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Un cauchemar éveillé [solo]

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Lun 19 Oct - 22:36
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Constantine Meyer
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ÂGE : 30 ans
TAILLE / POIDS : 1m92 / 90 kg
CLASSE : Infirmier


Un cauchemar éveillé

Solo - Flashback du 7 Janvier 2020
L’hôpital était bondé. De nombreux cas de grippe et maladies respiratoires se déclaraient depuis quelques jours, comme si la nouvelle année avait amené avec elle une vague de microbes. Bien sûr, on parlait de ce fameux Covid-19 apparu en Chine mais forcément, les personnes à la santé fragile demeuraient plus facilement contaminées. Pas d’antécédents, pas de risques. En tant qu’infirmiers, Mary et moi prenions nos précautions, même si nous n’avions pas à nous inquiéter pour nous-mêmes. En bons professionnels de la santé, nous nous rendions les plus disponibles possible pour soigner un maximum de personnes. Les journées étaient longues et éreintantes. Surtout pour moi qui rentrais plus tard. Mary, elle, devait finir quand Janna terminait l’école afin d’aller la chercher.

- J’y vais, on se voit ce soir, déclara mon épouse en venant m’embrasser sur la joue.

Elle se détourna. Je l’attrapai par le poignet pour la ramener vers moi et déposer un baiser sur ses lèvres crayonnées de rose.


- Sois prudente, dis-je en la libérant.

Elle sourit et me serra dans ses bras.


- Ich liebe dich* ! fit-elle d’un ton joyeux en partant.

Je soufflai par le nez, encore et toujours amusé par cet enthousiasme dont elle faisait preuve malgré la fatigue.


- Ich liebe dich, répondis-je à voix basse.

De toute façon, elle était déjà partie. Je soupirai, retournai m’occuper de mon patient. J’avais hâte de rentrer à la maison. Je me sentais plus épuisé que d’habitude. Je ne rêvais que de retrouver ma femme et ma fille, passer un peu de temps avec elles et me jeter dans le lit. Avec un peu de chance, je pourrais rentrer pour le dîner. Cela faisait plusieurs fois que je partais bien trop tard de l’hôpital à cause d’urgences de dernière minute. Cette fois, je comptais bien m’échapper avant. Mais en voyant la liste des personnes dont je devais m’occuper, ce n’était pas gagné.


« Fait chier… grommela Ihn aussi agacé que moi. Depuis le temps qu’on se plaint du manque d’effectif, y a personne pour se bouger le fion et engager du renfort. »

Ce n’était pas si simple mais mes pensées allaient dans son sens. Nous ne pouvions pas continuer à nous tuer à la tâche. La plupart d’entre nous retrouvait leur famille le soir. Nous avions aussi besoin de nous reposer, de consacrer du temps à notre vie privée.

« Au moins en thanatopraxie, t’étais plus tranquille. »

Oui, mais je ne regrettais pas d’être devenu infirmier. Mary avait raison, ça faisait du bien de se rendre utile pour des gens vivants. Je me sentais beaucoup mieux dans ma peau depuis que nous travaillions ensemble à l’hôpital.

« Ben tant mieux pour toi… »

Il ronchonnait mais depuis qu’il s’était enfin rendu compte de son amour pour elle, il était toujours content d’être en sa présence.

« Ouais enfin… vite fait parce que je te rappelle que tu ne me laisses pas beaucoup sortir. »

Normal, non ?

« Mouais… »

Je préférais qu’il râle pour ça plutôt que pour l’envie d’aller casser la gueule de quelqu’un. Un collègue m’appela pour gérer un patient. Je secouai la tête pour me reconcentrer sur mon travail et le rejoignis. Trente minutes plus tard, mon téléphone portable sonna. Je vis le numéro de l’école de Janna s’afficher. Pourquoi l’école m’appelait-elle ? Mary devait y être passée.

- Ja*, fis-je en décrochant.

« Monsieur Meyer, bonsoir c’est la maîtresse de Janna. »

- Oui, bonsoir. Il y a un problème ? Janna a oublié quelque chose en partant ?

« Non, ce n’est pas ça, Janna est toujours là. »


Comment ça ? Mary était censée l’avoir récupérée. J’en informai mon interlocutrice qui m’assura que personne n’était venu. Elle ajouta qu’elle voulait bien rester encore un peu pour garder ma fille si je venais la chercher tout de suite.

- O… OK, je quitte l’hôpital, dis-je déstabilisé. Mais… mais sa mère n’est pas passée ? Vous ne l’avez pas vue ?

« Non, nous avons essayé de la joindre, sans succès. »


Je me sentis pâlir et eus l’impression qu’une énorme pierre tombait dans mon estomac. Je raccrochai sans même dire merci ou au revoir, et partis en courant.

- Meyer ? Où tu vas ? demanda un collègue en me voyant tracer.

Je le regardai mais aucun mot ne sortit de ma bouche. Il dut voir à ma tête que quelque chose clochait car il n’insista pas et me laissa partir. En sortant de l’hôpital, je tentai d’appeler Mary. La messagerie se déclencha instantanément. Je décidai donc de faire le chemin en direction de l’école tout en réessayant d’appeler ma femme. Toujours rien. Je commençais sérieusement à paniquer.


« J’le sens mal, putain j’le sens mal… répétait Ihn, ce qui n’aidait pas à me calmer. Pourquoi j’le sens mal ? »

Je n’en savais rien mais j’espérais de toutes mes forces que Mary allait bien. Pourtant, une partie de moi était secouée d’un mauvais pressentiment. Aujourd’hui, nous étions le mardi 7 Janvier. En cette même date six ans auparavant, à quelques heures d’intervalle, je me trouvais dans la salle de bain de notre maison à me tailler les veines, prêt à en finir avec la vie. J’entendis Ihn gémir au fond de ma tête. Il refusait de parler de ce jour, ça le terrifiait. Forcément, il avait failli disparaître. A mi-chemin, je me rendis compte que j’avais gardé ma blouse d’infirmier. Tant pis, ce n’était pas grave. Je continuai de courir, essayai une énième fois d’appeler Mary, en vain. Je rangeai mon téléphone, accélérai ma course. Il ne me restait qu’à parcourir deux rues avant d’arriver à l’école. A une cinquantaine de mètres, je m’engouffrai dans une ruelle qui permettait d’accéder plus rapidement à destination. Le soleil était presque couché, on n’y voyait pas grand-chose. J’arrivai au milieu de la ruelle, près d’un grand conteneur à déchets entouré de poubelles.
Et je la vis.


« Non… »

Elle était là.

« N… non… »

Pétrifié, je la regardais, les yeux grands ouverts, n’arrivant pas à croire ce que je voyais. Ce n’était pas possible. Je faisais un cauchemar, un terrible cauchemar. Ҫa ne pouvait pas…

« Mary ! »

Mon corps bougea tout seul et je me retrouvai à genoux près du corps inerte de mon épouse, à moitié dénudée, pleine d’écorchures et de traces de coups, jetée comme une poupée de chiffon au milieu des poubelles.

« Dis-moi qu’elle va bien ! DIS-MOI QU’ELLE VA BIEN ! » s’écria Ihn hors de lui.

Je vérifiai son pouls. Rien. Non… Ce n’était pas possible. Je regardai autour de moi, repérai son sac à main par terre, tout retourné et déchiré. Son téléphone portable cassé gisait à côté. Je reportai mon attention sur Mary, la positionnai allongée sur le goudron et commençai un massage cardiaque. Je ne savais pas pourquoi j’agissais ainsi. Au fond de moi, je savais que c’était trop tard, que je ne pouvais rien faire. Elle avait perdu beaucoup de sang. Entre deux pauses durant le massage, je vis qu’elle avait été poignardée au ventre, à plusieurs reprises. C’était peine perdue, je faisais ça pour rien.


- Mary… non… Non, non, non, Mary… fis-je dans un chuchotement, ma voix bloquée au fond de ma gorge. Me fais pas ça s’il te plaît, s’il te plaît…

Je pris son visage entre mes mains, le cœur prêt à exploser. Son maquillage avait coulé. Ses mains étaient abîmées. Elle s’était défendue, elle avait pleuré, crié et lutté pour se sortir de là. De toutes ses forces… sans y arriver. Sans personne pour l’aider.

- Mary…

Nauséeux, je sortis mon téléphone et appelai la police, puis les secours. J’eus du mal à parler mais réussis tout de même à me faire comprendre. Quand je raccrochai, je retirai ma blouse et recouvris le corps de ma femme avec. En la regardant, ce fut comme si la vie me quittait moi aussi. J’avais l’impression que mon âme s’en allait, qu’un froid glacial envahissait tout mon corps, que mon cerveau ne répondait plus, qu’il faisait noir autour de nous. Ҫa ne pouvait pas être possible, ce n’était pas réel. Mary ne pouvait pas être partie comme ça, si soudainement. Pas elle… Pas maintenant… Pas comme ça…
Je ne sus combien de temps s’écoula jusqu’à ce que les gyrophares éclairent la ruelle. J’étais tellement dans les vapes que je me souvins à peine de ce qu’il se passa par la suite. Je me rappelai qu’on eut du mal à me détacher de Mary. Quand on l’emmena sur une civière, recouverte d’un drap, je restai assis par terre, incapable de me lever. Les policiers me demandèrent si j’avais vu les agresseurs, je répondis seulement par un signe de tête. Ils précisèrent qu’ils me recontacteraient demain, que je ne devais pas quitter la ville. Je ne risquais pas…


- … sieur… Monsieur ?

Je levai les yeux. Un autre policier me dit que je ne devais pas rester là, que je devais rentrer chez moi. Chez moi… Plus personne ne m’attendait. Plus pers…

Janna.

Mon cœur bondit de douleur. Janna patientait toujours à l’école. Les jambes tremblantes, je me mis debout et commençai à marcher.


- Ҫa va aller ? s’enquit le policier inquiet. Vous voulez qu’on vous ramène ?

Je m’arrêtai, la tête baissée, les yeux rivés au sol.

- Ma fille… répondis-je tout bas. J… je dois aller… la chercher.

Je n’attendis pas de réponse, m’éloignai. J’arrivai à l’école à la manière d’un zombie. Je me rendis jusqu’à la classe de Janna, fut intercepté par la maîtresse devant la porte ouverte. Ma fille jouait sagement dans un coin, elle ne m’avait pas encore vu.

- Monsieur Mey… commença la maîtresse.

Mais elle se tut et plaqua une main sur sa bouche en me voyant. Je ne savais pas de quoi j’avais l’air mais je devais faire peur à voir. Je remarquai seulement maintenant que j’avais du sang sur les mains et sur mes vêtements.


- Qu… qu’est-il arrivé ? demanda-t-elle à voix basse pour ne pas que Janna l’entende.

Je mis du temps à répondre.


- Je… M… Mary… je l’ai… trouvée…

Elle pâlit, bien que je n’eusse pas dit grand-chose.

- Et… elle… elle est… hésita la maîtresse.

Un simple « non » de la tête lui fit monter les larmes aux yeux.


- Oh mon dieu, souffla-t-elle choquée.

Elle jeta un coup d’œil à Janna, reporta son attention sur moi.


- Allez vous laver les mains, conseilla-t-elle. Je vous amène Janna dans le hall.

Je ne bronchai pas et me rendis aux toilettes les plus proches. A la manière d’un automate, je savonnai mes mains et les rinçai du mieux que je pus, jusqu’à ce que le lavabo ne soit plus taché de rouge. Je fis tout pour ne pas me regarder dans le miroir, me séchai et sortis. Dans le hall d’entrée, Janna vint se jeter dans mes bras.

- Papa !

Je faillis craquer en entendant sa voix, en la voyant si heureuse de me retrouver. Elle leva les yeux vers moi, fronça les sourcils.

- Ҫa va Papa ? demanda-t-elle d’un air soucieux.

Je m’accroupis devant elle et tentai un sourire rassurant. Je la serrai contre moi et dis :


- T’en fais pas… Je suis juste très fatigué. Viens, on rentre à la maison.

Je me relevai, la pris par la main. Un au revoir silencieux à la maîtresse et nous quittâmes l’école. Nous passâmes d’abord par l’hôpital pour récupérer ma sacoche et les clés de la maison. Personne ne me dit rien mais on nous regarda très bizarrement. Une fois sortis, l’air me parut plus respirable. Nous nous mîmes en route.
Comment lui dire ? Comment annoncer à une gamine de quatre ans que sa mère venait de mourir ? Comment lui faire comprendre qu’elle ne la reverrait plus jamais, qu’elle devrait vivre sans elle à partir de maintenant ? Comment faire ? Qu’allions-nous devenir ? Comment allais-je supporter Ihn maintenant que Mary n’était plus là ? Que devais-je faire ? Je me sentais complètement perdu.


- Papa, on est arrivés.

Je sortis de mes pensées, me rendis compte que nous étions plantés tous les deux devant la porte d’entrée de notre maison. D’une main tremblante, je déverrouillai et nous entrâmes. Janna quitta ses chaussures, courut allumer la lumière du salon.

- Maman ! appela-t-elle. Maman !

Je la rejoignis, une boule dans la gorge.

- Elle est où Maman ? Elle est toujours au travail ?

Je déglutis difficilement.

- Viens par là, dis-je en lui indiquant le canapé.

Elle s’assit, je m’agenouillai devant elle. D’abord, je pris ses mains, les joignis sur ses genoux en les gardant dans les miennes. Puis je pris une grande inspiration, expirai lentement.


- Janna.

Elle soutint mon regard, attentive.

- Maman ne rentrera pas.

Un silence.

- Mais pourquoi ? Elle dort au travail ?

Un autre silence.

- Elle a eu un accident. Elle… elle ne reviendra pas.

Je vis son visage se décomposer. Elle commençait à comprendre.

- Elle reviendra pas parce qu’elle est allée au ciel ?

Je hochai la tête.

- M… mais pourquoi ? Elle m’avait dit que c’était que les papis et les mamies qui allaient au ciel, quand ils étaient trop vieux. J’veux pas qu’elle aille au ciel maintenant !

Les larmes commencèrent à couler sur ses joues, je me mordis l’intérieur de la lèvre, m’assis à côté d’elle.

- Pourquoi elle est partie ? Je veux pas qu’elle parte ! sanglota-t-elle. Je veux Maman !

Je la pris dans mes bras, elle pleura pour de bon, ne cessant de répéter qu’elle voulait sa mère. Le regard rivé sur la télévision éteinte, je me contentai de la câliner, d’essayer de la rassurer avec la chaleur de mon corps. Rien n’y faisait, évidemment. Janna pleurait, pleurait, pleurait… Et moi, j’étais comme figé, ne pouvant rien faire pour la calmer. Je n’avais pas les mots. Rien ne venait. C’était le vide total. Dans mon corps, dans ma tête et dans mon cœur, c’était… le vide complet.
***

___________________________
*Ich liebe dich : Je t'aime
*Ja : Oui


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Lun 19 Oct - 22:52
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Constantine Meyer
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Un cauchemar éveillé

Solo - Flashback du 7 Janvier 2020 (fin)




***

Samedi 11 Janvier 2020, jour de l’enterrement.

Le ciel était parsemé de quelques nuages et une brise venait rafraîchir l’air. Il faisait plutôt beau pour un enterrement. J’aidai Janna à descendre de la voiture, lui donnai sa rose blanche. Elle la prit d’une main, l’autre occupée par une photo récente de sa mère qu’elle ne cessait de contempler. Je l’emmenai à l’intérieur du cimetière où la cérémonie allait débuter. A l’entrée, nous croisâmes ma belle-mère et les grands-parents de Mary, en larmes. Ils embrassèrent Janna très fort, me serrèrent dans leurs bras. Mary ne leur avait jamais dit pour ma maladie. Pour eux, j’étais quelqu’un de sain d’esprit, un homme tout à fait normal, sans problèmes. S’ils savaient, ils n’auraient pas laissé leur fille et leur petite fille vivre et se marier avec moi. Ils me parlaient mais j’étais incapable de répondre. Je ne pleurais pas, je n’avais pas pleuré une seule fois. Je n’y arrivais pas. Durant la cérémonie, je portais Janna dans mes bras. Le visage enfoui dans mon cou, elle pleurnichait en demandant sa mère. Quelques minutes plus tard, le cercueil descendait dans la fosse et tout le monde attendait son tour pour jeter sa rose dessus. Janna voulait absolument rester dans mes bras. J’avais mal au dos mais tant pis, je respectais son choix. Ensemble et en dernier, nous laissâmes notre rose tomber sur le cercueil. Enfin, nous nous éloignâmes en direction de la sortie. Je me sentais encore plus mal que le soir où j’avais trouvé Mary dans la ruelle. C’était comme si elle mourrait une deuxième fois. L’estomac et la gorge noués, nous saluâmes ma belle-mère et rentrâmes à la maison.
Quand nous franchîmes le seuil, je reçus comme une bouffée de souvenir en plein visage. Désormais, j’avais l’impression que cet endroit n’était plus notre nid douillet, notre repaire, notre refuge. Je ne m’y sentais plus chez moi. Malheureusement, nous ne pouvions pas déménager pour le moment. Mais j’allais y réfléchir sérieusement dans les prochains jours.


- Tu veux goûter ? demandai-je à ma fille tandis que nous enlevions nos chaussures.

Elle affirma d’un signe de tête. Je l’emmenai à la cuisine où je lui servis ses biscuits habituels et du jus de fruits. Elle mangea en silence, demanda si elle pouvait aller jouer dans sa chambre. Je l’autorisai, et la laissai faire. Je débarrassai la table, m’adossai au plan de travail, épuisé. Depuis ce soir-là, je ne dormais presque plus. J’avais eu droit à ma semaine de repos mais lundi, je devais reprendre le travail. Je ne savais pas si je m’en sentais capable. Je ne me sentais plus capable de rien, même de m’occuper de Janna… Durant les quelques jours précédent l’enterrement, c’était comme si j’étais un robot. Maintenant que Mary était enterrée, officialisant ainsi son décès, un tas de pensées négatives surgissaient. Et une énorme vague d’anxiété.
La respiration soudain haletante, je fus pris de violents vertiges et eus la sensation qu’on me comprimait les poumons. Tremblant de tout mon corps, j’avançai d’un pas, la main tendue vers le dossier de la chaise la plus proche pour m’y asseoir. Mais mes jambes ne répondirent plus. Je tombai assis par terre, le dos contre un des pieds de la table. Prenant ma tête entre mes mains, je tentai de reprendre une respiration normale, de calmer cette soudaine crise d’angoisse. J’étais terrifié à l’idée que Ihn puisse profiter de mon état de faiblesse pour sortir. Cela faisait quatre jours que je ne l’entendais plus. Pourtant, je savais qu’il était toujours là. Je ne savais pas ce qu’il attendait mais je redoutais le moment où il reviendrait. Il avait perdu la première et la seule personne en qui il vouait un amour supérieur à sa haine d’origine. Il allait redevenir l’être abject qu’il était avant, j’allais encore souffrir à cause de lui, j’allais devenir dangereux pour Janna…


- Papa ? appela ma fille depuis sa chambre.

Je sursautai. Elle ne devait pas me voir comme ça.


- J’arrive, attends, répondis-je d’une voix saccadée.

Je fis tous les efforts possibles pour me reprendre. Avoir entendu Janna m’aidait un peu. Je réussi à me mettre debout, me servis un verre d’eau que je bus d’une traite. Puis je rejoignis ma fille. Assise sur le tapis au centre de sa chambre, elle tournait les pages de son album de feuilles d’arbres. Elle le tenait habituellement à jour avec sa mère.


- Regarde, dit-elle en me montrant une feuille qu’elle venait de coller sur une page vierge.

Je m’assis à côté d’elle. La feuille ressemblait fortement à celle d’une rose.


- J’en ai gardé une avant de donner la fleur à Maman, déclara Janna, confirmant mes pensées. Comme ça, ça fait un souvenir.

Je caressai le haut de son crâne, embrassai sa tignasse blonde.

- C’est bien, t’as bien fait, répondis-je fier d’elle.

Elle referma l’album.


- On continuera de ramasser des feuilles ?
- Oui.


Finalement, je restai pour jouer avec elle jusqu’à l’heure de sa douche. Je l’assistai pour se laver les cheveux. N’aimant pas utiliser de sèche-cheveux, Mary n’en possédait pas. Ici, on laissait les cheveux sécher à l’air libre, ce qui n’était pas plus mal… sauf quand il fallait se presser. Là, il nous fallait encore manger et j’avais envie de proposer à ma fille de regarder un dessin animé avant d’aller dormir. Elle accepta gaiement en montant sur son marchepied pour m’aider à cuisiner. Du haut de ses quatre ans et demi, elle était toujours volontaire pour apporter son soutien, que ce soit pour faire la cuisine, le ménage, jardiner, ranger… Elle aimait se rendre utile et je ne pouvais pas le lui reprocher. Nous mangeâmes notre repas une heure plus tard, devant la télévision. D’habitude, nous refusions de laisser Janna regarder la télé en mangeant mais aujourd’hui était un peu une exception. En plus, elle termina son assiette sans broncher et débarrassa ses couverts. Nous regardâmes la fin du dessin animé sur le canapé, blottis l’un contre l’autre. Plus les minutes passaient, plus la petite s’affalait dans mes bras. A la fin du dessin animé, elle dormait. J’éteignis la télévision et, doucement, la soulevai pour l’emmener dans sa chambre. Je la déposai dans son lit, lui remontai la couette jusqu’aux épaules et sortis discrètement en refermant la porte derrière moi.
Je me rendis à la cuisine pour finir de débarrasser la table. Le silence qui régnait dans la maison était lourd, dérangeant. Avec Mary, il y avait toujours de l’animation. Nous discutions, elle fredonnait des chansons en s’occupant du linge, elle me lisait le passage d’un livre qu’elle aimait bien, etc. Là, l’absence de bruit était si forte que je sentais mes oreilles bourdonner. Et je n’aimais pas ça. D’un pas traînant, je me rendis dans la salle de bain pour prendre ma douche. Perdu dans mes pensées, je fus forcé de sortir quand il n’y eut plus d’eau chaude. J’enfilai le vieux pantalon et le tee-shirt qui me servaient de pyjama, et allai me coucher. Dans la chambre, pareil, ce silence angoissant. En regardant autour de moi, je vis, posé sur le dossier d’une chaise, le pull que Mary aimait bien porter à la maison le soir. Je m’en emparai et le posai à côté de moi, dans le lit. Peut-être que je dormirais mieux… Mais le silence me contrariait beaucoup. Alors j’allumai le radio-réveil pour avoir un fond de musique. Ce n’était pas grand-chose mais cela m’aida un peu à m’apaiser. Le pull de Mary serré contre moi, je fermai les yeux.
Je fis un affreux cauchemar. Je rêvai que je me trouvais dans la ruelle. Il faisait sombre, mais pas assez pour apercevoir Mary marcher devant moi. Soudain, je vis un groupe de quatre hommes prêts à se jeter sur elle. Je lui criai « Attention ! » mais elle n’eut pas le temps de s’enfuir. Ils étaient déjà sur elle et commençaient à l’agresser, d’abord verbalement, puis physiquement.


« Constantine ! » s’écriait-elle effrayée.

Je n’arrivais pas à bouger, comme si mes pieds étaient collés au sol, comme si mes jambes étaient faites de béton. Je ne pouvais que regarder et crier à ces types d’arrêter, de laisser ma femme tranquille. Mary ne cessait de m’appeler.


« Constantine ! Aide-moi, je t’en prie ! »

Je ne pouvais rien faire. Elle souffrait et je ne pouvais pas la sauver.

« Constantine ! »

Elle était seule, elle allait mourir.

« CONSTANTINE ! »

Je me réveillai en sursaut, me redressai en position assise. Trempé de sueur, tremblant de tout mon corps, j’avais la respiration haletante et les poings tellement serrés que mes bras me faisaient mal. J’avais l’impression que les hurlements de Mary résonnaient encore dans mes oreilles. J’enfouis mon visage dans mes mains. La radio grésillait à côté de moi. Je l’éteignis, la gorge sèche. Il fallait que je boive.
Fébrile, je descendis du lit et me rendis à la cuisine pour me servir de l’eau. C’est là que j’entendis Janna pleurer. Elle aussi faisait des cauchemars depuis quatre nuits. Je terminai mon verre, le posai au fond de l’évier et allai rejoindre ma fille dans sa chambre. Recroquevillée dans un coin de son lit, elle sanglotait doucement. Je m’assis au bord du matelas, ouvris la bouche, la refermai. Je ne savais même pas quoi dire, ne trouvais pas les mots. A force d’essayer de la rassurer, je ne savais plus quels termes employer. Désemparé, je ne fis que poser ma main sur la tête de Janna. Elle pleura de plus belle. Je soupirai. Le cœur serré, je décidai de la soulever dans mes bras et de l’emmener dormir dans mon lit. J’étais plutôt réticent à cette idée parce que je ne voulais pas que ça devienne une habitude. Mais là, je voyais qu’elle avait vraiment besoin de moi… et j’avais besoin d’elle aussi. Je la déposai, m’allongeai à ses côtés. Aussitôt, elle s’accrocha à moi tout en continuant de sangloter.


- M… Ma… Maman…

Je la serrai dans mes bras.

- Maman m… me manque…

Ses mots déclenchèrent ma réaction. Je me les étais pourtant répétés tant de fois ces dernier jours. Le fait que Janna les prononce me fit l’effet d’une bombe dans la poitrine, et les larmes me montèrent immédiatement aux yeux. Jusqu’à ce soir, je n’avais pas pleuré, pas versé une seule larme pour Mary. Je voulais montrer à Janna que j’étais fort, qu’il fallait continuer sans elle malgré tout, que sa perte était triste mais que nous devions aller de l’avant. Cependant, ce soir, je n’y arrivais pas. J’avais juste envie de tout lâcher, de me décharger. Je n’en pouvais plus.

- Elle me manque aussi, réussis-je à articuler… avant de me mettre à pleurer, moi aussi.
[FIN]

Ⓒ ️ DABEILLE
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