À droite, l'école et ses élèves normaux, comme tout le monde.À gauche, le centre de redressement pour jeunes dangereux.Maintenant réunis, pour le pire.
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Il pleuvait à verse, ce soir là, sur la vieille capitale britannique. L'esprit embrumé par l'alcool, le Corbeau s'avançait d'un pas incertain jusqu'à l'arrêt de bus le plus proche. Combien de verres avait il bu, ce soir là ? Il avait arrêté de compter après le cinquième. Tout ce qu'il voulait c'était oublier. Oublier tout ce qui s'était passé ces derniers temps. Il ne supportait plus de voir Lily dans cet état. Il ne supportait plus de voir son regard vide, éteint, et de ne plus entendre sa jolie voix. Il ne pouvait plus encaisser de la voir écrire dans son cahier en guise de communication avec lui, alors que dans le même temps elle ne savait de toute évidence plus comment faire pour sourire. Il voulait effacer de son esprit le fait que le soir du bal, il s'était jeté sur Tessa, et l'avait embrassée, tout en sachant que c'était une erreur. Effacer le fait que ce triangle amoureux était aussi tordu que l'ensemble de sa vie. Effacer le fait qu'un mois plus tôt, une autre escouade de l'organisation l'avait retrouvé, et avait failli le tuer, et que désormais, elle savait qu'il se trouvait quelque part dans Londres. Que le fait de demeurer dans cette ville était une erreur, et que jamais il n'aurait dû commettre une telle erreur.
Malheureusement, sa résistance à l'alcool était puissante. Elle l'avait toujours été. Il ne buvait pas souvent, mais lorsqu'il le faisait, l'oubli ne faisait pas partie des effets secondaires obtenus. Malgré tout, il lui arrivait parfois en de rares occasions d'essayer à nouveau, dans l'espoir d'avoir un peu plus de chance que les fois précédentes. Ce soir là, ce ne fut pourtant pas le cas. Le pas hésitant et l'esprit embrumé, il se déplaçait de rue en rue vers sa destination tandis que la pluie le trempait de plus en plus. Aucune importance. Il n'était de toute façon probablement pas en état de courir. S'il tentait, il risquerait certainement de s'éclater au sol après un faux pas, ce qui ne l'aiderait pas franchement. Décidé à payer son erreur, il continua à marcher, en ruminant de sombres pensées.
Peu de gens fréquentaient le quartier, ce soir là. Entre l'heure tardive, et le temps pluvieux, la plupart des gens avaient déserté les lieux et seuls les plus louches, et les plus perdus demeuraient encore dehors à cette heure. Chris, lui, était probablement un peu des deux.
Qu'est-ce que je fous encore à errer dans les rues à une heure aussi tardive ? En temps normal j'aurais juste fait ma petite course et ensuite je serais rentrée. Ce soir je n'avais étonnamment pas très envie de retourner à la résidence surveillée. J'ai du mal à m'habituer à la nouvelle. J'ai toujours vécu dans les résidences surveillées du lycée et depuis peu, je me trouve dans celles qui appartiennent à l'université. La rentrée n'a pas encore débuté mais ça me permet de prendre un peu mes marques. Enfin...c'est censé m'aider à prendre mes marques. Honnêtement je ne pense pas que ce soit le cas mais j'imagine qu'il faut laisser faire le temps.
Je continue de suivre les directions que mes pas décident de prendre. Je ne sais pas réellement quoi faire. Heureusement je n'ai plus de couvre-feu même si au pire, je peux toujours aller squatter chez mon frère. Ma route se poursuit de rue en rue, de ruelle en ruelle. L'obscurité due à l'heure tardive et le fait que ce soit les heures propices aux agressions me stressent. Et cela, mélangé à mon état psychologique fragile, a fait que mon cerveau a trouvé malin de partir en vrille.
Ca a commencé avec un simple enfant perdu que j'ai suivi bêtement. Je n'avais cependant pas prévu que ce gosse deviendrait un tueur sanguinaire avec quatre bras. Je sais que ce n'est qu'une nouvelle hallucination mais me sachant pas si l'enfant de base est réel ou non – ça m'étonnerait quand même – je préfère prendre la fuite. S'il est réel alors j'éviterai ainsi de le blesser. S'il ne l'est pas du tout et bien je ne reste juste pas à côté d'une illusion qui peut potentiellement me faire passer pour une demeurée.
Durant ma fuite, je croise la route d'un homme. J'espère que ce n'est pas encore une hallucination... Un espoir vain puisque celui-ci prend rapidement une autre apparence. Je ne sais pas trop ce que c'est devenu. Une espèce de monstre alien ? Peu importe. Tout ce que je vois c'est qu'il m'attaque alors pour me défendre, je sors le couteau suisse acheté un peu plus tôt – il était censé être pour mon frère – et tente de poignarder mon ennemi avant qu'il ne me touche. Je ne veux pas mourir. Je veux juste retourner à la résidence et y rester en sécurité. Pourquoi je ne suis pas rentrée plus tôt ? Je suis vraiment idiote. Je n'aurais pas dû rôder aussi longtemps.
Les lumières se déformaient. Les bruits aussi. Quelle heure était il déjà ? Il avait trop bu. Il n'aurait pas dû boire autant. Il n'avait pas l'habitude de Tessa pour la boisson. Même s'il lui arrivait d'enchaîner les verres dans l'espoir d'échapper à sa triste existence, il ne s'y abandonnait que rarement. Il savait que c'était dangereux. Dangereux pour lui. Dangereux pour les autres... Le pas toujours incertain, il poursuivit sa route, lorsque soudain, il entendit et vit du coin de l'oeil quelqu'un s'approcher de sa zone de confort dans son dos. L'inconnu approchait vite. Trop vite pour que ce ne soit pas suspect. Aussitôt dans son esprit, ce fut comme s'il recevait un électrochoc: ses yeux s'étrécirent et se plissèrent alors qu'il se sentait en danger. Son instinct prenait les commandes, et les effets de l'alcool furent résorbés passablement. La lame l'effleura et le toucha au niveau des côtes tandis qu'il l'esquivait en effectuant une roulade avant dans le but de l'éviter. Sans même prendre le temps d'observer qui il avait en face de lui, le Corbeau acheva sa roulade, se redressa, dégaina et tira une balle en plein dans le bras armé de son assaillant.
Il avait ouvert le feu par réflexe de survie, plus qu'autre chose. Heureusement pour lui, par ce temps et à l'heure qu'il était, le coin était désert. Malgré tout, il tourna la tête de gauche et de droite pour vérifier que personne ne se trouvait dans le coin, et fixa à nouveau l'inconnue, visiblement soulagé. Personne...
C'est alors que le temps sembla se figer quelques instants pour le brun. L'arme pointée vers l'inconnue, il la jaugea en cherchant à comprendre qui elle était. Elle ne ressemblait pas à une tueuse. Bien sûr, les apparences pouvaient être trompeuses, il en savait quelque chose. Mais il savait aussi écouter son instinct quand celui ci lui murmurait des choses. Et en cet instant, il lui disait que cette fille, quelle qu'elle soit, n'en avait pas après sa vie. Sous la pluie, observant la jeune femme, le brun réfléchît à toute vitesse, hésitant sur la conduite à adopter. Il n'était pas certain... Pourquoi l'avait elle attaqué si elle n'était pas une tueuse de Black Thorn ? - Qui es tu ? Et qu'est ce que tu me veux ? Lui demanda -t-il soudain d'une voix froide, l'arme toujours pointée vers elle, alors que des gouttes tombaient le long de ses cheveux.
Il en profita pour l'observer un peu mieux malgré l'obscurité. Elle était particulièrement mignonne mais une lueur de folie semblait danser dans son regard. Il posa le pied sur le couteau Suisse qui était tombé au sol près de ses pieds lorsqu'elle avait reçu la balle en pleine épaule, afin qu'elle ne soit pas tentée de faire un nouvel essai avant qu'il ne comprenne à qui il avait à faire. - Si j'étais toi, je répondrais, rapidement. Sinon j'égaliserai tes bras en tirant dans l'autre... Menaça Chris sans la moindre pitié.
Une hallucination, une action défensive effectuée par peur et c'est parti en vrille. Après une tentative de frappe avec un couteau suisse, c'est le sifflement d'une balle qui se fait entendre. Puis un cri de douleur. Ce dernier son, c'est moi qui l'ai émis. Je me suis toujours imaginée à quel point une balle pouvait faire mal en regardant les films mais je ne pensais pas que ce serait encore pire. Le couteau est tombé au sol aussitôt que l'information est arrivée au cerveau. C'est-à-dire tout de suite après m'être prise la balle dans l'épaule, que je protège désormais avec ma main libre.
L'homme pointe encore son arme vers moi avant de se mettre à me questionner. Qu'est-ce que je lui veux ? Mais c'est plutôt à moi de lui poser la question ! C'est un mutant qui a tenté de m'attaquer, moi je me suis juste défendue ! J'aurais mieux fait de fuir encore une fois. Ca m'aurait apportée moins d'ennui. Et puis pourquoi il a un pistolet ? C'est un mutant, il a sûrement des pouvoirs ! Ou alors son arme crache des lasers ou même un liquide verdâtre et empoisonné. Ou pire !
- C'est à moi de te poser la question, l'alien ! Tu m'as attaquée en premier !
Attendez... Si c'est vraiment un alien alors peut-être que son arme lui sert à lobotomiser les gens ! Naaaan je veux garder mon cerveau tel quel, avec mes souvenirs même s'ils sont pratiquement tous moches et déprimants !
- J'espère que ton tir n'est pas empoisonné ou qu'il ne libère pas plein de mini bestioles dégueulasses qui vont prendre possession de moi ! J'voulais juste me défendre !
Et pourquoi je parle à un mutant moi ? Ce serait pas plus logique que je m'en aille ? Si. Ca le serait carrément. Pourtant je perds mon temps à me disputer avec un monstre louche. Peut-être aussi parce qu'il pointe toujours son arme sur moi et que ça me terrifie... C'est aussi un bon moyen de dissuader les gens de fuir. Si je pars au pas de course, il va encore me tirer dessus et cette fois je crèverai sûrement.
Je baisse les yeux sur ma blessure et appuie un peu dessus avec l'index en grimaçant. Ca fait hyper mal mais je veux être sûre qu'il n'y a aucune bête dedans. Ou autre chose de pas net. Je fous même un bout de l'index dans la plaie en gardant ma grimace.
- Beuh... J'vais avoir un trou tout moche à vie maintenant...
Je stoppe mon trifouillage de blessure et regarde ensuite le type, lui râlant dessus. Ouais c'est un ennemi, ouais ce n'est pas prudent de ma part mais je ne suis plus à ça de près. De toute façon je commence à avoir l'habitude de me mettre en danger. C'est ce qui arrive presque tout le temps quand je sors toute seule et que les hallucinations s'en mêlent. La dernière fois, j'ai fini à l'hôpital parce que je me suis jetée sous les roues d'une voiture en voulant sauver une fillette inexistante. Cette fois, je finirai à l'hôpital à cause d'une arme à la con. Ou peut-être même que je vais en mourir...
- T'es vraiment pas net comme mutant ! T'aurais pu garder ton apparence humaine et passer tout droit au moins. J'ai gâché le cadeau que j'voulais donner à mon frère à cause de toi... J'vais devoir le nettoyer et le désinfecter à fond avant de pouvoir le lui offrir.
Ou lui en acheter un autre. Ce sera sûrement plus simple. Et en plus ça lui en ferait un qui serait propre et pas du tout abîmé puisqu'il ne serait pas tombé, ni avec un peu de sang.
Le Corbeau était alcoolisé. Il sentait que son esprit ne resterait pas concentré à fond très longtemps. Et pourtant, cette jeune femme, aussi peu dangereuse qu'elle puisse paraître, dissimulait peut être un assassin ayant tenté à l'instant de l'éliminer. Non... Non, ce n'était pas cohérent ! Un véritable professionnel n'utiliserait pas un couteau Suisse comme arme de prédilection ! Qui était cette fille ?! Que lui voulait elle ?! Mais lorsqu'elle se mit à éviter ses questions en mentionnant des histoires d'alien, Chris la regarda avec un regard mêlé d'incompréhension et de méfiance. Il avait l'impression d'être tombé dans la quatrième dimension. Et de faire face au jeune Barton, inventant des histoires pour faire fuir les autres. - Tu devrais plutôt être heureuse d'avoir un trou dans le bras et non à la tête, rétorqua -t-il lorsqu'elle se plaignit d'avoir un trou dans le bras, à présent.
Mais ses menaces n'arrêtèrent pas l'inconnue de raconter ses histoires à dormir debout. Elle semblait comme perdue dans sa bulle. Seulement cette fois, il ne pouvait pas se montrer indulgent, comme il l'avait fait pour Will. Cette fois, il avait besoin de réponses. Tout de suite ! Son regard se durcît, ses yeux se plissèrent, ses mâchoires se serrèrent, et il s'approcha brusquement de la jeune Thomson. Sans prévenir, il l'attrapa par les cheveux pour la forcer à le suivre: - Je n'ai pas le temps d'écouter tes conneries, ma grande ! Alors de deux choses l'une ! Soit tu me donnes des réponses, soit je vais te les arracher ! Mais dans les deux cas, à la fin de cette conversation, j'aurai obtenu ce que je cherche ! Lui dit il d'une voix dure et autoritaire.
Le duo se dirigea sous une pluie de plus en plus forte dans une ruelle sombre située non loin de là. C'était une impasse: parfait pour un interrogatoire improvisé ! Il força la jeune femme à avancer jusqu'au bout de l'impasse et la jeta au sol sans la moindre compassion, avant de pointer une nouvelle fois son arme vers elle: - Bon... Ici, personne ne viendra nous déranger ! Je répète ma question ! Quel est ton nom, et pourquoi avoir essayé de me tuer ?! Il devait être sûr. Etre sûr que cette fille ne représentait aucun danger pour lui. Voila ce que c'était que de vivre dans la peur en permanence...
Pourquoi ça n'arrive qu'à moi ce genre de rencontre tordue ? Je voulais juste acheter un cadeau pour mon frère, rôder un peu et ensuite rentrer. Résultat, mon cadeau est gâché et sûrement abîmé, j'ai rencontré un type super bizarre et je me suis carrément faite tirer dessus. Il y a des jours comme ce soir où je déteste vraiment ma vie au point de vouloir tout laisser tomber.
Être heureuse d'avoir un trou dans le bras et non dans la tête ? Ben non ! Figure-toi que ce soir j'aurais plutôt préféré l'inverse ! Au moins ça aurait mis fin à mes diverses hallucinations qui me hantent et au risque potentiel que je représente durant mes crises. Enfin trou ou non, je continue sur ma lancée. Moi je suis peut-être folle à lier et bonne pour l'asile, mais lui il n'est pas mieux !
- Mais arrête de me râler dessus ! J't'ai rien fait moi !
Rien à part tenter de le planter avec un couteau suisse...
- Lâche-moi, tu me fais mal et pis on n'est pas chez les pygmées ! T'es qu'un sauvage !
Je le suis à contre-coeur pour éviter qu'il m'arrache la tête. Ce con me tire par les cheveux alors qu'il aurait pu simplement me tirer par le bras. Je n'aurais pas aimé non plus mais ça aurait sûrement été moins douloureux. Lorsqu'il me lâche...non. Ce n'est pas le terme approprié. Lorsqu'il me jette au sol, qui est devenu mouillé à cause de la pluie soi dit en passant, on se retrouve dans une ruelle. C'est sombre, angoissant, je déteste déjà ce lieu. Je veux rentrer...
Je me mets sur les genoux après m'être tournée face au type louche. Il me menace encore avec son arme. Il ne sait rien faire d'autre ? Pourquoi j'ai tenté de le tuer ? Mais je lui ai déjà donné la réponse à cette question ! Il est sourd ou il n'a rien écouté ?!
- Et moi j'te répète ma réponse vu qu'apparemment t'as pas écouté ! Tu m'as attaquée en premier ! Moi j'me suis juste défendue !
J'en ai vraiment marre. Je craque. Les larmes commencent à couler sur mes joues déjà mouillées par la pluie. Hallucinations, violences, blessures. Trop de trucs qui ne m'attirent que des ennuis. Je n'en peux plus. Je n'ai pas assez de force pour supporter tout ça.
- J'm'appelle Lana... Ca y est, t'es content maintenant ?
Le visage dégoulinant d'eau de pluie, il fixa la mystérieuse étrangère avec un regard étrange. Elle ne mentait pas. Il en était certain, à présent. Un flashback apparut soudain devant ses yeux, de cette même fille blonde, se déplaçant dans les couloirs de l'université en uniforme d'étudiante, le croisant sans le voir. Elle était à Indarë, tout comme lui... - Merde... Tu es une Uncured, c'est ça ? Lâcha subitement le brun, plus pour lui que pour elle tandis que son cerveau recollait les pièces du puzzle soudainement. Si tel était le cas, peut être alors l'avait elle attaqué sans faire exprès ? Comment savoir... Le brun serra les mâchoires sous l'effet de la frustration. Elle délirait, et ses réponses n'avaient aucun sens, mais il se mettrait en danger s'il baissait son arme. Toutefois, lorsqu'il posa les yeux sur sa plaie et qu'il vit le sang qui en coulait, il sut qu'il fallait prendre une décision. Sous peu, elle tomberait dans les paumes, autrement. De plus, les larmes coulant sur le visage de Lana accélérèrent la décision de Chris.
Il rengaina son arme après avoir soupiré, puis s'arracha toute la manche droite du tshirt avant de s'approcher de la jeune femme: - Bon sang... Evite d'attaquer n'importe qui avec une lame, la prochaine fois... J'aurais pu te tuer, tu sais ? Ne bouge pas. Il faut que j'empêche le saignement le temps qu'on aille chez moi, sinon tu auras perdu trop de sang. Il fit une écharpe autour de la blessure, mais il vit aussitôt que son misérable bout de tissu ne ferait pas l'affaire bien longtemps. - Bon... Ca tiendra pas très longtemps, commenta -t-il aussitôt d'une voix redevenue amicale. On a intérêt à se dépêcher. Je peux t'aider à soigner ta blessure. Mais il va falloir que tu me fasses confiance, pour ça. Quel merdier... Impossible de rentrer chez soi sans se faire agresser par une planteuse folle...
Le brun regarda l'heure rapidement: les derniers bus ne tarderaient pas à passer. S'ils ne voulaient pas regagner le campus à pied, mieux valait se dépêcher. - Dissimule ta blessure, on va prendre le bus. On doit se dépêcher. L'heure tourne. Et j'aime autant pas regagner le campus à pied. J'ai tout ce qu'il faut pour panser ta blessure chez moi. Mais en attendant, tu vas devoir tenir le coup. Ca va aller ? L'assassin n'avait pas que des armes et des gadgets dans son appartement. Il disposait aussi de tout le nécessaire pour se soigner, au cas où il serait atteint par une balle, ou simplement blessé. Et heureusement, car c'était le genre de chose qui lui arrivait régulièrement...
J’ai craqué. J’ai subi tellement d’ennuis dernièrement que là, je n’arrive plus à les supporter. J’en suis au stade où je laisse tout tomber. Je me suis mise à pleurer en répondant à sa question. Il voulait savoir comment je m’appelle, il le sait maintenant. Il le sait après m’avoir troué l’épaule, tiré les cheveux, traînée dans une ruelle comme une pauvre merde et m’avoir jetée au sol comme l’être pathétique que je dois être. Il vient finalement de comprendre ce que je suis et pourquoi j’ai tenté de l’agresser… Bravo machin ! Tu viens de capter que si j’ai tenté de te planter, ce n’est pas par simple envie ou par plaisir mais juste parce que je suis bonne pour l’asile ! Tout ce merdier juste pour ça… Il aurait dû me demander ça AVANT de me tirer une balle.
- Et alors ? C’est bon, t’es rassuré de savoir que j’attaque n’importe qui juste parce que j’suis une demeurée ?
De toute façon, ça ne change rien au fait qu’il m’a tirée dessus. Que ce soit de la légitime défense, okay. Je n’en doute pas de ça. Ce qui me perturbe le plus c’est...qu’est-ce qu’il fiche avec un pistolet sur lui, bordel ?!
Finalement il a l’air plus serein. Alien étrange. Être rassuré de faire face à une tarée, faut être vraiment bizarre. Je ne vais pas m’en plaindre vu qu’il range son arme. Toutefois lorsqu’il s’approche de moi, je me recule par réflexe. J’ai de quoi me méfier, le mec m’a quand même tiré dessus sans hésitation ! En plus il me fait la morale ! Pour le coup, ça me fait un peu rager quand même.
- Je l’ai pas fait exprès, j’te l’ai dit !! Et pis tu peux parler, moi j’me balade pas avec un flingue sur moi ! J'voulais juste faire un cadeau à mon frère et à cause de toi, j’vais devoir aller le racheter !
Je me calme un peu en affichant une moue blasée, détournant le regard.
- Pis ça aurait peut-être mieux valu de me flinguer. De toute façon au point où j’en suis, c’est pas grave si j’finis six pieds sous terre…
Quand je dis que je suis en train de tout laisser tomber… Même mon envie de vivre disparaît. La preuve, je n’essaie même pas de soigner ma plaie alors que toute personne normale se serait précipitée à l’hôpital. Je n’essaie même plus de fuir alors que mon agresseur s’est vraiment approchée de moi et qu’il s’occupe de me faire un bandage de fortune sur l’épaule. Si je perds trop de sang, je peux mourir ? Je devrais laisser saigner alors.
Tiens...il est amical maintenant ? Pourquoi ? Il veut même me soigner chez lui. C’est louche. Il va sûrement vouloir achever le travail. Ou alors il ne veut pas avoir de mort sur la conscience et il va réellement me soigner.
- T’es marrant, j’ai un trou dans mes vêtements et ils sont plein de sang. Ca va pas être simple de dissimuler quoi que ce soit…
Attends...il veut vraiment me ramener chez lui ? Mais...c’est plutôt à l’hôpital qu’il faut aller en fait ! À la limite, l’infirmerie de l’université. Ils s’en fichent de savoir d’où vient la blessure. Ils savent qu’on a tous les risques du monde de se lever en bonne santé et de finir la journée avec le corps en miettes. Il y a plusieurs étudiants qui sont Uncured justement parce qu’ils ont le don de se foutre dans la merde et qu’ils ne s’en sortent toujours pas. La preuve, j’y suis.
- T’es un type bizarre, sérieusement. Tu veux me buter et ensuite tu veux jouer au docteur ?
Je soupire et tente de dissimuler au mieux la blessure même si je ne suis pas du tout optimiste sur le fait que personne ne verra le sang. Je reviens ensuite sur nos pas et je vais récupérer le couteau que je voulais offrir. Avec un peu de chance, il n’est pas trop abîmé. Je le range dans ma poche sans regarder son état. Je le ferai plus tard. Puis je suis mon agresseur pour aller prendre le bus. Mon frère désespérerait s’il savait qu’Austin me martyrisait et me torturait avant de sortir avec moi, et que maintenant je suis en train de suivre sans broncher un type qui a voulu me buter.
- Pourquoi on ne va pas à l’hôpital au fait ? Ils s’en foutent de savoir d’où vient la blessure, ils sont payés pour soigner. Et ils ont le matos pour retirer une balle surtout. T’en as un toi ?
D’un autre côté, si on ne va pas à l’hôpital et qu’il me soigne mal, j’ai une chance de ne pas survivre et donc de ne plus avoir ou créer des ennuis. Durant la route, je tente encore de dissimuler la blessure. On a de la chance, le soir il y a beaucoup moins de monde dans les bus et en plus, il fait plus sombre alors ça se voit plus difficilement.
Décidément, il les collectionnait. Après Tessa, voila qu'il croisait cette fille, qui l'attaquait à vue simplement parce que... pour quelle raison, d'ailleurs ?! Elle le voyait comme un alien, c'est bien ça ?! Il faudrait qu'il creuse la question avec elle plus tard. Mais pas maintenant, pas sous la pluie, pas alors qu'elle se vidait de son sang. - Pas vraiment, non... Mais on a pas le temps pour ça, maintenant. Dépêche toi, le bus va partir sans nous si on accélère pas le pas. Elle avait pleuré. Encore une pauvre gosse atteinte d'une maladie incurable... Chris ne put s'empêcher de penser à Tessa, et son coeur se serra. Pourtant, cela le poussa à se reprendre. Son histoire avec elle s'était terminée récemment et de façon plutôt abrupte. Certainement pour le mieux, mais cela ne signifiait pas pour autant qu'il avait encaissé les choses de meilleure façon pour autant.
En l'espace de quelques mois, il avait à la fois perdu Lily, Tessa, et sa sécurité à Londres. Black Thorn l'avait retrouvé un mois plus tôt, et la bataille avait été si violente que son visage et son corps en portait encore des blessures très nettes. En fin de compte, plus grand chose ne le retenait ici, à Londres. Il avait déjà entamé diverses procédures dans le but de faire fabriquer plusieurs faux papiers, et il préparait soigneusement son départ. D'ici six à huit semaines, il disparaîtrait de cette maudite ville... - Oui, oui, je sais... Tu l'as pas fait exprès... répéta Chris en traitant Lana comme il traiterait une gosse réclamant une glace. Aussi étonnant que cela puisse paraître, je doute que cet argument passe devant un juge. Cela eût au moins l'avantage de détendre un peu l'atmosphère. - Arrête de dire des conneries... Rétorqua -t-il aussitôt à sa phrase suivante sur un ton un peu plus sombre.
Il se tourna vers elle, et soupira, avant d'ajouter: - Tu me fais penser à quelqu'un que j'ai bien connu... Une jeune femme... Il regarda en direction de l'arrêt de bus, puis: - Allez, viens ! Faut y aller ! Ajouta -t-il en voyant le bus arriver. Lana râla, et Chris ne put s'empêcher de sourire, amusé, malgré la situation dans laquelle ils se trouvaient. - Il y a peu de lumière et les chauffeurs de bus sont peu regardants à cette heure. Fais c'que j'te dis, et tout ira bien. Je sais c'que j'fais, lui dit il d'un ton assuré. Hé, où tu vas ?! Héla -t-il alors qu'elle s'éloignait brusquement pour ramasser le couteau. Rassuré, il soupira en la voyant revenir. Pire qu'une gosse, ou qu'un plat sur le feu. - Parce que si on va à l'hôpital, ils voudront savoir pourquoi tu as pris une balle. Tu as envie d'expliquer que tu "n'as pas fait exprès" aux autorités ? Le monde ne tourne pas comme ça, Lana. Allez grimpe là dedans, ajouta -t-il alors que le bus venait de s'arrêter.
Il suivit derrière elle en la poussant au fond du bus tandis que le chauffeur fixait la route sans faire attention à eux. Coup de chance. Quant au bus, il était presque vide. Le Corbeau poussa doucement Lana dans un double siège vers le fond, et s'assît à côté d'elle. - Je te l'avais dit que ça se passerait bien. Ca va, ca fait pas trop mal ? Il attendit sa réponse, puis murmura: - T'en fais pas, je sais ce que je fais... Je suis tout le temps blessé... Et je ne vais jamais à l'hôpital... J'ai l'habitude... Le trajet se déroula sans encombres. A l'approche du campus, Chris ordonna expréssément à Lana de ne faire aucun bruit. Après quoi, il l'emmena chez lui. La seule chose qui avait changé dans le décor de son antre était la présence de deux photos de jeunes femmes, près de son PC à trois écrans, au fond de la pièce. L'une d'elle était Lily Cullen, l'autre Tessa Buchanan.
Le brun hôta son manteau trempé qu'il jeta sur son fauteuil en cuir près du PC, avant de se diriger, vers la salle de bain, tout en disant à Lana: - Enlève ton pull ! Je vais devoir nettoyer ! Il revint avec une boîte en métal de premier secours de qualité militaire qui lui appartenait, de toute évidence. - Mais ne t'inquiète pas, on a de la chance. La balle a traversé ton bras de part en part sans couper aucune artère. Tout ce que je vais avoir à faire, c'est... recoudre.
Le fait d’être une tarée ne le rassure pas ? Et ben je m’en fiche ! Je lui ai donné la raison de l’agression, il se démerde avec ça. Il est stressant par contre. Juste pour un bus qui pourrait partir sans nous. C’est pas grave, il y en aura un autre plus tard. Moi ce qui me préoccupe pour le moment, c’est totalement autre chose.
- Ca passera toujours mieux que toi qui me tires dessus avec une arme. J’suis sûre que t’as même pas le permis pour ça !
Moi au moins je peux dire que je suis malade. Au mieux on me relâche sans problème avec juste des séances psychiatriques, au pire on m’enferme dans un asile. Je serais jugée irresponsable dans les deux cas.
Des conneries ? Mon abandon total n’est pas une connerie ! Enfin peut-être que si mais il y a une raison derrière tout ça ! En plus il me compare à une autre. Je ne sais pas comment je dois le prendre pour le coup. Vu la tronche qu’il tire, je dirais que je ne suis pas censée le prendre comme un compliment. Et bizarrement, il retrouve le sourire en m’entendant râler. Ce type est vraiment trop bizarre. Néanmoins il marque un point. Peu de lumière, les chauffeurs sont plus concentrés sur la route que sur les passagers et au u de l’heure tardive, il n’y aura normalement pas grand monde.
Avant de réellement nous mettre en route, je veux toutefois récupérer le couteau suisse. C’est donc ce que je fais en ignorant la question de l’autre dingue puis je le rejoins peu après. J’en profite aussi pour lui poser une question plutôt logique. Pourquoi aller chez lui au lieu de l’hôpital ?
- Bah ouais. Moi j’serais juste jugée irresponsable parce que j’suis une demeurée malade. Ils auraient juste à appeler l’institution pour avoir la confirmation de mon état.
Je monte alors dans le bus et vais m’installer au fond. Au moins le véhicule est pratiquement vide alors niveau discrétion, c’est super facile.
- Ca fait un mal de chien…
Forcément je me suis prise une balle. Ce n’est pas le truc qui s’atténue aussi rapidement. Puis j’ai facilement mal de toute façon. Ce n’est pas comme si j’avais beaucoup de peau sur les os. Surtout en ce moment. Le fait qu’il se blesse tout le temps n’est pas hyper rassurant en soi. Ca veut dire qu’en me soignant, il risque de se blesser en échange ?
Lorsqu’on arrive enfin près de l’université, je suis les ordres du type même si je ne comprends pas pourquoi il veut que je reste silencieuse. Ce n’est pas comme si j’avais réellement quelque chose à dire. Je le suis alors qu’il m’emmène à sa résidence et...j’ai envie de fuir. Si je suis dans une résidence en solitaire, ce n’est pas pour des prunes ! Et là, je me vois obligée de suivre quelqu’un dans sa chambre ! Je n’ai pas envie de rester. J’ai encore trop de risques de l’attaquer ou de faire n’importe quoi…
J’enlève timidement ma veste en observant les lieux pendant que lui il va à la salle de bain. Je retire ensuite mon pull sans broncher avant de m’asseoir sur une chaise tout en remontant la manche de mon t-shirt. Je regarde la blessure et grimace un peu alors que je tire un peu sur le bras dans l’espoir de mieux voir l’état. Très mauvaise idée. Ca fait encore plus mal. En plus c’est inutile parce que j’avais oublié le bandage de fortune qui a été fait.
- T’as au moins de quoi endormir la zone ?
Non parce que vouloir me recoudre c’est bien. Mais s’il n’a pas de technique pour m’endormir, je vais hurler. Ou alors il faudrait me faire picoler. Il paraît que quand on est saoul, on sent beaucoup moins les douleurs. Je ne sais pas si c’est vrai mais c’est un coup à tenter. Et puis j’oublierais mes problèmes l’espace de quelques heures aussi.
- Ou de l’alcool ! Y a qu’à me faire boire jusqu’à ce que j’sois trop ivre pour ressentir quoi que soit !
Je retire le bandage de fortune, ignorant royalement le fait que l’hémorragie reprend puisqu’elle n’a plus rien pour l’en empêcher. Déjà que ça ne s’était pas totalement stoppé...c’était juste atténué. Là il n’y a plus d’obstacle.
- C’est quoi ton nom au fait ? Parce que moi je t’ai dit le mien mais j’connais toujours pas le tien. Pour le moment tu restes « Le type tordu qu’a voulu me buter ».
C’est vrai quoi ! Lui il sait comment je m’appelle mais moi j’en ai pas la moindre idée de son nom. Je sais que j’ai très peu de risque de le recroiser – du moins en dehors des couloirs de l’université – mais c’est plus équitable si moi aussi je sais comment il s’appelle. Enfin après, s’il veut que je l’appelle encore le type tordu, le gars chelou, ou un autre surnom peu sympa comme ceux-là, pour moi il n’y a pas de souci.
- Non, je prévois juste de t'arracher le bras, et de le remplacer par un implant cybernétique, lui répondit le brun depuis la salle de bain, avec un sourire amusé en fixant son propre regard dans le miroir, malgré la situation. Il prépara tout ce qu'il fallait, attrapa plusieurs serviettes, et se dirigea à nouveau dans la chambre avec sa boîte de qualité militaire, qu'il posa sur une chaise près du lit. - Non, viens t'assoir sur le lit, ajouta -t-il aussitôt, alors qu'il étendait une grande serviette bleu marine sur celui ci, pour le protéger du sang. Je ne veux pas avoir à t'attraper si tu perds connaissance à cause de la douleur pendant l'opération. Ce qui a de bonnes chances d'arriver, je le crains. Tu vas t'allonger, ce sera plus pratique pour moi...
Il prépara alors une seringue, puis attendit que Lana s'installe, et mit des gants visiblement stérilisés qui étaient présents dans la boîte en métal. Tout le nécessaire pour opérer, apparemment. - Bon, ne bouge pas. Je vais te faire une piqûre pour endormir la zone... lui murmura -t-il en se baissant vers son bras. Il enfonça l'aiguille, et injecta l'anesthésiant, avec une certaine expertise. Il était habitué à le faire sur lui, de toute évidence. Il la retira, puis la déposa dans la boîte métallique. Le temps qu'il se retourne, Lana s'était déjà endormie profondément, et le regard du Corbeau se plissa légèrement.
Oui, il lui avait menti. Ce n'était pas une piqûre pour anesthésier localement, mais bien pour l'anesthésier totalement. Il avait jugé qu'ainsi, ce serait plus pratique de l'opérer, et que de toute façon, elle souffrirait beaucoup moins ainsi. Sans attendre, il s'attela à désinfecter puis recoudre ses blessures, chose qu'il avait appris à faire, et fait des nombreuses fois par le passé, également. Puis, lorsqu'il eût terminé, il lui fit un bandage, et ôta ses gants. Après quoi, il posa une main sur son front pour vérifier sa température. Tout allait bien, elle dormait profondément. Satisfait, un sourire ourla les lèvres du Corbeau, et il nettoya son matériel avant de le ranger à nouveau. Il prit ensuite une douche afin de se nettoyer, puis se changea, et déploya le lit de fortune qui serait utilisé par la suite lorsque Lily venait dormir ici. Il s'y allongea, et s'assoupît pendant quelques heures.
Il fut néanmoins le premier à se réveiller. Si l'anesthésiant s'était désormais dissipé au petit matin, la jeune Thomson avait eu une nuit éprouvante, et elle récupérait toujours de son opération. Le brun ne fut pas inquiet qu'elle soit toujours profondément endormie. Il se leva, s'alluma une cigarette et commença tranquillement à préparer un petit déjeuner pour deux après avoir un tout petit peu levé les volets pour laisser filtrer un peu de lumière. Il ne voulait pas la réveiller trop vite, non plus. Chris n'était pas un cordon bleu. Un assassin n'avait pas besoin de l'être. Il tira de quoi faire des tartines, et prépara doucement, en se disant que peut être, l'odeur allait tirer la jeune femme de son sommeil réparateur...
Il… Il veut vraiment m’arracher le bras ? Il plaisante, hein ? Il ne dit ça que pour me foutre les jetons et se moquer de moi, hein ? Je ne veux pas qu’il touche à mon bras au final. Je crois que je vais juste me passer de ses soins et rentrer à la résidence. Tant pis pour la plaie.
- J’suis pas sûre d’avoir très envie d’être soignée tout à coup…
Je n’en avais déjà pas spécialement envie avant, maintenant j’en ai encore moins envie. Il revient de mon côté avec tout un attirail qu’il pose près de son lit. Lorsqu’il me demande de m’asseoir plutôt sur le plumard, j’hausse un sourcil. Il veut me démembrer totalement ou quoi ? Ah non. C’est juste au cas où je perdrais connais… IL VA REELLEMENT M’ARRACHER LE BRAS EN FAIT !!!
- Tu vas vraiment m’arracher le bras ?! Mais j’veux le garder moi ! T’es vraiment obligé de l’enlever juste pour une balle ?
Je suis certes à l’université mais je n’ai pas option criminalité hein. Ni médecine. Ni sciences… De toute façon j’avais que des mauvaises notes dans cette matière la plupart du temps. Et des mauvaises notes partout en fait… Je n’arriverai jamais à trouver un job au final. Non seulement je suis une folle qui voit et entend des trucs inexistants mais en plus je suis stupide. Personne ne voudra de ça dans son entreprise… Ah ! Je peux faire de la télé-réalité. Ils sont tous débiles dans ces trucs. Sauf que je n’aime pas la télé-réalité…
Pendant que mon cerveau divague encore, je me suis quand même installée sur le lit. Je m’y suis même allongée. Et Chris me dit un truc mais je n’ai pas du tout suivi. Je divague encore beaucoup trop dans mes théories foireuses, mes pensées stupides et mes espoirs vains. Et puis...plus rien. Le noir total.
Un long moment d’inconscience qui dure encore et encore. Je ne sais pas combien de temps est passé mais lorsque je rouvre les yeux, il y a du soleil qui s’incruste dans la pièce. C’est le jour ? Mais...je croyais pourtant être arrivée la nuit. Je m’assieds sur le lit en me frottant les yeux puis regarde autour de moi. Je suis toujours dans la chambre, y a juste un lit rajouté… Wait… Un lit rajouté ? Je suis en train d’halluciner ? Je me lève et m’approche du lit doucement. Et puis je tâte le truc. D’abord avec la main. Puis en m’asseyant dessus. Bon. Je ne passe pas à travers donc c’est bien réel. Et l’autre – ouais parce que je viens de tilter qu’il ma toujours pas dit son nom le salopiaud – il est où ? Ben en train de préparer à manger apparemment.
- J’ai été longtemps dans les choux ?
Sans doute oui. Pour passer de la nuit au jour, il y a obligatoirement plusieurs heures. Mais combien ? Je ne sais même pas quelle heure il est. Et… Oh c’est vrai, mon bras ! Il est encore là ?! OUI !! Il ne l’a pas arraché. Sauvée ! Sagouin, il se fichait vraiment de ma tronche en fait...
Tranquillement, clope aux lèvres, le brun prépara une autre tartine tandis qu'il en dévorait une au miel à côté, pour son plaisir personnel. Il fit aussi chauffer un peu de lait pour se préparer un chocolat chaud. Ne sachant pas ce que Lana buvait ni quand elle émergerait, il préféra éviter de faire à boire pour deux. C'est alors qu'il entendit sa voix, et fut étonné qu'elle soit déjà réveillée. Il pensait qu'elle dormirait encore une demi-heure, voire une heure. - Environ neuf heures, annonça -t-il tranquillement avec un petit sourire tout en continuant à préparer à manger. Petit déjeuner ? Il posa alors son couteau à beurre et s'approcha de sa casserole pour constater que son lait était prêt. Il le versa alors dans une tasse, et y ajouta du chocolat en poudre, et un sucre avant de tourner le tout. - Comment va ton bras ? Tu bois du chocolat ? Ajouta -t-il alors en regardant la tasse, prête à être bue.
Il avança les quelques tartines qu'il avait déjà préparées et mises dans une assiette vers la jeune fille, puis: - Tiens ! C'est pas de la grande cuisine, mais pour déjeuner... Il faut que tu reprennes des forces... Chris surcompensait un peu. Il se sentait mal de lui avoir tiré dessus, même si ce n'était pas de sa faute à l'origine. Avoir tiré dans le bras de cette jeune fille ne lui plaisait pas, même si elle était de toute évidence complètement cinglée. Un étrange silence retomba entre eux alors qu'il recommençait à faire des tartines, et sa voix s'éleva à nouveau dans la pièce, pour briser ce silence: - Chris... C'est comme ça que je m'appelle. Et je suis étudiant à l'université d'Indarë. Tu es dans mon appart', là, et sur le campus d'Indarë.
Il déposa à nouveau le couteau à beurre, se tourna lentement vers elle, et lui sourît doucement: - Je suis désolé pour ce qui s'est passé hier soir... Je me doute que tu ne comprendras pas, mais j'ai de bonnes raisons d'avoir réagi comme je l'ai fait. Et pour ta propre sécurité comme pour la mienne, j'ai besoin que tu oublies tout ce qui s'est passé. C'est d'accord ? C'était une enfant. Si extérieurement, elle avait un corps d'adulte, il lui fallait la traiter comme une enfant car c'était ce qu'elle était, en réalité... - Tu vas manger, prendre une douche, et je vais refaire ton bandage, histoire de vérifier l'état de ta blessure. Puis je te noterai ce qu'il te faudra te procurer à la pharmacie pour refaire tes bandages régulièrement, et à quelle fréquence les refaire. Si tout va bien, ton bras récupèrera très bien, ne t'inquiète pas. L'opération s'est bien passée.
Il utilisait une voix douce et pleine de patience, comme le ferait un adulte avec un enfant. Il y mettait beaucoup d'effort, car il n'y était pas du tout habitué...
J’ignore combien de temps je suis restée dans les choux. Une chose est sûre, ça a duré plusieurs heures. Je me suis endormie durant la nuit et en ouvrant les yeux, je découvre que c’est déjà le jour. Le plus important pour moi reste mon bras. Toujours présent. Tant mieux parce que je me voyais mal vivre sans. J’en ai besoin pour écrire, faire la cuisine et plein d’autres trucs. J’essaie de me remettre un peu les idées en place et questionne un tout petit peu le type qui s’est occupé de me soigner. Neuf heures ? Ah ouais quand même… Ca fait pas mal d’heures d’inconscience.
- Ah ! Euh...oui.
Je ne dis jamais non à un petit-déjeuner. Et puis j’aurai plus de faciliter à récupérer si je me nourris. D’un autre côté, je ne suis pas vraiment sûre d’avoir envie de me soigner correctement. J’observe mon soigneur avec attention pendant qu’il continue la préparation du petit-déjeuner. Cette fois il a l’air de s’occuper de la cuisson du lait. Je le regarde donc faire en rêvassant encore un peu. Mon cerveau n’est pas encore très réveillé alors quand il me pose les questions, il me faut toujours un petit temps de réaction.
- Hein ? Le… Ah oui. Il me fait un peu mal mais ça a l’air d’aller. ‘Fin j’crois… Et euh ouais j’veux bien peu de chocolat chaud si t’en as encore. Ou du jus d’orange.
Je ne suis généralement pas difficile pour les boissons. Surtout le matin. Un chocolat chaud ou froid ou un jus de fruit quelconque et ça me suffit. Je m’assieds sur une chaise et entame une tartine sans broncher. Que ce soit de la grande cuisine ou non, je m’en fiche. Ca reste de la nourriture et tant que c’est bon, c’est le plus important. Puis une tartine reste une tartine, peu importe qu’elle soit servie dans un restaurant cinq étoiles ou dans un appartement.
Je l’écoute ensuite se présenter. Enfin. Il ne m’a jamais dit son nom de toute la soirée alors qu’il m’avait maltraitée juste pour connaître le mien. Et là, il dit enfin comment il s’appelle. Ben c’est le moment hein ! Bon. Si je comprends bien, on étudie au même endroit. Enfin...c’est plus juste de dire qu’on va étudier au même endroit. La seule différence est que lui il peut loger aux dortoirs alors que moi je reste aux résidences sécurisées.
- J’vais être à l’université à la rentrée. Pour le moment je ne suis qu’aux résidences, le temps de m’habituer aux lieux...et parce que je ne peux pas vraiment rentrer chez moi…
Pendant que je mange, j’écoute ses excuses et surtout j’essaie de comprendre pourquoi il m’a tirée dessus sans réfléchir. Déjà qu’est-ce qu’il fiche avec une arme à feu ? Il est sûrement un Uncured. Un criminel. Un type envoyé à Indarë pour étudier dans un milieu plus adapté qu’une prison. Pourtant même si j’écoute ses explications, je ne comprends rien. Je ne sais toujours pas ce qui l’a poussé à me tirer dessus.
- Bouarf t’en fais pas, même si j’le racontais personne ne me croirait. Sérieusement… En sachant que j’ai régulièrement des hallucinations, tu me croirais toi si j’te disais qu’un étudiant m’a tirée dessus ? Sûrement pas. Tu penserais comme tous les autres que j’ai juste halluciné encore une fois et que tout ça n’a été que le fruit de mon imagination.
C’est pour ça que maintenant je ne dis plus rien dès que j’ai un problème. Je laisse couler. Une agression ? Passée sous silence. Des brimades ? Passées sous silence. Un coup de feu ? Il sera passé sous silence aussi. Une envie de tout laisser tomber et de m’enterrer pour les cents prochaines années ? Encore et toujours passée sous silence. Sauf hier, j’ai eu un instant de faiblesse. Bref il est donc tranquille par rapport à cette histoire. Rien ne sortira de ma bouche parce qu’à quoi bon raconter ça à des gens alors que je suis connue pour imaginer des trucs inexistants…
- T’es marrant, j’ai pas de vêtements de rechange. C’est plus simple si je me douche plutôt dans ma résidence.
Et j’ai totalement zappé l’histoire de la blessure. Au fond qu’elle soit propre ou infectée, je m’en fiche un peu. Je veux juste éviter de blesser d’autres gens.
- Ah…
Merde. Je viens d’y songer. Je suis censée prendre un traitement. Pourquoi je pense toujours à ces trucs quand c’est déjà trop tard ? Ca me saoule...
- Mon traitement est à la résidence… Je l’ai pas pris hier…
Et je pense que je vais aussi le zapper aujourd’hui. J’en ai marre de dépendre de ce truc pour éviter d’avoir trop d’hallucinations. En plus il ne fait même pas réellement effet. Ou alors il n’est pas assez fort. Heureusement que je n’ai aucun cours durant cet été. Ca me permettra de rester tranquillement dans mon coin, isolée du monde. Pour le moment, je me contente de terminer de prendre le petit-déjeuner.
- T’es plutôt attentionné pour un type qui a voulu me buter. T’es étudiant en médecine ou un truc comme ça ? Tu vas devenir expert scientifique comme dans les Experts : Miami ?
Oui bon il y a une différence entre séries et réalité mais ils ont bien dû s’inspirer de méthodes réelles pour faire un truc cohérent. Surtout quand la série est censée se passer dans le présent et non dans le futur.
Lorsque le brun lui tendit ses tartines, Lana lui demanda quelque chose à boire, et le brun se tourna aussitôt vers le plan de travail, cigarette toujours aux lèvres: - Hm, moui, ça devrait pouvoir se trouver, t'en fais pas, lui dit il alors que lui même s'était préparé un chocolat chaud juste avant. Il s'exécuta donc, et en prépara un autre pour la jeune femme. Mais alors qu'il lui préparait, il apprit une information qui le fit tiquer un peu: - Pourquoi est ce que tu ne peux pas rentrer chez toi ? Est ce que c'est lié à ces visions que tu as ? Le dos tourné à la jeune Thomson, il acheva son chocolat chaud, puis se tourna à nouveau et le lui tendit finalement en le posant sur la table: - Et voilà ! Un chocolat chaud, un ! Lui dit il avec bonne humeur avant de s'adosser au plan de travail en prenant sa propre tasse pour boire un peu de lait chocolaté.
Elle lui annonça alors qu'elle n'avait pas de vêtements de rechange, ce à quoi le brun fronça légèrement les sourcils: ce n'était pas faux... - C'est vrai, mais tu dois absolument nettoyer ta plaie, sans quoi ça pourrait s'infecter et ce serait beaucoup plus emmerdant... Bouges pas de là ! Lui dit il en déposant sa tasse et en s'approchant de son placard. Il fouilla dans ses affaires et tira un de ses propres tshirt, et le jeta sur son lit. - Tu mettras ça. C'est trop grand pour toi, oui je sais, mais ça n'a pas grande importance, c'est un tshirt. Et mieux vaut ça que de te trimballer avec ce haut déchiré et tâché de sang. On va s'adapter, compte tenu de la situation...
Soudain, il leva vivement les yeux en direction de la jeune femme: - Ton traitement ?! Répéta -t-il alors, avec une teinte inquiète dans la voix. T'es en train de me dire que tes hallucinations vont s'accentuer dans les heures à venir, c'est ça ?! Lana était déjà dans un sale état la veille au soir. Si son état devait empirer dans les heures à venir, Chris ne pouvait pas décemment la laisser rentrer seule. Ce serait trop dangereux, non seulement pour elle, mais aussi pour lui, en fin de compte. Il allait peut être devoir la raccompagner lui même et veiller à ce qu'elle arrive à bon port, saine et sauve... Enfin... Surtout sauve, en fait... - Bon, finis de manger et files sous la douche ! Je vais mettre au propre les instructions pour le bandage, histoire que tu saches quoi faire une fois que je ne serai plus là...
Le brun s'installa à son bureau et se mit à écrire rapidement des instructions à son PC pour la jeune femme. C'est alors qu'elle s'adressa à nouveau à lui, et le fit sourire. - Non ! Non, désolé de te décevoir... En fait, je fais des études de musique et de sport, lui répondit il en faisant un signe de tête dans un coin de la pièce. La jeune femme put alors voir déposé à cet endroit là l'écrin d'un violon, soigneusement posé contre le bureau, puis des gants de boxe et un casque de protection jetés négligemment non loin, ainsi qu'une raquette de squash, rangée dans son étui, et elle aussi déposée contre le bureau. - Mais ne t'en fais pas, mes instructions fonctionneront très bien, malgré tout, ajouta -t-il avec un clin d'oeil complice.
Le brun s'éloigna dans la salle de bain et revint avec la trousse de premier secours. Il extirpa lentement des ciseaux, puis: - Bon... allez, voyons quelle tête a ta blessure... Fais voir ton pansement... Il découpa avec précaution le bandage, et le retira, avant qu'un sourire plutôt satisfait n'ourle ses lèvres: - Ok... Ca se présente plutôt bien. Vas sous la douche, nettoie tout ça avec douceur, et on refera le bandage. Finalement, la jeune blonde fila sous la douche et Chris termina ses instructions avant de les imprimer au propre grâce à son imprimante. Il déposa ensuite le document sur la table, puis attendit que Lana revienne tout en préparant le matériel qui allait lui servir à refaire le pansement.
The Wiesel Den 
