Chase the inspiration [PV Lucia] [Terminé]

▬ Chase the inspiration ▬
feat Lysander Sedley & Lucia Valentini

Encore une journée des plus fastidieuses, ou dont le scénario semble se répéter comme dans un mauvais rêve. Cela m'apprendra à prendre des décisions de moi même tiens...Que je vous explique, comme je ne suis pas trop affiliée avec les lieux, j'ai décidé de faire une bonne action envers moi même et de visiter les endroits de l'institut que je ne connaissais pas encore. Quelle erreur, voilà que par mégarde et dans ma grande stupidité, je me suis perdue et que ça fait environ une heure que je cherche mon chemin. J'ai bien essayé de poser la question, mais les élèves que j'ai croisé ont tous fuis en me voyant...Comme si j'étais un animal dangereux. Remarque ce serait mentir de dire que c'est faux. Ouais enfin, ça n'arrange tout de même pas mon problème là tout de suite hein...Et comme je n'ai pas d'amis, et que je préfère sauter du toit plutôt que de parler à un membre de l'administration...Disons que ma première impression sur eux, n'a pas été la plus glorieuse...

C'est donc comme un pauvre enfant égaré qui cherchent ses parents, l'étui du violon sur l'épaule, que je me retrouvais à flâner le long des couloirs en me disant que peut être la chance serait de mon côté. Puis tout le monde me fuyait comme la peste....à croire qu'il y avait écrit "Psychopathe" sur mon visage. C'est d'un risible...mais ça me permettait de me rappeler pourquoi je déteste les gens, le monde et ce qui l'entoure. Seule la musique était mon salut, la seule source de lumière et de joie que j'avais trouvée. Ce lieu me rendait malade...je n'avais qu'une envie c'est de partir le plus vite d'ici...Sauf que malheureusement pour moi, j'allais y passer encore de longues années à venir. Quand bien même mes résultats. Finalement peut être que la potence, la peine capitale aurait été moins douloureuse. La mort ne me fait pas peur, c'est plutôt de ne pas la vivre qui m'effraie le plus. On pourrait croire que je suis un robot, sans émotions, sans sentiments. C'est un peu vrai.

Mes pas dirigèrent le chemin qu'ils voulaient que j'emprunte, et tandis que je commençais à perdre espoir de finalement trouver le nord, un son, fébrile, incoordonné certes, mais venant d'un instrument, résonna. Comme si je pensais y trouver un destin au bout, je suivais donc les notes pour définir le lieu d'où elles se propageaient. Finalement elles provenaient de cette salle dont l'installation semblait à avoir été faites pour une vie commune. Des étagères telles des bibliothèques, un feu de cheminée servant surement pour l'hiver. En soit, la salle n'avait rien d’extraordinaire, si ce n'était des pieds qui dépassaient d'un fauteuil...

Je crois que c'est la première chose étrange de la journée que je vois. Avec une légère once de timidité, je m'approchais doucement sauf que je n'avais pas fait attention à l'étui posé au sol, et je vous laisse deviner la suite...Dans ma perte d'équilibre, mon violon faisant contre balancier à l'intérieur, et parce que même avec mon bandeau cette information m'avait été inconnue, mon corps se projeta en avant pour tomber sur le jeune homme, et pas de la manière la plus...douce qui soit. Hé bah ma grande si tu voulais être discrète c'est raté...Comme aveuglée parce que je ne ressentais plus les sens autour de moi, je décidais de tirer mon bandeau vers le haut pour contempler l'ampleur des dégâts et me donner un repère. Position équivoque, à califourchon sur la pauvre victime, nos regards se croisèrent...et mes joues prirent la teinte d'une écrevisse, très gênée ! Autant je ne ressens rien, autant en bonne demoiselle aristocrate on m'a appris à être décente avec les hommes....et là il n'y a rien qui l'est ! Finalement j'aurais dû garder mon bandeau et faire genre que je suis vraiment aveugle non ?

Je devrais dire quelque chose vite ! La situation est assez embarrassante comme ça ! Mais qu'est-ce que je pouvais faire ? Elles font quoi les personnes normales dans ce genre de situation ?...

Tu parles d'une journée...D'abord je me perds, maintenant je me prends les pieds et m'écroule sur un inconnu ? Et pour couronner le tout j'allais surement devoir m'excuser...Enfin c'est quand même un peu de ma faute, si au moins j'avais fait un tant soit peu attention. Et encore plus si je n'avais pas suivie cette flopée de notes. Le jeune homme, brun, à première vue, se redressa légèrement pour réaliser à son tour ce qu'il venait de se passer. C'est qu'il ne doit pas avoir l'habitude que des filles lui tombent dessus comme ça...Sauf si c'est un Don Juan, mais ce n'est pas à moi de juger de ce genre de choses. Par contre euh...il est un peu trop près là on est d'accord ? Nos regards se rencontrant, créant une sorte d'alchimie étrange, mêlée à un semblant de gêne. Enfin non lui semblait plutôt plus à l'aise avec la situation, remettant en cause le fait qu'il était peut être moins intimidé par ce genre de quiproquo...Un léger contact sur mon épaule me réveilla un tant soit peu de la confusion de cette scène. Ce serait mentir si je disais que ça n'avait pas effleuré mon esprit de trouver que cela était plaisant, un premier contact...une telle proximité avec un être humain...

Mais loin d’allier l'utile à l'agréable pour une fois, c'était la peur qui en prenait le dessus, surtout à cause de réminiscences douloureuses. Esquissant une mimique, je tentais de me relever en prenant un peu appui sur lui, parce que je suis encore un peu sonnée, et me mit sur le côté, détournant très vite les yeux. A quoi ce garçon avait bien pu penser ? Si ça se trouve il me prenait pour une fille facile, ou même pire. Rien que de l'imaginer suffit à me faire mordre l'intérieur de mes joues pour me maudire. Bon c'est peut être le moment de s'excuser maintenant que je viens de mettre fin aux circonstances atténuantes.

▬ Je....désolée...

Ouais bon c'est pas ce qu'on peut appeler une victoire, mais on va dire que c'est un premier pas. Tout de suite, comme pour tenter de masquer le silence pesant qui s'installait, j'attrapais l'une des partitions qui jonchent le sol. C'était donc lui qui jouaient de la musique tout à l'heure ? Drôle de position pour jouer de la guitare...Enfin je suis beaucoup trop novice en la matière sur les guitaristes pour me permettre d'en faire la remarque. Une œillade autour de moi pour réaliser que nous étions seuls dans cette pièce immense me plongea à nouveau dans l’embarras...Bon c'est moi qui suis tombée sur lui, mais je ne connais ces intentions...Ce serait être naïve de ne pas se méfier pas vrai ? Moi seule sait, à quel point les apparences peuvent être trompeuses. Comme je ne suis pas spécialement douée pour créer une conversation d'ordre sociale, parce que je ne suis pas une armoire de sympathie, je préférais laisser parler la musique pour moi même. Sortant le violon de mon étui que je posais sur mes jambes, j'en grattais les quelques cordes pour faire les notes inscrites, et fit une moue peu approbatrice. Un musicien en manque d'inspiration ?

Comme si la distance n'était plus trop présente, je décidais enfin de m'exprimer

▬ Tu ne devrais pas accorder un bémol, avec une octave, c'est ça qui t'empêche de reprendre derrière sur une harmonie pour parler terme professionnel.

Il allait peut être trouvé cela gonflé, voir même me dire de m'en aller et auquel cas, je n'aurais juste qu'à me lever pour partir. Continuant donc de m'enfoncer dans ma présomption éphémère, je jouais les notes en essayant de trouver un équilibre à tout cela...Comme si je cherchais d'une certaine façon à aider un collègue partageant le même idéal, ou la même passion. Réalisant que j'avais toujours mon bandeau sur mon front, je le remettais en place sur mes yeux, tentant de garder mon calme. Pas de ça aujourd'hui, et ce n'était pas qu'il n'était pas agréable à regarder, mais des événements peu glorifiants ces derniers jours m'obligent à prendre des précautions.    

Dans la précipitation, il me dit carrément qu'il ne fallait pas que j'y fasse attention, ce qui attira ma curiosité. Pourquoi est-ce qu'il semblait gêné de montrer quelque chose comme ça ? Tout le monde fait des erreurs, à ses ratés après tout. Même les plus grands. Et puis pourquoi mes permettrais-je de le juger en tant que musicien ? Je ne le connais pas après tout. Un mouvement sur le côté, et un froissement me fit comprendre par perception qu'il avait du s’asseoir de nouveau et dans une position convenable cette fois ci. Et puis il y a quelque chose que je ne pouvais rater, son odeur, son parfum légèrement épicé...Cette simple donnée me permettait d'en apprendre un peu plus sur mon interlocuteur sans forcément qu'il se décrive. Par observation et déduction, je me faisais comme un portrait robot afin de deviner un peu son style : Guitariste donc peut être un peu acoustique, mais par l’enchaînement des notes, il semblait tabler sur un genre rock'n roll ! Peut être faisait-il parti d'une groupe de musique ? Cela serait très certainement probable, cela expliquerait le pourquoi il cherche l'inspiration ? Ou alors c'est un artiste compositeur qui souhaite se laisser en carrière solo ?

Je devrais peut être arrêter d'analyser autant les gens...Ce n'est pas comme ça que je vais me faire des connaissances. Seulement....le voulais-je déjà ? J'ai bien compris par le passé que les attaches sont une douleur, un poids, un fardeau. Attendez je ne parle pas qu'on devienne les meilleurs amis du monde non plus, mais même juste connaître quelqu'un, le faire ancrer dans une partie de sa vie, de son esprit suffisait déjà à créer un mal. Je ne comprendrais jamais ces gens qui s'entourent, est-ce une façon pour eux de ne pas se noyer dans la solitude ? ou de se vanter d'être marqués dans le coeur des autres ? Décidément ce monde est bien pâle et triste. En arriver à jouer la carte de la manipulation même dans l'amitié, dans le social...L'être humain est abject...Je regrette d'en faire partie. Naître robot sans émotions, ne rien ressentir. Me sortant de mes rêveries, je me contentais d'écouter les paroles du jeune homme, n'y répondant que partiellement avec des signes de tête ou des simples soupirs. Je ne suis vraiment pas douée à ça, mais étrangement le fait qu'il me parle comme s'il me connaissait depuis longtemps me réchauffa le coeur. Attend quoi ? Cela m'avait secouée à ce point ma chute ? Je ne devais pas avoir les idées en place.

▬ Le plus important reste d'essayer, et de ne pas se décourager....

C'est en parti vrai, mais j'avais essayé de sortir quelque chose de réconfortant....Depuis quand je me soucie des émotions des autres maintenant ? C'est nouveau ça aussi tiens...Il allait falloir que j'aille à l'infirmerie pour me faire ausculter, ça ne tourne plus rond, il y a vraiment quelque chose qui cloche. Et puis peut-on vraiment parler de "réconfort" hein...C'est pas la phrase la plus incroyable pour consoler quelqu'un. Les joues encore rosies, alors que je me remerciais de ne pas le regarder pour me laisser intimidée. Depuis mon arrivée ici, je n'avais rencontré que deux garçons. Lui et Sebastien...et je vais vraiment finir par croire que je ne connais vraiment rien aux hommes. L'un était un peu masochiste à vouloir me côtoyer, et lui dans tout ça ? Il reste un mystère....tout comme son prénom. On m'avait pourtant appris que le premier pas dans une rencontre c'était de se présenter....pourtant ce n'était pas pour me déplaire. Il était étrange, mystérieux et spontané. Un aspect de lui qui attirait grandement mon attention.

Je me relevais alors posant mon violon sur mon épaule, et commença à jouer un morceau de classique italien, style sonate comme si j'espérais que la douceur de cette mélodie apaise un peu sa frustration et donc son manque d'inspiration.

Morceau:

Pourvu qu'il ne me prenne pas pour une malheureuse avec mon bandeau sur les yeux. C'était après tout ma seule barrière entre moi et la folie. Sur la dernière note alors, avant qu'il ne s'exclame sur quoi que ce soit, j'ajoutais par la suite timidement.

▬ Niccolo Paganini a écrit la plupart de ses meilleures compositions avec un manque d'inspiration, il ne faut pas s'arrêter à vouloir bien faire, vouloir que le morceau s'accorde ou soit parfait. Il faut surtout qu'il vienne du coeur, et qu'il transcende le principe même de "vivre ce que l'on joue"...Si du moins ton amour pour la musique est à cette hauteur.

Me sentant un peu idiote de lui dire des choses comme ça alors qu'il n'en avait surement rien à faire, je reprenais place sur le fauteuil, gardant un air silencieux presque immuable.

C'est tout de même curieux, je ne saurais me l'expliquer mais plus la discussion avançait dans un sens que je souhaitais qu'elle prenne et plus je me sentais....vivante...Cette sensation ne m'était pas arrivée depuis tellement de temps, que je m'en retrouve complètement décontenancée. Je me surprenais à apprécier parler de musique avec un inconnu qui pourrait être un pervers, un détraqué, mais il n'en montrait rien. Je m'étonnais d'apprécier la compagnie de cette personne. Le coup sur ma tête a été vraiment plus violent que ce que je pensais...ou alors peut être que d'une certaine façon je changeais...un peu ? J'étais un peu moins paniquée par la situation de tout à l'heure, comme s'il ne s'était rien passé et même si ce n'était pas le cas, le brun ne m'en fit pas une seule fois la remarque, et ne m'en tint pas rigueur. Encore plus intriguée et curieuse, je me demandais qui pouvait être cet homme qui faisait preuve de nonchalance, mais d'écoute et d’intérêt.

Les paroles dites précédemment semblait être entré un peu en lui, et à ma grande surprise il m'expliqua que je lui faisais penser à sa mère. Un visage perplexe, je n'ai pas pu m'empêcher d'esquisser un léger rictus, ce n'était pas un sourire, mais c'était un bon début. Une personne dite "normale" se serait complètement fourvoyée d'être comparé à une personne maternelle et aurait surement sorti quelque chose du genre "hé mais je suis pas ta mère" et ce serait agacée. Mais je ne suis pas de cette norme, au contraire, je prenais presque cela comme un compliment.

▬ Ta mère est une formidable musicienne dans ce cas...

Pouvais-je me permettre de faire ce genre de remarque déplacée ? Essayant quand même de ne pas créer un malaise, je préférais expliquer le pourquoi de mes paroles. Pour moi même si le monde est triste, terne, sans couleurs, tout est lié, tout a un sens, aucun élément n'est placé au hasard dans le décor.

▬ C'est après tout l'essence même de l'existence de la musique. A quoi servirait-elle si ce n'était pour être écoutée par le public ? Il y a ceux qui se contentent de jouer sans sommation et de suivre la partition d'une clé à l'autre. Et il y a ceux....qui veulent la vivre, et qui veulent prouver leur présence, marquer le coeur des personnes, pour qu'elles se souviennent.

Si un jour je venais à disparaître....est-ce que quelqu'un se soucierait de mon absence ? Est-ce que quelqu'un se rappellerait de qui j'ai été ? Je n'ai pas peur de la mort, ce qui m'effraie le plus, c'est de mourir sans marquer les esprits. C'est pour ça que j'ai choisi la musique...et même si cela m'indiffère qu'on m'aime ou qu'on m'apprécie...je veux laisser mon passage dans les coeurs de ces personnes que je rencontre. Peut être n'est-ce pas en bien, mais si une part de mon entité habite dans leur mémoire, comme une réminiscence, alors c'est suffisant.    

Tout à l'heure, il s'est senti gêné parce qu'il préférait que je ne regarde pas ses partitions, et maintenant c'était moi qui pouvait rougir de mon idiotie. C'est vrai que j'avais supposé qu'elle était musicienne, et qu'il en rigole, même si ce n'était pas méchant, impossible de ne pas retrouver un fard sur mes pommettes. Encore des émotions, décidément quelque chose ne va vraiment pas aujourd'hui. Je ne relevais pas sur le sujet vis à vis de sa mère, même s'il avait piqué ma curiosité, sa mère une cantatrice hein ? Elle devait surement avoir une très jolie voix, une bref remembrance quand j'accompagnais la mienne dans des opéras où chantait des modèles telle des castafiores. Une voix aussi puissante que le roc, une douceur aussi pure que le cristal. J'ai toujours été impressionnée par le degrés et la teneur d'une voix, un organe bien entraîné pouvait accomplir un ton que personne ne pourrait atteindre.  

C'est une manie que j'ai de toujours rentrer dans des discussions qui dérivent soit en débat, soit en philosophie, ça doit être le côté Aristote que ma famille avait tendance à trop utiliser sur ses débiteurs. Au moins sur le sujet de la musique, nous partageons le même, un musicien qui gratte pour juste gratter, et pour jouer faux et dissonant quel est l’intérêt. Effectivement pour nos propres oreilles, mais aussi pour les autres. Nos réponses convergent, et c'est bien la première fois que je rencontre quelqu'un qui est du même avis que moi sur la musique, au point où je commence même à apprécier cet inconnu, car oui nous ne nous sommes pas encore présentés, et beaucoup de personnes trouveraient ça étrange, seulement moi ça me plaisait, car je ne me faisais pas de probabilités, ni d'opinions, j'idéalisais juste le brun en face de moi, comme s'il était une icone, une idole. En parlant d'idole, s'il était effectivement dans un groupe, il est possible que sa côté de popularité ne soit pas exagérée. Et cela expliquerait également le pourquoi j'avais la sensation qu'il pouvait me fasciner.

En parlant de fascination, à son tour il saisit sa guitare et commença à en gratter les cordes. Je voulais enlever mon bandeau pour l'admirer faire, me dire que j'avais raison de le faire confiance, alors je saisis ce dernier pour libérer mon regard, bien que très réticente sur le moment et le poser sur mes genoux. J'ouvrais alors mes iris azurés et les posa sur le musicien qui jouait. J'aurais peut être dû éviter, ce n'est pas la panique qui me prit mais un tout autre mélange de sensations. Le brun avait de la prestance, ça devait être une habitude de guitariste qui leur était propre. Mais ce qui me charma le plus, c'était sa voix, l'ardeur de ses paroles, le timbre rauque et envoûtant. Digne d'un rockeur, et plus encore...Il parait que les gratteurs de cordes ça fait rêver et craquer les filles, je commence peut être à comprendre pourquoi. Après je ne suis pas très forte en anglais, mais il n'était pas difficile de deviner que cette sérénade parlait d'amour, mais qu'est-ce que c'est que l'amour vraiment....Je n'ai jamais vécu ça alors comment pourrais-je le savoir ? Pourtant ce morceau me touchait tout de même. Mon regard bleu scrutait la moindre de ses expressions, le temps s'était figé dans cette pièce comme si plus rien n'existait autour. Au moins pour ce qui est de mettre du coeur dans la chanson, ça c'était accompli. Bon le thème l'a aidé mais...

J'étais du coup plus curieuse de savoir pourquoi ce manque d'inspiration s'il écrivait des paroles avec autant de dynamisme ?  

▬ C'est une très belle chanson....parfaite pour avouer des sentiments amoureux à quelqu'un, tu devrais y penser le jour où tu croiseras la femme de ta vie.

Ironie du sort ou non, ce n'est pas que je le prenais pour un crowner mais presque. En faites tous les rockeurs ont ce petit côté drague qui ne laisse personne indifférent. Il fallait que je me remette de mes émotions dissidentes, la musique m'avait un peu trop marquée, l'ambiance aussi. Regardant mon violon, il m'avait donné envie de m'exprimer à mon tour, mais je suis trop intimidée pour chanter devant un inconnu, qui plus est un jeune homme. Je ne suis pas une cantatrice hors pair comme pourrait l'être la femme qui l'a mis au monde, mais ça m'arrive d'aimer chanter, de laisser la musique me transporter au point de le témoigner, devant peu de personnes cela dit.

▬ Pourquoi cherchais-tu à composer ? Est-ce que c'est ton groupe qui te l'a demandé ?

Tiens voilà que c'est moi qui commence à faire des conversations en posant des questions. J'en avais presque oublié que j'avais retiré mon bandeau de mes yeux, je n'étais pas tétanisée par la crainte, je me sentais....étrangement bien...Est-ce la musique ou la présence du brun et sa chanson qui m'apaisait ?  

Dans le registre italien, les sons dits d'amour, qu'ils soient passionnés, bridés ou meurtris sont quelque chose qui marquent souvent l'esprit. On dit même de ce pays, qu'il est à l'apogée de son romantisme. En entendant les mots "love" et "fall" j'avais en effet supposé que c'était une chanson faites pour les déclarations, mais la réponse du jeune homme me laissait perplexe. Quand bien même j'étais une novice en la matière, que je ne connaissais en effet rien de ce sentiment, ni même des quelques empreintes qui l'identifie. Pourtant je ne comprends pas ce raisonnement. Donc si je résume l'amour c'est quelque chose qui se fait en secret dont on a peur ? Cela me rappelle un peu l'histoire en littérature des amants de Vienne. Obligés de se rencontrer dans le plus grand secret. Enfin là on parle quand même d'effroi d'aimer. Est-ce que mes parents l'avaient ressentis ? Est-ce que c'était pour cette raison qu'ils m'en avaient fait voir de toutes les couleurs...Non je ne pense pas, définitivement ce n'était pas de l'amour qu'ils avaient ressentis. Et je ne devrais même pas penser à eux, de peur de sombrer de nouveau. Je suis si instable...

Je repose à nouveau mes yeux interrogateurs, ratant un battement soudain. Je n'avais jamais vu un tel regard, des yeux clairs, vides, dont la couleur n'avait ni joie...ni peine. Sortant de ma soudaine contemplation, je voulais éluder le mystère.

▬ L'anglais et moi nous ne sommes pas très bons amis, ma langue maternelle étant l'italien, ce n'est pas vraiment le même dialecte. Mais quelque chose m'interpelle....Si en effet aimer est douloureux, inspire la peur....Pourquoi beaucoup de gens s'évertuent à ressentir de l'amour dans ce cas ? Quel est le but, si c'est pour fuir ? Est-ce une façon de se sentir "vivant"....Je ne connais pas tout ça....Aimer...je ne sais pas ce que c'est...

Et je ne le saurais sans doute jamais, mais qu'importe pourquoi en revenir sur ce sujet, et puis ça devait peut être l'embêter de discuter de ça...à moins que....lui même fuyait ses propres sentiments, un peu comme j'aime fuir la réalité ? Je fais une belle italienne romantico tiens...Je ne lis pas de romans, je n'ai jamais ressenti de l'amour pour qui que ce soit, pour quoi que ce soit, c'est un sentiment qui m'est inconnu et qui m’oppresse car j'ai l'impression que c'est une chose qui m'est interdite. Mon père me l'avait déjà dit quand j'étais une enfant : « Personne ne peut aimer un monstre comme toi »....Suis-je vraiment ce qu'il a dit ? Une perle de sueurs coula sur ma tempe, alors que je me sentais soudainement oppressée....je devrais peut être mettre le bandeau avant qu'il ne soit trop tard. Alors que j'allais le replacer, à nouveau la voix du brun perça le silence pour répondre à ma question me coupant dans mon élan. Et vu son étonnement, j'avais probablement frôlé un sujet très sensible....Tentant de calmer l'anxiété qui me prenait, je reposais à nouveau mes yeux sur lui.

▬ D'une certaine façon...ton groupe est donc une passade pour arriver à toucher les étoiles...En tant que musicien, il est vrai qu'on rêve d'être parfait, d'avoir l'oreille absolue, d'être accompli, mais il ne faut pas se leurrer...nous sommes des humains....Tout ce que nous pouvons faire c'est nous accrocher à notre idéal et à nos rêves, en se donnant le moyen d'y parvenir....

Peut être devrais-je être plus claire ? Il est vrai que ce genre de discours peu manquer de fond et surtout d'émotions. La mécanique de mon coeur est de retour.

▬ Si composer te plait, et que tu le fais pour toi même et non pour les autres, alors ne renonce pas....

Soudainement mes joues s'empourprent ! Depuis quand est-ce que je soutiens des inconnus moi ? Ne suis-je pas censé détester l'être humain et son monde anarchique ?

▬ Je....suis persuadée que tu réaliseras ton rêve...

Histoire de ne pas me noyer dans la gêne, je reprenais mon violon en y grattant quelque cordes, attendant sa réaction. Bien que je devais admettre que je l'appréhendais....Cela débordait toujours dans le mauvais sens quand je me mêle de ce qui ne me regarde pas...

Le sujet était plus délicat que je le pensais. Je m'étais sans doute attendue à une réponse, mais il semble que le jeune homme n'en détient pas les clés. Peut être que comme moi lui aussi il n'a jamais vraiment cherché à comprendre la raison, le pourquoi du comment et à expliquer un sentiment aussi vague et compliqué ? Comme nous sommes similaires sur certains points de vues, cela ne m'étonnerait en rien. Un être doué de peu d'émotions comme moi pourrait il comprendre un jour de toute façon ? Il y a peu de temps, quelqu'un lui a fait comprendre qu'aimer c'était plus que dire ses sentiments à quelqu'un, c'est encore plus physique, plus mental...On pense souvent à la personne, et quand elle n'est pas bien, on souffre avec elle. Ainsi donc nous sommes comme un reflet de sa propre ombre ? N'est ce pas du gout égoïste pour elle et injuste pour nous ? Non décidément je n'y comprends rien, c'est quelque chose qui m'échappe, moi qui suit pourtant douée d'un intellect plus élevé que la moyenne...sans vouloir m'en vanter, ça me sert plutôt bien en terme général ! C'est juste que je n'en ferais pas l'étalage.

Enfin il semble plutôt ravi que j'ai changé rapidement de sujet en lui posant cette question, à voir sa tête il avait été plus que préoccupé de savoir quoi me répondre, alors que là il jubilait complètement, et c'est peu dire, je le vis sauter sur ses pieds, écarter les bras et annoncer de manière théâtrale une évidence. Si je m'étais attendue à ça...Posant mes iris bleus écarquillés de surprise, je me demandais qui pouvait être cette personne qu'il souhaitait dépasser. Et qu'il fasse référence au fait d'être une lumière en s'en vantant légèrement, quel curieux personnage il fait ! Intriguant surtout...Seulement toute cette petite comédie inattendue déclencha quelque chose en moi que je ne pu retenir, et alors qu'il se tournait vers moi, je m'esclaffais en riant de plus belle, c'est la première fois que je ris de nouveau, depuis mon enfance. C'est drôle comme sensation, ça picote la bouche, et ça chatouille le ventre, au point où a en créé même une légère douleur, ce n'était pas un rire moqueur, mais un rire franc, sincère et amusé.

▬ Dé...désolée...c'est juste que...tu es vraiment quelqu'un de peu commun...je croise rarement des personnes de ton acabit...

J'essuyais les quelques larmes qui avaient perlées au coin de mes yeux, appréciant ce simple moment. Cela m'a fait un bien que je ne pensais même pas. Plus de peur, plus d'inquiétude, mais maintenant je ne voulais juste plus partir....c'est comme ci j'allais me réveiller d'un rêve éveillé, et que j'allais retourner à ma misérable et piètre existence. Pour une raison qui m'est étrangère, je ne le dérangeais pas, alors je peux bien rester un peu...J'espère juste ne pas l'avoir vexé en laissant libre cours à mes émotions...Rire est donc une émotion ? L'être humain est tout de même fascinant.

▬ Tu n'as pas à t'excuser...c'est...moi qui suis la plus bizarre dans cette histoire...

Un léger sourire sur mon visage, alors que je me faisais presque violence pour ne pas le laisser apparaître.

▬ Tu....Je ne sais pas trop si j'ai le droit de te demander cela mais....on s'est pas présentés et j'avoue maintenant que je suis curieuse de savoir qui est le personnage qui se cache derrière cet être exceptionnel...

Drôle de façon de demander son nom à quelqu'un...
Typique made in Lucia Valentini après tout. La noblesse, l'aristocratie aura un jour ma peau, c'est obligatoire.