauteur du maître nageur et grimper dessus pour s'asseoir en haut. Prendre de la hauteur c'était reposant, s'éloigner de ce type était reposant, il avait l'impression métaphorique d'être au dessus de tout ça. Et puis plus personne n'était vraiment surpris de son comportement maintenant.

Will se doutait qu'il ne pourrait pas sortir seul, il fallait au moins que l'un fasse la courte échelle à l'autre mais il avait un peu de mal à réfléchir à tout ça depuis ce  souvenir qui lui avait violé l'esprit. Il avait envie de penser à autre chose depuis aujourd'hui, le monde semblait vouloir le remettre en face de tout ce dont il ne pensait pas. Les sensations qui lui manquaient, cette impression de ne plus être vraiment humain, cette tentative d’oubli...  Il voulait qu'on lui foute la paix. Donc, il se pensait peut-être à nouveau bien isolé sur sa chaise avant de bien voir que ce gars sans nom le suivait encore. Le faux albinos l'ignora et grimpa quand même.

Ce garçon finit alors par parler. Il ne comprenait pas ce qui le faisait stresser mais qu'il allait l'embêter sur tout cela une dernière fois avant de le laisser tranquille. Le faux albinos déglutit un peu, regardant ailleurs comme si ne pas le voir allait le faire disparaître. Cependant, la chaise bougea d'un coup, Will se cramponna aux accoudoirs dans un mouvement de surprise, son regard rouge se plantant à nouveau vers son interlocuteur. Sa phrase, sa tirade lui fut comme une sorte de claque dans la gueule. Il lui disait que ses efforts étaient vains. Que c'était qu'en affrontant ce qu'il s'était passé qu'il y arriverait. Il resta un moment silencieux en le voyant s'éloigner. C'était bien plus compliqué de ça... Il était juste brisé, en morceau, on avait passé son enfance à le démonter pour le remonter, assemblant les pièces dans n'importe quel sens pour voir le résultat. Au final, ils n'ont jamais su le remettre à l'endroit.

Will observa le vide un moment. Plusieurs minutes en fait, se sentant totalement désemparé de tout cela. Il observa l'eau. Il avait envie de sauter dedans. Il se retint, il ne voulait pas par contre que ce gars croit n'importe quoi et qu'il joue au maître nageur. Donc, au bout d'un long moment, il sauta de la chaise qui recula un peu sous l'impulsion du jeune homme. Il atterrit au sol, il ne savait pas trop ce qu'il allait se passer ou même ce qu'il allait dire. Le jeune homme n'avait pas parlé sérieusement depuis des années puisque ça ne lui rapportait rien mise à part de l'ennuie.

Il s'approcha alors de la fenêtre mais resta à quelques mettre de ce gars qui restait toujours un inconnu. Il croisa les bras, un air calme sur le visage même si son cœur battait certainement beaucoup trop fort. Il laissa flotter un moment de silence avant de demander:

- Pourquoi tu étais là-bas ?

Lui-même se trouvait surpris de son ton sérieux. Et le sens de la question était...compréhensible. Il parlait du passé. Il était presque sûr que c'était ce gars et il semblait avoir comprit que l'inconnu l'avait également reconnu. Sinon il n'agirait pas aussi étrangement.

S'ils parlaient, Will préférait que ce soit ici. Une fois dehors, il craignait être trop tenté par les gens, par le grand espace libre et partir. Ici il était coincé et n'avait pas d'autres  choix que d'assumer.

Il plantait son regard dans le sien, faisant taper régulièrement son talon contre le sol montrant bien qu'il n'était pas dans son élément. Mais, consciemment ou non, il avait décidé de faire un pas en avant.

Il avait quand même trouvé un moyen pour ne pas parler de lui-même. Il ne savait pas si c'était fait exprès ou non mais cela lui avait parut essentiel. Il ne comprenait toujours pas pourquoi il avait vu un gosse là-bas pour ne jamais le revoir plus tard. Donc sa question avait été un peu brutale. Certainement un peu trop. Mais là où il pouvait être parfois très diplomate, tellement qu'on ne comprenait plus de quoi il parlait, il pouvait être aussi cru. Il y avait très peu de nuance chez Will. Du moins dans ce qu'il montrait de lui-même. En tout cas, cela stoppa la parole de l'inconnu qui le regarda longuement, un peu surpris. Et oui, Will n'était pas non plus dans une pensée très traumatique de son enfance. Le problème chez lui était différent. Donc  s'il n'en parlait pas, ce n'était pas forcément pour les raisons obvious du type " ça me fait faire des cauchemars".

Cependant, le sujet ne plaisait pas du tout au gars sans nom qui perdit son sourire, finissant par avouer que c'était sans importance. Il repartit à ses tâches alors qu'il lui donna un discours métaphorique digne d'un film dramatique. Will avait du mal avec ce genre de citation. Pour lui, c'était vague et sans vraiment de sens (ironique pour un gars qui passait ses journées à être absurde ). Il croisa alors les bras toujours calme pour l'instant.

- T'es du genre nécrophile alors ?

Will repartait un peu dans ses répliques ironiques, puisqu'il avait toujours un peu de mal à être sérieux. Il faisait référence donc à son histoire de cadavre sous le tapis. Car ce gars là semblait dormir avec depuis longtemps.

Il se dirigea vers les caisses dans l'optique d'aider à les pousser également. Mais il semblait toujours avoir le regard un poil vague. Il ne dit rien pendant plusieurs secondes avant de marmonner:

- De toute façon je peux en avoir une légère idée. Ta façon d'asphyxier les gens en dit long.

Quand des gosses se retrouvaient illégalement dans des labos, c'était rarement pour leur acheter des jouets. Et puis Will l'observateur avait bien comprit que la pirouette qu'il avait fait tout à l'heure d'une rapidité déconcertante n'était pas un truc qu'on apprenait à l'école. Et on embauchait rarement les gamins à l'armée. Donc il y avait des chances que tout cela était lié. Il poussa alors une des caisses jusqu'au niveau de la fenêtre. Comment il aurait fait, lui, pour remonter s'il avait été tout seul ? Il aurait certainement fait quelques nages dans la piscine puis se serait endormit ici.

Il n'insista donc pas plus sur la discussion, il en savait déjà certainement beaucoup et il n'était pas du genre harceleur. Et puis c'était pas non plus un but ultime de savoir puisqu'il avait quelques hypothèses dans le fond de son cerveau.