Si tu n'échoues jamais... [Timaé]

Si tu n'échoues jamais...

Cette école, je vous jure... Il n'y a pas milieu plus miséreux que celui-ci. Les professeurs qui y enseignent sont dénués d'intelligence. La plupart des élèves qui y passent sont inintéressants au possible. Et les cours qui y sont donnés me donnent, vulgairement dit, la gerbe. Je ne sais pas pourquoi, ni par quel miracle, je ne me suis pas encore barré de ce trou à rats. Tout, absolument tout est pourtant fait pour que je déguerpisse au plus vite, que je prenne mes jambes à mon cou et que j'abandonne définitivement ma vie londonienne qui me donne plus de l'urticaire qu'autre chose. Un dragueur n'arrête pas de me coller aux baskets, un grand sportif, avec qui je partage ma chambre, ne cesse jamais de me chambrer et une imbécile de prof dédiée à ma spécialité fait véritablement tout ce qui est en son pouvoir pour me mettre des bâtons dans les roues ou me pousser au dégoût vis-à-vis de ma passion. Peut-être que ça les amuse de me voir m'énerver. Peut-être qu'ils n'attendent que ça. Après tout, ils ont rapidement dû remarquer à quel point j'étais sensible à la provocation et en jouent allègrement, que ce soit pour, par la suite, se taper des barres entre potes, essayer de me pousser à bout ou tout faire afin que finisse par enfreindre le règlement.

La seule personne que je supporte réellement, c'est Roxanna. Ayant tous les deux commencés sur de mauvaises bases à cause d'un quiproquo assez ridicule, en grande partie à cause de mon mal-être qui a fini par détenir des répercutions sur le sien, notre relation s'est, avec le temps, vachement améliorée. Certes, elle est bien plus jeune que moi, mais je suis certainement le mieux placé pour défendre, à la force de mes mots, que la différence d'âge n'est et ne sera jamais une réelle barrière. Ceux qui se servent de cette excuse ne sont que des gros cons au même titre des sexistes et des machos.

D'ailleurs, en parlant de la petiote, je la vois au loin, dans un coin de la cour réservée à l'ISS, être mêlée à un groupe de pétasses qui ne lui ressemblent aucunement, que ce soit sur le plan de la maturité ou celui des valeurs qu'elles peuvent prôner. Je m'avance donc discrètement, piqué par la curiosité de ce qu'une bande de bouffonnes dans leur genre peut bien vouloir à ma nouvelle protégée. Oui, parce que je ne m'entends pas simplement bien avec Roxanna. J'ai aussi décidé de la prendre sous mon aile, qu'elle soit assez forte pour se défendre ou non, par simple volonté de lui éviter plus de tracas qu'elle n'en a déjà avec elle-même, avec ce fardeau qu'on lui a collé à la peau dès la naissance. Même moi j'ai pu être assez stupide pour croire qu'être doté d'une intelligence irréprochable puisse s'avérer être un atout de taille alors qu'en fait, ça n'est rien d'autre qu'un de ses cadeaux empoisonnés desquels on n'arrive jamais vraiment à se débarrasser. Je tends l'oreille et mon sang ne fait qu'un tour rien qu'à entendre des ricanements mesquins dignes des parfaites salopes qu'elles sont. Et lorsque je vois Roxanne s'avancer vers avec une drôle de tête, je ne peux m'empêcher d'intervenir quand bien même je ne sais absolument pas pourquoi elles rient de leur côté.

- Hé, les pimbêches. Si vous voulez vous moquer de quelqu'un, assurez-vous au moins de vous attaquer à une personne de votre niveau. Oh, non, mais c'est vrai, il n'y a personne d'aussi bas que vous. Maintenant dégagez avant qu'une profonde envie de vous faire ravaler vos petites dents de castor ne me prenne.

Je fronce les sourcils pour leur faire comprendre que je ne suis pas là pour plaisanter tout en leur jetant un regard noir à en faire frissonner plus d'un de terreur. Comme quoi, la taille n'est pas toujours un élément obligatoire servant à l'intimidation et j'en sais quelque chose. Vous ne pensiez tout de même pas que c'était Dan qui dictait sa loi dans la chambre ?! C'est bien mal me connaître. Je finis par prendre Roxanna par l'épaule en l'emmène loin de ces filles qui me tentent dangereusement de commettre un meurtre. Étrangement attendri, en parfaite opposition au timbre de voix que je viens d'employer, je penche la tête sur la petite adolescente, muni d'une question. J'ose espérer pour les autres qu'elles n'ont pas été l'emmerder sinon ça va barder.

- Que se passe-t-il, Roxy ? Je t'écoute. Ne me dis pas que ces gamines te cherchent des noises sinon je vais directement les trouver.

Codage par Libella sur Graphiorum

Si tu n'échoues jamais...

Alors... comment dire... Celle-là, je ne l'ai pas vu venir ! Alors que nous nous isolions de ces insupportables gamines, contre lesquelles je me défoulerai bien en balançant moult insultes, la petite Roxy, se trouvant dans un état que je n'ai tout simplement jamais connu venant de sa part, m'avoue, sans pression et sans fioritures, qu'elle est amoureuse de moi. Pardon ?! Elle, amoureuse de moi ?! De quelqu'un, déjà, ça m'étonne, mais alors de moi... j'avoue hésiter entre croire à une mauvaise blague ou prendre l'information très sérieusement. Et puis, en prenant le temps de réfléchir à la situation, la façon qu'elle a d'éviter mon regard ou de triturer ses doigts ne donne en rien la sensation qu'elle joue la comédie. Et avec un minimum de bon sens, connaissant cette fille, ce n'est pas vraiment son truc de jouer sur ce genre de choses en mentant ou en s'inventant des histoires pour s'amuser ou embêter quelqu'un.

Je demeure donc stoïque et un peu sous le choc de cet aveu qui n'a tout bonnement pas fait partie des éventualités face auxquelles je m'étais parées. Il faut dire aussi que cette année scolaire est plus qu'un chamboulement du côté des sentiments et émotions, qui se jouent bien trop souvent de moi ou de ceux qui m'entourent. Déjà que je ne suis pas vraiment un modèle de self-contrôle, les situations de ce genre ne sont réellement faites pour m'aider à me maîtriser.

Ne sachant pas trop comment réagir à ce qu'elle me dit, j'hésite longuement à la réponse que je pourrais lui donner sans la brusquer. Ce n'est encore qu'une enfant, malgré la maturité dont elle fait preuve, et elle est bien la seule avec qui je tente un maximum d'étouffer mes ardeurs. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais je me sens plus comme étant son protecteur ou une sorte de grand-frère. Mais un petit ami... Trop de paramètres entrent en conflit pour que je puisse accepter aveuglement cette proposition ou pour que je puisse me permettre de lui rendre, ne serait-ce que le dixième de ce qu'elle attend peut-être de moi.

Pour commencer, les filles ne sont pas du tout ma tasse de thé et ça, ça n'est nullement quelque chose que je contrôle. Ensuite, au-delà du fait qu'elle ne possède pas les atouts requis pour pouvoir passer l'étape de la validation ou pour attiser un quelconque intérêt de ce côté-là, il y a Dan...

Eh oui... je suis bel et bien actuellement en couple avec Dan Maxwell, ce petit con avec qui je me chamaille depuis le début de l'année. Ne me demandez pas pourquoi, ni comment s'est arrivé étant donné que cela ne regarde les principaux intéressés, c'est-à-dire lui et moi et personne d'autre. Seulement, vis-à-vis de ces abrutis d'amis, de sa "popularité", mais surtout de ses parents, notre relation demeure cachée. Il m'est donc impossible de me défendre avec ça envers la jeune Roxanna sous peine de mettre en péril notre petit secret. Bien que je sois quasi certain qu'elle le garderait jusqu'à sa tombe, je ne préfère pas prendre le risque de tout faire exploser simplement parce que j'aurais malencontreusement laissé échapper cette anecdote croustillante.

- Oh... Roxy, je...

Tout en posant une main sur son épaule, je soupire, embêté tout en m'efforçant, néanmoins, de lui faire face et de ne pas la fuir du regard par honte ou par crainte de lire dans son regard de la tristesse ou de la déception. Bordel, pourquoi faut-il que ça soit toujours sur moi que tombent ce genre de choses ?! Il faut désormais que j'explique à une jeune fille entrée en pleine adolescence que je ne saurai jamais lui rendre la pareille à cause d'une histoire d'incompatibilité sexuelle. C'est... gênant... pire, c'est dérangeant. Moi qui ne crains pourtant pas de blesser les autres, avec elle c'est différent.

- Écoute, je... je suis très flatté par ce que tu me dis, là, Roxy, seulement...

Allez Timaé, tu peux le faire ! Déglutis un coup et dis-lui sincèrement ce que tu as sur le cœur. Dans le fond, à quoi ça servirait de lui mentir et de la mener en bateau, mise à part ne pas être toi-même et d'autant plus la blesser ? Fuir n'est certainement pas une option. Il faut qu'elle sache, il faut qu'elle comprenne que je ne suis pas en capacité à lui répondre favorablement.

- ... Seulement, je suis homosexuel... Tu comprends donc qu'il est difficile pour moi de pouvoir te rendre les mêmes sentiments.

Je soupire une nouvelle fois, mes doigts se resserrant automatiquement sur son épaule, sacrément gêné par tout ça. On peut dire que c'est une première, pour moi, de "briser le cœur" d'une personne, qui plus est d'une fille que j'apprécie plutôt bien. Espérons sincèrement que l'expression précédemment utilisée ne sera pas d'application parce que j'éprouverai énormément de difficultés de retourner auprès d'elle en sachant que je lui ai fait du mal...

Si tu n'échoues jamais...

Quoi de plus difficile que de devoir volontairement assumer le fait d'avoir potentiellement anéanti le cœur de certainement l'une des personnes que l'on respecte et que l'on chérit le plus dans cette école ? C'est ce que je suis en train de vivre et croyez-moi que ça n'est pas une partie de plaisir, loin de là.

Alors que mes mots ont été prononcés et que le silence le plus lourd à porter se répand au sein de la conversation dorénavant terrée dans le mutisme, je me sens, pour la première fois, très mal à l'aise face à une situation qui, désormais, n'est plus sous mon contrôle.

Quelle va-t-être la réaction de la jeune Roxanna toujours plantée devant moi ? Quels gestes ou quels mots deviendront ce qui consiste être sa réponse à ma négation ? Je m'impatiente de le savoir au même titre que je la redoute pleinement. Au final, même si j'ai hâte de le découvrir et quand bien même je l'appréhende fortement, peu importe ce qu'il pourrait se produire, je m'assurerai d'être présent pour elle ou, dans le cas contraire, de ne plus jamais la croiser au risque de malencontreusement remuer un couteau que j'ai dû, à contre-cœur, planter en plein dans sa poitrine.

J'ai peut-être l'air d'être celui qui se trouve être le moins calé en sentiments, mais moi aussi je sais ce que c'est de tomber amoureux, de souffrir, d'être triste ou carrément perclus de douleur face à une situation sur laquelle on n'exerce aucun contrôle et pourtant qu'est-ce qu'on aimerait en avoir. C'est là, placé devant nous, à la fois si proche et si loin, mais au moment où on tend la main et que nos doigts semblent s'apprêter à frôler l'objet de notre convoitise, celui-ci nous échappe, nous nargue ou parfois disparaît complètement.

Je les vois, ses poings qui se resserrent. Je la perçois, cette timide et silencieuse larme qui s'écoule sur sa joue. Et je m'en veux terriblement. Pas comme ça. Pas à elle. Pas maintenant. Concrètement, je ne sais plus où me placer, mais surtout, je ne sais pas quoi faire. Lui caresser la tête en lui disant que tout ira bien et que je serai toujours là pour elle ? Ça n'est franchement pas la meilleure idée. L'enlacer ? C'est pire... M'en aller ? Hors de question. Il n'est pas dans mes habitudes de fuir mes problèmes, qu'ils aient été causés par mes soins ou non et en l'occurrence, je trouverais ça tellement lâche et irrespectueux de l'abandonner ainsi au milieu de la cour juste après qu'elle se soit, pour ainsi dire, piqué le doigt en s'étant essayée à la cueillette d'une rose.

Ma main posée sur son épaule resserre sa prise alors que je déglutis, mal à l'aise, incertain et presque aussi affecté qu'elle, me faisant véritablement violence pour ne pas me fondre dans des excuses qui n'auraient peut-être d'autre effet que d'empirer la situation. Ça serait indirectement lui rappeler à chaque prononciation d'un "désolé" l'impossibilité d'une réciproque qui n'a jamais été à l'ordre du jour.

- Roxy...

Son prénom. Enfin, le surnom que je lui donne est murmuré, quasiment inaudible. Un murmure au sein duquel il n'est pas difficile de dénicher une pointe d'angoisse, mais aussi et avant tout une sorte de peine partagée avec la malheureuse. Si l'événement n'est pas facile à vivre pour elle, il l'est d'autant plus pour moi qui me retrouve à devoir subir les conséquences de quelque chose échappant totalement à ma volonté hormis celle de rester sincère en toute circonstance, même les plus délicates.

Mais alors que je m'apprête à réitérer l'opération en y mettant un peu plus de voix ou que je m'attends à ce qu'elle fonde en larmes, son visage se relève, les yeux écarquillés, brillants de mille feux. Après quoi, elle chuchote quelque chose que j'ai du mal à comprendre en guise d'accompagnement à un frottement de ses yeux humidifiés par les émotions.

Puis, elle me pose une question, ressassant le passé en me demandant si je me souviens de ses paroles lors de notre première rencontre où, effectivement, nous avions échangé vis-à-vis de son malheur lié à sa presque impossibilité de l'échec. Et soudainement, son visage s'illumine, regagnant une certaine gaieté dans un sourire que j'ai, au début, du mal à déchiffrer. Joue-t-elle à la forte ? Agit-elle de la sorte dans l'unique but de ne pas m'enterrer plus bas que terre en me laissant dans un puissant sentiment de culpabilité ? Non, absolument pas. Franche comme elle est, elle finit par me faire comprendre qu'elle a mal, mais que le goût de l'échec, ce goût dont elle s'était assurée de ne jamais connaître, vient étrangement et paradoxalement changer la donne. Échouer quelque part. L'inaccessibilité de mes sentiments à son égard se présente à l'adolescente comme étant son tout premier insuccès... duquel elle ne se débarrassera probablement jamais. Une réaction somme toute originale, mais à la hauteur du bout de femme que je vois devant moi.

Attendri par sa façon d'agir, mais aussi un chouia soulagé de savoir qu'elle ne risque pas de m'en vouloir à vie ou de partir en courant et en pleurant à chaudes larmes, je pose mon autre main sur l'épaule libre tout en lui offrant un sourire qui, je l'espère, permettra peut-être d'intensifier le sien.

- Je préfère largement te voir sourire que te voir pleurer. Et... je suppose que c'est une bonne chose d'être celui qui t'as sorti de ta monotonie de la réussite sans fin ?!

Si tu n'échoues jamais...

Mettons-nous tout de suite d'accord : je ne maîtrise absolument pas ce concept qu'est l'amour et je dois dire que la prononciation de ma dernière me laissa ainsi le cul entre deux chaises, ne sachant pas vraiment si elle aiderait à détendre l'atmosphère ou si elle allait juste se faire l'élément déclencheur d'une nouvelle catastrophe signée Timaé. Le silence uniquement brisé par une tristesse et des larmes et l'absence de contacts directs me firent déglutir une seconde fois, commençant véritablement à être gêné de la situation. Je ne sais tout simplement pas quoi faire, ni ce que je suis censé lui dire afin de lui remonter le moral... je veux dire... à qui ça arrive ce genre d'événements ? Forcément, je suis le pro qui réussit toujours à se mettre dans des pétrins pas possibles.

Mais alors que je m'apprête à reprendre la parole, un léger bruit aussi délicat que le bout de jeune femme qui se trouve devant moi me plonge dans un mutisme auquel je ne me suis pas attendu. Elle... Est-ce qu'elle vient de... rire ?! Aussi fou que cela puisse paraître, il me semble avoir bel et bien entendu quelque chose de semblable à un rire. A moins que cela ne soit quelqu'un aux alentours ? Non, c'est impossible. Le son était trop faible et les personnes les plus proches positionnées bien trop loin pour que cela puisse provenir d'elles. Non, c'était Roxanna.

D'autant plus perdu face à un tel retournement de situation, j'écarquille les yeux et cligne plusieurs ces derniers, presque comme secoué et... ouais... simplement inapte à comprendre le développement de cette... déclaration d'amour à sens unique ? Comment pouvions-nous passer de la neutralité aux larmes et des larmes aux rires ? Les réactions de cette enfant me dépassent... Et cela doit certainement se lire dans mon regard qui est toujours planté dans le sien, plus par automatisme que par réelle envie, cela dit.

Et puis... Et puis, il y a cette phrase... Ce mot... "Tu es mon héros". A cet instant précis, diverses réactions sont à portée, éclater de rire, fondre ou rester ébahi face à une telle affirmation. Moi, un héros ? J'aurai décidément tout entendu en une seule et même journée. Je parviens à faire craquer les petites filles et en plus de ça j'en deviens leur héros. Sur le coup, j'avoue ne pas trop savoir comment traiter cette information. S'il y a bien un qualificatif qui ne me sied absolument pas, c'est bien celui de l'héroïsme en sachant pertinemment ce qu'il vient de se produire. Donc, lui briser le cœur est un acte héroïque ? Et bah...

Avant de reprendre la parole, je secoue la tête dans un espoir que cela remette un semblant d'ordre dans mes idées même quand bien même je suis toujours dans le flou le plus total.

- Moi ? Un héros ? J'espère que tu plaisantes.

La tonalité employée n'est ni mesquine, ni agressive, simplement... vraie et saupoudrée d'un peu d'humour. Ensuite, la voilà qui se remet à rire, à réellement et pleinement rire tout en prenant le temps d'essuyer les larmes qui étaient restées accrochées à ses joues. C'était... adorable... et incroyablement soulageant pour moi. D'ailleurs, je ne sais pas si je dois prendre cet éclat de joie comme étant une réponse à ma question directe, mais dans le doute... on va dire que les émotions lui ont fait dire des choses qu'elle ne pensait ou ne connaissait pas vraiment.

Un fin sourire s'accroche à mes lèvres là où ma main initialement postée sur son épaule perd sa saisie et revient se perdre le long de mon corps. Bon... j'imagine que les choses sont rentrées dans l'ordre ? Tout en suivant le mouvement de son visage qui se dirige vers ces idiotes de petites pétasses, je m'autorise à croiser les bras tout en fermant finalement les yeux, assez satisfait de la tournure qu'a pris cette discussion même si je n'en reste pas moins quelque peu... secoué. Mais alors que je soupire intérieurement, ressentant d'ores et déjà le retrait de ce poids que l'on venait d'attacher à ma conscience, la voix fluette de Roxanna revient à mes oreilles et me tire de ma pause, accompagnée par deux questions.

Les yeux rouverts, je la fixe longuement, l'expression assez neutre avant de subitement la ramener contre moi dans une étreinte aussi étonnante qu'intense. Une joue posée sur le haut de sa tête, je tiens certainement entre mes bras la seule et unique personne avec qui je m'octroie cette possibilité sans qu'il n'y ait d'arrière-pensées. Elle est amoureuse, certes, mais elle sait que je ne le suis pas en retour. Ce câlin, c'est en quelques sortes la tendresse la plus folle que je puisse lui offrir sans espérer la faire souffrir... et la seule que je m'autorise à mettre à exécution.

En y pensant, c'est étrange... c'est bien la première fois que je me fais instigateur de ce genre d'actions. J'ai toujours été câliné et surplombé par une taille masculine démesurée et non pas l'inverse. Un peu de changements, ça a aussi son petit effet.