À droite, l'école et ses élèves normaux, comme tout le monde.À gauche, le centre de redressement pour jeunes dangereux.Maintenant réunis, pour le pire.
Venez participer à la journée d'introduction des clubs ! Nourriture et activités pour tout le monde ~
Forum fermé. Indarë rouvre ses portes à une nouvelle adresse.
Si vous étiez partenaires et que vous souhaitez revenir dans notre liste, vous pouvez : - Ajouter votre fiche parmi nos partenaires en passant par cette page : https://indare.forumactif.com/h20- - Changer notre fiche et nos boutons pour les remplacer par ceux-ci : https://indare.forumactif.com/t84- - Changer le nom du forum en "Petits secrets d'Indarë"
Pour les anciens membres qui souhaiteraient s'inscrire à la V2, c'est par ici → https://indare.forumactif.com/ Pas mal de choses ont changé donc pensez à lire tous les sujets. J'ai aussi listé le plus gros des modifications dans le MP général envoyé pour l'ouverture.
Les actions définies et anticipées de chaque personnage dans la totalité de ce RP ont été mûrement réfléchies et consenties par les deux partis.
Le jour est venu pour mon premier concert à Londres, enfin premier… Depuis que j’ai emménagé ici. Cela faisait quelques mois déjà mais c’était la première fois que je ne voyageais pas pour mon travail, qui était d’ailleurs plus une passion qu’autre chose… Il fallait que je me tienne prête pour dix huit heures trente, heure où mon impresario viendrait me chercher. Je n’avais pas peur, j’étais confiante, comme toujours. Je jouais avec mon coeur et mon âme, comment pouvais-je faire une mauvaise symphonie avec l’orchestre philharmonique . J’avais hâte comme toujours avant une représentation. En attendant cela je pris un bon bain chaud pour me détendre et sortis ma tenue pour ce soir une robe rouge avec une traîne au niveau de l’épaule gauche et tout en tulle, je l’aimais beaucoup et comme je ne l’avais portée que deux fois, pourquoi pas une troisième? Jamais deux sans trois comme le dit le dicton! La robe en question: ici
Lorsque je sortis du bain je prenais mon temps pour me préparer mais ne m’habillais pas de suite, j’avais faim alors il fallait bien que je mange, non? Je restais donc en tenue de maison et me préparais un plat réchauffé. Oui, j’avais clairement la flemme… Enfin bref je sortis le plat et l’emmenais à la table pour le déguster. Ça ne valait pas les lasagnes que je faisais mais c’était tout de même bon. Une fois rassasié je touchais ma montre et constatais qu’il était temps de me préparer pour la représentation je retournais donc dans ma chambre et enfilais la robe sans trop de mal, ayant l'habitude depuis des années de me préparer seule malgré ma malvoyance. Bien évidemment c’était mes parents qui m’avait aidé à me préparer à une vie active sans porter le poid de mon “problème” si je puis dire. Je m’habillais donc tranquillement, ne voulant pas froisser ma robe qui sortait de chez le pressing. Aujourd’hui et comme toutes les fois je devais me coiffer pour cette représentation. Avec ma malvoyance je pouvais néanmoins voir à environ quatre vingt centimètre, ce n’est certes pas beaucoup pour les “voyant” mais pour les malvoyant c’était déjà beaucoup! Je pouvais donc faire un beau chignon avec ma longue chevelure. Une fois cela fait je retournais dans mon salon, attendant Mylène pour qu’elle me conduise jusqu’à la salle où allait se passer le concert et la soirée post concert. Comme tous ces genres de soirée il n’y avait pas tant de monde que ça, enfin, il faut dire que bien que je sois extravertie je me contentais de parler à certains qui m’accostaient mais ne restais pas forcément qu’avec eux, les autres avaient payé leur place à cette soirée tous les gens ici. Enfin bref l’on sonna à ma porte et je souris en ouvrant la porte, faisant un câlin à mon impresario. Je l’adorais, elle me suivait depuis mes débuts, étant amie avec mes parents elle attendait beaucoup de moi et apparemment n’était pas déçue. Ça me rassurait assez venant de sa part, mes parents aussi me le disait bien évidemment et ça me faisait tout autant plaisir, mais elle c’était mon impresario donc il y avait donc pas mal de différence.
Il était à présent temps de partir en direction de l’Alexandra Palace, là où se passerait le concert et le reste de la soirée. Enfin arrivé je sortis de la voiture tranquillement avec mon violon dans son étui au chaud, je le tapotais pour être bien sûr que je ne l’avais pas oublié, toc bien bête mais que je faisais toujours avant chaque concert! De part mon hyperémotivité je pense que c’était une sorte de réconfort de sentir que je n’avais pas oublié mon meilleur ami. Je pouvais être stressée malgré mon caractère et bien sûr je l’étais un peu à chaque concert bien que je ne voyais pas les gens devant moi, je me contentais juste de jouer face à eux. Je faisais passer mes émotions à travers mon violon pour les faire passer dans le cœur de ceux qui écoutaient mon concert. Oh bien évidemment ce n’était pas que le mien, il fallait compter l’orchestre philharmonique. Il faisait partie du concert eux aussi après tout! Enfin, je n’avais plus vraiment le temps de penser à ça. Mylène prit mon bras et me mena juste au milieu de la scène, je lui fis un signe de tête pour la remercier et calais mon violon dans le creux de mon cou, commençant à jouer avec toute l’assurance et le doigté que j’avais, j’étais une professionnelle après tout, je ne devais pas douter de mes capacités ou de celles de mes accompagnants! Le spectacle dura environ deux heures et je ne me lassais pas d’entendre nos mélodies, c’était beau et j’avais toujours une petite larme à la fin de chaque concert. Bien évidemment c’était des larmes de joie!
Le concert une fois fini je m’inclinai en souriant et mon impresario revint vers moi pour me prendre la main et nous quittions la scène. Il était à présent temps de passer aux festivités. Mylène avait pris mon violon pour que j’aille directement à la soirée comme d’habitude et je pris un verre de champagne avant de m’asseoir un peu en retrait pour boire un peu tranquillement avant d’aller voir les gens.
- C’est bon comme ça ? - Oui. Par contre, mets tes collants, il fait frais ce soir. - D’accord !
Janna fila dans sa chambre en courant. L’excitation était à son comble. Ce soir, je l’emmenais voir un concert de musique, plus exactement un concert philarmonique. Depuis que ma fille avait vu Haku jouer du violon, elle s’intéressait davantage à la musique. Je savais qu’elle aimait chanter, notamment avec sa mère, mais les instruments ne l’avaient jamais attirée. En ce moment, elle me parlait souvent de vouloir s’essayer à jouer sans toutefois faire un choix. Je voulais bien lui payer des cours mais elle devait se décider. Dans ma jeunesse, je connaissais le piano. Sans vouloir me vanter, j’étais plutôt bon. Mon seul défaut, c’était que je ne savais pas lire les partitions. J’apprenais à l’oreille et ça, c’était plutôt mal vu. Bref, de toute façon, je n’étais pas assez bon professeur pour aider Janna moi-même. Quand j’avais vu la publicité dans les rues de Londres en allant chercher ma fille à l’école une semaine auparavant, je m’étais dit qu’elle voudrait peut-être assister à un concert. Ce fut une fois les billets achetés que je me mis à douter. Il s’agissait d’un orchestre, elle ne pourrait pas entendre tous les instruments séparément. Et ça durait au moins deux heures, pourrait-elle rester tranquille durant tout ce temps ? Était-ce finalement une bonne idée ? Au pire, je pouvais toujours lui montrer plein d’instruments sur Internet… Mais ce n’était quand même pas pareil. Pourtant, quand je lui avais annoncé que nous nous y rendrions samedi soir, ma fille s’était exclamée de joie… avant de me demander ce que signifiait « orchestre philarmonique ». Même en lui ayant donné une définition simple mais pas vraiment parlante, elle parut encore plus emballée par l’idée. Elle avait tellement hâte qu’elle ne tenait plus en place.
- Voilà !s’exclama-t-elle en me rejoignant dans l’entrée.
Elle avait mis ses collants, comme je le lui avais demandé. Par-dessus, elle portait une robe bleu nuit à petits pois dorés, et son manteau préféré assorti à ses bottines noires. Pour ma part, je m’étais contenté d’une chemise blanche, d’un jean et d’une veste noirs, tout comme mes chaussures de ville. Ce n’était ni trop habillé, ni pas assez. Les seuls costumes que je possédais étaient celui de mon mariage et celui des enterrements auxquels j’assistais parfois quand j’étais Thanato. Ils ne sortiraient pas de l’armoire de sitôt… Une fois prêts, nous quittâmes l’appartement et nous rendîmes à la salle de concert en voiture. L’Alexandra Palace dans le quartier de Haringey était un bâtiment victorien du 19ème siècle constitué de nombreuses verrières. Il faisait office de salle de spectacle, centre communautaire ou encore studio de télévision, théâtre, et même patinoire. Je passais souvent à quelques rues à mon arrivée à Londres, mais n’y étais jamais entré. Il fallait dire que je n’avais aucune raison de me rendre dans un endroit comme celui-ci. Ce soir, nous profiterions d’un beau concert et Janna découvrirait la musique sous une autre forme. J’étais content de pouvoir lui donner cette occasion. J’espérais seulement que ça lui plaise jusqu’au bout. Nous arrivâmes à destination avec un peu d’avance. Ainsi, nous pûmes choisir de bonnes places, à peu près vers le milieu de la salle, de façon à pouvoir voir les musiciens assez distinctement. Quelques minutes plus tard, les lumières s’éteignirent, ne laissant que la scène éclairée. D’abord, toute la troupe de l’orchestre entra. Puis se fut le tour d’une femme vêtue d’une jolie robe rouge. Elle tenait un violon et un archet dans sa main, et le bras d’une autre femme de l’autre, comme si elle peinait à marcher seule. A sa façon de se mouvoir, on aurait dit qu’elle était malvoyante. C’était peut-être le cas… Bref. Peu après, le chef d’orchestre entra sous les applaudissements de la foule. Le silence retomba. Et le concert commença. Dès les premières notes, j’entendis Janna murmurer « Oooh ! » et quand je baissai les yeux sur elle, je fus surpris par son regard attentif et brillant d’émotion. Elle semblait littéralement captivée. Je ne pus m’empêcher de sourire, content, avant de reporter mon attention sur le concert. Flamme rouge au milieu de cette vague noire de musiciens, la soliste se mouvait d’une manière qui me faisait penser à Haku le jour où il nous avait montré sa musique, le côté féminin en plus, bien que le jeune homme eût des traits fins et de longs cheveux. Cette femme dégageait une aura aussi étrange que captivante et à force de la regarder, de l’écouter, je n’entendais presque plus le reste des instruments, comme si elle était seule sur scène. Je pensais comme un parfait débutant vis-à-vis de ce genre de représentation, je me disais également que j’avais peut-être tout faux et que je ne voyais là qu’une mise en scène… mais la violoniste me donnait l’impression de jouer comme si elle y mettait tout son cœur, tous ses sentiments, comme si elle voulait transmettre un message de bonheur au public. Ce fut ce que je ressentis durant deux heures. Deux heures qui filèrent à la vitesse de l’éclair. Ce fut presque une déception de voir les lumières se rallumer et l’orchestre saluer avant de partir en loges. Mais j’étais heureux de ce moment passé avec Janna qui s’agrippa à mon bras pour me dire « C’était trop bien, Papa ! »
- Tu ne t’es pas ennuyée ?demandai-je au cas où. - Non, pas du tout ! J’ai beaucoup beaucoup aimé !
Je souris en caressant le haut de son crâne.
- Viens on rentre.
Nous nous levâmes et attendîmes que la voie soit libre pour sortir de la salle. Dans le hall, je remarquai que pas mal de gens ne se dirigeaient pas vers la sortie mais plutôt vers une salle de réception. Il devait y avoir une fête privée. Mais en regardant les affiches, je vis qu’il s’agissait d’une soirée accessible à tous.
- Papa, j’ai faim,dit Janna en tirant sur ma veste.
J’hésitai un instant, pris sa main et l’emmenai vers la salle de réception.
- On peut rester un peu ici si tu veux. Regarde, il y a quelques trucs à grignoter.
Je nous servis de quoi apaiser un peu notre faim, trouvai du jus de pomme pour accompagner tout ça. Comme je conduisais, je préférais ne pas boire d’alcool. De toute façon, je n’avais pas envie de vin, et il n’y avait pas de bière. Une dizaine de musiciens de l’orchestre étaient présents. J’aurais bien voulu tenter de discuter avec l’un d’entre eux, si Janna voulait bien échanger avec quelqu’un dont l’instrument de prédilection l’intéressait. Mais ils semblaient tous occupés avec des interlocuteurs passionnés. Nous restâmes donc dans notre coin pour éviter de nous faire bousculer.
- Fais attention, ne tache pas ta robe,dis-je en voyant Janna galérer avec une espèce de mini sandwich à la crème de concombre.
J’attrapai une serviette en papier et la lui donnai. Elle me remercia, mangea tranquillement. Je n’avais pas très faim, ne grignotai que quelques trucs. Plus tard, ma fille demanda à aller aux toilettes. Je regardai autour de moi, vis un écriteau au-dessus d’une porte dans un coin de la salle. A quelques mètres, la demoiselle en robe rouge était assise et buvait un verre de champagne. Personne ne venait lui parler, c’était un peu bizarre. Nous passâmes non loin d’elle pour aller vers les toilettes. J’ouvris la porte. C’était un couloir donnant sur une cabine pour femme et une autre pour homme.
- Vas-y, je t’attends là.
Janna entra, je refermai la porte derrière elle. En me retournant, je remarquai une petite pochette rouge au sol, près d’un arbre en pot. Ce même rouge que la robe de la violoniste. Elle l’avait peut-être faite tomber… Je la ramassai et la rejoignis.
- Excusez-moi, je crois que c’est à vous,dis-je en lui tendant la pochette.Enfin… peut-être…ajoutai-je moins sûr de moi tout à coup.
J’avais fait un sacré raccourci en unissant les couleurs mais c’était sûrement trop hâtif. J’aurais l’air fin si cet objet ne lui appartenait pas…
Pour une fois et c’était assez surprenant les gens ne se bousculaient pas vraiment pour me parler. Enfin, il fallait dire que j’étais dans un coin plutôt éloigné de la soirée. À côté des toilettes plus précisément. Le public devait se dire que je ne voulais pas parler et, qui sait, c’était peut être vrai? Oui ça l’était un peu bien que ce n’était pas à cause d’eux bien évidemment! J’adorais les gens qui allaient à mes spectacles mais lorsque une partie de l’orchestre était là je les laissais parler avec le public. Lorsque ce n’était qu’un concert entre ma pianiste et moi ce n’était pas pareil. On était un peu plus sollicité par les autres et ça leur faisait bien plaisir et indirectement cela me faisait plaisir à moi aussi. J’étais toujours reconnaissante des gens qui nous écoutaient, ça procurait un plaisir sans nom, d’où ma petite larme après chaque concert. J’étais toujours émue de transporter les gens dans mon univers c’est le but que je me fixais à chaque prestation qu’il n’y ait qu’un piano ou un orchestre philharmonique.
Enfin que ma place n’était pas des plus pratiques, en effet à cause de ma malvoyance je ne voyais clairement pas les gens, enfin, je voyais une masse d’ombre. Parfois cela m’angoissait mais je me disais toujours que j’avais toute ma vie ainsi et que c’était déjà bien que je vois un peu donc je ne plaignais pas vraiment, j’étais comme j’étais voilà tout et les gens était gentil bien que certains me prennent en pitié à cause de ma malvoyance. Je détestais ça! Qu’on me prenne en pitié… Et puis quoi? J’étais normal à par ce problème, j’arrivais à vivre ma vie en étant autonome et les gens seraient bien sur le cul de voir ce que je pouvais faire avec mon handicap. Comme la cuisine, j’étais un vrai cordon bleu! Un petit sourire se dessina sur mon visage, j’étais encore partie loin dans mes pensées. J’allais passer pour une abrutie mais qu’importe, il paraissait que j’avais un beau sourire et puis, en me voyant dans le miroir j’acceptais ce compliment bien que je n’aimais pas me vanter. Il faut juste accepter les compliments que l’on nous fait., après il fallait faire la différence entre le vrai et le faux. Personnellement je me fiais au ton emprunté pour parler.
Un serveur arriva et baissa le plateau près de mes yeux je pris une flûte de champagne et le remerciai avec un large sourire qu’il compris de suite me demandant ensuite si je voulais des petits fours et j'acquiesçai. J’avais un peu faim, mon plat surgelé ne m’avait clairement pas suffit. Le serveur appela donc un collègue qui vint en un éclair et je pris deux petits fours aux oeufs de lompes, bien meilleur que le caviar à mon goût...J’avalais donc mon petit four et bus un peu de mon champagne en faisant tomber ma pochette comme une idiote. Je me baissais pour le récupérer mais je vis la main d’un homme me la récupérer et me la tendre en s’excusant. Je regardais un instant son visage alors qu’il était assez proche de moi, ses yeux était magnifique! Je récupérais la pochette en prenant la parole d’une voix cristalline.
« Merci beaucoup Monsieur… » Je souris. « Comment vous appelez vous? » Je bois la fin de ma boisson pour ensuite poser la flûte sur la table d’à côté et repris la parole. « Il fait chaud ici.. Vous fumez? J’allais y aller pendant qu’on ne me remarque pas. » Je ris doucement en prenant ma canne près de moi, me levant.
Cependant, elle la récupéra avec un sourire reconnaissant.
- Merci beaucoup, Monsieur…
Elle hésita, son regard planté dans le mien.
- Comment vous appelez-vous ?
Je mis quelques secondes en trop à répondre, parce que son regard nacré m’étonna. Elle semblait effectivement malvoyante mais ça ne gâchait en rien son élégance et sa beauté. Car oui, on ne pouvait pas dire le contraire, c’était une très belle femme. Son teint laiteux contrastait avec ses cheveux d’un noir de jais attachés en chignon et le rouge éclatant de sa robe dont la tulle trainait par terre à ses pieds. Je ne savais dire son âge mais elle avait l’air plus jeune que moi.
- Meyer,me présentai-je un peu troublé.
J’entendis Ihn pouffer de rire dans son coin. Qu’est-ce qui lui arrivait encore à ce crétin ?
« Rien rien… »
Bien sûr.
« Non mais regarde-toi, même pas foutu de dire ton prénom, même devant une jolie minette comme elle. »
Et alors ? C’était mon choix. Je le chassai de ma tête, me reconcentrai sur la demoiselle qui se plaignait de la chaleur de la pièce. Je devais avouer que ça devenait étouffant.
- Vous fumez ?demanda-t-elle soudain.J’allais y aller pendant qu’on ne me remarque pas.
Elle ponctua sa phrase d’un petit rire cristallin qui me donna un étrange mais agréable frisson dans la nuque. Elle se leva en attrapant une canne qui était posée contre le mur à côté d’elle.
- Je vous suis, mais…commençai-je en me tournant vers la porte des toilettes.
Janna en sortait justement. Elle s’approcha de nous et leva les yeux vers la jeune femme avec un regard à la fois timide et admiratif.
- C’est ma fille, Janna,dis-je en posant ma main sur son épaule.Tu dis bonjour ?
Elle rougit comme une pivoine.
- B… Bonjour… - Bonjour mademoiselle,répondit aimablement la violoniste en se penchant en avant.
Elle posa délicatement sa main sur la chevelure blonde de Janna.
- As-tu aimé le concert ?
Ma fille hocha vivement la tête.
- Oui, c’était beau ! - J’en suis très heureuse alors ! Excusez-moi,fit-elle à mon attention,je suis curieuse de savoir à quoi ressemble votre fille…
Elle bougea ses mains devant les yeux de Janna qui la regardait, intriguée.
- Puis-je ?
J’approuvai. Si elle avait besoin de toucher le visage des gens pour se faire une idée de leur physique, elle devait très mal y voir. Je me demandais si j’oserais faire ça à sa place. Je n’étais pas très tactile, à part avec Janna. La violoniste rassura ma fille en lui expliquant ce qu’elle allait faire. La gamine ne bougea pas et se laissa toucher. Les gestes de la violoniste étaient doux, ses doigts se mouvaient de façon si gracieuse qu’elle donnait l’impression de ne pas vouloir abîmer le visage de la blondinette.
- Tu m’as l’air d’être une très jolie petite fille !déclara-t-elle quelques secondes plus tard en retirant ses mains.
Janna se contenta de rire en plaquant ses mains sur ses joues, l’air agréablement surprise par ce contact rapide mais intense. Sans vraiment réfléchir, sans me dire que ça pouvait soit lui faire plaisir, soit la vexer, je lui présentai mon bras pour aller dehors. A la base, c’était un geste plutôt naturel si je voulais agir en gentleman mais dans mon intention, je voulais aussi lui apporter mon soutien pour marcher sans rencontrer de problème. Silencieusement mais toujours le sourire aux lèvres, elle passa son bras sous le mien et nous quittâmes la salle de réception. Nous eûmes droit à quelques regards curieux mais je n’y fis pas attention. La fraîcheur du hall nous soulagea. Janna courut devant nous en contemplant le décor et les tableaux, la tête levée si haut qu’elle manqua de tomber à la renverse. Je lui donnai son manteau, elle s’en vêtit, et nous voilà dehors, en haut des marches qui descendaient vers la cour du bâtiment. En bas, quelques enfants jouaient ensemble. Ce devait être les gamins de tous ces couples qui préféraient rester à l’intérieur pour se goinfrer et boire des coups.
- Je peux aller jouer avec eux ?demanda Janna en les montrant du doigt. - OK, mais pas longtemps, c’est tard,répondis-je en m’arrêtant assez loin de la première marche pour ne pas que la violoniste risque de trébucher.Et cours pas dans les escaliers. - Merci !fit-elle heureuse.
Elle descendit trois marches, remonta, me fit un câlin et un bisou, et repartit. D’ici, je pouvais avoir un œil sur elle, c’était parfait. Les lampadaires éclairaient bien la place, je ne risquais pas de la perdre de vue.
Tenant ma pochette en effleurant sa main je bloquais sur ses yeux puis une fois redressée je souris et lui demandais son prénom. Je me sentis un peu bête en attendant qu’il me le dise, faisant valser mes iris nacrées de gauche à droite. Il le dit d’un ton assez bizarre mais peut être était-il impressionné de me parler? Je me retenais de rire à cette pensée qui était bien bête quoique vraie parfois, je ne comprenais cependant pas pourquoi. J’étais comme tout le monde, j’étais juste célèbre mais cela faisait-il de moi quelqu’un de plus important que les autres? Enfin bref, il accueillit ma demande positivement. Au moins je n’allais pas le bloquer avec mon odeur de tabac pourtant son petit “mais” me fit un peu stresser. Pourquoi? Je ne savais pas trop puis il me présenta sa fille. Je ne m’y attendais pas mais un large sourire se dessina sur mon visage. La jeune fille concluais-je au son de sa voix me dit bonjour très timidement. Je lui demandai alors d’une voix douce comment elle avait trouvé le concert et sa réponse m’enchanta.
« J’en suis très heureuse alors! » Je posais mon regard vide d’où le son de la voix de Meyer venait et je lui posai une question. « Excusez moi je suis curieuse de savoir à quoi ressemble votre fille… » Je bougeais mes mains légèrement pour lui signifier que j’aimerais toucher son visage. « Puis-je? » Après la réponse positive de l’homme je me mis devant la petite fille. « N’ait pas peur Janna, je vais juste toucher ton visage pour voir à quoi tu ressemble. » Je ris pour la détendre. « Je suis très curieuse… »
Une fois la petite mise en confiance je touchais légèrement son visage de mes fins et longs doigts. Je ne m’attardais pas trop longtemps pour ne pas la gêner puis enlevais mes doigts en souriant.
« Tu m’as l’air d’être une très jolie petite fille! »
Une fois cela fait je me levais en dépliant ma canne mais soudain je vis un bras se tendre vers moi et un nouveau sourire se dessina sur mon visage. Je le pris mais gardais tout de même ma canne de l’autre main.
« Hé bien… Les gentleman n’ont pas tous disparu à ce que je peux constater! » Je ris doucement et nous sortons de la salle de réception sans nous faire remarquer. Enfin je crois? Qu’importe cela allait me faire du bien de sortir, je commençais à étouffer à l’intérieur! Nous prîmes le manteau de Janna et sortîmes du hall.
J’entendis des enfants jouer et la petite fille demander à son père si elle pouvait jouer avec les autres, elle le remercia lorsqu’il accepta. Elle avait l’air d’être une petite fille calme et polie, c’est joli de savoir que tout comme son père des gens comme ça existaient toujours. L’endroit où nous arrêtions était éclairé et l’homme se stoppa peu avant les marches que j’avais sentis grâce à ma canne.
« Merci de vous être arrêté mais je ne serais pas tomber vous savez! La canne m’aide beaucoup » Dis-je sur un ton joyeux. « Ne vous en faites pas ce n’est pas un reproche! »
Je lâchais son bras et ouvrais ma pochette pour en sortir un paquet de vogue à la menthe et mon briquet pour l’allumer, un fois cela fait je rangeais le paquet mais gardais le briquet dans ma main.
« Vous le voulez? » Je lui souriais toujours, j’étais habituée à sourire mais pas autant, c’était assez déroutant mais je n’y prêtais pas plus d’attention.
Je tirai une longue latte sur ma cigarette tout en gardant la fumée quelques secondes dans mes poumons et de la recrachant dans les airs.
« Au fait, vous devez le savoir si c’est marqué sur l’affiche mais moi c'est Freja. »
- Merci de vous êtres arrêté mais je ne serais pas tombée, vous savez,dit joyeusement la violoniste.Ne vous en faites pas, ce n’est pas un reproche,ajouta-t-elle alors que je commençais à chercher à me justifier.
Soulagé, je la laissai me lâcher le bras. Elle fouilla dans sa pochette et en sortit un paquet de cigarettes mentholées. En regardant Janna rejoindre ses camarades, je sortis mon propre paquet de la poche intérieure de ma veste. La jeune femme me proposa son briquet, je la remerciai et le lui rendis quand j’eus allumé mon bâtonnet de tabac. Je pris le temps de l’apprécier. La première cigarette était toujours la plus agréable. Après, je commençais à ne plus faire y faire attention et c’était là que je commençais à les enchaîner sans m’en rendre compte, surtout quand je me sentais stressé ou en colère. Le silence était tombé entre mon interlocutrice et moi. Je ne savais pas vraiment quoi lui dire, c’était assez embarrassant. Je n’étais pas du genre à engager la conversation.
- Au fait.
Je la regardai, me rendis compte que j’étais tendu. Qu’est-ce qui m’arrivait ? Nous discutions simplement…
- Vous devez le savoir si c’est marqué sur l’affiche mais moi c’est Freja.
Par réflexe, je levai les yeux sur l’immense toile suspendue au-dessus de la grande porte principale. J’y contemplai un joli portrait de la demoiselle ainsi que son nom écrit dessous : Freja Kristeva. Je me raclai la gorge, un peu perturbé.
- Désolé, je… sans vouloir vous froisser, c’est la première fois que j’entends parler de vous,dis-je en me grattant l’arrière du crâne avec ma main libre.C’est que… c’est la première fois que ma fille et moi assistons à un concert comme celui-ci.
Discrètement, je me frappai le front deux fois avec le poing en faisant la grimace. Et voilà, je voulais encore me justifier. Au pire, qu’y avait-il de mal à ne pas connaître Freja Kristeva ?
« J’en sais rien mais t’es carrément bizarre là, »fit remarquer Ihn suspicieux.
La violoniste m’assura que ce n’était pas grave, que ça lui importait peu, du moment qu’elle avait réussi à nous transporter dans son univers. Et elle insista sur le fait qu’il y avait une première fois à tout. Je poussai un léger soupir, apaisé. Au moins, elle ne faisait pas partie de ces célébrités à la grosse tête, c’était plaisant à savoir.
- Vous voulez vous asseoir ?demandai-je en désignant les marches devant nous, sans prendre en compte le fait qu’elle ne voyait peut-être pas mon geste.
Elle accepta et, bien qu’elle refusât mon aide, je gardai un œil attentif sur elle tandis qu’elle s’asseyait sur la première marche, laissant le bas de sa robe effleurer le sol autour d’elle. Je m’installai à sa gauche au moment où un petit courant d’air venait nous rafraîchir. En voyant la violoniste seulement en robe, je ne perdis pas de temps à réfléchir : calant ma cigarette entre mes lèvres, je retirai ma veste pour la poser sur ses épaules.
- C’est pas grand-chose mais ce serait bête de tomber malade,dis-je en récupérant ma cigarette entre deux doigts.
Mon rire cristallin s’éleva une fois de plus dans les airs. Il ne me connaissait pas? Et alors? S’il avait aimé mon spectacle c’était l’essentiel après tout!.
« Et alors? Vous ne me connaissez pas? Qu’importe tant que je vous ai transporté dans mon petit univers. C’est tout ce que j’attends de mon public, qu’il aime ce que je leur fais partager. » Je pris une longue taffe, l’appréciant et marquant donc un temps de pause dans mon petit monologue. « Vous savez… Ce n’est pas parce que vous et votre fille ne me connaissez pas que je vais m’en offusquer au contraire, il faut une première fois à tout! » J’inclinai la tête sur le côté en entendant son soupire visiblement il était soulagé en entendant ma réponse et je lui souris.
Il m’invita ensuite à m’installer sur les marches avec lui. Je hochais la tête pour lui signifier que j’étais d’accord et posais un pied là où ma canne descendait pour me signaler un dénivelé. Je descendais donc sur la marche inférieure et m’assis tranquillement, ma robe se relâchant tout autour de moi et je sentis que Meyer s’assit à mes côtés, je souris une nouvelle fois, je devais avoir l’air bien niaise depuis qu’on s’était rencontré, cependant c’était plus fort que moi. Il était gentil du peu que j’avais pu apercevoir de lui.
Et puis un courant d’air me fit frissonner, après tout nous étions en novembre et j’avais oublié ma cape à l’intérieur. J’eus un instant la chair de poule jusqu’à ce que je sente un tissus sur moi mais aussi les mains de Meyer en train de poser sa veste sur mes épaules. Je fis attention avec ma cigarette et le laissais faire puis tournais ma tête vers lui.
« C’est vraiment gentil mais… Et vous? »
Je m’en voulais un peu, peut être allait-il avoir froid mais qu’en ayant senti ses doigts sur ma peau ils n’étaient pas si froid que ça comparé à moi mais quelle idiote je fais!
« Désolée je… Je m’en veux j’ai totalement oublié ma cape dans l’arrière salle pour les musiciens… » Je baissais les yeux un peu honteuse. « Au fait… Vous pouvez me tutoyer si vous voulez! » Un nouveau sourire se dessina sur mon visage. J’étais toujours souriante mais ce soir là un peu plus. Peut être parce que j’avais fait découvrir mon univers à quelqu’un qui n’y avait jamais goûté? « Et donc, c’est la première fois que vous faites ça, ça vous a plu autant qu’à votre fille? » Dis-je en inclinant la tête. « J’espère vous revoir, votre compagnie est très agréable. Vous êtes venus pour une occasion particulière ce soir? »
Elle fut surprise par mon geste mais m’accorda un joli sourire.
- C’est vraiment gentil mais… et vous ?
Elle s’excusa, s’en voulant d’avoir oublié sa cape à l’intérieur.
- Ҫa ira,la rassurai-je aussitôt.
Je ne craignais pas beaucoup le froid, et le débardeur que je portais sous ma chemise me permettait d’y résister un peu plus. Je regardai Janna qui avait l’air de bien s’amuser avec les autres enfants.
- Vous pouvez me tutoyer si vous voulez,suggéra Freja toujours souriante.
Ça m’arrangeait oui, je n’aimais pas le vouvoiement.
- Et donc, c’est la première fois que vous faites ça,poursuivit-elle.Ça vous a plu autant qu’à votre fille ?
J’acquiesçai.
- Oui, c’était vraiment bien, j’ai passé un bon moment,répondis-je sincère.J’avais peur que Janna s’ennuie et, au final, nous n'avons pas vu le temps passer.
- J’espère vous revoir, votre compagnie est très agréable,confia-t-elle à mon grand étonnement.Vous êtes venus pour une occasion particulière ce soir ?
Je m’étais arrêté à « votre compagnie est très agréable » et ne comprenais pas vraiment pourquoi. Je ne parlais pas beaucoup et devais toujours avoir cette même gueule de déterré que d’habitude. Ah mais non, j’étais bête, elle ne me voyait pas bien… Heureusement, sinon elle partirait en courant.
« A croire que ça en charme certaines,se moqua Ihn.Elle doit être aussi inconsciente que Mary. »
T’étais vraiment obligé d’en parler maintenant ?
« Ouais non, désolé. C’est sorti tout seul… Mais c’est à cause de toi là ! Tu m’fais dire n’importe quoi ! »
Ah, c’était de ma faute maintenant.
« Ben ouais, j’ai l’impression que c’est le bordel dans ta tête, et ça me perturbe. C’est cette fille qui te fait cet effet ou quoi ? »
Freja ? Me faire de l’ef… J’eus l’impression d’avoir mis la tête dans un four à deux-cent degrés. N’importe quoi ! Nous nous connaissions à peine ! L’esprit complètement embrouillé, je mis du temps à répondre à la jeune femme, en profitai pour mettre ça sur le compte de la cigarette que j’étais en train de consommer.
- Je voulais que Janna découvre la musique sous un autre angle,finis-je par répondre en tapotant sur le bâtonnet pour faire tomber la cendre devant moi.Elle voudrait jouer d’un instrument mais n’arrive pas à se décider, c’est encore tout nouveau pour elle.
J’aspirai un peu de tabac, expirai et regardai Freja en la pointant avec ma cigarette.
- Par contre, si je te tutoie, tu t’y colles aussi,ajoutai-je avec un demi sourire, et d’un ton plus dégagé.Sinon ça me donne l’impression d’être vieux alors que j’ai juste trente ans…
Cela me fit plaisir qu’il me dise qu’il avait aimé mais surtout que Janna ait aimé. Dans mon cas j’étais tombée dans la musique à ma naissance. Cependant une chose me fit bizarre pourquoi avait-il mis tant de temps à me répondre? J’aspirais une dernière fois sur ma sucette à cancer et tapotais mon côté libre pour écraser ma cigarette au sol et ouvrais ma pochette pour en sortir un petit cendrier portable pour ranger ma cigarette. Il n’y avait que trois choses qui tenait dans cette pochette, mon paquet de clope, mon portable et mon cendrier portable, ma carte d’identité quant à elle était glissé entre la “paroi” et mon portable pour être sûre de ne pas la perdre, enfin bref.
Je vis ensuite un point lumineux se tenant devant mon visage pas trop loin mais assez près pour que je le vois me pointer la fraise de sa cigarette vers moi. Je souris alors qu’il était en train de me dire de le tutoyer lui aussi d’un ton plus… Libre pourrait-on dire? J’avais l’impression qu’il prenait un peu plus confiance en lui et ça me faisait grandement plaisir. Cependant en pensant à ça je failli rougir mais… Pourquoi? On ne se connaissait pas? Lorsqu’il me dit qu’il n’avait que trente ans, je fis la moue et répondais en lui tirant la langue.
« Bouh tu es vieux » Après quoi je me mis à rire chaleureusement. « Bon… Ok, je vais te tutoyer, c’est bien parce que t’es gentil ou… Que j’aime pas vouvoyer?» Je posais mon index sur mes lèvres. « Qu’importe! J’ai deux choses à te demander » Dis-je en me grattant l’arrière de la tête. « Tu veux fumer une seconde clope ou il est vraiment trop tard? Et… Je peux toucher ton visage? » Je faillis rougir et me ressaisis en reprenant la parole. « J’aimerais voir si tu ressembles à ta fille… » J’inclinais la tête sur le côté en fermant les yeux et en souriant.
Elle fit une petite moue et me tira la langue à la manière d’une enfant prêt à faire une farce.
- Bouh, tu es vieux…plaisanta-t-elle avant de rire.Bon… OK, je vais te tutoyer, c’est bien parce que t’es gentil ou… que j’aime pas tutoyer ?
Elle posa son index contre ses lèvres, une lueur espiègle dans son regard nacré.
- Qu’importe, j’ai deux choses à te demander.
Je ne dis rien, curieux.
- Tu veux fumer une seconde clope ou il est vraiment trop tard ? Et… je peux toucher ton visage ?
Mon cœur rata un battement. Hein ? Toucher mon visage ?
- J’aimerais voir si tu ressembles à ta fille…dit-elle toute enjouée.
Elle ne le voyait pas mais j’étais tellement sur le c… tellement choqué que je m’étais figé, la bouche légèrement ouverte. Je la refermai, secouai légèrement la tête pour me ressaisir. Comment refuser ? Et d’ailleurs, pourquoi refuser ? Elle n’allait rien faire de mal…
- D’accord,fis-je simplement.
Je terminai ma cigarette, l’écrasai par terre et mis le mégot dans le paquet presque vide. En général, je trouvais toujours une poubelle pour le jeter mais je n’en voyais pas à proximité. Tant pis, je m’en débarrasserais plus tard. Expirant les derniers effluves de tabac, je pivotai vers Freja qui, tournée vers moi, levait les mains en attendant que je me rapproche. Ce que je fis, lentement. Quand elle posa ses doigts sur mes joues, je reçus comme une décharge qui me fit frissonner de la tête aux pieds. La fraîcheur de ses paumes sur mes tempes était si douce que je fermai les yeux. Quand ses ongles effleurèrent la base de mon cuir chevelu, je sentis mon cœur vibrer étrangement… et mon estomac se serrer douloureusement. Je rouvris les yeux. Le visage de Freja était si près que je pouvais presque compter ses cils. Je reculai brusquement, comme si je venais de me brûler, l’obligeant à couper le contact.
- E… excuse-moi…fis-je d’une voix à peine audible en tournant la tête comme si je ne voulais plus lui faire face.
Je ne savais pas ce qui me prenait. J’avais trouvé le moment agréable mais… c’était comme si je ressentais soudain un sentiment de trahison envers Mary. Je n’y arrivais pas. Je n’arrivais pas à passer à autre chose, c’était trop dur.
Lorsque je lui demandais de toucher j’étais à la fois heureuse et un peu apeurée. Ce n’étais pas dans mes habitudes pourtant mais…. Qu’est ce qu’il se passait au juste! Enfin à présent il était trop tard pour reculer, il avait dit qu’il était d’accord et je n’allais pas changer d’avis sous le fait que j’étais troublé, il trouverait ça sûrement bizarre et je ne voulais pas qu’il me trouve bizarre, c’était… Incompréhensible, moi qui me foutais de ça habituellement… Enfin bref je levais les mains au niveau de mon visage pour les voir et ainsi ne pas faire mal à Meyer pendant que j’allais toucher son visage, il ne manquerait plus que ça! Je vis alors son visage dans mon champs de vision, je pouvais voir la couleur de ses yeux grâce au lampadaire seulement tout était flou. Je posai alors mes mains sur son visage, délicatement, comme s’il était un bijou. Pourquoi je l’identifie comme ça? Ah… Peut être parce que sa fille m’avait paru ainsi elle aussi? Sûrement ça, mais bref ce n’est pas ça la question, j’étais en train de toucher son visage pour l’assimiler à celui de sa fille et je dois avouer qu’il se ressemblait assez ce qui me fit légèrement sourire. Sourire qui s’effaça bien vite lorsque le père de famille se recula brusquement, brisant le contact assez brutalement. Je gardais les mains levées un instant avant de les rabaisser et les mettre sur mes genoux, baissant automatiquement le regard, rouge de honte.
« Je… Je suis désolée… J’ai été trop tactile comme d’habitude. Je vais te laisser avec ta fille pour rentrer.. » Je tentai un sourire. « Dis lui que le piano est un très bon instrument d’apprentissage! » Je me levais donc et, comme si je n’étais pas assez gênée un de mes talon se prit dans ma traîne en tulle, la déchirant et me faisant tomber au passage. « Meyer! »
Les yeux rivés sur mon alliance, le visage de Mary apparut à mon esprit et j’eus du mal à m’empêcher de fuir d’ici. Elle me manquait tellement, je n’arrivais pas à exprimer à quel point elle laissait un grand vide derrière elle depuis qu’elle nous avait quitté.
- Je… je suis désolée… j’ai été trop tactile, comme d’habitude,déclara Freja embarrassée.
Elle n’avait pas à s’excuser. Elle était malvoyante, je trouvais normal qu’elle ait besoin de toucher certaines personnes et certains objets pour se les mémoriser. Non… c’était de ma faute. Je demeurais encore trop touché par la disparition de Mary, bloqué dans mes sentiments à cause du chagrin et de la culpabilité, de la colère et de l’anxiété.
- Je vais te laisser avec ta fille pour rentrer. Dis-lui que le piano est un très bon instrument d’apprentissage.
Elle se leva, je ne réagis pas, encore trop perdu dans mes pensées. Comment faire pour guérir de tout ça, arriver à faire mon deuil ? C’était beaucoup trop récent, comme si je l’avais perdue hier ! Rien que d’y penser, mes mains tremblaient. Je sentais mon cœur se déchirer, comme ce bruit de tissu tout près de m…
- Meyer !s’écria Freja.
En une fraction de secondes, je me levai et me tournai vers la jeune femme qui était en train de chuter vers le bas des escaliers. Je la saisis rapidement par le poignet et l’attirai à moi. Le parfum de ses cheveux… ou de sa peau ou… je ne savais pas trop, m’envahit les narines, et je crus défaillir. Mais je l’aidai à se remettre correctement sur pieds, remarquai un bout de tulle déchiré et ma veste ainsi que la canne par terre. Je les ramassai, rendis son bien à la violoniste et lui présentai une nouvelle fois mon bras.
- J… je te raccompagne à l’intérieur,décidai-je sans oser la regarder en face.J’ai pas envie que tu tombes à nouveau.
Elle accepta silencieusement et je la ramenai dans le grand hall. Je ne m’attardai guère, sachant que Janna était toujours dehors. Mais je ne savais pas quoi dire à Freja, quels mots employer pour la quitter sans paraître impoli ou trop brutal.
- Euh…fis-je en passant ma main sur ma nuque, un peu confus.Tu… O… on reviendra te voir en concert.
Et je tournai les talons. J’aurais au moins pu lui dire quelque chose de mieux comme « Ravi de t’avoir rencontrée » ou… ou je n’en savais rien, bordel ! Je me retrouvai de nouveau dehors. Janna était toujours en train de jouer en bas. Je descendis, l’appelai. Elle salua ses camarades et me rejoignit, toute contente. Nous nous dirigeâmes vers le parking. Arrivés à la voiture, je jetai un dernier coup d’œil au bâtiment. Je n’aurais jamais pensé faire ce genre de rencontre alors que je voulais juste montrer la musique à ma fille. Maintenant, je me sentais complètement déstabilisé. Et je dormis à peine cette nuit, l’esprit hanté par les visages de Mary et Freja.
The Wiesel Den 
![Une rencontre musicale [Meyer] Tbab](https://zupimages.net/up/21/15/tbab.png)
